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à‰tat des lieux de l'oeuvre des ONG internationales dans la région centre du Cameroun de 1960 à  2010.

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par Judith Tsafack
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Master 2013
  

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Paragraphe B) Les limites imputables aux acteurs locaux

Les limites à une action efficace des OING ne sont pas le seul apanage de ces dernières, d'autres acteurs contribuent à cette situation notamment l'Etat75, les partenaires d'exécution (organisations locales et autres prestataires) et les populations locales.

? L'Etat

Dans leurs missions, les OING présentes au Cameroun accompagnent l'Etat afin d'améliorer les conditions de vie des populations dans des domaines d'intérêt général prédéfinis par ce dernier76. Cet appui ne saurait donc se faire sans les institutions chargées des questions relatives à leurs différents domaines d'intervention. Ainsi, les ONG établissent soit des relations formelles matérialisées par des protocoles d'accord dans le cadre de la mise en oeuvre d'une action ponctuelle, soit dans la réalisation d'une série d'actions ou tout simplement des relations informelles qui permettent à l'OING et au partenaire étatique de travailler ensemble sur des questions précises. Toutefois, certains facteurs internes à l'Etat empêchent ce dernier de faciliter l'appui attendu de ses partenaires que sont les organisations non gouvernementales internationales.

75 Départements ministériels et services déconcentrés de l'Etat

76 Conformément à la loi de 1990 sur la liberté d'association.

i. 90

La mauvaise gouvernance

Les partenariats OING-Etat sont très accentués et aboutissent quelque fois soit au financement par les OING de certaines activités engagées par les départements ministériels et/ou leurs services déconcentrés. Seulement, ces financements n'échappent pas toujours à une gestion opaque, à la corruption et aux détournements. Les fonds alloués à certains partenaires institutionnels à titre de financement d'une activité précise sont parfois consacrés partiellement à l'activité en question, et quelque fois, détournés de la localité initiale pour être investis dans des zones non prioritaire. Cette mauvaise pratique peut créer chez ces OING un certain découragement et conduire quelque fois à la fin du partenariat avec certaines institutions. Il est clair que cette mauvaise gouvernance représente un obstacle à l'atteinte des différents objectifs de développement que se sont fixés, aussi bien les Nations Unies à l'échéance 2015 (OMD) que ceux formulés par le Chef de l'Etat pour un Cameroun émergent à l'horizon 2035, et qui, sont désormais des cadres de référence toute action de développement au Cameroun.

ii. La lenteur dans l'octroi de l'agrément

La loi N° 90/053 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association au Cameroun en son article 16, alinéa 1, stipule que « les associations étrangères ne peuvent exercer aucune activité sur le territoire sans autorisation préalable du Ministre chargé de l'Administration territoriale après avis conforme du Ministre chargé des Relations Extérieures ».

Si elle est précise quant à l'autorisation préalable du MINADT, une certaine ambigüité demeure en ce qui concerne le délai de traitement de la demande d'agrément. Dans la pratique, l'on se rend compte que les OING qui sollicitent une autorisation du gouvernement peuvent attendre plusieurs années avant de l'obtenir. Situation embarrassante, qui pousse certaines organisations, soit à exercer sous le couvert d'autres, soit de façon illégale et ce, pas forcément pour s'opposer aux dispositions légales, encore moins du fait de certaines intentions inavouées, mais plutôt parce qu'elles pensent qu'à travers quelques réalisations, le gouvernement disposera des faits pour mieux analyser leur requête. Cette stratégie ne conduit pas toujours aux résultats escomptés.

Si une OING est informée du temps nécessaire pour le traitement de sa demande d'autorisation, nous pensons qu'elle s'y prendra à temps et n'engagera pas d'activités au Cameroun avant la décision du gouvernement. Dans la longue attente, certaines associations sont amenées à débourser des sommes considérables (destinés aux pauvres) pour garantir le

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suivi des dossiers. Sans reprocher à l'Etat son attribut de souveraineté (enquête de moralité), nous ne saurons ne pas considérer cette lenteur comme une limite à l'action des OING installées au Cameroun en général.

Bien plus, le décret N° 2005/104 du 13 avril 2005 portant organisation du MINATD précise que le contrôle de l'application de la législation et de la réglementation sur les ONG, ainsi que l'instruction des dossiers de demande d'agrément au statut d'ONG sont des questions dont se charge le Service des ONG, appartenant à la sous-direction des libertés publiques, cette dernière dépendant de la direction des affaires politiques (Article 27, alinéa 1). Ainsi, si seul un Service du MINATD est chargé des questions relatives aux ONG locales et ONG internationales, ceci justifierait à suffisance cette lenteur, étant donné l'ampleur des sollicitations de demandes d'agrément de la part des ONG locales et des organisations internationales non gouvernementales au Cameroun.

iii. Le détournement des projets à des fins politiques

Les actions mises en oeuvre par les OING au Cameroun le sont principalement sous forme de projet, qu'elles soient de durée courte, moyenne ou longue. Certains de ces projets doivent être validés par des autorités compétentes dans le domaine concerné qui en abusent quelquefois. C'est le cas par exemple, de la réorientation à des fins stratégiques d'un projet vers des localités qui leurs sont favorables ; l'insertion « exigée » de leurs proches dans le personnel du projet, les manoeuvres de corruption, et lorsque ces démarches démagogiques ne trouvent pas écho favorable auprès des OING, certains projets se meurent dans des bureaux. Si l'Etat en tant qu'acteur local est aussi responsable de l'inefficacité de l'action des OING au Cameroun, qu'en est-il des organisations et entreprises locales ?

? Les organisations et entreprises locales

Les actions des OING sont généralement menées avec divers partenaires parmi lesquels les organisations et entreprises locales. Divers contrats sont ainsi signés par ces entités pour la mise en oeuvre des projets précis dont la réalisation pose quelquefois problème notamment en matière de professionnalisme et de gouvernance.

i. Le manque de professionnalisme

Bien qu'il existe au Cameroun une expertise assez variée, il faut cependant noter que le personnel de certaines associations locales, surtout celui des communautés rurales ne

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dispose pas toujours des compétences nécessaires pour une réussite optimale de leurs activités, en grande partie financées par des OING. En effet, elles constituent très souvent les partenaires les plus indiqués pour la réalisation des projets de développement local, car elles maîtrisent mieux les réalités inhérentes à leur contexte. Toutefois, ces associations ne se forment pas toujours sur la base des critères de compétence, mais plutôt selon une logique d'affinité. C'est pourquoi, au moment de la mise en oeuvre du projet, il est récurrent de se retrouver face à des nombreuses difficultés liées pour la plupart à l'incompétence du personnel.

ii. La mauvaise gouvernance

Partant des organisations locales en passant par les entreprises, les problèmes de gouvernance demeurent des questions de fonds au Cameroun, notamment dans la gestion des budgets, la facturation des honoraires, les rapports qui ne reflètent pas les réalisations effectives sur le terrain.

On garde en mémoire ce cas où une entreprise sélectionnée pour la réhabilitation des salles de classe dans certaines écoles de la République dans le cadre d'un projet d'appui au système éducatif, a explicitement facturé un nombre de salles réhabilitées supérieur à celui effectivement rénové. Son rapport a été validé par l'ingénieur de suivi, pourtant employé et payé par l'OING maître d'ouvrage. Cet exemple montre à quel point les alliances sont montées de part et d'autre pour spolier les ressources financières des projets et parfois avec la complicité du personnel même de l'OING. Certains prestataires n'hésitent d'ailleurs pas à transférer dans leurs comptes privés des ressources destinées à la réalisation du projet !

Si l'efficacité de l'oeuvre des ONG se heurte aux difficultés qui émanent pour certains des organisations et prestataires locaux, qu'en est-il des populations locales qui bénéficient en effet de ces actions ?

? Les populations locales

Les limites à l'action des OING dans la région du Centre sont le fait d'un ensemble de facteurs imputables à tous les acteurs impliqués dans le processus, y compris les populations locales.

i. 93

La tragédie des Communaux

Le concept de « tragédie des Communaux »77 fût développé par Garrett HARDIN en 1968 dans le domaine de l'agriculture. Il a imaginé un pâturage ouvert à tous où l'on devrait s'attendre à ce que chaque éleveur essaie d'y mettre autant de bétail que possible, puisqu'il s'agit d'un terrain commun. Le pâturage n'étant pas une ressource illimitée, arrive le jour où il commence à s'épuiser. En tant qu'être rationnel, chaque éleveur cherche à y ajouter une bête de plus afin de maximiser son gain avant l'épuisement total de la réserve. Chaque homme est enfermé dans un système qui le contraint à augmenter son troupeau sans limite (dans un monde limité). La ruine est la destination vers laquelle tous les hommes se ruent, chacun à la poursuite de son propre meilleur intérêt dans une société qui croit en la liberté des communaux. La liberté dans les communaux apporte la ruine à tous. Il ajoute, une bête, et encore une et ils font tous la même chose jusqu'à ce que le pâturage s'épuise totalement et est abandonné par tous. Nous sommes ici dans une situation où le bien est commun, bien de tous et donc propriété de personne.

Ce concept de tragédie des communaux, utilisé dans le domaine de l'agriculture est transposable à celui des projets de développement et explique suffisamment l'échec en termes de durabilité, des projets de développement qui sont rétrocédés aux populations et qui nécessitent un entretien par celles-ci. Lorsqu'une OING arrive dans une localité faisant face à un problème d'approvisionnement en eau potable par exemple, elle y construit des puits ou des forages et prévient ainsi les populations des maladies hydriques. Lorsque le forage est opérationnel, toute la population est enthousiaste et à priori, elle pense à l'utiliser aussi longtemps que possible. Elle en bénéficie jusqu'au jour où survient une déficience dans le forage. Au lieu de penser à la réparation, chaque membre de la communauté reste en rejette la responsabilité à ses congénères. Bien plus, chacun cherche à remplir tous ses récipients avant que le forage ne soit totalement abimé. C'est malheureusement la triste réalité des projets de développement infrastructurels. Ils n'ont qu'une courte durée de vie à cause de leur caractère « de bien commun » à tous.

ii. La méfiance

La majorité des projets de développement ont lieu en zone rurale. En effet, c'est principalement dans les zones enclavées et éloignées des centres urbains que subsistent encore d'énormes besoins, et parfois dans tous les secteurs. Certaines populations des communautés

77 Pour plus d'informations, voir article sur la tragédie des communaux, Garett HARDIN, publié dans Science, 1968.

reculées adhèrent peu à certains projets, surtout lorsque le but visé est le changement de comportements ou des habitudes des membres d'une société. Elles ne sont pas toujours réceptives, ce qui rend la tâche difficile à l'organisation. Les méfaits de la colonisation et les représentations sociales du « blanc » qui en découlent ne sont pas sans effets sur certaines populations qui préfèrent émettre des réserves quant au désintéressement de l'action des OING, principalement d'origine occidentale.

iii. Les mauvaises pratiques

L'analyse du contexte et la prise en compte des particularités locales constituent un point important dans la conception d'un projet de développement. L'on ne saurait, même pour une action de bienfaisance, débarquer dans une communauté pour la mise en oeuvre d'un quelconque projet sans au préalable chercher à comprendre la culture de ce peuple. La culture est en effet constituée d'un ensemble d'éléments qui permettent aux membres d'une société donnée de trouver des solutions à leurs besoins. Selon Bronislaw Malinowski (1944), « les éléments constitutifs d'une culture auraient pour fonction de satisfaire les besoins essentiels de l'homme [...]. Par voie de conséquence, la culture constitue l'ensemble des réponses fonctionnelles à tous ces besoins, la culture désigne un ensemble de solutions »78.

A priori, l'on ne saurait reprocher à un peuple de faire usage de ses us et coutumes pour subvenir aux multiples besoins qui sont siens. Seulement, il s'avère que certaines pratiques culturelles ne contribuent pas nécessairement au bien-être des membres de la communauté (dépôt des déchets organiques humains dans l'atmosphère, braconnage, discrimination à l'endroit des minorités telles que les albinos...).

Cette première section nous a permis d'examiner en profondeur les limites aussi bien internes qu'externes aux OING et, aussi convient-il de formuler des recommandations en vue d'une intervention plus efficace et efficiente desdites organisations.

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78 MBONJI EDJENGUELE, Cultures et développement, Master «Coopération internationale, Action humanitaire et Développement Durable», IRIC, 2011, P6.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore