CHAPITRE II :
LES CONTRÔLES JURIDICTIONNELS
Dans un Etat de droit, il est normal que des litiges, de droit
comme de fait, soient le cas échéant, dénoués ou
tranchés par les juridictions74. Afin d'équilibrer
l'exorbitance des pouvoirs des autorités de l'Etat central, la
participation du juge se révèle plus que salvatrice. Elle vise
à rappeler aux autorités administratives un temps soit peu, la
subordination de leurs actions à la règle de droit, au principe
sacro-saint de légalité.
Le contrôle juridictionnel offre la meilleure garantie
de l'utilisation régulière et efficiente des finances locales.
Cela s'explique par l'indépendance des organes juridictionnels
vis-à-vis des autorités de décision. Ce contrôle a
posteriori est essentiellement exercé par les juridictions des comptes
(section 1). Néanmoins, d'autres juridictions,
n'exerçant pas de manière spécifique des attributions
financières, interviennent lorsque les faits ou actes des agents
gestionnaires des finances locales sont susceptibles de recours devant elles et
parfois passibles de sanctions. On retiendra, parmi elles, la juridiction
administrative celle constitutionnelle (section 2)
compétente pour le contentieux de la légalité des
actes des collectivités locales et par conséquent pour celui des
actes budgétaires et ceux ayant une incidence financière.
Section 1 : Le contrôle des actes
budgétaires locaux : une compétence de principe des
juridictions financières locales
L'article 351 de la nouvelle loi organique n°001/2014 du
15 juin 2015 relative à la décentralisation dispose de
manière lapidaire que « le contrôle juridictionnel est
assuré par le juge des comptes conformément aux textes en vigueur
». Cette disposition semble faire de la juridiction
financière, en l'occurrence la chambre provinciale des comptes, l'unique
juridiction chargée de connaitre les litiges portant sur les actes
budgétaires locaux.
Nous analyserons d'une part, la mise en oeuvre du
contrôle juridictionnel des comptes du receveur de la collectivité
locale, et du contrôle de l'utilisation des deniers publics locaux de
l'ordonnateur (paragraphe 1). D'autre part, nous verrons les
effets résultants de ces contrôles du juge des comptes
(paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le contrôle juridictionnel des comptes
et du bon emploi des deniers publics locaux
Selon l'article 38 de la loi organique 11/94 sur la cour des
comptes : « la cour des comptes est chargée du contrôle
des finances publiques. À cet effet, elle juge les comptes des
comptables publics , · elle déclare et apure les gestions de
fait , · elle vérifie la régularité
74 Le terme juridiction, du latin « jurisdictio »,
désigne les organes de l'Etat dotés du pouvoir de dire le droit
et d'appliquer la loi.
Mémoire de Master 2, présenté par
Djéson Faustin AKOUMA MOIAHIDJI Page 40
Thème : « Le contrôle de l'Etat sur les actes
budgétaires des Collectivités locales au Gabon »
des recettes et des dépenses décrites dans
les comptabilités publiques et s'assure à partir de ces
dernières du bon emploi des crédits des fonds et valeurs
gérés par les services de l'Etat ou par les autres personnes
morales de droit public ». Autrement dit la juridiction
financière est compétente pour contrôler l'ensemble des
actes financiers de toute personne morale de droit public soumises aux
règles de la comptabilité publique, notamment les
collectivités locales et leurs établissements publics. Les
ordonnateurs75 et comptables publics locaux sont, à ce titre,
justiciables devant la juridiction des comptes du ressort, en l'occurrence les
chambres provinciales des comptes76. Celle-ci est donc
chargée du jugement des comptes des comptables locaux et de
l'appréciation de la gestion des ordonnateurs locaux. C'est la fonction
originelle du juge des comptes.
Analysons d'abord le contrôle de la
régularité des comptes qui pèse sur le receveur de la
collectivité locale (A), avant de s'intéresser
au contrôle de l'utilisation des deniers publics qui pèse sur
l'ordonnateur local (B).
A- Le contrôle de la régularité des
comptes du receveur de la collectivité
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