III - Le Renforcement des compétences
locales
Si la décentralisation a un souci économique,
doit-elle continuer de se passer financièrement du domaine agricole dans
le les Communes à vocation purement rurale ? Selon le maire de la
Commune de Mont-Rolland, le non transfert des compétences en
matières d'agriculture réduit leurs chances des mener en tout
indépendance des actions43 efficaces et durables sur ce
plan.
En effet, l'Etat à travers la reforme administrative de
1990, qui a abouti à un transfert de neufs domaines de
compétentes aux collectivités locales a maintenu une logique
interventionniste sur les politiques économiques et par évidence
sur la politique agricole. Ainsi au fil des années les opérations
de l'Etat ne sont presque jamais en phase avec les préoccupations des
paysans de Mont-Rolland et dans ce cadre les exemples sont multiples, allant du
bassin de rétention aux subventions en semence inadaptée. Ainsi
sous son propre contrôle, l'Etat doit pouvoir faire de l'agriculture une
compétence «partagée»44 voire
transférée. Cela permettrait aux autorités locales,
d'opérer des financements ciblés à la base, en s'inspirant
des réalités
43 Entretien avec YVES LAMINE CISS le maire, 2014
44 Pour une politique agricole concerté
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socioéconomiques locales, et du coup aider, par
exemple, les structures telles que les groupements féminines, les
«Morom»45 et autres associations dans la
réalisation de projets agricoles.
Ainsi à travers une démarche ciblée, la
Commune pourra doter les personnes ou organes locaux, biens
imprégnés dans le domaine agricole, de moyens financiers mais
aussi de superficies de production agricole qu'ils pourront être à
mesure d'exploiter de manière efficiente. Le slogan
«1 morom une petite ferme, un groupement
féminin une grande ferme » peut être réalisable
dans la mesure où la plupart des «morom»
et groupements à travers des cotisations parviennent à collecter
des sommes importantes qu'ils pourraient investir dans l'agriculture surtout si
les conditions préalables sont réunies. En effet, ces groupements
et «morom» malgré leurs énormes
ressources financières ne croient pas qu'un investissement agricole soit
aujourd'hui la meilleure solution, car en plus de la péjoration
climatique les difficultés qui sont parfois rencontrées par ceux
qui tentent l'expérience ne sont guère négligeables. Par
exemple, le Groupement des Femmes du village de Ndiaye Bopp (GFNB) dispose d'un
champ où il pratiquait une culture mixte : pluviale et maraichage,
à travers un système de «mbaye
seddo» ; autrement dit quelques employés sont
recrutés pour le travail sur la base d'un partage des
bénéfices entre les employés et le groupement. Selon la
présidente du groupement en plus de l'absence des pluies, la
cherté du tarif de l'eau demeure leur principal problème, car la
SDE (Sénégalaise Des Eaux) ne leur a pas établi un tarif
maraicher. Ce groupement qui compte au moins 300 femmes a eu à cultiver
le sorgo, le gombo et le concombre pendant la campagne agricole de 2012/2013. A
cause des difficultés rencontrées sur le plan agricole, les 4
millions de francs CFA qui étaient en caisse ont été
totalement redistribués aux dix sous-groupes du groupement en 2013 pour
que ces derniers trouvent indépendamment leur manière de
travailler et cela au bout de 8 mois. A la fin de ce délai un versement
sera effectué au profit du grand groupement. (Awa FAYE,
présidente GFNB, 2014)46
Aujourd'hui, chaque village possède en moyenne une
quinzaine de classes-d'âges (avec des effectifs parfois importante
dépassant 30 membres et cela en fonction des villages) ; et au moins un
grand groupement féminin par village, sur les 18 que compte la Commune.
Il y a alors plus de 18 groupements féminins et 270 classes d'âge
au moins. En effet, ces groupements et «morom»
ont des ressources financières et humaines sur lesquelles les
45 Association regroupant des individus qui ont
à peu prés le même âge et parfois de même sexe
le mot «Morom» fut utilisé en 1970 par
Charles Becker qui y relate le rôle important joué par les
«morom» dans la conversion aux religions
révélées (catholicisme et Islam) contribuant à
l'abandon massif des religions traditionalistes.
46 Entretien avec AWA FAYE , présidente du
Groupement féminin de Ndiaye Bopp
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autorités locales et publiques doivent pouvoir compter
pour relever le défi d'un «retour réussi vers la
terre». De même les groupements féminins et
associations peuvent représenter un potentiel énorme pour le
développement du maraichage.
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