La participation politique dans les bidonvilles. Les cas de Newton-aéroport et de New-bell Douala.( Télécharger le fichier original )par Raouto Crazzilli NANTCHA Université de Douala - MASTER II- DEA Sociologie 2015 |
1 .2.3. Travaux relatifs à la participation politique dans les bidonvillesUne mission menée par le service de lutte de Bruxelles sur la participation politique et le plan d'action nationale d'inclusion sociale, nous permet d'avoir une autre approche de la participation car leur population cible était les associations de pauvres. Selon leur compte rendu, les associations s'impliquent pour quatre raisons : - Pour de changements sociaux pouvant être favorables aux pauvres ; - Ces personnes en s'impliquant dans la vie sociale et politique retrouvent force et perspective de vie ; - Cela permet qu'il n'y ait pas un écart entre leurs besoins réels et les politiques élaborées ; - Elle permet une évaluation précise des politiques mises en application. Il en ressort donc que pour elle, la participation politique renvoie à toute forme de contact entre la population concernée, les autorités et les instances politiques. Ainsi, pour qu'il y ait participation, il faut que : - Les instances politiques considèrent la spécification des associations ; - Les associations disposent des moyens nécessaires ; - Un accord entre ceux qui prennent part : - De la disponibilité - Une formation de ceux qui prennent part ; - Il y ait une sensibilisation de la société ; - Il ait une approche selon les niveaux de pouvoir Gilles Seraphin26(*)(2000) en recherchant le rapport entre la population avec les différentes formes d'autorité et ses revendication politiques sociales et économiques, laisse entendre que pour les démunis, c'est subir la politique avec comme possibilité « supporter ». Même si ces derniers refusent également, ils s'expriment en ces termes ; « on va faire comment », « on supporte non ? » Raymonshudon27(*)(2008), poirier et S. Yates dans un article collectif relève que l'abstention aux élections et la réticence des individus à l'égard de la politique expriment que la participation politique ne se résume pas à la participation électorale3. Daniel Armah-Attoh28(*)(2006) dans ses études sur la participation politique au Ghana, s'appuie sur la définition que donne Jan Theorell (1903-1982) et AL à la participation politique (comme étant ce qui permet aux citoyens d'exprimer leurs doléances par le biais de nombreux moyens et de se faire entendre par ceux qui sont en position d'autorité) , et relève que les différents moyens par lesquels les citoyens s'impliquent sont : le vote, les lettres adressés aux élus, les campagnes en faveur d'un parti politique, la signature d'une pétition et la participation à une marche de protestation ; bref toute activité qui influence directement ou indirectement le processus de prise de décision. Achille Mbembe (1988), pour sa part a mené une réflexion sur le politique par temps de disette29(*), et relève que les obstacles à l'éclosion d'une citoyenneté individualiste qui est la base d'une culture démocratique sont : les préjugés ethniques, le faible niveau de scolarité et les contraintes politiques internes ou liées à l'environnement international. Il laisse également entendre que : « L'option dite « Démocratique » ne sera viable qu'après qu'ait été atteint et dépassé un certain seuil de revenus par tête d'habitants et un niveau de vie qui seuls, la rendent viable »30(*) Faute de quoi, selon lui les africains ne prioriseront que la satisfaction des exigences matérielles et alimentaires sur d'autres par conséquent, ce sont les attentes matérielles (l'attente du manger) qui orientent les représentations, nourrissent les rêves, déterminent les attitudes et les gestes, induisent les choix symboliques, et donnent lieu à la construction des idiomes politiques. 31(*) Soutenant sa thèse selon laquelle la participation ne renforce pas la démocratie, mais peut au contraire restreindre les champs de la représentation, il fait l'opposition entre la théorie des participationnistes et celle des élites. Il cite Mendes, participationniste qui affirme que : « La démocratie ne consiste pas à mettre périodiquement un bulletin de vote dans une urne, à déléguer les pouvoirs à un ou à plusieurs élus, puis à se désintéresser, s'abstenir, se taire, pendant cinq(5) ans, pendant sept(7) ans. Elle est action continuelle du citoyen, non seulement sur les affaires de l'État, mais sur celles de la région, de la commune [...] La démocratie n'est efficace que si elle existe partout et en tout temps. Le citoyen est un homme qui ne laisse pas à d'autres le soin de décider de son sort. Il n'y a pas de démocratie si le peuple n'est pas constitué de véritables citoyens, agissant constamment en tant que tel » et Michel Debré déclarant... Relativement à la participation dans la démocratie représentative, il souligne que : « ...si une société opte pour la démocratie représentative, elle ne peut pas étendre indéfiniment la participation de tous aux décisions elles-mêmes (aux autres décisions que celles de choisir ceux qui décident à la place des autres) sans affecter le mécanisme et l'importance des décideurs » Comme pour dire que la démocratie représentative et la démocratie participative sont complémentaires jusqu'à un certain niveau, au delà duquel il faudra privilégier soit le choix des décideurs ou le choix des décisions. Cet auteur est évoqué ici pour présenter la conception de la démocratie selon les participationnistes et les élites ; car c'est quelque peu cette situation qui se vit dans les bidonvilles, surtout la conception des élitistes. Cependant la critique qui peut être faite est que la démocratie qu'elle soit directe ou représentative s'enrichit de la participation des citoyens à la vie politique. UN-Habitat32(*) après certaines de ses études sur les bidonvilles souligne que même si les habitants des taudis ont le droit de vote, ils n'auront qu'une faible influence politique, si les taudis et les établissements dans lesquels ils vivent sont de petites tailles et dispersés. Selon eux, les taudis sont aussi l'expression de l'exclusion politique car une part toujours croissante de leur habitant pouvant atteindre 75% a moins de 25 ans et n'a pas que peu de voix au chapitre qui les concerne. Dans leur étude, elle a retenue quelques axes : le rôle de l'identité des castes et des partis politiques dans la participation politique des habitants des bidonvilles de Delhi. Dans le cadre de l'Afrique, en Avril 2006 au Kenya, elle s'est proposé d'examiner la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement en Afrique et les stratégies visant à satisfaire l'engagement pris au sujet des taudis. Il s'est manifesté une volonté politique accrue de faire face aux problèmes des taudis les organisations des partis politiques dans les bidonvilles ainsi que les formes et les moyens de la participation des habitants des bidonvilles, concernant leur accès au ressources urbaines, publiques et privées. Le travail implique de reconstituer les chaînes causales et de relier des acteurs politiques distants (par exemple une institution internationales et les habitants d'un bidonville) et de montrer en quoi leurs choix politiques sont responsables de l'exclusion d'autres qu'ils s'agissent des populations urbaines pauvres, des peuples indigènes, des femmes, des personnes. Comme critique, UN- Habitat est dans une approche macro car parlant ici des relations entre le gouvernement central et les taudis, ainsi qu'avec les institutions internationales, alors que s'agissant de cette participation politique dans ces taudis, il faut aussi intégrer une approche micro, car avec la décentralisation, le problème peut aussi venir des habitants de ces quartiers. Jérôme Lafargue33(*)(1996) dans ses travaux sur la sociologie de la protestation en Afrique relève que dans les bidonvilles, La conscience des intérêts communs est souvent brisée par l'autonomisation des stratégies individuelles et par la dépendance. Aussi, les pauvres n'agissent pas souvent de façon unie et cohérente, car leur pauvreté aux causes multiples entravent l'esprit de mobilisation. Grâce aux travaux du sociologue Louis Favreau, nous avons le cas d'un bidonville qui est devenu une municipalité avec la participation des habitants. Ce qui nous intéresse ici c'est comment est que villa el Salvador a amené ses habitants à participer. L'auteur fait ressortir ici que cela a été possible grâce aux membres d'un réseau des groupes de femmes et d'une structure administrative démocratique des associations de quartier, qui a des représentants dans chaque bloc d'habitations. Bref par une concertation pour définir ensemble les priorités de leur quartier, ils ont procédé par une approche de proximité fait par les jeunes du quartier. Compte tenu du fait que la signification que l'on accorde aux bidonvilles varie en fonction des pays, des zones ou des régions, et que la participation politique dépend des systèmes et des régimes politiques existants, l'analyse de ce phénomène sera fait dans le sens du fait socialtotal de Marcel Mauss (1968) qui le conçoit comme : « Les faits que nous avons étudiés sont tous, qu'on nous permette, des faits totaux ou, si l'on veut- mais nous aimons moins le mot- généraux : c'est-à-dire qu'ils mettent en branle dans certains cas la totalité de la société et des institutions et d'autres cas seulement un très grand nombre d'institutions, en particulier lorsque ces échanges et ces contrats concernent plutôt des individus »34(*) Nous adopterons cet angle de vue, afin de saisir comment la participation politique dans les bidonvilles se présente dans le contexte camerounais. A l'issue de ce chapitre, nous avons ressorti le paradoxe de ce sujet et recensé les travaux y relatifs. Dès lors, il est indispensable définir comment nous allons procéder pour appréhender ce phénomène. * 26Gilles Seraphin, Vivre à Douala, l'Imaginaire et l'Action dans une Ville Africaine en Crise, l'Harmattan, 2000, P 216-217 * 27R. Hudan, Christian. P, STEPHANIE. Y, Participation Politique, Expression de la Citoyenneté et Formes Organisées d'Engagement: la Contribution des Coalisions à un Renouvellement des Conceptions et de Pratiques, Politiques et Société, vol.27, no 3, 2008, p.170 * 28Daniel Akmar-Attoh, « Participation Politique et Perception Populaire de la Responsabilité au Ghana », ariticle, Mars 2006 * 29Achille Mbembe,Afriques Indociles, Christianisme, Pouvoir et Etat en Société Postcoloniale, Karthala, 1988 P153-177 * 30Mbembe(achille), op cit, p 156 * 31 Ibid. PP196-157 * 32www. CSH-DELHI.COM * 33Jérôme Lafargue, Contestations Démocratiques en Afrique : Sociologie de la Protestation au Kenya et en Zambie, Karthala, Paris, 1996 * 34 Mauss (marcel), Essai sur le Don : Formes et Raisons de l'Echange dans les Sociétés Archaïques, in Sociologie et Anthropologie, 4éd PUF, 1968 |
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