CONCLUSION
En définitive, l'émergence des OING dans la
région Centre du Cameroun s'inscrit dans une longue dynamique
amorcée au niveau international. Celle-ci prend appui sur la
solidarité humaine peu organisée au départ, mais qui a
connu au fil du temps une évolution singulière
caractérisée par le passage d'une conception traditionnelle
à une formulation beaucoup plus structurée. Le principal fil
conducteur de cette modélisation au plan international a
été la notion de solidarité internationale,
véritable prise de conscience par les Etats développés de
la nécessité de venir en aide aux populations les plus
vulnérables se trouvant parfois à l'autre bout de la
planète. Le contexte particulier du Cameroun, notamment les besoins
insatisfaits de ses populations au sortir du processus de décolonisation
et l'échec des politiques de développement inadaptées qui
ont fortement détérioré son tissu socio-économique,
ont conduit à l'intervention des OING dans le but d'améliorer les
conditions de vie des populations locales.
34WAYA Jean Hermann, Analyse de la gestion
environnementale du projet Pipeline Tchad-Cameroun dans la localité de
Bélabo, monographie de DCJA en Sciences et Techniques d'Animation,
I.N.J.S. de Yaoundé, 2010, p.22.
![](tat-des-lieux-de-l-oeuvre-des-ONG-internationales-dans-la-region-centre-du-Cameroun-de-1960--2018.png)
CHAPITRE II : LES FONDEMENTS JURIDIQUES ET POLITIQUES
DE L'ACTION DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES NON GOUVERNEMENTALES DANS
LA REGION DU CENTRE
28
INTRODUCTION
Organisation dont le siège est situé à
l'extérieur du pays hôte, l'organisation non gouvernementale
internationale encore appelée « association étrangère
» dans la loi N°99/014 du 22 décembre 1999 portant
organisation des ONG au Cameroun, accompagne l'Etat dans la conception et la
mise en oeuvre des politiques de développement conformément aux
dispositions légales.
Ce chapitre traitera spécifiquement de deux points
essentiels : Les sources juridiques reconnaissant le statut des ONG
internationales et régulant leur action au Cameroun (I) et les principes
stratégiques sur lesquels repose le déploiement de ces nouveaux
acteurs internationaux sur le territoire camerounais (II).
Section I) Les sources juridiques des l'action des
organisations internationales non gouvernementales au Cameroun
Nous évoquerons ici les textes ou principes
généraux du droit qui président à la reconnaissance
du statut et l'activité de l'ONG internationale en édictant les
règles de Droit International (DI) et interne reconnaissant sa
personnalité juridique en tant que acteur non étatique,
garantissant leur exercice de la liberté d'association, et partant
légitimant leur déploiement au Cameroun. Très souvent, le
droit se heurte à la définition de cette entité, qui
côtoie les termes d'association, association étrangère,
organisation de solidarité internationale. Loin de constituer un concept
aisément identifiable et maîtrisable dans le temps et l'espace,
la
29
notion d' « ONG internationale » semble se conjuguer
au pluriel, et évoluer dans un contexte de réglementation
précis pour le cas du Cameroun. Aussi, leurs cadres juridique (A) et
institutionnel (B) seront évoqués dans cette section.
Paragraphe A) Le cadre juridique de l'émergence des
organisations internationales non gouvernementales au Cameroun
Les OING étant des acteurs transnationaux, le droit
interne n'est plus le seul apte à reconnaitre leur statut juridique ou
à réguler leur action. La diversité des sources juridiques
se justifie aisément, tout en favorisant un enchevêtrement de
droits nationaux (1), communautaires et internationaux (2).
1) Sur le Plan international
? La Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme (DUDH)
La DUDH proclamée le 10 décembre
194835, est le premier instrument juridique de portée
universelle proclamant les droits de l'Homme opposables à tous et
partout. Son but principal étant le respect de la personne humaine
à travers « le respect universel des droits de l'homme et des
libertés fondamentales. »(Préambule). L'article 20 de
ladite déclaration stipule que « ...toute personne a droit
à la liberté de réunion et d'association pacifique. Nul ne
peut être obligé de faire partie d'une association ».
Même si elle n'a pas force obligatoire, la DUDH reste un fondement
juridique des libertés en général et de la liberté
d'association en particulier. Elle demeure une source d'inspiration pour le
législateur dans l'ordre interne tout en ayant une force juridique
légèrement plus grande que certaines recommandations. La
Constitution camerounaise y fait cas au niveau de son préambule,
acquérant ainsi force de loi au plan interne.
Des textes internationaux ultérieurs ont
également reconnu la liberté d'association.
? Les autres instruments internationaux relatifs à
la liberté d'association.
35 Assemblée générale de l'ONU,
New York, résolution 271A (III).
i) 30
Le pacte international relatif aux droits civils et
politiques
La DUDH n'étant qu'une déclaration de principe,
deux pactes internationaux ont été adoptés le 16
décembre 1966 pour rendre son contenu plus contraignant. L'un est
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l'autre aux
droits civils et politiques. Ce dernier, objet du présent
développement est entré en vigueur le 23 mars 1976. L'Etat
camerounais l'a ratifié le 27 juin 1984. Contrairement à la DUDH,
ces deux pactes sont de véritables traités soumis à la
ratification en liant les Etats parties. Le pacte relatif aux droits civils et
politiques en son article 22, alinéa 1 reconnaît la liberté
d'association avant de préciser à l'alinéa 2 que ce droit
ne peut faire l'objet de restriction que dans les cas prévus par la
loi.
ii) La Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples de 1981
Le Cameroun s'est aussi engagé à
l'échelle africaine à garantir la liberté d'association
à travers la souscription à la Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples (ratifiée en 1989) qui la consacre en son article
10.
iii) La Convention européenne (no
124) de 1986 sur la reconnaissance de la
personnalité juridique des organisations
internationales non gouvernementales.
Signée à Strasbourg le 24 avril, elle souligne
en son article 2 que : «la personnalité et la capacité
juridiques d'une ONG telles qu'elles sont acquises dans la Partie dans laquelle
elle a son siège statutaire sont reconnues de plein droit dans les
autres Parties».
Les conditions requises pour les ONG sont les suivantes: avoir
un but non lucratif d'utilité internationale; avoir été
constituée par un acte relevant du droit interne d'un Etat contractant ;
exercer des activités effectives dans au moins deux Etats; son
siège statutaire dans un Etat contractant et son siège
réel dans cet Etat ou dans un autre Etat contractant.
Entrée en vigueur le 1er janvier 1991, son
principe général veut que le droit qui régit la
personnalité et la capacité juridique des ONG soit le droit de
l'Etat où se trouve le siège indiqué par l'acte
constitutif de l'ONG. Ce qui implique, selon certains, que « l'ONG
aura dans tous les Etats contractants les mêmes capacités et la
même personnalité juridiques que celles obtenues dans l'Etat
où se trouve son siège » (COURSIN, 1995).
Pour mieux cerner la légitimité de l'oeuvre des
OING au Cameroun, des instruments internationaux en rapport au contexte
national sont à quérir.
31
iv) Régime d'association et Conventions de
Yaoundé
Un "Régime d'Association" a vu le jour en 1957. Il a
été doté des ressources du premier Fond Européen de
Développement (FED). En 1963 et en 1969 furent signées par 18
Etats d'Afrique et les six de l'Europe, les 1ère et
2ème Conventions de Yaoundé, accords principalement
orientés vers la coopération financière, technique et
commerciale, essentiellement dans les secteurs des infrastructures
économiques et sociales. Il s'agit là d'accords de
coopération gouvernementale qui ne font pas mention de la collaboration
avec les ONG, tout comme les Conventions de Lomé qui expirent en 2000,
laissant la place à une nouvelle forme de partenariat consacrée
par l'Accord de Cotonou.
v) L'Accord de Cotonou
Malgré les succès de plusieurs décennies
de coopération, il fallait reconnaître que le partenariat ACP-UE
pouvait être plus efficace et devait s'adapter à une situation
géostratégique modifiée par la fin de la guerre froide.
L'Accord de Cotonou consacre la participation d'acteurs non étatiques au
processus de développement. Afin que l'action des OING puisse se
dérouler dans de bonnes conditions, il faut avant tout que le cadre
légal du pays hôte leur soit favorable, d'où l'abord du
cadre juridique dans lequel exercent ces organisations au Cameroun.
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