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La conservation du dugong en Nouvelle-Calédonie. La mobilisation et la confrontation de savoirs et pratiques relatifs à  une « espèce emblématique ».

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par Audrey Dupont
Université Aix-Marseille - Master Pro Anthropologie et Métiers du développement durable 2014
  

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I.4. Présentation rapide des lieux d'enquête

I.4.1. La commune de Pouébo

La commune de Pouébo, située dans la région Nord-Est de la Grande-Terre, dans la Province Nord et dans l'aire coutumière Hoot-ma-Whaap, constitue une longue bande côtière de 70 km enchâssée entre une chaîne de montagne et un lagon turquoise. Elle est composée de deux districts21 (le district coutumier de Balade au nord et celui de Pouébo au sud) rassemblant 16 tribus dont deux indépendantes : celles de Paalo et Colnett. La région représente 2452 personnes soit 12 individus/km2, ce qui est peu comparé au reste de la Nouvelle-Calédonie (recensement 2014, densité de la population par commune et par Province, www.isee.nc). Elle est peuplée majoritairement par des Kanak (95%), quelques familles calédoniennes d'origine Européenne22 aux extrémités nord et sud, quelques Européens au village (Bodmer, 2010 : 4).

lieux d'enquête

ISEE, 1996

Langues vernaculaires

Figure 3 : Répartition géographique et langues sur la commune de Pouébo (c) réalisation : Dupont

L'une des particularités de la commune reste sa forte diversité linguistique. Sur l'espace de 70 km, on retrouve trois ensembles linguistiques bien marqués : le « Nyelâyu » parlé dans les tribus de Balade, le « Cââc » qui se cantonne au centre de Pouébo et le « Jawé » au sud du village. Cette distribution linguistique conditionne le découpage du territoire suivant : le district de Balade, la zone de Pouébo-village et le district de Lé-Jao, administré par son Grand-chef Noel Poindi. Cette répartition spatiale est celle reconnue par les habitants interrogés dans cette enquête. Si le travail d'enquête a été en majorité mené dans les tribus de Yambé et Diahoué, nous avons aussi interrogé

21 Subdivision administrative sous autorité et juridiction de la commune, qui regroupe une ou plusieurs tribus respectant l'organisation des aires d'influence de chaque « grand-chef » qui administre ce territoire (cf. Cornier, 2010 : 30).

22 Il s'agit de Calédoniens nés sur le territoire, ou en France, qui sont présents en Nouvelle-Calédonie depuis plusieurs années

Juin 2015 24

DUPONT A, ETHT7, La conservation du dugong en Nouvelle-Calédonie : la mobilisation et la confrontation de savoirs et

pratiques pour la protection d'une espèce « emblématique » menacée

des personnes de la tribu de Saint-Denis de Balade et de Saint-Louis et Saint-Denis à Pouébo (cf. figure 3).

La faune et la flore terrestres et marines exceptionnelles ont été internationalement reconnues, particulièrement par le classement UNESCO du lagon en 2008 et par la mise en place d'aires marines protégées, comme celles de Hyabé/Lé-Jao ou de Dohimen et de Yeega dans la commune de Hienghène, inaugurées en 2010 (Le Journal des aires marines protégées de Pweebo et Hyehen, WWF, Association Ka Poraou, Association de l'aire marine protégée de Hyabé/Lé-Jao, OGAF et PN, mars 2014). Du fait de son éloignement de Nouméa, la région s'est tardivement préoccupée de son développement touristique, même si quelques aménagements touristiques qui permettent à quelques familles d'avoir des revenus de leurs activités.

Sur place, quelques emplois dans le bâtiment, dans les professions administratives, au dispensaire, à l'OPT, des revenus ponctuels obtenus à travers la professionnalisation des activités de pêche ou la vente d'objets artistiques dynamisent ce territoire. Mais, depuis cinq ans environ, beaucoup de personnes partent travailler en dehors de la zone, à Hienghène, particulièrement vers les sites miniers de la zone VKP (Voh/Koné/Pouembout) ou encore vers des agglomérations de la côte-est ou à Nouméa (Cornier, 2010). Ces mouvements ne semblent pas a priori perturber une certaine continuité des modes de vie traditionnel puisque nombre d'habitants des tribus pratiquent toujours des activités vivrières (agriculture, pêche, chasse) pour s'alimenter et s'organisent socialement selon des systèmes d'alliances et d'échanges complexes et hérités des parents et grands-parents (Ibidem). Toutefois, face aux changements sociaux importants actuels en Nouvelle-Calédonie, vécus par certains « Jeunes » comme par les « Vieux » comme une rupture, le système coutumier ne fonctionne plus comme « avant ».

Les transformations impactées par l'amélioration des conditions matérielles et économiques dans la région sont très récentes et la population ne sait peut-être pas encore comment réagir pour faire face à ces changements qui, s'ils apportent du confort, génèrent aussi des inquiétudes. Ainsi elle exprime une certaine peur de perdre ses valeurs et ses savoirs traditionnels parce que la transmission culturelle, du fait des facteurs précédemment cités, ne se fait plus comme « avant». L'école et le développement économique à la fois souhaité et craint sont perçus comme des freins à la communication entre les personnes, qui formulent une grande distinction entre le mode de vie « traditionnel » et la vie « moderne », surtout parmi les générations les plus anciennes.

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