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Le contrôle de l’état sur les actes budgétaires des collectivités locales au Gabon.


par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI
Université Omar Bongo de Libreville (Gabon) - Master 2 Professionnel en gestion financière des collectivités locales 2014
  

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Section 2 : Les limites liées aux contrôles juridictionnels

La portée des différentes modalités de contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires locaux ressort des limites d'ordre juridictionnel.

Ces limites concernent les insuffisances liées à la procédure et moyens de contrôle des juridictions locales (Paragraphe 1) ; mais concernent l'usage abusif des décharges de responsabilité et des remises gracieuses de débet (Paragraphe 2) faites aux agents publics, gestionnaires de fonds publics.

Paragraphe 1 : Les insuffisances liées à la procédure et aux moyens des
juridictions locales

Le contrôle des juridictions locales connait des insuffisances lorsque l'annulation de l'acte budgétaire attaqué intervient de manière tardive. Le contrôle peut alors s'avérer inefficace : les dépenses pouvant déjà être réalisées. Tout comme lorsque le rapport de la juridiction financière mettant en cause un receveur local n'est pas délibérément suivi de sanctions de la part des autorités compétentes.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 68

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

Nous analyserons d'abord les difficultés que rencontrent les juridictions financières locales (A), avant de voir spécifiquement celles des tribunaux administratifs provinciaux (B).

A- Les difficultés des juridictions financières locales

L'instauration récente des chambres provinciales des comptes et le faible nombre des juridictions existantes123 constituent une difficulté non négligeable pour une meilleure gouvernance financière locale. Mais elles rencontrent, par ailleurs, d'autres difficultés.

D'abord, les périodes d'intervention restent aléatoires et décalées des faits. Même si le président de la juridiction décide annuellement du programme des travaux, le calendrier de contrôle est en effet un mystère. Le rythme d'intervention peut être variable suivant l'importance de la collectivité. La pertinence de ces contrôles semble, de plus, être remise en cause dans la mesure où un décalage temporel important existe entre les faits et la révélation de l'irrégularité ou de l'inefficacité. Que représente en effet, aux yeux des citoyens ou d'autres acteurs de la vie communale, une révélation d'actions et de décisions vieilles de trois (3) voire de cinq (5) années ? D'ailleurs, il est assez fréquent que les gestionnaires en cause ne soient plus responsables de la collectivité au moment où sont rendues publiques les observations définitives des magistrats financiers.

Ensuite, pour les méthodes de collecte des éléments probants, la cour des comptes ou les chambres provinciales des comptes effectuent généralement des contrôles sur pièces et sur place afin d'obtenir les éléments sur lesquels seront fondés les jugements, avis ou observations. Le contrôle de la gestion d'une collectivité, ainsi pratiqué, débute habituellement par un examen des pièces à la disposition de la cour et du dossier de la collectivité (contrôles antérieurs, coupures de presse et correspondances). Après une évaluation de l'état général des finances de la collectivité, le magistrat fixe le champ de ses investigations en sachant que les dépenses de personnel, les procédures de marchés publics et les investissements constituent des domaines essentiels. Une fois les champs d'investigation choisis, le magistrat pourra demander pour tout document les renseignements manquant, en vue d'une analyse de régularité et d'efficacité. Cette procédure rigoureuse des magistrats financiers semble trouver toutefois ses limites dans les durées importantes d'exécution des contrôles qui augmentent d'autant plus le décalage de l'observation avec les faits.

De même, dans la pratique, les chambres provinciales des comptes sont confrontées à certaines contraintes préjudiciables à l'exercice de leur contrôle et relatives à l'état de reddition des comptes des collectivités locales contrôlées.

La reddition des comptes se fait dans un environnement peu favorable. En effet, bon nombre de comptables locaux ne rendent pas compte de leur gestion devant la

123 Les chambres provinciales n'existent pour le moment que dans certaines provinces (Haut-Ogoué, Ogoué maritime, Ngounié, Nyanga et l'Estuaire).

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 69

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

juridiction des comptes dans les délais légaux. Pour les collectivités locales dont la chambre reçoit tout de même les comptes, généralement ceux-ci ne sont pas en état d'être jugé car n'étant pas accompagnés de toutes les pièces générales tel que le compte administratif du Maire ou du Président du conseil départemental. Ce qui est significatif d'une défaillance des comptables supérieurs de la DGCPT sensés centraliser et veiller à l'état d'examen des comptes de gestion des collectivités locales au terme de chaque exercice budgétaire. Cette difficulté majeure tenant à la mise en état d'examen des comptes des collectivités locales est d'ailleurs déplorée dans les nombreux rapports annuels de la Cour des comptes. Elle constitue une entrave fondamentale à l'efficacité du contrôle juridictionnel.

C'est ce qui ressort du rapport public 2010 de la Cour des comptes dans lequel elle souligne : « en effet, les conditions dans lesquelles sont produits les comptes de gestion des comptables publics limitent les performances de la Cour en matière de contrôle juridictionnel. Les comptes ne sont pas déposés à la Cour à la bonne date et lorsqu'ils sont produits, ils sont très rarement en état d'examen ».

Toujours au plan procédural, les dispositions règlementaires exigent, en l'occurrence dans le cadre du contrôle juridictionnel des comptes des receveurs des collectivités locales, une double transmission des comptes locaux. Une première transmission du fascicule de gestion par le receveur au service de la Direction Générale de la Comptabilité Publique et du Trésor (DGCPT) pour centralisation et vérification sur chiffre. Une seconde transmission, cette fois du compte de gestion accompagné de pièces essentielles, par le DGCPT à la Cour des comptes. Cette règle de double transmission provoque des lourdeurs dans la procédure du contrôle juridictionnel, et révèle un problème de sincérité des écritures comptables124 produites à la cour des comptes.

En outre, on peut relever l'encombrement de la Cour des comptes, si l'on tient compte de l'importance quantitative des organismes publics soumis à son contrôle. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire, en ce qui concerne les collectivités locales, d'alléger sensiblement le travail de la haute juridiction financière en étendant la création des chambres provinciales des comptes à l'intérieur du pays.

Mais au-delà de son encombrement, l'action de la Cour des comptes, et partant celle des chambres provinciales des comptes, pose surtout le problème des suites données à ses rapports car il y va de l'efficacité de son contrôle. En effet, la relative publicité donnée aux contenues de son rapport annuel (communiqué de presse, diffusion sur son site Internet et celui du gouvernement, et dans le journal officiel de la République...) a pour but d'inciter les pouvoirs publics, sous la pression de l'opinion publique, à prendre les mesures de réformes convenables. Ce procédé de contrôle repose sur l'idée selon laquelle l'exposition publique de mauvaises gestions financières ou de défectuosités dans le fonctionnement des services peut contraindre les autorités responsables à agir. Malheureusement des exemples de personnes sanctionnées dans ce sens, sont très rares. Les observations formulées par la

124 « Les comptes des receveurs des collectivités locales, lors des opérations de centralisation à la Trésorerie Générale ou Trésorerie Centrale, sont en fait préalablement corrigés par la DGCPT », Source : entretien avec un agent du trésor.

Mémoire de Master 2, présenté par Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 70

Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes budgétaires des Collectivités locales au Gabon »

Cour des comptes ne sont pas toujours suivies d'effets. Ce qui fait que les mêmes problèmes reviennent, souvent, dans ses rapports (état de reddition des comptes, retard dans leur dépôt, insuffisances de son personnel, irrégularités récurrentes dans la gestion financière des marchés publics, du personnel des collectivités locales entre autres).

Que dire à présent des difficultés que rencontrent les juridictions administratives

locales ?

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus