CHAPITRE II : APPROCHE CONCEPTUELLE
Durkheim (1895), cité par Grawitz (1993 : 329), note
que « le savant doit d'abord définir les choses dont il traite
afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question ».
Ainsi, c'est dans cette optique que nous consacrons ce chapitre à la
clarification des concepts clés tout en montrant dans quelle mesure ils
sont pertinents pour traiter notre sujet.
Les concepts que nous avons retenus pour aborder notre
problématique sont les suivants : carte mentale, aide
psychopédagogique, bilan psychopédagogique, apprentissage,
difficulté d'apprentissages, styles d'apprentissage.
II.1. Carte mentale
La carte mentale est le concept central de notre étude.
Elle s'entend comme un ensemble de tracés destiné à
présenter sous une forme graphique des idées, des tâches ou
d'autres concepts ayant des liens avec un mot-clé, un concept central ou
une idée principale.
Comme l'expression l'indique, elle est d'une part une carte
dans la mesure où elle se présente comme un diagramme ou un
dessin représentant une certaine structure, une représentation
à échelle réduite d'une surface. D'autre part, le mental
renvoie à l'esprit (une dimension de la pensée ou la
capacité de raisonnement). Par conséquent, le concept de carte
mentale est donc lié au diagramme ou à l'esquisse qui est
développé dans le but de refléter la pensée
rayonnante.
II.1.1. Historique de la carte mentale
Encore appelée carte heuristique, carte des
idées, carte conceptuelle, schéma de pensée, arbre
à idées, carte cognitive, mind mapping en anglais, la
carte mentale a des origines lointaines. Tout part de Simonide de Céos
(556 environ à 468 avant J.-C.) considéré comme celui qui
a imaginé des techniques pour apprendre et retenir et plus
particulièrement les techniques de l'art de la mémoire (Yates,
1975, in Dambreville, ibid). Plus tard, Aristote conceptualise la carte
heuristique sans réellement la nommer. Puis au fil des siècles,
on retrouvera également, chez Leonard de Vinci et plusieurs autres
intellectuels et inventeurs des sortes de diagrammes avec un objet central et
des ramifications de part et d'autres. C'est le psychologue Tony Buzan qui,
dans les années 1970, va formaliser le concept (Tallab, 2018) alors
qu'il enseigne dans plusieurs universités la psychologie des
apprentissages et la mémoire
17
(Kuntz, 2016). Il s'appuie sur l'idée que l'utilisation
du cerveau droit est plus apte aux synthèses visuelles que le gauche. Il
va donc s'adresser à cet hémisphère par la cartographie
mentale et désigner le mind mapping comme étant une
méthode de schéma, un outil de pensée, une
représentation visuelle de ce qui se passe dans le cerveau et donc un
outil idéal d'accompagnement aux processus mentaux.
II.1.2. Carte mentale et fonctionnement du cerveau
:
La méthode de la carte mentale sollicite le
fonctionnement des deux hémisphères du cerveau qui sont
impliqués simultanément : le droit pour l'image, la vision
globale, la couleur, l'émotion et le gauche pour l'analyse, les mots, la
logique et la linéarité.
La carte mentale se veut une représentation visuelle
externe de ce qui se passe dans le cerveau humain, elle se caractérise
par une formalisation qui respecte les modes de fonctionnement de celui-ci. Le
cerveau fonctionne par visualisation et association dont les
caractéristiques qui entrent en confrontation avec les apprentissages se
déclinent de la sorte (Buzan et Buzan 1999, in Dambreville, 2014) :
? Le cerveau est sensible à la matérialisation des
associations entre entités
(non perceptibles directement depuis un texte) ;
? Le cerveau est sensible à la mise en relief de
l'information par des moyens liés à la saillance visuelle
(couleurs, textures, reliefs, etc.) ;
? Le cerveau fonctionne selon un mode que l'on peut qualifier
de « pensée irradiante ». C'est-à-dire que la
pensée se propage à partir d'un centre.
Les cartes mentales sont « plus compatibles avec le
cerveau et efficaces parce qu'elles sont en phase avec la manière dont
le cerveau fonctionne » (Mongin & Delengaigne, 2011, in Lascombe,
2013, p. 28). En effet, une carte mentale exploite et favorise le
fonctionnement naturel du cerveau par le jeu d'association d'idées,
l'utilisation de la couleur et des images pour une meilleure
mémorisation.
II.1.3. Carte mentale et fonctionnement de la
mémoire
Les articles vantant les mérites de la carte mentale
comme véritable outil d'organisation des informations sont
légion. A la fois outil de créativité, d'organisation de
la pensée, véritable
18
stimulateur cérébral, il est dit aussi qu'elle
favorise la mémoire. Ce qui laisse penser que mémoire et carte
heuristique entretiennent des liens.
Le Robert Micro (2006, p. 823) définit la
mémoire comme la « faculté de conserver et rappeler les
choses passées et ce qui s'y trouve associé ».
D'après le dictionnaire de psychologie (2004, p. 444), la mémoire
renvoie à « la capacité à acquérir,
conserver et restituer des informations ». Il s'agit donc d'un type
de traitement de l'information. La mémoire est essentielle aux
apprentissages.
Les études en psychologie expérimentale, en
psychologie cognitive et en pathologie humaine ont renforcé
l'idée de l'existence de plusieurs types de mémoires ou
d'activités mnésiques. Ainsi on peut distinguer les types
suivants :
- Mémoire à court terme (MCT)
C'est le type de mémoire dont la caractéristique
est de représenter un nombre d'informations maintenues et
activées. La capacité de stockage en est limitée et a une
durée de quelques secondes (Bredart, 2004, in Doron & Parot). En
mémoire à court terme, on a le nombre de gestes, de chiffres, de
lettres ou encore de mots (Kuntz, 2016) ;
- Mémoire de travail
Elle fait partie de la mémoire à court terme
avec un système de capacités limitées qui permet le
stockage temporaire et le traitement des informations nécessaires
à la réalisation des tâches complexes. Si elle partage avec
la mémoire à court terme la faculté de stocker
temporairement l'information, elle s'en distingue par sa capacité
à manipuler cette information.
- Mémoire à long terme
Par opposition à court terme, elle désigne un
système de stockage à capacité illimitée (Doron
& Parot, 2004). Autrement dit, c'est la mémoire qui permet de
retenir, de façon illimitée, des données d'informations
sur des périodes de temps très étendues. Les contenus de
ce type de mémoire sont décrits selon leur nature comme
épisodique, sémantique et procédurale.
- Mémoire épisodique
Ce type de mémoire comprend les
évènements personnellement vécus par un sujet. C'est la
mémoire de l'expérience personnelle. Cette expérience est
composée d'« épisodes » qui peuvent être
identifiés sur la base de leur coordonnées temporelles et de lieu
et qui sont à l'origine d'une biographie singulière (Doron &
Parot, op. cit., p. 265).
- Mémoire sémantique
19
Cette mémoire inclut des informations plus abstraites
relatives à des faits, des règles ou des connaissances
générales acquises au cours de la vie contrairement à la
mémoire épisodique. Elle fonctionne par des concepts objectifs.
Elle inclut également le sens des mots, les connaissances de style
encyclopédique qui permettront la construction d'une
représentation mentale du monde sans la perception immédiate et
demeure indépendante du contexte spatio-temporel de son acquisition.
- Mémoire procédurale
La mémoire procédurale part de l'implicite ou
des automatismes. Elle comprend la mémoire des savoir-faire
automatisés (écriture/ lecture/ comptage/ tracer un trait) et le
système de représentations perceptives avec la perception des
environnements automatisés (couleurs/ visages/ objets) (Kuntz, 2016). En
effet, elle porte sur les habiletés motrices, les savoir-faire, les
gestes habituels. C'est elle qui facilite notre capacité à se
remémorer comment réaliser une séquence de gestes (fumer
une cigarette par exemple). Si la mémoire procédurale est
implicite, elle possède l'avantage de pouvoir être
explicitée lorsque le sujet est questionné.
Comme nous l'avons mentionné supra, il existerait des
correspondances entre la carte mentale et les processus mnésiques.
Nombreux sont les écrits qui se sont efforcées à montrer
que la carte mentale imitait fortement la façon dont fonctionne notre
cerveau et, par ricochet, les processus mentaux et mnésiques en sont
impactés au cours des activités cérébrales (Djoudi,
2018). Ainsi, Stordeur (2014), cité par Djoudi (2018), affirme à
ce propos que « la mémoire n'est pas une entité unique
que l'on peut situer dans le cerveau ; f...] ; elle est le résultat du
fonctionnement cérébral ». La mémoire a une
forte implication dans les différents processus
cérébraux.
Il importe de souligner que la carte mentale en tant que
technique de rétention de l'information partage des liens historiques
avec la mémorisation. En effet, elle se rapproche de la méthode
mnémotechnique qui remonte à l'Antiquité. Ainsi, c'est
à cette période que l'art de mémoire est né
(méthode des loci). Elle consistait à associer des
images avec des lieux (Dambreville, 2014) et à mémoriser un
parcours familier. Il s'agit ensuite d'imaginer chaque item à
mémoriser sur les endroits du parcours. Quand la personne veut se
rappeler la liste d'objets, elle doit alors parcourir mentalement le chemin
où elle a imaginé les objets (Eysenck, 2000). Beaucoup d'autres
méthodes ont émergé et nous nous en limitons qu'à
celle énoncée ci-dessus.
De plus, l'usage récurrent de la carte mental
accélère la mémorisation des informations. Il active et
renforce la capacité à se souvenir des choses acquises. La
répétition est alors
20
nécessaire si l'on veut se souvenir plus tard d'une
information. Ebbinghaus ne soulignait-il pas déjà depuis 1885 que
sans répétition la probabilité de se rappeler une
information diminue très vite (Michel, 2017) ? Buzan (2012, p. 24),
cité de nouveau par Djoudi (2018) exhume cette préoccupation en
précisant que « le cerveau humain doit s'entrainer pour gagner
en puissance et le Mind Map constitue l'exercice idéal qui booste la
réflexion, la créativité et la mémoire. Comme pour
tout entrainement, plus vous pratiquez, meilleur vous serez ». Cette
assertion souligne bien le rôle que joue le recours au quotidien de la
carte mentale sur la mémorisation des informations. Ainsi, habituer la
mémoire renverrait à utiliser quotidiennement la carte
heuristique.
Dans sa configuration, la carte mentale présente des
branches qui rappellent les différents liens entre les neurones au cours
des processus cérébraux. Chaque branche de la carte mentale est
une pièce où sont stockées les données. Elle fait
appel à l'ensemble des aptitudes corticales et stimule le cerveau
à tous les niveaux, le rendant plus apte à mémoriser
(Kunz, 2016). En d'autres termes elle reflète la manière dont
fonctionne le cerveau.
La carte mentale est, en outre, un graphique qui peut contenir
des images. Or, la mémoire sensorielle est rapide mais elle permet des
entrées d'autres mémoires comme la mémoire lexicale pour
le graphisme ou la mémoire imagée pour les objets (Kunz, 2016 in
Djoudi, 2018). Le recours à la carte mentale faciliterait l'activation
des capacités de ces deux différentes mémoires dont les
caractéristiques sont liées aux éléments que peut
contenir une carte heuristique.
Au cours de la réalisation d'une carte cognitive,
l'utilisateur est invité à organiser et à
réorganiser les informations qu'il possède. Il entre ainsi dans
un processus métacognitif qui convoque l'intervention de la
mémoire courte permettant d'assembler et combiner. C'est d'ailleurs
celle-ci qui représente la mémoire de travail qui a pour objectif
de réorganiser les informations qui permettent d'aboutir à une
solution.
La carte mentale est composée non seulement d'images et
de couleurs mais aussi et nécessairement de mots-clés. Les mots
sont l'apanage des mémoires sémantique et lexicale. Ces mots
constituent une vaste partie de la connaissance humaine et contribuent
fondamentalement à la réussite scolaire en situation
d'apprentissage. Ainsi, en édifiant la carte mentale, nous sommes
amenés à exploiter les connaissances inscrites dans ces types de
mémoires (sémantique et lexicale). La carte mentale est ainsi une
possibilité de rappeler et extérioriser les données issues
de ces différentes activités mnésiques.
21
La carte mentale permet de faire travailler les
mémoires de manière différente et propre à chacun
des utilisateurs. Elle milite en faveur d'une schématisation des
connaissances à la fois visuelles et linguistiques gravées dans
les différentes mémoires. Elle présente également
des intérêts de plusieurs ordres que nous tenterons de montrer
ci-dessous.
II.1.4. Intérêts de la carte
mentale
Parler d'un intérêt de la carte mentale renvoie
à reconnaître l'importance des schémas. Les schémas
permettent de faire ressortir les relations entre les différents
éléments du problème. Il s'agit d'une stratégie qui
peut être appliquée dans différents types d'exercices pour
mieux définir le problème ou mieux retenir certains
éléments (Büchel & Büchel, 1995, in Bosson,
2008).
En dehors de ces considérations scientifiques à
partir desquelles la carte mentale fonde son existence, elle (la carte mentale)
a des applications dans plusieurs domaines (Courtois, 2017). On peut l'utiliser
dans la vie quotidienne, autant pour le travail que pour les études ou
les loisirs. Elle peut alors être utilisée dans la planification
d'une réunion, dans le bilan des tâches à réaliser
pour divers projets (construction d'une maison, préparation d'un voyage
d'une cérémonie ou bien même d'un mémoire). Nous
nous attèlerons plutôt sur ses intérêts à
l'école (apprentissage/enseignement). Les intérêts
pédagogiques de la carte mentale sont de plusieurs ordres. Elle
s'inscrit dans le cadre des travaux portant sur l'intérêt de la
schématisation dans les apprentissages scolaires (Nze, 2016). Elle n'est
donc pas une production anodine mais bien un outil propre à
différentes activités pédagogiques (Régnard,
2010).
Elle se présente comme une démarche importante
pour la compréhension des textes (Régnard, 2010, Dambreville,
2014) qui sont un amas de données dont la forme ne donne pas
aisément à percevoir les relations entre les entités
présentées. Au fil de la construction de la carte, en manipulant
les informations, les liens deviennent plus clairs et lorsque la carte mentale
est terminée le concept est généralement beaucoup mieux
compris par le réalisateur (Lepouder, Genty, 2008, in Courtois, 2017).
La carte mentale vise donc à s'affranchir de la prise de notes trop
linéaire car cette dernière ne permet pas de faire des
associations. L'absence d'association traduirait l'absence de connexion et
l'absence de connexion impliquerait l'absence de mémoire et de
réflexion. De plus, les textes les plus abordés en contexte
scolaire sont souvent des textes littéraires qui mobilisent peu ou pas
des organisateurs paralinguistiques et qui sont des enrichissements du texte
par des couleurs, des encadrés, des icônes, etc. Or, la carte
mentale est un outil qui comporte ces éléments qui favorisent une
plus grande capacité de rétention. Ainsi,
contrairement à l'organisation linéaire de la
pensée textuelle dont l'une des conséquences est que 80% de ce
qui a été appris est oublié au bout de 24 heures
(Dambreville, 2017), la carte mentale permet de réduire les coûts
cognitifs chez les apprenants lors de la compréhension d'un texte.
En outre, la carte mentale est tout aussi utile tant pour les
élèves que pour les enseignants. Chez l'enseignant, la carte
conceptuelle est utile en ce qu'elle est « l'occasion d'évaluer
le stade de différents acquis de l'ordre du savoir et de l'ordre des
compétences » (Régnard, 2010). En effet, l'enseignant,
en demandant à ses élèves de construire une carte, va
pouvoir évaluer si les élèves ont bien compris la notion
et s'ils ont une idée claire de celle-ci (Courtois, 2017). Il importe
alors pour l'enseignant d'apprendre comment réaliser une carte
mentale.
Chez les élèves, elle trouve son importance dans
la révision des leçons et dans l'organisation et la
hiérarchisation des idées. Dans le cadre des révisions des
cours, l'auteure suggère d'utiliser les cartes mentales à la
maison en cachant les noeuds et en essayant de les retrouver (Régnard,
ibid.). Aussi la création de branches et de noeuds de plusieurs niveaux
fait-elle apparaître visuellement la hiérarchisation des mots
clés et ainsi les liens et relations entre les différents
éléments. La carte mentale a également l'avantage de
favoriser la mémorisation de l'information (Lafaye, 2012 in Courtois
2017 ; Lascombe, 2013 ; Régnard 2010) et l'implication des
élèves lors de la construction des connaissances dans leur
processus d'apprentissage (Lascombe, 2013 ; Longeon, 2013).
Enfin, elle se réclame être un outil d'aide aux
élèves en difficulté (D'Heyagre-Lesure, 2012, in Courtois,
2017). Car de nombreux élèves sont affaiblis face à leurs
cours lorsqu'il s'agit de les apprendre et, ce, tout au long de la
scolarité parfois. Les cartes mentales peuvent être une occasion
de réduire les contraintes de l'écrit grâce à la
seule présence des mots clés ou des icônes. Elles
contribuent à enlever la surcharge de mots qui bloque certains enfants.
Par conséquent, ils peuvent développer d'autres
compétences en contournant leurs difficultés (Courtois, 2017).
22
II.1.5. Réalisation d'une carte
mentale
23
Une carte mentale correspond à un schéma
arborescent qui implique l'existence de branches et sous branches. Elle peut se
réaliser manuellement ou avec un logiciel informatique et ne
nécessite pas un matériel complexe lorsqu'il s'agit de sa
conception à la main. Un support papier sans lignes, sans carreaux pour
éviter d'influencer la structure, un logiciel dédié (comme
freemind ou Xmind), un crayon ou des crayons de couleurs sont les
éléments qui permettent de réaliser une carte heuristique
tel que l'illustre la figure ci-après.
Figure 1: carte mentale des principes
structurels de conception d'une carte mentale
Source : Dambreville (2014).
Comme l'indique l'image ci-dessus, la première
étape consiste à insérer au centre de la carte
l'idée principale qui peut être un concept, un personnage, un
sujet de dissertation, etc (Dambreville, 2014). De cette idée centrale
va dériver un ensemble de branches qui constitueront les idées
principales. Ces branches sont des ramifications qui doivent se
présenter de façon harmonieuse (Kunz, 2016). Les branches portent
des mots qui ont pour but d'ouvrir vers d'autres mots, idées, concepts,
images, etc. Le choix des mots révèle la démarche du
créateur, la capacité à évoquer. Dans les
logiciels, on distingue les branches « parent » et « fils
». Ainsi, les branches « parents » sont proches du coeur de la
carte, et induisent une hiérarchie dans les associations d'idées.
Les branches ainsi obtenues peuvent s'étendre en sous branches et sous
sous branches facilitant le développement et la précision du
sujet (Courtois, 2017). Le mot ou expression choisis ne doivent exprimer qu'une
seule idée ou concept à la fois. Il est possible en fonction du
créateur d'ajouter des organisateurs para-linguistiques (des couleurs,
des images ou des dessins, des flèches, des caractères
spéciaux, des icônes, etc).
24
Il importe de souligner que tous les individus et
particulièrement pour notre contexte tous les élèves ne
sont pas disposés à s'approprier cet outil (Régnard,
2010). C'est pourquoi il est important pour l'éducateur de s'assurer de
ce que le sujet qu'il soit capable de bien comprendre et maîtriser ce
type d'outil. La lecture de la carte se fait dans le sens des aiguilles d'une
montre. Chaque segment doit comporter un seul mot et l'écriture doit
être lisible et de préférence à l'horizontale.
Pour l'éducation, la carte mentale sert à
planifier des informations autour d'un thème central de manière
hiérarchique. Elle favorise également l'apprentissage des
nouveaux savoirs, évalue les compétences, la compréhension
et permet de résoudre les problèmes car tous les
éléments sont en relation et on a une vision d'ensemble. Par
conséquent, il s'avère important de donner une définition
de la carte mentale qui converge avec les objectifs de notre étude.
II.1.6. Définition de la carte mentale
Il est nécessaire de donner une définition
claire du concept de carte mentale afin de pouvoir circonscrire l'usage que
nous en ferons tout au long de notre étude. Tout d'abord, la carte
mentale est à la fois un processus et son résultat (Nze, 2016.).
C'est l'expression de la manifestation extérieure de la pensée
irradiante sous la forme d'un schéma arborescent (Buzan, 1970, in
Courtois, 2017) et il note bien que ce type de schéma correspond
à une représentation de la « pensée rayonnante »
en référence au fonctionnement cérébral. Ainsi une
carte mentale refléterait l'organisation « naturelle » de la
pensée qui se fait par association à partir d'une idée
centrale. D'ailleurs, il compare le cerveau à une gigantesque machine
à associer (Courtois, ibid.).
La carte mentale peut tout aussi être
appréhendée comme une construction qui met simultanément
en évidence des formes de langage. Ainsi, Mongin (2012), cité par
Courtois (ibid, p. 2), soutient que « les cartes mentales parlent
quatre langages : celui des mots (ensemble des mots clés
présents), celui des images (dessins rajoutés pour illustrer les
idées, les préciser), celui de la couleur et enfin du contexte en
référence aux différents liens entre les idées qui
peuvent être représentés ».
Carlier (2013) insiste sur le caractère
synthétique de la carte mentale. Les cartes mentales permettent donc
d'avoir une vue globale et synthétique sur une seule page d'un sujet
parfois bien complexe. Elles sont enfin définies comme un outil
favorisant l'organisation des idées.
25
Elles servent à organiser mais aussi à
représenter des connaissances de manière
délinéarisée (Lascombe, 2013).
Au regard de toutes ces définitions, il est
nécessaire d'en décliner une qui cadre avec l'objectif de ce
travail portant sur l'importance de l'introduction de la carte mentale dans les
pratiques d'aide psychopédagoique des COSP auprès des
élèves en difficulté d'apprentissage du collège
Raymond Bouckat.
La définition que nous nous proposons de retenir est la
suivante : la carte mentale peut être définie comme un
schéma de forme arborescente qui consiste en une représentation
graphique et synoptique des liens entre les données de la connaissance
et de la pensée dont l'un des intérêts est de permettre aux
éducateurs d'aider les élèves à améliorer
leur situation d'apprentissage.
Cette définition a le mérite de retenir un
maximum d'éléments contenus dans les descriptions des auteurs
précités (arborescence, graphisme, synthèse, liens entre
les concepts) et les éléments en lien avec notre
thématique. En effet, elle met en évidence les
éléments suivants : intérêt pédagogique,
outil d'intérêt pour les éducateurs (et
particulièrement les COSP), les élèves et leurs
apprentissages.
A la suite de cette revue nous ayant permis d'aborder ce qu'on
entend par carte mentale et ses relations avec le fonctionnement
cérébral, tentons dans les lignes ci-dessous d'appréhender
ce que nous entendons par aide psychopédagogique.
II.2. Aide psychopédagogique
L'aide psychopédagogique est l'une des missions
dévolues au Conseiller d'Orientation -Psychologue (Mbengone Ekouma,
2016a). Elle est d'ailleurs l'une des plus importantes en contexte
professionnel puisqu'elle s'étend sur une plus ou moins grande
durée. Il importe alors de clarifier cette notion. Dans cet ordre
d'idée, il est nécessaire de définir ce qu'on entend par
« aide » d'abord, puis « psychopédagogie » avant de
tenter de donner une définition de ce qu'on appelle « aide
psychopédagogique ».
L'aide est « l'action d'intervenir en faveur d'une
personne en joignant ses efforts aux siens » (Le Robert Micro, 2006,
p. 28). Le terme est souvent employé comme synonyme de soutien. L'aide
consiste au fait d'apporter une assistance à d'autres personnes dans des
situations quotidiennes ou à porter secours à une victime dans
des situations d'urgence (Grand dictionnaire de la psychologie, 1999 : 158).
L'aide est une relation dissymétrique
26
entre un adulte et un élève
considéré en tant que personne (Reverdy, 2017). En psychologie,
l'aide implique une relation entre des individus dont l'un (l'aidant) porte
soutien à un autre (l'aidé) dans le but d'emmener ce dernier
à sortir d'une situation inconfortable. C'est dans cette perspective que
Hétu (1994, p. 4) déclare qu'« aider quelqu'un, c'est
s'engager avec lui dans une séquence d'interactions verbales et non
verbales, dans le but de lui faciliter l'expression, la compréhension et
la prise en charge de son vécu ».
Le terme « psychopédagogie » est source
d'ambiguïté (Terral, 1994). Cité par Mattesco (2018), Philip
(2011) soutient qu'« il a toujours été difficile de
formuler une définition de la psychopédagogie et qui de surcroit
fasse consensus ». Alors, il semble être laborieux de tenter de
donner une définition exacte de cette notion.
Bon nombre d'auteurs ont essayé de donner tour à
tour leur conception de la psychopédagogie. La première
définition de la psychopédagogie est attribuée à
Claparède qui l'entend comme un « aspect de la psychotechnie
éducative, psychologie de l'enfant susceptible de s'adresser à
ceux qui enseignent » (Dintzer, 1964, cité par Terral, 1994,
p.112). La psychopédagogie renvoie alors à l'étude
scientifique des capacités psychiques de l'enfant ou
l'élève, la prise en compte des composantes psychologiques des
individus et des groupes (Doron & Parot, 2004) aux fins de servir aux
enseignants dans leurs pratiques quotidiennes. Elle implique de la part des
éducateurs le recours à « la philosophie et aux
connaissances scientifiques de l'enfant et de l'adolescent »
(Dintzer, 1964, cité par Terral, 1994, p. 116).
La psychopédagogie est une discipline qui croise deux
autres. Elle est une jonction entre la psychologie et l'enseignement dont
l'objectif est le bien-être éducatif de l'individu. Léon
(1966, in Mattesco, 2018), la considère comme « discipline
charnière » entre la psychologie et la pédagogie qui
tente de comprendre et de permettre aux apprenants d'entrer dans les
apprentissages. Elle permet, par une approche globale, de définir des
actions qui prennent en considération l'ensemble de la personne pour
l'amener à accéder aux apprentissages. Elle invite les
éducateurs à adopter une démarche analytique et
compréhensive des difficultés vécues par les apprenants
(Mattesco, ibid). Les théories de la psychologie (cognitive,
développement, analytique, etc) sont convoquées dans une telle
démarche pour pouvoir définir un cadre d'actions orienté
vers l'aide aux élèves en difficulté. Pour Terral (1994,
p. 112), « la psychopédagogie est une discipline relais entre
la psychologie et la pédagogie. Elle est l'ensemble composé de
savoirs, de démarches et d'activités en lien avec les
connaissances livrées par la psychologie appliquée au monde de
l'éducation ». Ainsi,
27
tel que le souligne Mialaret (1987) par psychopédagogie
on peut entendre « soit une théorie, soit une méthode,
soit un ensemble de pratiques qui se réfèrent aux données
de la psychologie de l'éducation » (Mialaret, 1987, in Terral,
1994), et ce, soit pour les fonder, soit pour les expliquer, soit pour les
mettre en oeuvre sur le plan de l'action (Mattesco, op. cit).
Une autre acception de la psychopédagogie à
partir de laquelle notre travail fondera son appréhension du terme
considère la psychopédagogie comme une « discipline
utilisant à des fins pédagogiques les apports de la
psychologie-discipline dont l'objet privilégié d'étude
sera le sujet de l'éducation (maître et/ou élève)
appréhendé dans la multiplicité des approches
psychologiques (cognitive, relationnelle) » (Terral, 1994, p.
118).
Dans le cadre du présent travail, nous
considérons la psychopédagogie comme l'ensemble des savoirs,
savoir-faire et savoir-être empruntés à la psychologie afin
de permettre aux éducateurs la mise en oeuvre des actions
pédagogiques au bénéfice des individus en situation
d'apprentissage. Cette mise en oeuvre s'inscrit dans ce qu'on nomme « aide
psychopédagogique ».
L'aide psychopédagogique fait référence
à un ensemble d'actions, de mesures, de pratiques et de démarches
orientées vers l'amélioration de l'adaptation de l'enfant ou
l'adolescent en milieu scolaire et à faciliter l'acquisition de ses
connaissances et son développement cognitif. Plus globalement, elle est
l'ensemble des méthodes utilisées par des spécialistes de
l'éducation pour l'apprentissage et pour l'enseignement (Adjibodou,
2006). Elle permet d'assurer les conditions psychiques d'entrée dans les
apprentissages scolaires
L'accompagnement de l'élève qui a ou qui risque
d'avoir des difficultés d'apprentissage est d'abord centré sur
tout ce qui concerne l'acte d'apprendre. Il vise également les
éléments pouvant nuire à la réalisation des
apprentissages : motivation à apprendre, rythme d'apprentissage, modes
de pensée et stratégies, etc. Elle (l'aide
psychopédagogique) consiste en une prise en charge des
élèves en difficulté. En citant Brunstein (2006), Vouha
Bissa (2016, p. 7) soutient que c'est « un accompagnement à la
scolarité qui prend en compte le fonctionnement psychique de l'apprenant
en difficultés scolaires ».
L'aide psychopédagogique permet de répondre
à des problématiques personnelles d'apprentissage et
d'investissement scolaire (Vouha Bissa, ibid). Elle consiste à proposer
dans une logique de support des outils et conseils aux apprenants qui, en
majorité, présentent des difficultés dans leurs
apprentissages en vue de redynamiser certaines de leurs capacités.
28
Ce type d'aide n'implique pour l'aidant de se substituer
à l'élève, mais plutôt d'amener ce dernier à
comprendre où se situent ses difficultés et quelles techniques
sont adaptées à ses besoins. Pour cette raison, le Conseiller
d'Orientation- Psychologue est invité à travailler avec
l'apprenant sur ses capacités d'organisation de travail, ses
motivations, la compréhension de son mode de raisonnement (Vouha Bissa,
op cit.), ses méthodes de révision et de
mémorisation, etc. Il pratique une aide qui conduit
l'élève à être indépendant dans ses
apprentissages. L'aide psychopédagogique est un processus diachronique
dont les informations recueillies à chaque étape peuvent
éclairer la situation de l'élève et aider le CO-P à
identifier le mal être du patient. On retient les points suivants dans la
mise en place d'une aide psychopédagogique :
- Phase n°1 : analyse de la demande
Cela passe par l'identification de l'élève, du
motif de la demande et de son auteur (l'élève lui-même,
l'administration scolaire, les parents, les enseignants).
- Phase n°2 : l'évaluation
diagnostique globale
Approfondissement de la connaissance sur
l'élève, ce qu'il vit en classe, à la maison ou durant ses
loisirs. Mise en place du bilan psychopédagogique (passation,
dépouillement, analyse et interprétation des tests) pour
identifier les capacités psychocognitives de l'élève ainsi
que ses différentes modalités d'apprentissage.
- Phase n°3 : classement des informations
recueillies :
Classement des informations et émergence du point
nodal, le point qui coince. C'est la phase d'identification de la situation qui
bloque les apprentissages, la problématique globale à l'origine
de la difficulté (estime de soi, motivation, comportement,
stratégies d'apprentissage, etc) et autour de laquelle doit s'organiser
l'aide.
- Phase n°4 : mise en place de l'aide ou
prise en charge :
Les modalités d'intervention dépendent de
l'identification du point nodal. Le suivi individuel doit privilégier la
relation duelle. A ce moment le CO-P oriente l'enfant vers le support, l'outil,
la démarche et la stratégie thérapeutique adéquate
ou la médiation la plus adaptée.
La prise en charge psychopédagogique de même que
le programme d'actions qu'elle sous-entend doit être adaptée
à la nature du problème mis en cause afin de faire face à
la
29
question de la diversité et de la complexité des
individus. « Elle doit alors intégrer deux dimensions
» (Loeb, 2013, in Vouha Bissa, 2016, p. 8) à savoir :
- Remédier aux difficultés actuelles en
travaillant sur les tâches scolaires qui posent problème ;
- Prévenir les difficultés à venir qui,
en proposant des situations de travail, permettent de développer les
capacités à mieux apprendre.
Une fois la motivation en place un travail plus proche des
exigences scolaires pourra être envisagé.
Nous ne saurons entériner cet aspect de l'aide
psychopédagogie sans clarifier un outil très important pour sa
conduite : le bilan psychopédagogique.
II.2.1. Le bilan psychopédagogique
Le bilan psychopédagogique a pour objectif de cerner
les capacités intellectuelles en lien avec l'investissement scolaire
chez un sujet. Il permet de mettre en place une évaluation des
méthodes d'apprentissage (visuelle, auditive, kinesthésique...).
Il se présente comme un outil nécessaire pour connaître
l'enfant au-delà de ses difficultés scolaires, pour mieux
comprendre son fonctionnement.
Le développement intellectuel de l'individu
étant complexe, le bilan psychopédagogique implique de mettre ce
développement intellectuel en relation avec son évolution
psychologique car l'apprentissage s'inscrit nécessairement dans un
contexte affectif. Le déroulement du bilan peut se décliner en
quatre étapes générales :
- L'entretien préalable
Il concerne la rencontre avec l'enfant ou l'adolescent et sa
famille. Cette étape permet de clarifier la demande, d'en
préciser les objectifs et les attentes, de cerner les mobiles et le
motif et de faire l'anamnèse du sujet. Elle permet de choisir les outils
les plus adaptés.
- La séance de tests
(demi-journée)
C'est la phase de l'évaluation des acquis scolaires
dans les disciplines principales (recours à la fiche synthétique
d'un bilan pédagogique), des capacités intellectuelles, du
30
potentiel intellectuel et le niveau de développement
cognitif, des tests des styles d'apprentissage, des capacités
mnésiques, etc. Ensuite, le Conseiller d'Orientation procédera au
dépouillement et à l'analyse des tests.
- Le compte rendu
Un entretien de restitution est mené (de
préférence en présence des parents), restitution des
conclusions tirées.
- Le suivi en individuel
Pour privilégier la relation duelle, l'orientation de
l'enfant vers le support thérapeutique (jeu, littérature...), la
médiation appropriée ou l'outil de prise en charge adapté
à la situation.
L'objectif du bilan psychopédagogique est d'identifier
les forces et faiblesses du sujet ainsi que d'apporter une réponse
efficace aux difficultés d'apprentissage que nous aborderons dans les
lignes suivantes.
II.3. Apprentissage
Les apprentissages ont fait l'objet de nombreuses
études. La grande littérature qui s'y consacre justifie de la
difficulté à donner une acception idoine de ce concept. Le Robert
Micro (2006, p. 61) définit ce terme comme le « fait
d'apprendre un métier manuel ou technique dans une école ou chez
un particulier ». Le dictionnaire de psychologie (2004, p.52)
définit l'apprentissage comme le « changement dans le comportement
d'un organisme résultant d'une interaction avec le milieu et se
traduisant par un accroissement de son répertoire ».
Les théories qui fondent les définitions par
lesquelles on appréhende le concept d'apprentissage aujourd'hui semblent
d'un côté se compléter et de l'autre s'opposer. Ainsi, le
behaviorisme (ou comportementalisme) définit l'apprentissage comme une
modification durable du comportement résultant de la conséquence
d'un entraînement particulier.
L'approche cognitiviste soutient que l'apprentissage renvoie
à l'ensemble des processus mentaux à travers lesquels la
mémoire recueille, traite et emmagasine les nouvelles informations et
repère, par la suite, ces informations. Pour les constructivistes, la
connaissance est construite par l'apprenant sur la base d'une activité
mentale. L'apprentissage suppose ainsi l'activité de l'apprenant, avec
manipulation d'idées, d'objets, de connaissances et de conceptions
(Mbengone Ekouma, 2018, p.145).
31
Enfin, élaborée par Vygotski en 1978 (Mbengone
Ekouma, op cit), l'approche socioconstructiviste entend l'apprentissage comme
le fait pour un individu de co-construire ses connaissances en confrontant ses
représentations à celles d'autrui. Cette approche met l'accent
sur le rôle des interactions sociales multiples dans la construction des
savoirs. On apprend par les interactions sociales avec d'autres personnes.
Chacune des théories énoncées ci-dessus
tente de proposer des mécanismes pédagogiques à mettre en
oeuvre pour favoriser les apprentissages des élèves. Si les
apprentissages scolaires demeurent au coeur des priorités, les
difficultés auxquelles sont confrontés les individus en situation
d'apprentissage attirent de plus en plus l'attention du grand nombre.
II.3.1. Difficultés d'apprentissage
Les difficultés d'apprentissage sont au coeur des
analyses portant sur les questions éducatives. La littérature qui
existe sur cette notion se caractérise principalement par la
variété des tentatives de la définir. Dans ce qui suit
nous tenterons d'appréhender et d'expliciter ce qu'on entend par
difficulté d'apprentissage et en quoi elle se distingue du «
trouble d'apprentissage ».
Le Robert Micro (2006, p. 387) définit « la
difficulté comme une peine, un embarras, un empêchement, un ennui.
C'est le fait de se trouver dans une situation de moindre facilité
». La difficulté se réfère, de ce fait, à
un obstacle qui empêche de poursuivre un but.
Au cours de leur scolarité les individus font face
à plusieurs types de difficulté et celles qui touchent les
apprentissages occupent une place de plus en plus préoccupante.
L'expression « difficulté d'apprentissage » fait
référence à une panoplie de contraintes dont les sources
sont variées. Il s'agit d'un réel obstacle à la
réussite des élèves qui ne reçoivent dans leur
grande majorité aucun accompagnement efficace pour sortir de cette
situation. Ainsi, une difficulté d'apprentissage peut s'entendre comme
un retard développemental ou un obstacle à l'apprentissage
à caractère transitoire qui se dissipe habituellement grâce
à une intervention adaptée.
Dans la littérature scientifique, une approche
quantitative de la difficulté s'oppose à une approche
plutôt qualitative (Berzin & Brisset, 2008 ; Robbes, 2009). La
première qui s'appuie sur la conception piagétienne du
développement considère que l'acquisition des connaissances
s'effectuent selon une suite ordonnée de stades, eu égard
à la norme scolaire généralement retenue. Ainsi, la
difficulté renverrait à un écart qui distancie la
production d'un élève donné
32
par rapport à la succession de différentes
étapes du modèle de référence. A contrario, la
perspective qualitative soutient que les stratégies varient d'un sujet
à l'autre et chez le même sujet aussi. Chacun ayant ses propres
modes d'acquisition des connaissances, la difficulté se présente
comme une modalité d'expression différente et dont l'intervention
devrait d'abord être plus compréhensive. Ce qui suppose la saisie
de l'origine et de l'analyse de la difficulté.
Les difficultés d'apprentissage sont causées par
plusieurs facteurs internes et externes à l'individu. Cèbe &
Goigoux (1999) évoquent quatre facteurs favorisant la présence
des difficultés chez les élèves. Pour ces deux auteurs, un
déficit de socialisation peut entrainer des difficultés chez les
apprenants. Ce déficit s'exprime par l'incapacité d'un enfant
à être un élève scolairement adapté. Il
s'agit en effet d'une difficulté à participer activement au
travail de la classe, une difficulté à organiser son travail et
d'autonomie dans les apprentissages et un manque de confiance en soi et une
attitude à persévérer face à la difficulté.
Aussi le déficit de socialisation peut-elle s'apparenter au manque
d'attention et à la manifestation de comportements
incontrôlés ou agressifs (Goigoux, 1998 in Cèbe &
Goigoux, 1999).
En outre, l'hypothèse d'une immaturité
développementale est mise en valeur par Cèbe et Goigoux (1999)
dans la mesure où le système scolaire a tendance à
être plus large à l'égard de certaines catégories
d'apprenants qui sont considérés comme immatures et ne devant pas
faire l'objet de pression dans les apprentissages. Cette conception humaniste
conduit à ce que l'écart s'intensifie entre les enfants en
situation de difficulté et leurs camarades « normaux ».
Puis est évoquée l'hypothèse du
déficit expérientiel qui renvoie au fait que les activités
dont bénéficient les élèves en difficulté
dans leur milieu d'origine ne seraient pas suffisamment diversifiées, ou
qu'elles n'auraient que peu de parallélisme avec les tâches
scolairement reconnues comme la norme et, par conséquent, ils ne
pourraient pas acquérir les compétences nécessaires
à la réussite scolaire.
Enfin, le dernier des facteurs désignés par les
auteurs est le déficit de motivation. La motivation est un moteur de
l'apprentissage car elle détermine l'énergie et les ressources
attentionnelles que le sujet décide d'imputer au traitement de son
environnement. Il est communément admis que les difficultés
d'apprentissage ont pour origine un manque de motivation pour l'école en
général et les activités scolaires en particulier (Young,
1997, in Cèbe & Goigoux, 1999).
Très souvent usitées sans distinction, les
expressions « difficulté d'apprentissage » et « trouble
d'apprentissage » renvoient à des réalités
différentes. Le trouble d'apprentissage se distingue de la
difficulté d'apprentissage. Les troubles d'apprentissage font
référence à un
33
groupe de dérèglements causés par un
dysfonctionnement cérébral pouvant résulter d'une
lésion, d'une anomalie génétique ou d'un
développement cérébral inadéquat. Ces
dérèglements se manifestent par l'arrêt du
développement ou le développement déviant d'une
compétence liée à l'un ou l'autre des domaines suivants :
la mémoire, l'attention, le raisonnement, la coordination, la
communication, la lecture, l'écriture et le calcul. Étant
donné son origine neurologique, le trouble d'apprentissage est
persistant, voire permanent, en dépit d'une intervention adaptée
contrairement à la difficulté qui est transitoire et
passagère.
Le trouble d'apprentissage n'est pas synonyme
d'incapacité à apprendre sur le plan intellectuel. Il traduit une
difficulté à traiter l'information. En effet, le trouble
d'apprentissage interfère avec la capacité du cerveau à
absorber, à entreposer ou à récupérer
l'information. Ce déficit cognitif a ainsi un impact sur la façon
dont une personne perçoit, reçoit, comprend et exprime une
information. Pour pouvoir dire qu'un enfant a un trouble d'apprentissage, une
évaluation devra être faite par un spécialiste tel qu'un
neuropsychologue ou un orthophoniste. Un diagnostic qui va nécessiter un
soutien approprié. Bien qu'il n'existe aucune cure, aucun moyen de
l'enrayer, il est, toutefois, possible d'en diminuer les conséquences
sur la vie de l'individu et ce, de deux façons : la
rééducation et l'accommodation.
Il existe de nombreux troubles d'apprentissage parmi lesquels
:
- la dysphasie : qui est un trouble
neurodéveloppemental lié au langage qui affecte la
compréhension et/ou l'expression d'un message verbal, peu importe la
modalité de présentation, oral ou écrit ;
- la dyslexie : qui est une difficulté
propre à l'acquisition de la lecture.
- la dyscalculie : trouble spécifique
des apprentissages touchant la sphère de la numératie
(comprendre, utiliser, interpréter ou communiquer à l'aide des
nombres ;
- la dysgraphie : ce trouble affecte
l'écriture et son tracé. L'écriture manuelle est soit trop
lente, soit illisible, soit fatigante demandant dans tous les cas un effort
cognitif majeur ;
- le trouble déficitaire d'attention avec ou
sans hyperactivité (TDA/H) : c'est un trouble comportemental le
plus fréquent chez les enfants et les adolescents. A des degrés
variables, il peut perturber le fonctionnement personnel, scolaire, familial et
social.
Concernant la difficulté d'apprentissage, si une
intervention adaptée est faite auprès de l'enfant, et ce, en
fonction de ce qui est difficile pour lui, elle se dissipera. Donc si la
difficulté éprouvée est au niveau d'une notion en
français (par exemple les adjectifs), tant que cette notion
34
ne sera pas revue et intégrée pour qu'il soit
capable de la transférer dans d'autres situations, l'enfant aura une
difficulté. Toutefois, lorsque cette notion sera bien comprise, l'enfant
pourra continuer ses apprentissages comme il le faisait avant (Fecteau,
2011).
L'aide psychopédagogique est mise en place pour tenter
de sortir les élèves des difficultés dans lesquelles ils
sont enfermés. Ce type d'aide doit pouvoir prendre en compte les
caractéristiques individuelles de chaque élève. Il est
donc important de tenir compte du style d'apprentissage de chacun d'eux. Car
comme le note Mbengone Ekouma (2018, p.162) : « le style
d'apprentissage détermine fortement le style d'enseignement
».
II.3.2. Style d'apprentissage
Définir le style d'apprentissage est une question
à laquelle il est difficile de répondre de manière simple.
La lecture des nombreux écrits sur le style d'apprentissage met
rapidement en évidence la pluralité et la diversité des
définitions de ce concept (Chevrier, Fortin, Leblanc et Théberge,
2000). Le style est une manière personnelle d'agir, de se comporter.
L'évocation de ce terme dans le contexte scolaire renvoie à une
conception de l'individuation de l'activité éducative. Il renvoie
en effet à l'idée qu'il existe une différenciation chez
les individus quant à leur capacité à apprendre pour les
élèves ou à enseigner pour les éducateurs ou
enseignants.
Selon le Dictionnaire de psychologie (2004, p.687), « le
style d'apprentissage est un ensemble de caractéristiques individuelles
qui concernent la manière préférée de traiter les
informations. Il correspond à « la manière dont chaque
apprenant commence à se concentrer sur une information nouvelle et
difficile, la traite et la retient » (Dunn & Dunn, 1993, in
Mbengone Ekouma, 2018, p.155). C'est un ensemble d'activités cognitives,
affectives et physiologiques propres à un individu renvoyant à la
manière dont il perçoit, interagit et répond dans un
environnement d'apprentissage (Keefe, 1979).
En effet, si chaque élève a un style
d'apprentissage qui lui est propre, il est toutefois nécessaire de
préciser qu'il n'existe pas de bon ou mauvais style. L'idéal
serait d'adapter les styles d'enseignement aux manières d'apprendre des
élèves sans toutefois tendre à enfermer chacun d'eux dans
son propre style.
Aussi, est-il important de distinguer style d'apprentissage et
stratégie d'apprentissage. Une stratégie est un ensemble
d'actions coordonnées en vue d'atteindre un but. Pour Mbengone Ekouma
(2018, p.155), les stratégies d'apprentissage font
référence à des « actions volontaires (ou
involontaires) d'un apprenant qui servent à améliorer une partie
de son apprentissage ou
à résoudre un problème dans sa
production d'une langue ». C'est un ensemble d'activité par
lesquelles le sujet choisit, organise et gère ses actions en vue
d'accomplir une tâche ou d'atteindre un but.
Parmi les typologies de styles d'apprentissage, on peut citer
le modèle de Kolb (1984) qui distingue deux manières de percevoir
l'information (concrète ou abstraite) et deux manières de la
traiter (active ou passive). Selon ce modèle, l'apprenant évolue
sur des continuums (concret/abstrait et actif/réflexif) selon ses
appréhensions mais également selon ses préférences
à traiter ou à percevoir l'information (Mbengone Ekouma, 2018).
En combinant les modes préférés de perception et les modes
préférés de traitement de l'information, l'auteur a
défini quatre styles différents et décrit les modes
d'apprentissage qui conviennent le mieux à chacun d'eux. Le tableau
suivant fait une présentation de chacun des styles d'apprentissage.
35
Tableau 1 Styles d'apprentissage d'après
le modèle de Kolb (1984)
Styles
|
Définition
|
Intuitif-pragmatique ou concret- réfléchi
(divergent)
|
· Désire connaître le pourquoi d'une
situation
· Cherche à raisonner sur des informations
concrètes
· Explore ce que le cours, le sujet a à offrir
· Préfère que les informations lui soit
présentées d'une manière détaillée,
systématique, raisonnée, etc.
|
Intuitif-réflexif ou
réflchi-abstrait (assimilateur)
|
· Désire répondre à la question "Qu'y
a-t-il à connaître?"
· Préfère que les informations soient exactes
et que leurs présentations se fassent d'une manière
organisée
· Respecte la connaissance de l'expert
|
|
36
|
Méthodique-réflexif ou
abstrait-actif (convergent)
|
Désire connaître le comment d'une situation
· Préfère que des applications et des
informations utiles lui soient présentées
|
Méthodique-pragmatique ou concret-actif
(accommodateur)
|
· Désire connaître en se posant la question
«Qu'est-ce qui arriverait si... ?»
· Recherche une signification à l'apprentissage
· Préfère des présentations
où il est en mesure de voir «ce qu'il peut faire» et ce que
«les autres ont fait»
|
|
Source : Grolleau (2010).
Plusieurs autres styles d'apprentissage ont été
proposés et mis en évidence par
Zakhartchouk en 1999, notamment ceux fonctionnant par paires
(Mbengone Ekouma, 2018). On a à cet effet les paires :
- visuels/auditifs ;
- réflexifs/impulsifs ;
- dépendants/indépendants ; -
productifs/consommateurs ; - conviviaux/individualistes ; -
intensifs/économes ;
Cette classification des styles d'apprentissage ne doit pas
conduire à une considération rigide des manières
d'apprendre chez les individus au risque de les enfermer de façon
absolue dans des schémas théoriques qui ne rendent compte que
d'un aspect limité de la réalité telle que vécue
par les personnes (Mbengone Ekouma, ibid.).
Nous venons de passer en revue les différents concepts
et notions clés de notre travail. Dans le but de nous imprégner
de ce que disent les autres recherches sur le sujet qui constitue la trame de
ce mémoire, le chapitre suivant se consacrera à la revue de la
littérature, puis nous saisirons l'occasion d'aborder l'approche
théorique, la problématique et les hypothèses de notre
étude.
37
CHAPITRE III : RECENSION DES TRAVAUX ANTERIEURS, APPROCHE
THEORIQUE ET PROBLEMATIQUE
Nous traiterons dans ce chapitre des points suivants : d'abord
la revue des travaux antérieurs ayant un lien avec les objectifs du
sujet traité dans ce mémoire ; puis l'approche théorique
qui abordera le champ d'étude et le cadre d'analyse théorique, la
problématique ; et enfin, nous exposerons les hypothèses.
III.1. Recension des travaux
antérieurs
Toute recherche se fonde sur des connaissances et savoirs
préexistants à partir desquels émergent des
questionnements. Concernant la revue des travaux antérieurs, Grawitz
(1993, p. 483) souligne la prudence de « prendre connaissance de la
bibliographie, soit sur le même problème traité en d'autres
lieux, soit sur des problèmes différents, mais
étudiés au même
38
endroit et pouvant mettre en cause des données
semblables ». A cet effet, nous avons organisé les travaux
traitant de notre sujet en les regroupant selon qu'ils abordent les points
suivants :
- L'impact d'une intervention psychopédagogique sur les
apprentissages des élèves en difficulté : Bosson (2008)
;
- L'effet de la schématisation sur la résolution
des problèmes : Nze (2016) ;
- L'impact pédagogique de l'utilisation des cartes
mentales : Farrand, Hussein et Hennessy (2002), Assenarre (2009), Longeon
(2010), Nikolic (2014), Mbengone Ekouma (2016b) et Courtois (2017) ;
- L'intérêt pratique des styles d'apprentissage :
Chartier (2003) et Hijazi (214) ;
III.1.1 Impact d'une intervention sur les apprentissages
des élèves en difficulté
En 2008, Bosson a rédigé une thèse dont
l'objectif majeur était de comprendre les mécanismes du transfert
des stratégies au sein d'une intervention métacognitive
auprès des élèves présentant des difficultés
d'apprentissage. Plus particulièrement, elle vise à
évaluer son intervention métacognitive en comparant les
résultats aux pré et post-tests de mathématiques des
élèves du groupe expérimental et du groupe contrôle
et d'évaluer les effets d'apprentissage au cours de l'intervention, par
l'analyse de trois cas, l'influence de la métacognition, de la
motivation et du type de stratégie sur le transfert. Afin d'atteindre
les objectifs susmentionnés, l'auteure émet l'hypothèse
générale selon laquelle « le transfert de stratégies
cognitives et métacognitives est augmenté par une intervention
métacognitive ».
Cette étude a porté sur 16 élèves
en difficulté scolaire dont l'âge variet entre 8,4 et 12,2 ans de
la 3ème et de la 6ème primaire. Ces
élèves ont été divisés au départ en
deux groupes dont un groupe expérimental (GE1) et un groupe
contrôle (GC) de 8 individus chacun. La démarche débute par
des entretiens avec les élèves et leurs parents aux fins de
déterminer la nature de la difficulté. La méthodologie
consiste en une phase de pré-test, une phase d'intervention et deux
phases de post-tests (divisé en post-test immédiat et post-test
différé). Les instruments utilisés sont des tests
scolaires, le K-ABC (Kaufman Assement Battery for Children). Le
groupre contôle (GC) du pré-test va devenir le groupe
expérimental 2 (GE2).
Les résultats les plus en vue montrent que les
élèves du GE1 obtiennent de meilleurs scores au post-test
immédiat que les élèves non entraînés. Par
ailleurs, les scores des élèves du GE1 montrent qu'ils
maintiennent les stratégies du post-test différé.
39
Cette étude est compatible avec la nôtre parce
qu'elle vise à montrer que l'enseignement de stratégies aux
élèves en difficultés d'apprentissage amène ces
derniers à améliorer leurs capacités à
résoudre des problèmes. De plus elle met en exergue les
conséquences positives d'une intervention dans un processus visant
à réintroduire les élèves dans les apprentissages.
En effet, notre ambition est de montrer qu'une intervention avec la carte
mentale peut tout aussi être efficace.
III.1.2. Effet de la schématisation sur la
résolution des problèmes :
La question de la schématisation est abordée par
Nze (2016) dans son mémoire de fin d'études. Constatant un infime
usage du schéma au 3ème cycle primaire et
reconnaissant que les élèves possèdent chacun ses
caractéristiques psychologiques propres, l'auteur cherche à
mettre en évidence l'effet de la schématisation sur la
résolution des problèmes mathématiques. Ainsi, en vue de
savoir dans quelle mesure cela est possible, il soutient que le type de
stratégie favorise la résolution de problèmes
arithmétiques chez l'élève de 5è année
primaire. Plus spécifiquement :
- plus les élèves de 5ème
année utilisent la schématisation, plus ils obtiennent de
meilleurs résultats lors de la résolution de problèmes
arithmétiques ;
- et inversement, moins les élèves de
5ème année utilisent la schématisation, moins
ils obtiendront de meilleurs résultats lors de la résolution de
problèmes arithmétiques.
Pour vérifier ces affirmations, Nze (2016) adopte une
méthode expérimentale comparative mettant en jeu un
pré-test et un post-test. L'expérimentation porte sur 98
élèves dont 49 filles et 49 garçons divisés en un
groupe témoin et un groupe expérimental. Au pré-test
l'auteur cherche à identifier les stratégies utilisées par
les élèves au quotidien. Au post-test, trois jours après
que les enseignants et les élèves du groupe expérimental
(GE) aient été formés au processus de
schématisation, le groupe témoin (GT) va résoudre un
problème sans utiliser le schéma, ce qui ne sera pas le cas pour
l'autre groupe.
Les résultats montrent qu'au pré-test les
résultats des deux groupes sont identiques (GE = GT). A contrario, au
post-test, une différence est visible entre les deux groupes dont GE =
53,06% de réussite contre GT = 6,2%.
Cette étude révèle que les
stratégies de schématisation peuvent contribuer
considérablement à favoriser les apprentissages. C'est
également cet objectif qui oriente notre travail.
40
III.1.3. Impact pédagogique de l'utilisation des
cartes mentales :
Dans un article, Ferrand, Hussain et Hennessy (2002) se
donnent pour objectif de mesurer l'efficacité de la technique de la
carte heuristique par rapport aux méthodes habituelles d'apprentissage
chez des étudiants en médecine en ce qui concerne le rappel des
connaissances. Leur population est composée de cinquante
étudiants repartis en deux groupes équitables dont l'un est le
groupe « MM » (groupe qui a recourt à la technique de la carte
mentale) et l'autre le groupe témoin. Les auteurs adoptent comme
méthode de soumettre pour lecture un texte aux apprenants et à
l'issue de laquelle les étudiants de chaque groupe seront invités
à répondre à des questions. Le groupe « MM »
utilisera la carte mentale pour y répondre et l'autre utilisera la
méthode traditionnelle. Les résultats montrent que le groupe
« MM » a fait un meilleur rappel des items corrects que l'autre
groupe. Et la motivation des étudiants du groupe « MM » semble
avoir été plus élevée que celle du groupe
témoin.
Cette étude va dans le sens d'une plus-value qu'apporte
la carte mentale aux apprentissages. Elle rejoint notre projet même si la
population étudiée n'est pas semblable à la
nôtre.
Assenarre (2009), quant à lui, a commis un essai
après avoir fait le constat que la carte mentale était
méconnue des professionnelles et professionnelles de l'éducation
et qu'aucune méta-analyse ne s'est intéressée aux
avantages de la carte mentale pour les apprentissages en contexte
éducatif. Son objectif est alors d'évaluer, à partir d'une
recension de dix travaux traitant des avantages de la carte mentale sur les
apprentissages, l'apport pédagogique de la carte mentale chez les
élèves du primaire en difficulté d'apprentissage. Les
résultats que l'auteur a recueillis décrivent deux tendances :
d'abord la carte heuristique se présente comme un outil efficace dans un
contexte d'apprentissage indépendamment du contexte éducatif, de
la clientèle ou de son utilisation ; de plus, la carte heuristique
semble avoir davantage bénéficié aux élèves
du primaire qu'aux élèves des cycles supérieurs
L'auteur tire la conclusion selon laquelle il y a eu une
plus-value pédagogique significative de la carte heuristique chez les
élèves du primaire. Elle fait preuve d'une efficacité en
tant que stratégie d'apprentissage et outils plaisant. Cette
étude rejoint nos objectifs en ce sens qu'elle montre les
différents apports de la carte mentale en contexte éducatif. Ce
texte soutient la contribution de la carte mentale comme stratégie dans
la prise en charge des difficultés d'apprentissage des
élèves du primaire.
41
Dans son étude, Longeon (2010) part du constat qu'il
existe, depuis Buzan (1970) jusqu'à Novak (1998), des techniques de
représentations spatiales des concepts qui, malheureusement, n'ont
jamais fait l'objet d'expérimentation dans le cadre de leur
capacité à favoriser l'évaluation des connaissances.
Au vu d'un tel constat, l'auteur se fixe pour objectif de voir
si dans le sillon d'une expérimentation la carte heuristique permet
d'évaluer les connaissances des élèves. Pour ce faire, il
formule l'hypothèse selon laquelle le résultat de la
représentation spatiale des concepts élaborés par la carte
heuristique devient une trace sur l'état actuel des connaissances de
l'apprenant pouvant être évalué par un enseignant.
Pour atteindre son objectif, Longeon (2010) fait recours
à la matrice de critères élaborée par Novak et
Gowin en 1984 permettant d'évaluer des cartes conceptuelles. Cette
grille facilitera l'étude comparative des productions des apprenants que
l'auteur codifie Ca avec une carte de référence produite
par un enseignant codifiée Cr. L'expérimentation se
déroule en deux activités dont la première consiste dans
un premier temps à présenter la carte heuristique, ses origines
et ses modes de construction aux apprenants. Puis dans un autre temps, les
élèves réalisent sur feuille une carte heuristique sur un
concept de leur choix. La deuxième activité porte sur le recours
par les élèves à un logiciel d'élaboration d'une
carte heuristique. L'expérimentation porte sur 12 apprentis en seconde
et première année commerce et première année
mécanique âgés de 16 à 25 ans.
Les résultats obtenus dans chaque activité
semblent conforter l'hypothèse de départ. En effet, les
résultats de l'activité 1 montrent des points communs au niveau
sémantique entre les productions Ca et Cr. Cependant,
il existe des différences au niveau de l'organisation des idées.
Les conclusions de l'activité 2 montrent que les sujets trouvent assez
aisément les mots principaux à mettre dans la carte et
parviennent à les rattacher au concept central. Toutefois, apparaissent
des difficultés à établir des liens croisés entre
les mots. Du point de vue de l'organisation du graphique, la majorité
des sujets a choisi l'organisation en étoile. De plus, le taux de
similitude entre la production Ca et Cr est forte, soit un
taux de 79% pour la hiérarchisation et de 52,5% pour les mots
clés.
En guise de conclusion, l'auteur reconnaît que
l'élaboration de la carte heuristique est un exercice laborieux dont la
maîtrise est fonction d'un entraînement continuel. Son utilisation
pour l'évaluation ne saurait être systématique.
L'éducateur devra s'assurer que l'enfant a intégré
durablement l'outil afin qu'il puisse être directement autonome dans ses
apprentissages.
42
L'étude de Longeon (2010) présente un
intérêt pour nous en ce qu'elle nous permet de comprendre comment
le recours à la représentation graphique des concepts permet
d'apprécier le niveau de connaissance d'un élève sur une
notion donnée. C'est aussi l'occasion d'indiquer que la carte mentale
est un outil qui peut être aussi usitée par les enseignants. Elle
montre comment dans un contexte d'aide psychopédagogique
l'éducateur peut se renseigner sur le niveau de connaissance d'un
élève en difficulté par rapport à une
matière donnée.
Nikolic (2014), dans son étude, constate que peu de
travaux ont porté sur l'efficacité de la carte heuristique comme
activité de pré-écriture tandis que son efficacité
en tant qu'outil d'apprentissage et d'organisation a été
démontrée dans plusieurs disciplines. Ainsi, en prenant pour
objet l'application de la carte heuristique comme stratégie de
brouillonnage dans la production écrite en langue
étrangère et son impact sur la cohérence textuelle,
l'auteur se fixe comme objectif de voir si la capacité des scripteurs
à produire des cartes heuristiques cohérentes est liée
à leur capacité à réaliser des textes
cohérents en FLE.
Trois hypothèses sont formulées par l'auteur :
1. si la cohérence d'un texte repose sur les
relations hiérarchiques des idées et si elle est assurée
par le processus de planification conceptuelle et notamment par le processus
d'organisation des idées, alors la capacité du scripteur à
produire des textes cohérents ne dépendra pas directement de sa
compétence linguistique en langue étrangère ;
2. si le processus rédactionnel n'est pas
linéaire mais hiérarchique, alors la carte heuristique, qui
nécessite un traitement hiérarchique des idées,
s'avèrerait efficace comme stratégie de brouillonnage ;
3. si le processus rédactionnel, tout comme la
carte heuristique, nécessite une structuration et une gestion
hiérarchique des idées, alors il devrait exister un lien entre la
capacité à construire des cartes heuristiques cohérentes
et la capacité à produire des textes cohérents.
Ces trois hypothèses vont diriger la démarche
expérimentale de l'auteur. Pour ce faire, il va s'intéresser
à des étudiants de l'université de Lettonie
âgés de 20 ans et inscrits en Français Langue
Etrangère (FLE). En raison de la variation de leur niveau de
français-certains sont de niveau intermédiaire (A2) et d'autres
de niveau indépendant (B2) selon l'échelle standardisée du
Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues
(CECRL)-le groupe requiert une caractéristique
hétérogène. Ayant débuté la première
phase avec 15 sujets (N=15)
43
l'expérimentation dans la deuxième phase s'est
achevée avec un effectif de 8 sujets (N=8). Ainsi, Nicolic (2014) opte
pour une démarche qui repose sur deux tests :
- Un pré-test dans lequel la tâche consistera,
pour les étudiants, à rédiger un texte en classe pour une
durée de 60 minutes. Les sujets sont empruntés à un examen
officiel/ celui du diplôme d'étude en langue française
(DELF). Dans cette phase, les sujets sont libres de choisir leur brouillonnage,
c'est-à-dire leur mode de préparation de la rédaction de
leur texte ;
- Un post-test dans laquelle la réalisation de la carte
heuristique est imposée comme stratégie de brouillonnage. Les
sujets sont alors contraints de préparer leur texte en ayant recours
à la carte heuristique.
Une séance de formation sur l'utilisation de la carte
heuristique comme stratégie de brouillonnage a été offerte
aux apprenants entre la phase de pré-test et celle de post-test. Le
traitement des données a été réalisé en
trois moments. Dans un premier temps, les écrits ont été
évalués par un professeur neutre, titulaire du certificat
d'examinateur-correcteur des épreuves du DELF. La grille
d'évaluation élaborée par l'évaluateur a
été basée sur les critères des descripteurs du
niveau B2. Deux indices ont été évalués: la
cohérence du texte et la compétence linguistique en langue
française. Deuxièmement, à la fin de la production
post-test, un questionnaire a été rempli par les étudiants
dans le but d'évaluer sur une échelle de 1 à 4 (pas du
tout d'accord; plutôt pas d'accord; plutôt d'accord; tout à
fait d'accord) la véracité de trois affirmations portant sur
l'accueil général de la carte heuristique comme outil de
brouillonnage (je comprends bien comment faire des cartes heuristiques; la
carte heuristique m'aide à organiser mes idées et à mieux
écrire ; je vais utiliser cet outil dans l'avenir).
Et dans un troisième instant, les cartes heuristiques
construites par les scripteurs lors du brouillonnage au post-test ont
été évaluées. Leur évaluation, basée
sur une échelle de 1 à 4 (incohérente ; peu
cohérente ; cohérente ; assez cohérente) visait la
capacité du scripteur à construire une structure spatiale, nodale
et arborescente qui soit claire, cohérente et bien disposée sur
la feuille.
Les résultats obtenus par l'auteur montrent que la
carte heuristique comme stratégie de brouillonnage n'a pas d'impact
significatif sur la cohérence du texte rédigé. La mise en
comparaison donne des résultats mitigés. Certains scripteurs qui
avaient produit des textes plus cohérents ont aussi construit des cartes
heuristiques plus cohérentes. De l'autre côté, les
scripteurs qui présentent une faible cohérence cartographique ont
produit des textes d'une cohérence égale ou supérieure aux
autres scripteurs.
44
Indépendamment de leur compétence linguistique
en langue étrangère, les scripteurs ont une capacité
différente à produire des textes cohérents. Cette
capacité est probablement fonction de la façon dont ils
planifient au niveau conceptuel. En effet, deux niveaux distincts auxquels
opèrent les scripteurs (niveau conceptuel et niveau linguistique)
existent. Les compétences linguistiques n'impactent donc pas les
capacités à produire des textes cohérents.
Les derniers résultats renseignent que la carte
heuristique paraît plus appréciée et mieux accueillie par
les étudiants qui parviennent à mieux organiser leurs
idées et à réaliser des textes cohérents que par
ceux qui font plus de progrès et qui bénéficient davantage
de son utilisation. En conclusion l'auteur estime que « les scripteurs
qui organisent et hiérarchisent mieux au niveau conceptuel trouvent la
carte heuristique ?...? plus compatible avec leur mode de pensée »
(Nicolic, 2014).
Cette étude rejoint la nôtre en ce sens que
l'auteur reconnaît l'apport pédagogique de la
représentation graphique des idées et particulièrement de
la carte heuristique. Ce type de formalisation regorge un intérêt
capital par rapport à la production de texte (Dambreville, 2014). Elle
démontre dans notre intérêt que le COP peut en avoir
recours dans le but d'aider les élèves qui ont des
difficultés à organiser leurs idées en vue de
rédiger harmonieusement un texte pendant les devoirs.
Dans un article, Mbengone Ekouma (2016b) se questionne de la
façon suivante : dans quelle mesure la carte conceptuelle peut-elle
favoriser l'enseignement de la géographie ? Elle fait l'hypothèse
que la méthode d'enseignement favoriserait la construction des savoirs
au cours de géographie. Son étude porte sur cent dix (110)
élèves du lycée Mbélé âgés
entre 12 et 14 ans.
La procédure a porté sur la sélection de
deux enseignants dont l'un d'eux a été formé à la
méthode de la carte mentale pendant quatre (4) semaines. Les
élèves, eux, ont été répartis en deux
groupes de 55 élèves chacun dont l'un a suivi le cours avec la
méthode de la carte conceptuelle et l'autre avec la méthode
transmissive. Une évaluation sommative a été
opérée par chaque enseignant. Les élèves du groupe
ayant bénéficié de la carte conceptuelle ont
été invités à rappeler le cours en utilisant cette
technique et les autres ont été amenés à utiliser
la méthode traditionnelle pour rappeler le cours.
Les résultats ont montré que les
élèves du groupe expérimental (ceux ayant eu recours
à la carte conceptuelle) ont obtenu de meilleurs scores que ceux du
groupe témoin. Aussi, existe-t-il une différence significative
entre les résultats des deux groupes. Par conséquent, la carte
conceptuelle a favorisé l'assimilation du contenu et la rétention
du vocabulaire. Mbengone
45
Ekouma (2016b) conclue son article en soulignant que la carte
conceptuelle servirait d'indicateur d'apprentissage. Elle constitue une aide
à la compréhension écrite en géographie et serait
un outil complémentaire aux styles d'enseignement.
Cet article a un intérêt dans ce travail parce
qu'il met en relief l'importance et la plus-value des organisateurs graphiques
dans les apprentissages. Nous croyons avec l'auteure que ce type d'outil peut
avoir un impact sur les savoirs tant d'un point de vue qualitatif que
quantitatif.
Courtois (2017), pour sa part, a mené une étude
intitulée « l'influence de l'utilisation des cartes mentales sur la
mémorisation des concepts de sciences » dans le cadre d'un
mémoire de fin d'études. La profusion d'études mettant en
avant les potentiels atouts des cartes mentales ainsi que leur apparition et
leur développement dans le domaine de l'éducation ont conduit
l'auteure à constater que de nombreux enfants éprouvent des
réels problèmes quant à la mémorisation des
contenus d'enseignement. Ainsi, ils se retrouvent démunis face à
leurs leçons en situation d'apprentissage.
En s'intéressant à l'apport de l'utilisation des
cartes mentales chez les élèves dans le cadre des sciences,
l'auteure tente d'établir des liens entre ces outils et la facilitation
de la mémorisation. Pour ce faire, elle formule la problématique
suivante : « à l'école, les cartes mentales
favorisent-elles la mémorisation des concepts de sciences ? »
Pour y apporter des éléments de réponse, Courtois
(2017) va procéder à une expérimentation dans une classe
de CE2 composée de 23 élèves susceptibles de s'être
déjà familiarisés avec l'usage de la carte mentale.
L'expérimentation aura pour objectif de mettre en place
une séquence de sciences dans la classe. La thématique va tourner
autour du mouvement du corps humain et les membres qui sont en action dans ce
processus.
La classe choisie pour l'expérimentation va être
scindée en deux groupes dont un qui fera usage de la carte mentale et un
autre qui procédera à la synthèse de texte. L'exercice se
déroule en deux phases. Il consistera dans un premier temps à
réaliser, pour le premier groupe, une carte mentale sur les mouvements
du corps et d'en faire une synthèse pour le deuxième groupe avec
possibilité de faire des brouillons pour les deux groupes. Et dans un
deuxième temps le groupe ayant recours à l'outil (carte mentale)
sera invité à recopier une carte mentale sur la leçon au
tableau.
Au cours de cette expérimentation, l'auteure fera une
comparaison des productions à plusieurs niveaux : la construction de la
carte mentale (organisation de la structure et
46
hiérarchisation des idées), la connaissance du
vocabulaire, la compréhension des liens entre les éléments
et l'évaluation des brouillons. Pour traiter les données,
l'auteure fait recours à la matrice des critères qualitatifs et
quantitatifs énoncée par Longeon (2010) et à partir
delaquelle elle retient uniquement les critères sur l'organisation
spatiale et les niveaux hiérarchiques.
L'étude de Courtois (2017) débouche sur
plusieurs résultats. Du point de vue de la construction de la carte
mentale, on observe que les élèves dans leur majorité ont
réalisé leur carte mentale en réseau (7
élèves sur 8) puis en étoile (1 élève sur
8). Au niveau de la hiérarchisation nombreuse sont les sujets qui ont eu
recours à trois niveaux (6 sur 8 élèves), puis quatre
niveaux et deux niveaux. Ces derniers résultats montrent que «
les enfants semblent avoir un bon niveau de maîtrise en raison de la
proximité de leurs niveaux d'avec ceux de la carte de
référence qui en possède 5 niveaux » (Courtois,
2017).
Quant à la copie de la carte mentale de la leçon
au tableau, on se rend compte que la majorité des sujets ont des
problèmes d'organisation spatiale (73% des élèves) contre
27% d'entre eux (soit 3 élèves) qui n'éprouvent pas trop
de difficulté.
Pour la phase d'évaluation des connaissances du
vocabulaire lié aux membres participant au mouvement du corps humain,
l'étude révèle que les élèves ayant fait
usage de la carte mentale ont de légers meilleurs résultats que
ceux qui ont réalisé la synthèse de texte soit 59% des
réponses correctes pour les premiers et 51% pour les deuxièmes.
L'évaluation de la compréhension relève que les
réponses attendues chez les sujets qui ont fait la synthèse de
texte sont légèrement supérieures à ceux qui ont
utilisé la carte mentale. On peut alors être amené à
souligner que les écarts entre ces deux catégories de sujets ne
sont pas très significatifs. L'auteure estime à cet effet que ces
résultats ne permettent pas de conclure sur l'efficacité des
cartes mentales dans la révision d'une leçon en sciences.
Nonobstant ce fait, les cartes mentales, précise l'auteure, peuvent
être utilisées en classe à condition de prendre des
précautions de préparation par l'enseignant afin de s'assurer de
l'entière intégration de cet outil par l'élève.
Cette étude porte l'intérêt de montrer les
applications de la carte mentale dans les apprentissages. Elle donne quelques
informations sur la possibilité de faire recours à la carte
mentale pour apprendre même si les résultats ne permettent pas de
formuler des conclusions pertinentes. Elle révèle en effet
l'intérêt pédagogique de cet outil ainsi que des limites
qui sont les siennes. Le COP peut, dans le cadre de l'aide
psychopédagogique auprès des élèves en
difficulté de révision, leur conseiller son utilisation. Ceci
dit, la carte mentale se pose comme un outil important pour l'aide
auprès des élèves en difficulté d'apprentissage.
47
III.1.4. Intérêt pratique des styles
d'apprentissage
Dans une perspective de pédagogie
différenciée, Chartier (2003) a pour objectif de montrer
l'ambigüité existante autour de la notion de style d'apprentissage
ainsi que la nécessité pratique d'en tenir compte dans l'action
éducative.
En partant du constat selon lequel les difficultés
d'apprentissage ont longtemps été conçues uniquement comme
résultant de déficits de l'efficience intellectuelle des
apprenants, l'auteur se convainc que les différences de performance sont
en fait liées aux différences de style. Ainsi, tentant de saisir
la notion de style d'apprentissage à travers la convocation de plusieurs
modèles théoriques, Chartier (2003) admet que le flou conceptuel
qui caractérise cette notion est fonction de « la
médiocre qualité scientifique de beaucoup de modèles parmi
lesquels les pédagogues praticiens choisissent parfois, hélas, en
fonction de critères superficiels, ou parce que le modèle
conforte leurs préconceptions ». C'est dire que ce
foisonnement d'approches concernant cette notion complexifie une
possibilité de consensus autour de cette dernière.
Toutefois, cette absence de consensus autour de la notion de
style d'apprentissage n'entache en rien l'importance d'en tenir compte dans les
apprentissages des élèves. Les styles d'apprentissage permettent
une approche de l'apprenant invitant à une prise en compte des
caractéristiques personnelles des apprenants. Les réponses des
individus en termes de comportement dans les situations d'apprentissage sont le
fait d'interactions entre des composantes de la situation de formation et des
caractéristiques dynamiques personnelles.
Cet article est important pour notre étude parce qu'il
nous renseigne sur le fait que l'aide que le COP doit apporter aux
élèves en difficulté doit être adaptée et
personnalisée en fonction des caractéristiques singulières
de chacun d'eux. Ce qui sous-tend la nécessité pour lui de
connaître les caractéristiques de chaque élève
bénéficiant d'un accompagnement psychopédagogique et donc
d'identifier le style d'apprentissage de chacun afin que la carte mentale, qui
fait l'objet du présent travail, ne puisse être proposée de
façon inadaptée aux élèves (Regnard, 2010).
En 2014, Hjazi a commis une étude dont l'objectif
principal était d'identifier les effets de l'utilisation de la carte
mentale sur les compétences cognitives et la performance technique en
escrime chez les étudiants de cette discipline. Dans le dessein
d'atteindre cet objectif il formule les hypothèses ci-dessous :
48
- Il y a des différences significatives entre les
scores au pré et au post-test pour les groupes expérimentaux et
contrôle à la fois aux compétences cognitives et à
la performance technique en faveur du post test ;
- Il y a des différences significatives entre les
groupes expérimentaux et contrôle au post test à la
compétence cognitive et à la performance technique en faveur du
groupe expérimental.
Son étude porte, en effet, sur 46 étudiantes
réparties en deux groupes de 23 parmi lesquels le groupe
expérimental a bénéficié de l'enseignement de la
carte mentale tandis que la méthode conventionnelle a été
appliqué au groupe contrôle.
Après une série de test pour identifier les
styles d'apprentissage des étudiantes et mesurer leur niveau de
compétence cognitive et de performance technique, les étudiantes
ont été amenées à dessiner les cartes mentales d'un
plan curriculaire d'escrimes.
Les résultats ont révélé que le
style d'apprentissage préféré de l'échantillon
était le visuel suivi de l'auditif et du kinesthésique. Ces
résultats montrent également qu'il y a des différences
significatives entre le pré et le post pour les deux groupes à la
performance technique et à la compétence cognitive en faveur d'un
post test. Enfin il y a des différences significatives entre le groupe
contrôle au post-test de la compétence cognitive pour le groupe
expérimental et pas de différences significatives entre les deux
groupes au post test de la performance d'une méthode traditionnelle.
Cette étude parle en faveur d'un effet positif de la
carte mentale sur les compétences cognitives des apprenants. C'est une
idée que nous tendons à partager dans notre travail. Cette
étude convoque tout comme nous les styles d'apprentissages.
III.2. Approche théorique
Une approche théorique renvoie à un ensemble de
connaissances scientifiquement établies qui tente d'expliquer une
question, un problème. La présentation du fondement
théorique d'une étude vient en complément aussi bien de la
définition des concepts que de la revue de la littérature. Elle
sert à circonscrire théoriquement notre travail. Cette
étape consistera en la présentation du champ d'étude, du
cadre théorique dans lequel s'oriente notre étude ainsi que la
problématique.
III.2.1. Champ d'étude
49
La présente étude s'inscrit dans le cadre des
sciences de l'éducation et, particulièrement, dans les champs de
la psychopédagogie scolaire, la psychologie des apprentissages et la
psychologie cognitive.
L'objet de la psychopédagogie scolaire est multiforme
dont l'aspect le plus essentiel est de faciliter le retour aux apprentissages
des élèves. Cette forme disciplinaire trouve un regain
d'intérêt en raison du contexte dans lequel s'orientent les
politiques éducatives actuelles en Occident et progressivement en
Afrique : celui de l'aide personnalisée aux élèves en
difficulté. Cet objectif a conduit les décideurs à former
et orienter des éducateurs spécialisés dans les
différents établissements afin de minimiser l'échec
scolaire. La présence des COP en établissement est sensée
répondre à ce besoin.
La psychopédagogie scolaire convient à notre
étude car elle répond aux mêmes objectifs que nous nous
sommes fixés plus haut. Elle consiste à fournir des outils
efficaces et adaptés aux caractéristiques individuelles des
élèves en difficulté. Ainsi, nous tentons par la
présente étude à montrer s'il y a un intérêt
à adopter la carte mentale comme dispositif d'aide
psychopédagogique des élèves qui rencontrent un certain
nombre de problèmes au cours de leurs apprentissages.
La psychologie cognitive, quant à elle, s'attache
à comprendre les processus mentaux associés aux connaissances
pour générer des prédictions comportementales. C'est une
étude scientifique des fonctions cognitives humaines : la
mémoire, le langage, les perceptions, le raisonnement, la
résolution d'un problème, etc. Elle est d'un grand
intérêt dans la présente étude en ce sens qu'elle
permet de rendre compte de la manière dont la carte mentale active les
différents processus mentaux enjeu dans la l'appropriation, la
mémorisation et l'extériorisation des connaissances. La carte
mentale est fortement liée au fonctionnement de la mémoire et du
cerveau, objets de la psychologie cognitive.
Le dernier champ dans lequel s'inscrit cette étude est
celui de la psychologie des apprentissages. Cette discipline s'intéresse
de façon générale aux processus d'apprentissage ou
à comprendre comment l'être humain est capable de
développer de nouvelles attitudes, connaissances et compétences
sur le plan de l'acquisition comme de l'invention. Ainsi, la carte mentale
représente un dispositif qui favorise les apprentissages et la
mémorisation. Elle est une méthode d'enseignement active,
favorise la dynamique de groupe (Kremer & Verstraete, 2014) et
l'acquisition des savoirs (Mbengone Ekouma, 2016b).
50
Le champ d'étude ayant été défini,
il convient à cet effet de préciser le modèle
théorique dans lequel notre travail va s'inscrire. Pour cela, nous irons
faire un rappel des théories avant d'indiquer le cadre théorique
retenu.
III.2.2. Cadre théorique
Plusieurs auteurs ont abordé la question des
apprentissages selon des vues variées. Ces différentes
interprétations constituent ce qu'il tient lieu d'appeler « les
théories des apprentissages » auxquelles nous avons
brièvement fait allusion dans les lignes précédentes.
L'objectif de notre travail étant de comprendre dans quelle mesure la
carte mentale serait un outil facilitant l'aide psychopédagogique
auprès des élèves en difficulté d'apprentissage,
certaines de ces théories pourraient apporter quelques éclairages
sur notre sujet, car la carte mentale répond dans beaucoup de cas
à un besoin pédagogique. Parmi ces multiples théories nous
avons retenu d'en aborder quatre (4) dont : la théorie transmissive, la
théorie béhavioriste, la théorie constructiviste et la
théorie socioconstructiviste.
III.2.2.1. Théorie transmissive des
apprentissages
Pour ce modèle théorique, l'apprentissage se
résume à un enregistrement en mémoire du savoir
exposé par l'enseignant, comme si ce savoir s'imprimait directement dans
le cerveau de l'élève telle une pellicule photographique. Cette
conception de l'apprentissage est héritée des pédagogies
traditionnelles. Elle « découle du modèle de
communication mise au point en 1940 par Shanon et Weaver » (Mbengone
Ekouma, 2018, p.146). Le rôle de l'enseignant est de distiller un certain
nombre d'informations aux élèves qui écoutent et prennent
des notes.
Ici l'erreur est attribuée à la seule
responsabilité de l'élève qui aurait manqué
d'écoute pendant la dictée de l'enseignant. La remédiation
possible serait dans ce cadre d'expliquer à nouveau à
l'élève ou de refaire apprendre en lui demandant d'être
plus attentif.
Cette théorie a de nombreuses limites parmi lesquelles
la non prise en compte du rôle de l'élève et de ses
processus cognitifs dans la construction de son savoir. Elle fait table rase de
l'autonomie de l'élève. Elle prétend que la nature de
l'information que l'enseignant pense communiquer à l'élève
est la même que celle que l'élève croit percevoir.
51
Cet aspect nous conduit à exclure ce modèle dans
l'explication de notre travail. Car la carte mentale est un outil qui
nécessite un processus coopératif entre l'enseignant et
l'élève.
III.2.2.2. Théorie béhavioriste
Cette théorie est le croisement de deux (2) courants :
« celui de la physiologie animale de Pavlov et celui de la psychologie
expérimentale de Thorndike et Skinner » (Mbengone Ekouma,
ibid., p.147).
Le behaviorisme ou comportementalisme définit
l'apprentissage comme la capacité à donner la réponse
adéquate à des stimuli donnés. Il est envisagé
comme un processus mécanique dans lequel les comportements de
l'apprenant sont déterminés par les renforcements
rencontrés : les « bonnes » réponses sont
récompensées et reproduites, les « mauvaises »
réponses punies et abandonnées. C'est l'apprentissage par
conditionnement.
Le rôle de l'enseignant ici est de faire usage
volontairement des renforcements pour favoriser l'acquisition de certains
comportements tout en faisant disparaître d'autres, de construire,
d'organiser les objectifs d'apprentissage et de déterminer des objectifs
d'apprentissage précis (Mbengone Ekouma, ibid., p.147). Comme
le souligne Mbengone Ekouma (ibid., p. 148), cette théorie met
l'accent sur :
- « la définition des connaissances à
acquérir en termes de comportements observables qui devront être
mis en oeuvre dans les apprentissages , ·
- l'apprentissage par essais-erreurs , ·
- la répétition par l'association
stimuli-réponse , ·
- l'usage de renforcements positifs en cas de bonnes
réponses et des renforcements négatifs pour rectifier les erreurs
».
Dans le modèle behavioriste, l'apprenant ne progresse
pas à pas. L'erreur est à éviter. Si, toutefois elle
survenait, c'est que l'élève n'aurait pas maîtrisé
certains prérequis indispensables ou que le savoir n'aurait pas
été décomposé en éléments
suffisamment petits pour être confondu avec une réponse
adaptée à un stimulus.
Cette théorie présente également des
limites. Elle ne permet pas de rendre compte par exemple des apprentissages
complexes, comme l'acquisition de la lecture. De plus, l'élève y
est considéré comme un simple exécutant qui n'a pas
conscience des objectifs visés et ne comprend pas la signification de
ses actes. Les savoirs nouveaux viennent se superposer les uns autres sans
jamais ne se restructurer ni s'enchevêtrer. Or, la démarche d'aide
dans laquelle le
52
COSP entend s'inscrire prend en compte l'implication de
l'élève ainsi que sa capacité à se prendre en
charge en vue de son autonomie dans les apprentissages. Cette conception
théorique ne saurait correspondre avec nos objectifs.
III.2.2.3. Théorie constructiviste
La théorie constructiviste a été
fondée et développée en 1975 à l'initiative de
Piaget qui a également théorisé sur le
développement intellectuel. Le constructivisme apparait en
réaction au behaviorisme à qui l'auteur reproche de limiter
excessivement l'apprentissage à l'association
stimulus-réponse.
Selon cette théorie, la construction de la connaissance
est le résultat d'un processus d'interaction entre le sujet et le
milieu, processus qui produit un système de connaissances
organisées qui ne peut se réduire à une simple
accumulation. En d'autres termes, « les connaissances se construisent
par ceux qui apprennent. Pour le constructivisme, acquérir des
connaissances suppose l'activité des apprenants, activité de
manipulation d'idées, de connaissances, de conceptions »
(Mbengone Ekouma, 2018, p. 149). Schématiquement, on peut dire que toute
connaissance nouvelle est confrontée à la structure cognitive
existante afin d'y être intégrée.
Le processus adaptatif qui va alors s'engager opérera
par assimilation ou par accommodation. L'assimilation, c'est l'appropriation
par le sujet d'un élément externe dont la structure est
compatible avec le système cognitif existant. L'accommodation est
l'adaptation du système cognitif existant aux variations externes qu'il
ne réussit pas à assimiler. Ces deux pôles de l'adaptation,
assimilation et accommodation, sont indissociables : l'assimilation permet la
cohérence du système cognitif, l'accommodation, son
adéquation au réel.
Mais l'action constante du sujet sur son environnement peut
introduire des perturbations dans le système : certaines acquisitions
posent des problèmes, entraînent des conflits intra-psychiques par
impossibilité de relier la connaissance nouvelle à la structure
cognitive existante. Le sujet répond par des compensations actives, une
autorégulation nommée équilibration. Si le
déséquilibre est important, l'autorégulation
entraînera une restructuration qui tiendra compte des acquisitions
nouvelles et sera donc plus solide, plus large et plus générale :
on parlera, dans ce cas, de rééquilibration majorante.
De façon pratique, l'apprentissage renvoie à la
situation dans laquelle l'élève est placé dans des
contextes actifs pour qu'il rencontre et résolve des conflits entre
différents schèmes
53
qui s'élaborent. Dans cette approche théorique,
le sujet apprend en s'adaptant au milieu (Mbengone Ekouma, idem.,
149).
Les applications pédagogiques de la posture
constructiviste sous-tendent d'avoir recours aux pratiques de la
pédagogie active qui consistent à placer l'élève au
coeur de ses apprentissages. D'après Mbengone Ekouma (2018) ces
pratiques reposent sur les actions suivantes :
- considérer l'élève comme l'artisan
de ses connaissances ,
- valoriser les activités d'apprentissage en
mettant l'élève en position centrale et active dans les
dispositifs d'enseignement-apprentissage : activités de manipulation
d'idées, de réflexion, de recherche, de connaissances, de
conceptions, de manières de faire, etc. ,
- évaluer les prérequis (savoirs et
savoir-faire) dont disposent les élèves ,
- tenir compte des représentations, des conceptions
des élèves, car elles peuvent soit servir de point d'appui, soit
faire obstacle à l'acquisition de connaissances nouvelles ,
- favoriser les situations à
problème.
Les travaux qui ont été conduits dans la
perspective du constructivisme ont contribué à la
compréhension de la formation des connaissances par l'apprenant et
l'apprenante et à l'élaboration de situations didactiques
susceptibles de favoriser leur évolution. Toutefois, malgré ces
promesses des limites ont été proférées à
l'égard de cette théorie.
Au niveau théorique, nombre d'auteurs estiment qu'elle
pose problème (Bereiter, 1985 in Arcà & Caravita, 1993).
D'abord elle ne définit pas des limites de validité. Car aucun
modèle n'est valide à l'absolu et efficacement capable de
décrire comment se déroulent les processus de la connaissance, de
la compréhension et de l'apprentissage. En outre, on lui reproche de ne
pouvoir faire des prévisions et d'inférer des règles de
déroulement des processus cognitifs. Enfin, l'axiome de base suivant
lequel l'individu est le protagoniste actif du processus de connaissance et que
les différentes constructions mentales sont le résultat de son
activité court le risque de conduire à un subjectivisme absolu
(Arcà & Caravita, 1993).
Au niveau de son application à l'école,
l'apprentissage reste une relation privée entre un sujet, les objets, la
tâche, le problème. Les relations sociales entre pairs ou avec un
éducateur ne semblent pas prééminentes dans le
développement cognitif. Dans ces conditions, on voit mal la place de
l'enseignement dans ce développement. Or, la carte mentale requiert un
système
54
d'interactions dans lequel se retrouvent l'éducateur,
et pour ce qui nous concerne, le COSP et les élèves. Ce qui nous
renvoie à convoquer l'ultime théorie que nous avons retenue.
III.2.2.4. Théorie
socioconstructiviste
La théorie socioconstructiviste a été
élaborée par Vygotski en 1978 (Mbengone Ekouma, 2018) suite aux
critiques formulées contre certains aspects du constructivisme. Les
constructivistes admettent que des conflits cognitifs peuvent surgir, donc des
déséquilibres, puis des équilibrations. Mais ceci reste du
domaine du sujet et ne suppose pas essentiellement la présence et la
confrontation avec un autre. Plusieurs continuateurs de Piaget, à
l'instar de Vygotski, ont remis en cause ce point de vue en insistant au
contraire sur les aspects bénéfiques des interactions sociales
dans le développement (Mbengone Ekouma, ibid.)
Pour les tenants de cette approche théorique,
l'acquisition trouve principalement son origine dans des confrontations
d'actions ou d'idées avec des partenaires. Elle passe par « une
interaction entre le sujet, la situation et les acteurs de la situation
» (Mbengone Ekouma, idem., p. 150). Les échanges
interindividuels deviennent source de progrès cognitifs par les conflits
sociocognitifs qu'ils font naître.
Les apprentissages se font à travers les
médiations et interactions avec autrui et avec des outils techniques et
sémiotiques. L'enfant et son développement sont conçus non
pas de façon isolée mais plutôt en interaction
étroite avec les contenus culturels et l'ensemble des pratiques par
lesquelles les adultes essaient de rendre possible cette appropriation.
Le processus de médiation passe par ce que Vygotski
nomme par « zone proximale de développement ». Ce concept qui
occupe une place de choix dans la pensée de ce dernier renvoie à
la différence entre le niveau de résolution de problèmes
sous la direction et avec l'aide d'adultes plus compétents et celui
atteint par l'enfant tout seul. En d'autres termes, l'écart entre ce que
l'enfant peut encore savoir et savoir-faire au contact d'autres individus et ce
qu'il sait et sait faire. Un enseignement orienté vers un stade
déjà acquis est inefficace au regard de celui qui
précède le développement.
Le résultat des interactions entre le sujet et des
partenaires extérieurs entraine ce qu'on appelle « conflit
sociocognitif ». Il naît en effet dans la confrontation des
représentations de l'enfant avec celles des autres (enseignants,
élèves, pairs). Par rapport au constructivisme, l'approche
sociocognitive ou socioconstructive introduit une dimension
supplémentaire : celle des interactions, des échanges, du travail
de verbalistion, de co-construction, de co-élaboration.
55
Dans cette approche, l'erreur est l'expression ou la
manifestation d'un ensemble de conceptions intégrées dans un
réseau cohérent de représentations cognitives, qui se
dressent en obstacles à l'acquisition et à la maîtrise de
nouveaux concepts. Le franchissement de ces obstacles devient alors le projet
de l'acte d'enseignement et l'erreur un épisode dans la restructuration
et l'élargissement des connaissances. En outre, l'acte d'enseignement
renvoie à l'organisation des situations d'apprentissage propices au
dialogue en vue de provoquer et de résoudre des conflits sociocognitifs.
Enfin, l'apprentissage est considéré comme la co-construction de
ses connaissances en confrontant ses représentations avec celles
d'autrui.
L'une des limites de cette théorie est son application
dans des situations où l'éducateur est confronté au
problème de la pléthore des effectifs dans les salles de classes.
Ce type de classes surchargées ne sont pas aisées à
gérer et demandent du temps.
Pour finir, il y a lieu de préciser que la
théorie socioconstructiviste tend à avoir une correspondance avec
les besoins de notre recherche. C'est-à-dire de voir dans quelle mesure
nous pouvons proposer une aide aux élèves en difficulté
d'apprentissage en convoquant la carte mentale comme outil de médiation.
En effet, les processus de construction et de co-construction des connaissances
énoncés par cette approche s'accordent aux principes de l'outil
dont nous tenons à en faire la démonstration de l'application
pédagogique en contexte scolaire.
En effet, d'une part la carte mentale est un outil qui demande
à être appris aux élèves par l'intermédiaire
d'un enseignant aux fins d'une totale réappropriation par ces derniers
et d'un réel impact sur leurs apprentissages. Cette
réappropriation passe par un encadrement de l'enseignant qui doit
s'assurer que le principe de construction est bien assimilé. Le
rôle de ce dernier reste fondamental et justifie pourquoi la
théorie socioconstructiviste sied à notre étude. D'autre
part, l'utilisation individuelle de cet outil favorise la
réflexivité, le réajustement des idées ainsi que la
hiérarchisation de la pensée de l'utilisateur (Bessette &
Duquette, 2003). Ce qui a pour but de le remettre au centre de la construction
de ses connaissances. Ces deux dimensions qui font correspondre le
socioconstructivisme et la carte mentale nous invitent à circonscrire
notre travail dans ce modèle théorique.
Nous venons de rappeler quelques approches théoriques
qui tentent d'expliciter les processus d'apprentissage de même que les
limites qui leurs sont faites. Dans les paragraphes suivants nous irons
décliner la problématique de notre travail.
III.3. Problématique
56
L'aide personnalisée en contexte scolaire est l'un des
dispositifs auxquels il est fait allusion quand on aborde la question des
difficultés d'apprentissage à l'école (Claus, 2016). En
France, une variété de dispositifs est mise en place pour
répondre aux besoins d'individualisation ou de personnalisation de
l'aide scolaire (Félix, Saujat & Combes, 2012). C'est dire que les
acteurs du secteur éducatif accordent une place importante au rôle
que doivent jouer les enseignants spécialisés et, en
l'occurrence, les Conseillers d'Orientation Psychologues.
Dans notre contexte, malgré le fort désire de
répondre efficacement au problème des difficultés
scolaires, les dispositifs d'aide demeurent encore à l'état
embryonnaire. D'une part, un vide existant en matière de politique de
remédiation de la difficulté scolaire est observé dans les
textes officiels. En effet, aucun article contenu dans la Loi
N°21/2011 du 14 février 2012 n'explicite clairement les
mesures dédiées au développement d'un système
d'assistance personnalisée auprès des élèves en
difficulté d'apprentissage. Toutefois, on soupçonne l'article 91
de cette loi de tendre de façon encore floue vers cet objectif.
L'article 91 de ladite loi dispose qu'« au cours du cycle primaire et
tout en tenant compte de ses aptitudes au pré-primaire, l'apprenant, en
situation de redoublement, peut être orienté par le Conseil
d'école, soit vers une formation à un métier de base
approprié, s'il est âgé d'au moins douze ans, soit vers un
centre de formation des pépinières du sport, soit encore dans un
établissement spécialisé, s'il présente
d'importantes déficiences».
Tout d'abord, on s'aperçoit que cet article fait du
redoublement une difficulté particulière dont la réponse
serait la réorientation vers des centres sportifs et les possibles
déficiences, quant à elles, auront pour solution l'orientation
vers un établissement spécialisé-notons que parmi les
établissements spécialisés qu'on peut rencontrer au Gabon
il y a entre autres l'Ecole Nationale pour Enfants Déficients Auditifs
(ENEDA).
Ensuite, si l'affectation des élèves ayant des
déficiences importantes vers des établissements
spécialisés rencontre notre assentiment, le problème du
redoublement semble mal abordé. Car cet article ne tient pas compte des
possibles difficultés à l'origine de ce redoublement et qui
pourraient nécessiter une aide particulière. Enfin, cet article
fait abstraction des difficultés que peuvent rencontrer les
élèves de l'enseignement secondaire qui sont les sujets de notre
étude. On se rend compte qu'aucune mention n'est faite à
l'égard de l'aide personnalisée comme une priorité dans ce
texte officiel.
D'autre part, au sein des établissements, les
élèves en difficultés d'apprentissage semblent être
livrés à eux-mêmes (Courtois, 2017). L'aide apportée
aux élèves identifiés
57
comme étant en difficulté est soit inexistante,
soit inadaptée ou insuffisante d'après nos observations faites
pendant le stage de fin d'études.
Comme nous l'avons mentionné dans notre constat, la
seule pratique d'aide psychopédagogique proposée aux
élèves demeure l'édification d'un planning
personnalisé de travail. Si cet outil est non négligeable au
regard de l'importance de l'organisation du travail dans la réussite
scolaire (Mindzie Mintogo, 2016), il est nécessaire de souligner que
chaque élève présente des difficultés
d'apprentissage particulières. C'est pour cette raison que nous nous
sommes interrogés sur la possibilité de proposer un outil qui
pourrait répondre de façon optimale aux besoins de certains
élèves en difficulté d'apprentissage en fonction de leur
fonctionnement psychologique, et donc, de leurs styles d'apprentissage
dominants. L'outil que nous avons choisi dans le cadre de ce travail
exploratoire est la carte mentale.
Sous d'autres cieux la carte mentale a fait l'objet d'une
vaste littérature quant à ses bienfaits et à ses avantages
(Assenare, 2009, Courtois, 2017). Cependant, peu de travaux ont porté
sur son application en contexte scolaire. Dans l'enseignement, elle reste
encore très peu utilisée mais fait une apparition progressive ces
dernières années (Lascombes, 2013). Au Gabon, aucune étude
ne s'est attelée à démontrer comment et pourquoi elle peut
faire l'objet d'une utilisation dans le cadre d'un accompagnement
psychopédagogique dans l'enseignement secondaire.
Les lectures que nous avons pu recenser fournissent un nombre
important d'informations sur l'usage de cet outil. D'abord, il faut souligner
que la carte mentale ne peut pas être conseillée à tous les
élèves (Regnard, 2010 ; Longeon, 2010). Il paraît judicieux
de tenir compte des styles d'apprentissage de chaque élève. Les
styles d'apprentissage sont d'un intérêt pratique à
l'école. Leur identification est assurément d'une grande
pertinence pour les éducateurs, le corps administratif et les apprenants
eux-mêmes (Chartier, 2003 ; El Ghardallou, 2013). Ils sont utiles aux
enseignants dans la mesure où ils rendent possible la
nécessité d'adapter leurs interventions pédagogiques.
Aussi, permettent-ils aux élèves de prendre conscience de leurs
spécificités et d'utiliser les techniques d'apprentissage les
mieux adaptées.
Une autre étude dans laquelle s'est investi Longeon
(2010) montre que la carte mentale peut être utilisée par les
enseignants à des fins d'évaluation des connaissances des
élèves. Cet outil permettrait d'apprécier le niveau de
connaissances des élèves sur une notion, sur un cours. C'est donc
un outil qui renouvelle les paradigmes dans l'évaluation (Dambreville,
2014).
Aussi, il a été montré au cours de nos
lectures que la carte mentale autrement appelée carte heuristique peut
constituer un dispositif permettant d'améliorer l'écriture et
notamment la
58
cohérence textuelle (Nikolic, 2014). L'auteur tente de
montrer que le recours à la carte mentale dans le processus de
brouillonnage a un impact sur l'organisation et la hiérarchisation des
idées en vue de produire un texte cohérent. Si la carte
heuristique impacte peu ou prou la cohérence d'un texte, elle peut
néanmoins être utile en tant que méthode de
préparation de la rédaction d'un texte (le brouillon) et peut
faciliter la hiérarchisation des idées qui seront comprises dans
le texte final. De plus, outre son intérêt dans la structuration
du texte et l'enchaînement des idées, elle (la carte mentale)
favorise la motivation des apprenants au primaire (Dalila, 2018 ; Longeon,
2010).
On peut également retenir de ces lectures que le
recours à la carte mentale par les élèves du primaire,
notamment ceux de CE2, permet plus ou moins de mémoriser des concepts.
C'est-à-dire qu'elle favoriserait la connaissance et la
compréhension des concepts de sciences ainsi que leur structuration
(Courtois, 2017). Cet avantage concernant la structuration des concepts par la
carte repose sur l'efficacité que les organisateurs graphiques ont
contrairement à la linéarité textuelle (Waller, 1981 in
Assenare, 2009).
Cette bibliographie en lien avec notre étude nous a
permis de disposer de plusieurs informations. Si l'on déplore la
rareté sinon l'absence de travaux en contexte gabonais en rapport avec
notre thématique, nous reconnaissons néanmoins la contribution de
chacune de ces études. Elles nous donnent des renseignements sur
l'importance de l'utilisation de la carte mentale dans les apprentissages. Cet
outil demeure utile tant pour les enseignants dans leurs pratiques
pédagogiques - d'enseignement (Lascombe, 2013) et d'évaluation
(Kuntz, 2016, Longeon, 2010) - que pour les élèves au niveau de
leurs apprentissages et de leur motivation (Assenare, 2009), de la
compréhension et de la mémorisation (Courtois, 2017), de la
construction des savoirs (Mbengone Ekouma, 2016b) et de l'écriture
(Dalila, 2018, Nikolic, 2014). Ainsi dit, la carte mentale se présente
comme une méthode « révolutionnaire » (Kuntz,
2016, p.6) au sein de l'école. Elle est un changement de paradigme dans
les apprentissages (Dambreville, 2014).
Toute chose égale par ailleurs, ces études ont
la particularité de ne pas s'intéresser de façon
précise aux sujets que nous avons choisis pour notre étude.
Autrement dit, elles font leur expérimentation sur des
élèves du primaire (Assenarre, 2009, Bosson, 2008, Courtois,
2017), du lycée professionnel (Longeon, 2010), des étudiants
d'université (Farrand et al., 2002, Hjiazi, 2014, Nikolic, 2014) et des
élèves de 4ème (Mbengone Ekouma, 2016b). Or, notre travail
est axé sur les élèves en difficulté
d'apprentissage au collège et plus précisément en classe
de 3ème.
59
Ensuite, de ces études, seule une porte sur le contexte
éducatif gabonais et poursuit des objectifs distincts de ceux du
présent mémoire. Le travail que nous menons semble être
l'un des premiers du genre qui a comme champ empirique l'un des
établissements scolaires du Gabon. En outre, si ces études
montrent l'intérêt de la carte mentale pour les enseignants aucune
d'elles ne fait explicitement référence à son utilisation
par les enseignants spécialisés et particulièrement par
les Conseillers d'Orientation Psychologues dans leurs pratiques
professionnelles. Seul le travail de Bosson (2008) tente de mettre en exergue
des médiateurs qui malheureusement ne sont pas des CO-P.
Enfin, peu de ces études traitant de l'apport
pédagogique de la carte mentale n'insèrent dans leur
démonstration les styles d'apprentissage (tels que
théorisés par Kolb, 1984) avant d'expérimenter l'outil sur
les élèves. Le seul travail dans lequel la notion de styles
d'apprentissage est abordée aux côtés de la carte mentale
se limite juste à déterminer les styles dominants chez les
étudiantes qui constituent la population de l'étude (Hjazi,
2014). En d'autres termes, il ne met pas explicitement en relation les
incidences des différences individuelles sur l'utilisation de la carte
mentale par les participantes.
Nous nous interrogeons sur la pertinence de la carte
heuristique (ou carte mentale) sur les apprentissages par
l'intermédiaire du CO-P dans son rôle de psychopédagogue.
En nous appuyant sur le concept de zone proximale de développement issu
du socioconstructivisme, il nous paraît loisible de souligner que le CO-P
a un rôle primordial à jouer au cours de la construction des
connaissances chez les élèves. En effet, il est invité
à choisir les outils adaptés aux spécificités
(styles d'apprentissage par exemple) et aux besoins en termes d'apprentissage
des élèves qu'il reçoit en situation d'aide
psychopédagogique. Ainsi, parmi ces outils, la carte mentale semble
pouvoir lui être d'une grande aide plutôt que la seule
réalisation du planning personnel de travail.
Au regard de ce qui précède, la
problématique centrale qui se dégage se résume ainsi :
dans quelle mesure la carte mentale serait-elle utile pour le COSP dans le
cadre d'une aide psychopédagogique auprès des
élèves en classe de 3e identifiés comme
étant en difficulté d'apprentissage ?
De cette problématique découle
l'hypothèse générale suivante : l'aide
psychopédagogique apportée aux élèves en
difficulté d'apprentissage scolaire est fonction des outils
mobilisés par le COSP.
Cette hypothèse se décline en trois
hypothèses de travail telles qu'énoncées ci-après
:
60
- Hypothèse de travail 1 :
l'utilisation de la carte mentale par les élèves en
difficulté d'apprentissage favorise leur capacité
à rappeler les informations du cours ;
- Hypothèse de travail 2 : l'usage de la
carte mentale chez les élèves en difficulté
d'apprentissage favorise la hiérarchisation des
idées d'un cours ;
- Hypothèse de travail 3 : L'usage de la
Carte Mentale chez un élève en difficulté
d'apprentissage dépend de son style d'apprentissage ;
Nous entendons par outils la carte mentale et le questionnaire
des styles d'apprentissage. Pour confirmer ou infirmer notre hypothèse
nous avons opté pour la méthodologie qui consistera à
évaluer les apprenants sur la réalisation de deux des cartes
mentales qu'ils auront à élaborer sur un cours de sciences
physiques et notamment le cours portant sur les conducteurs ohmiques. En effet,
après des séances qui auront pour but de leur apprendre
l'élaboration de l'outil, il leur sera également demandé
de réaliser sur un écart de quelques jours deux cartes mentales
sur les conducteurs ohmiques. Les résultats de ces cartes feront l'objet
d'une analyse particulière afin d'apprécier les capacités
de rappel et de hiérarchisation des informations contenues dans une
leçon et l'impact des styles d'apprentissage sur la qualité des
informations contenues sur les cartes mentales des élèves.
Ce chapitre nous a permis d'évoquer les points
liés à la recension des travaux antérieurs à notre
étude, l'approche théorique, la problématique et la
formulation de l'hypothèse générale. Nous aborderons dans
les lignes suivantes la deuxième partie de notre travail qui porte sur
les aspects méthodologiques.
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DEUXIEME PARTIE : ASPECTS METHODOLOGIQUES
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