CHAPITRE V : DISCUSSION
Le paludisme grave forme anémique vient en
première position devant toutes les autres formes de gravité du
paludisme [30-32].
Selon Tchokoteu [33], la survenue plus fréquente de
l'anémie grave au cours du paludisme parmi les enfants âgés
de moins de 5 ans serait en rapport avec le faible niveau d'immunisation des
sujets de cette tranche d'âge et l'association d'autres affections
anémiantes telles que la malnutrition, les parasitoses intestinales et
les hémoglobinopathies.
Commune de résidence
Malgré que toutes les communes soient touchées
par cette maladie, nous constatons que la commune Annexe vient en tête
avec 33,8% des cas (44/130) suivie des communes Kampemba et Lubumbashi avec
respectivement 25,4% et 23,8%. Cette fréquence élevée
pourrait s'expliquer par sa forte densité de la population et au fait
que cette commune possède des centres de santé de
référence qui a une moindre capacité d'accueil poussant
ainsi les malades à venir se faire soigner dans notre milieu de
travail.
Mois d'hospitalisation
Bien que l'accès palustre soit présent au
courant de toute l'année dans notre milieu, nous remarquons que, dans
notre série, des prévalences élevées ont
été enregistré du mois de décembre jusqu'au mois de
mai. Cette période correspond à la saison des pluies. Cette
observation a été faite par plusieurs auteurs dans d'autres
milieux d'Afrique où sévit le paludisme [30].
Age
L'âge moyen de nos patients est de 25,9#177;17,9 mois.
Le plus jeune avait 2 mois et le plus âgé avait 59 mois. Notre
moyenne est comparable à celles trouvées par Fendel [34] au Gabon
en 2010, Dzeing-Ella [31] et Kouam-Kouam [35] qui notent des moyennes
respectives de 27 mois, 25,5 mois (#177;19,2) et 23,1 mois (#177;13,5). En
2002, dans son étude menée au Nord du Ghana, Mockenhaupt [36]
avait noté une moyenne d'âge de 21 mois.
Par contre, d'autres auteurs ont noté des moyennes
inférieures à la nôtre tel est cas de Soulama [37] et de
Malamba [38] qui rapportent respectivement des moyennes de 15,6 mois
(#177;10,8) et de 14,4 mois.
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Dans notre série, 46,9% des enfants avaient un
âge est inférieur ou égal à 2 ans. Nos
résultats sont comparables à ceux de Bassat [39] et de
Dzeing-Ella [31] qui ont noté des taux respectifs de 58,1% et 68%.
Bouyou-Akotet [40], dans son étude
réalisée en 2009 à Libreville (Gabon), affirme que le
risque de développer une anémie au cours d'un paludisme grave est
significativement plus élevé chez les enfants dont l'âge
est inférieur ou égal à 2 ans. En 2008 à Kilifi
(Kenya), Kai [41] avait un constat identique et confirme que la moyenne
d'âge des enfants qui présentent un paludisme grave forme
anémique se situe entre 12 et 36 mois.
Sexe
Nous avons observé une nette prédominance du
sexe féminin avec 57,7% des cas. Le sexe ratio est de 1,36. Nos
résultats contredisent ceux de plusieurs auteurs ont aussi trouvé
un sexe ratio en faveur des garçons : une étude menée en
1998 à Antananarivo (Madagascar) par Raobijaona [42] relève un
sexe ratio de 1,4. Chiabi [43] à Yaoundé (Cameroun) en 2004, Asse
[44.] et Gebre [45] ont eu 1,2. Malamba en 2007 à Kampala (Ouganda) [38]
ont trouvé 1,1. Enfin, Kouam-Kouam [35], Dzieng-Ella [31] et Tchoukoteu
[33] enregistrent une légère prédominance masculine avec
un sexe ratio de 1,05.
Letoutourier, cité par Mutombo [30], pense que la
concentration sérique des Ig M plus élevée chez la femme
que chez l'homme donne à penser qu'une relation existerait entre le taux
des Ig M d'un sujet et le nombre de chromosome X, ce qui permettrait à
la fille (ou femme) de mieux résister à l'agression
paludéenne que son homologue masculin ou tout au moins d'atténuer
chez la fille (ou femme) la sévérité de la maladie ; car
au cours de l'infestation de l'organisme par le Plasmodium falciparum,
celle-ci stimule les lymphocytes B et il s'ensuit l'apparition des Ig M d'abord
et puis des Ig G tributaires de l'immunité humorale.
Clinique
Dans notre série, plus de 4/5 de nos patients
étaient pâles, tachypnéiques et asthéniques. La
splénomégalie était présente dans 73% des cas
à l'admission. La constatation significative dans notre série de
la splénomégalie chez nos patients témoigne du
caractère hémolytique d'origine paludéenne de ce trouble
en l'absence d'une hémoglobinopathie, d'un trouble nutritionnel ou d'une
autre cause chez nos malades. Dans la série de Gebre [32], la
splénomégalie a été notée chez 50,4% des cas
alors que dans celle de Tchoukoteu [33] elle a été notée
dans 86% des cas.
En ce qui concerne la fièvre, Kouam-Kouam [35] note
96,6% de patients fébriles et Bassat [39] lui trouve 69,1%. Notre faible
taux (70%) de patients fébriles pourrait s'expliquer par le fait que
près de la moitié de cas (49,2%) avait pris un
antipyrétique avant de venir en consultation.
Traitement avant
Notre étude rapporte que 37% des patients ont
reçu un antipaludéen (quinine, dérivées
d'arthémisinine, chloroquine) avant d'être admis à
l'hôpital. Pour Tchokouteu [33], ce taux est de 27% des cas. Nos chiffres
sont inférieurs à ceux trouvés par Kouam-Kouam [35] qui
rapporte 79,7%.
Le manque d'amendement après cette administration du
médicament est plus en rapport avec un sous-dosage des antipaludiques
administrés souvent par des personnes peu informées sur le plan
médical comme nous le constatons dans notre milieu.
Traitement pendant l'hospitalisation
Presque quatre patients sur cinq de nos patients (79,2%)
était soumis sous un traitement fait de la quinine. Le paludisme grave
à Plasmodium falciparum est une des grandes urgences
thérapeutiques tropicales surtout chez l'enfant, du fait de la
rapidité d'évolution. Parmi les produits schizonticides
érythrocytaires indiqués dans le traitement des accès
graves, la quinine reste le produit de référence. Dans le
paludisme grave de l'enfant, la quinine intraveineuse reste le traitement de
choix en France. Le volume apparent de distribution de la quinine est
inférieur chez l'enfant à celui de l'adulte, mais son
élimination est plus rapide de sorte que, aux posologies usuelles, la
clairance systémique et les concentrations plasmatiques sont comparables
chez l'enfant et chez l'adulte [46]. En l'absence d'étude
pharmacocinétique chez le nouveau-né, le traitement repose sur la
quinine aux mêmes posologies que chez l'enfant plus âgé. Le
relais par voie orale est effectué selon l'état du patient par la
quinine à la même posologie, ou bien par les dérivés
d'Arthémisinine [47].
Evolution
L'anémie grave a provoqué le décès
de 17,7% des patients de notre série. Nos résultats sont
superposables à ceux de Sanou [48] qui rapporte 12,5% de
décès. Raobijaona [42] trouvent dans sa série un taux de
létalité proche au nôtre qui est 14,5%. Par contre,
d'autres
auteurs rapportent des taux inférieurs au nôtre :
4,4% pour Bassat [39], 8,9% pour Dzeing-Ella [31] et 9% pour Malamba [38].
Selon l'Organisation Mondiale de la Santé,
l'anémie grave est la forme de gravité la plus fréquente
et responsable de la majorité des décès chez l'enfant
[47].
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