Détermination de la part de l'activité informelle dans la commercialisation des produits pétroliers en RDC : cas de la ville de Kinshasapar Jean-Pierre YAKUBU Université de Kinshasa - Licence en Pétrole et Gaz 2016 |
· Reconnaitre l'existence de la commercialisation informelle des produits pétroliersCertains responsables politiques affirment qu'ils n'ont pas de politiques vis-à-vis de l'informel faute de connaissances précises sur ces acteurs. La non-reconnaissance de ce secteur est aussi un moyen pour l'Etat d'esquiver le problème. La reconnaissance de ce secteur est donc un préalable à la mise en place de politiques publiques. · Adopter une approche pragmatiqueLa formalisation de l'informel fait souvent partie des recommandations pour ce secteur. Or, formaliser l'informel sera difficile. Formaliser tout le monde est une « vision totalement illusoire à court et à moyens terme ». J.C. VEREZ,encourage la formalisation autant que possible mais n'adopte pas de position normative face à ce secteur. « Quels que soient les défauts en termes de développement économique ou d'augmentation de l'assiette fiscale dans le pays, nous devons appuyer ce secteur pour qu'ils continuent d'apporter, dans des conditions optimales, de l'emploi et de la valeur ajouté aux micro-entreprises informelles dans la commercialisation des produits pétroliers ». De plus, étant donné qu'il y a plusieurs niveaux d'informalité, il y a différents besoins en régulation.25(*) · Favoriser la simplification administrative et la transparenceL'Etat doit réfléchir à mettre en place des cadres réglementaires adaptés à la réalité économique, tels qu'une fiscalité progressive ou des procédures d'enregistrement simplifiées. Mieux les faire connaitre la loi est capital et ils comprendront la cause de la formalisation. · Se doter d'une réelle capacité de mise en application des règlesSi l'Etat souhaite lutter contre la commercialisation informelle des produits pétroliers à Kinshasa, il faut alors qu'il se dote d'une réelle capacité de mise en application des règles. Les régies financières, notamment la douane et les impôts, ont peu de capacité d'intervention et collaborent très peu, alors qu'elles sont confrontés à des acteurs aux connections politiques fortes et qui ont la capacité de contourner les règles. · Favoriser « de travailler ensemble » entre le public et le privé« En impliquant le privé, cela pourrait encourager certaines entreprises à participer au système, si elles voient que ce système peut leur servir ». III.3.2. Enjeux et perspective d'avenir dans la lutte contre le marché informel dans la commercialisation des produits pétroliers à KinshasaLa lutte contre la commercialisation informelle des produits pétroliers devrait se traduire entre autres par : la mise au chômage de près de 100000 acteurs, une baisse des importations informelles, et une hausse du prix desdits produits sur le marché informel. A très court terme, ces prix peuvent être largement supérieurs aux prix fixé par le ministre de l'économie nationale dans les stations-services. Mais, à moyen terme, ils se rapprochent aux prix officiels ; et à long terme, les acteurs de la commercialisation informelle peuvent se formaliser pour garder la confiance de leurs consommateurs. Nous constaterons ensuite une hausse des importations formelles des produits pétroliers pour faire face à la nouvelle demande très élevée induite par la lutte. En retour, les recettes fiscales connaitront une amélioration, cependant, cette hausse des recettes fiscales pourrait être atténuée par les éventuelles mesures du gouvernement face à l'inflation ; la hausse des prix des produits pétroliers devrait se répercuter sur le coût de production des autres secteurs, entraînant ainsi une hausse généralisée des prix. Cette accélération de l'inflation aura des conséquences sur la demande locale, compétitivité des exportations, les recettes fiscales et les dépenses publiques. Nous devons savoir que cette lutte contre la commercialisation des produits pétroliers peut être interpréter comme une suppression de subvention par les consommateurs. Selon la théorie keynésienne, la variable fondamentale qui dynamise l'activité économique est la demande agrégée ; or la demande agrégée = consommation des ménages + investissement + dépenses des administrations publiques + solde commercial. Cette théorie affirme que l'intervention active des gouvernements dans l'économie et la politique monétaire sont les meilleurs moyens d'assurer la croissance économique ; elle soutient qu'une économie peut connaitre un chômage durable, ce que l'on nomme également équilibre de sous emplois, c'est-à-dire une situation dans laquelle tout ce qui est produit est vendu, mais où toute la main d'oeuvre ne trouve pas d'emplois. La demande agrégée quant à elle représente la demande totale des biens et services dans une économie domestique pour un temps et un niveau de prix donnés ; pour l'augmenter, il convient de stimuler les composantes (consommation des ménages, investissement, dépenses des administrations publiques et solde commercial) vers la hausse.26(*) Selon le rapportnational sur le développement humain en 2014(RNDH) dont le thème central était «cohésion nationale pour l'émergence de la RDC», le secteur informel est une réponse populaire contre la crise économique où ses opérateurs se recrutent dans toutes les couches de la population. Le secteur informel, précise le rapport, fait office de « maquis » pour la survie de ceux que le secteur formel n'a pas pu intégrer ou a rejetés. La distribution des emplois dans l'ensemble du secteur productif des agglomérations urbaines indiquent que le secteur informel demeure le principal employeur avec 77,1% des emplois, affirme le rapport, qui relève aussi que les résultats de cette économie posent problème par rapport aux réflexions de bon sens sur ses limites dans l'accumulation des richesses. Les activités du secteur informel dégagent, en effet, un surplus qui, malheureusement se dissout plus souvent dans les circuits familiaux de redistribution, et conduit rarement à un processus d'accumulation et de transformation des conditions technologiques. Par ailleurs, les tares sus-évoquées placent le secteur informel dans une situation de faiblesse de mobilisation de l'épargne et de ce fait, l'exclut de plusieurs opportunités d'appui des secteurs publics et privés. Les banques financent les importations, le commerce de gros, la construction, notamment pour les grandes entreprises. Elles ne financent pas les petites entreprises, dont la plupart oeuvrent dans l'informel et se plaignent du manque de capitaux et d'équipements pour augmenter leur productivité. Il se crée une situation dans laquelle la population manque de moyens pour développer des activités génératrices de revenus. Selon ce même rapport, plus de 90% des revenus des ménages proviennent des activités de l'informel. «On ne peut donc pas exclure que, pour les emplois publics qui offrent des horaires de travail plus souples, les fonctionnaires soient massivement impliqués dans l'exercice des activités informelles pour obtenir un complément de revenu dans une autre activité privée» relève le rapport. La croissance de l'informel ne peut donc être abordée uniquement comme un signe de dynamisme de l'activité privée, mais souvent comme la résultante de la précarisation généralisée du travail. Cependant, le rapport précise qu'en dépit de cette nature de stratégie de survie des masses laborieuses, le secteur informel est très souvent défini par la négative et ce, caractérisé par la fuite organisée devant l'impôt, la concurrence déloyale, l'insalubrité urbaine, bref, une prolifération conceptuelle négativiste déterminant en grande partie les prises de position vis-à-vis de ce phénomène. En effet, ce concept est un outil puissant qui modèle les perceptions, influence l'action et, de ce fait, affecte la réalité. On parle alors de l'économie noire, de l'économie sauvage, de l'économie de survie, de l'économie de la cité informelle, de l'économie ne tenant pas la comptabilité, de l'économie de pauvreté.27(*) Le schéma (1) ci-après présente les mécanismes de transformation des effets de la lutte contre la commercialisation informelle des produits pétroliers qui sont expliqués ci-haut. Schéma 1 : Les mécanismes de transformation de lutte contre la commercialisation informelle des produits pétroliers Lutte contre la commercialisation informelle des produits pétroliers Effet sur les dépenses publiques Effet positif sur la recette fiscale Hausse généralisée des prix Baisse des importations informelles des produits pétroliers Hausse des importations formelles des produits pétroliers Hausse de la demande locale des produits pétroliers Perte d'emplois, perte de pouvoir d'achat Hausse des prix moyens des produits pétroliers Augmentation de taux de chômage Ouverture de nouvelles stations-services Création insignifiante d'emplois Effet sur la demande locale Effet sur la croissance économique formelle Source :Réalisé par l'auteur * 25 J.C. VEREZ, Le rôle du secteur informel dans un contexte de régionalisation Tiers-Monde, 1998, pp. 581-596. * 26M-P. ROLAND MEDJIGBODO, Impacts de la lutte contre le marché informel des produits pétroliers au Benin, Université d'Abomey Calavi, Benin, Abomey Calavi, 2013, pp. 5-7 * 27http://acpcongo.com/acp/le-secteur-informel-intervient-a-70-dans-les-operations-economiques-en-rdc/#cLmvzzeiUlKXPYeB.99 |
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