3.3. Limites et perspectives d'avenir
Nous avons tout au long de notre travail souligné
l'importance de dédollariser l'économie congolaise depuis 2003,
mais le constat est qu'aujourd'hui l'économie congolaise est fortement
dollarisée ; et cela malgré une bonne gestion des affaires
publiques depuis un moment.
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C'est ainsi que nous voulons analyser dans cette
dernière section les causes de la persistance de la dollarisation en
RDC, dollarisation qui était censée n'être qu'une mesure
d'urgence. Enfin, nous proposerons quelques recommandations et suggestions.
3.3.1. Causes de la persistance de la dollarisation en
RDC
Comme signalé un peu plus haut, le manque de confiance
en la monnaie nationale peut constituer un frein pour le processus de
dédollarisation, et une cause majeure de la persistance de la
dollarisation. Nous voulons à présent voir qu'est qui peut
être à la base de ce manque de confiance.
Effet d'hystérèse
Il y a hystérèse lorsque le comportement d'un
système découle non seulement de ses déterminants actuels
mais également de l'évolution passée du système.
Plus précisément, il y a hystérèse lorsqu'une
caractéristique qui a été modifié par un agent
extérieur ne retrouve pas son état initial, alors même que
la cause de la modification a disparu.
En observant les évolutions passées des
indicateurs macroéconomiques de l'économie congolaise, nous
sommes arrivés à la conclusion que les causes principales ou
directes du phénomène de la dollarisation furent les
instabilités monétaires et économiques
caractérisées par l'hyperinflation. L'instrumentalisation
même de la dollarisation trouve à la fois son origine et son but
dans l'hyperinflation, ainsi que dans la lutte contre cette dernière.
Cependant, au regard de l'évolution de
l'économie durant la période 2001-2017 où
l'économie congolaise connait une stabilité relative du cadre
macroéconomique, il s'observe à l'opposée la persistance
de la dollarisation. Cette situation paradoxale explique l'effet
d'hystérèse de la dollarisation dans l'économie
congolaise.
La persistance de la dollarisation dans une économie
résulte des plusieurs facteurs (inflation forte et variable,
instabilité institutionnelle, fragilité de l'économie face
aux chocs ou vibrations de l'activité économique internationale,
etc.), mais le rôle joué par les agents économiques dans le
choix de détention des actifs monétaires détermine en
grande partie l'ampleur de ce phénomène. La formulation des choix
des agents privés se fonde sur les informations des évolutions
passées de l'économie.
Dans une économie où les évolutions des
indicateurs économiques restent stables dans le temps, les
autorités publiques arrivent à ancrer leurs comportements dans la
mise en place des politiques économiques.
Par contre, si l'économie évolue dans une longue
période d'instabilité, les agents économiques n'arrivent
pas dans l'immédiat ou dans un futur proche à retrouver la
confiance aux actions menées par les autorités même si ces
derniers arrivent à renouer la stabilité du cadre
macroéconomique.
KABUYA KALALA et MATATA PONYO, dans leur ouvrage « Espace
Monétaire Kasaïen : Crise de légitimité et de
souveraineté en période d'hyperinflation au Congo (1993 - 1997)
» en expliquant la mémoire inflationniste sélective du
public de l'espace monétaire Kasaïen, pensent qu'au fil des
années, les agents économiques préviennent la
dégradation du pouvoir d'achat en essayant d'anticiper au mieux le taux
d'inflation après une longue période d'inflation forte.
La persistance de la dollarisation s'explique nous donc par le
fait de l'intériorisation des évolutions défavorables
passées de l'économie congolaise et c'est malgré une
certaine stabilité retrouvée.
Fragilité de la stabilité
Une autre raison de cette persistance se trouve dans les
périodes de courtes instabilités qui signalent de la
fragilité même de cette stabilité.
Entre 2007 et 2010 en passant par deux années
d'instabilité, le taux d'inflation n'a varié que de 0,10% de 2007
à 2010 en faisant abstraction de ces deux années
intermédiaires, il passe de 9,90% à 9,80%. Cependant, il
s'observe que les mesures menées par la Banque central du Congo pour
combattre l'inflation résultant de la crise mondiale de 2008 et 2009
avec des taux d'inflation respectifs de 27,60% et 53,40% ont été
efficace pour ramener le taux d'inflation à son niveau initial de 2007
en 2009.
Mais durant ces années de courte instabilité
monétaire, le taux de dollarisation a connu une augmentation plus que
proportionnelle au taux d'inflation. En analysant que l'année 2007 par
rapport à 2010, le taux de dollarisation a varié de 10,87%
passant de 51,37 % en 2007 pour se situer à 62,24% en 2010. Ces
années marquées par des chocs externes à l'économie
ont contribué à la consolidation des incertitudes de la
stabilisation macroéconomique renouée
La capacité de production augmentera à la suite
d'un cadre propice des affaires, une règlementation adéquate
entre les investisseurs et l'économie, ...
depuis 2002. Ainsi, les agents privés vont continuer
à préserver une grande partie de leurs actifs en monnaie
étrangère.
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