B/ Les raisons du regain d'intérêt sur les
activités communautaires par les parlements nationaux.
Comme au niveau de l`union européenne, la
dépossession des compétences des législateurs nationaux a
été perçue par ceux-ci comme un empiétement sur le
domaine de compétence des assemblées. Il devient tout à
fait légitime pour les parlements nationaux de s`intéresser
à l`intégration sous régionale. Ce regain
d`intérêts s`explique simplement par la perte et la
réduction du domaine de compétence du parlement en ce qui
concerne le domaine de la loi (1) et également celui du
contrôle de l`action gouvernementale (2).
1) Les raisons liée à la perte et
à la réduction du domaine de compétence législative
des parlements nationaux.
La perte ou la réduction des compétences sur des
domaines réservés à la loi par les constitutions aux
parlements nationaux inquiète ceux-ci et éveille un regain
d`intérêt sur les questions communautaires. Pour comprendre
l`intérêt naissant des parlements nationaux sur les
activités communautaires, il faut tenir compte des conflits qui
existeraient sur les domaines dans lesquels la communauté a
bénéficié du transfert de compétence. Pour en fin
se rendre compte que, plusieurs domaines de compétences des parlements
nationaux ont été perdus. Les parlements nationaux devenant, dans
ce processus de communautarisation des Etats membres, au pire des cas,
lésés par cette action, au meilleur des cas, ils deviennent des
acteurs secondaires dans les domaines de la loi sur laquelle les parlements
nationaux et la communauté sont en concurrence. L`initiative des lois
nationales revenants désormais non
377 OBERDORFF (H), « les incidences de l'union
européenne sur les institutions françaises », op
cit, p 98.
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plus seulement aux parlements nationaux (la proposition de
loi), ou à l`exécutif (projet de lois) mais également
à la CEMAC, avec la particularité que les parlements nationaux
n`ont même pas un droit de regard sur l`initiative communautaire. N`ayant
pas déjà une posture qui devrait être la sienne au sein des
Etats membres de la CEMAC, l`on constate un déclin, et les qualificatifs
ne manquent pas pour stigmatiser la position qui serait celle des parlements
nationaux sous l`effet de la CEMAC, devenant des obéissant d`une
communauté dominante et surpuissante. L`on en vient à se demander
qui fait la loi dans le contexte de communauté d`intégration ? La
question mérite d`être posée, dans la mesure où les
constitutions des Etats membres de la CEMAC sont claires en affirmant que la
loi est votée par le parlement. L`appartenance à la CEMAC est
venue réduire les pouvoirs des parlements nationaux en matière
législative par l`autorité dont elle fait preuve lors de la
conception et l`entrée en vigueur de la norme de droit communautaire
dans l`ordre juridique national. Des lors, les parlements nationaux, dans le
processus de communautarisation des Etats membres de la CEMAC, sont devenus de
plus en plus lésés et également dépouillés
d`une partie de leurs prérogatives dans ce processus
d`intégration communautaire. Il devient nécessaire
d`élaborer un compromis nécessaire pour rétablir un
parlement en décadence autant sur le plan national que communautaire,
d`où le regain d`intérêt des parlementaires sur les
domaines de compétence de la loi transférée à la
communauté. Il serait parfaitement logique de proposer que les
règles de droit devant être légiférées au
sein de la communauté, puissent être inscrites prioritairement
à l`ordre du jour dans les parlements nationaux, surtout discutés
et adoptés sans être fondamentalement modifiés, au risque
de mettre en péril la politique communautaire voulue par les
gouvernements et chefs d`Etats de la CEMAC. Dans ce cas les parlementaires
seront associés d`une façon indirecte à la prise des
décisions au sein de la CEMAC. Les parlements nationaux participeront de
leur manière au processus de communautarisation des Etats membres de la
CEMAC. En conséquence, étant généralement
responsable devant l`assemblée nationale, le gouvernement y engagera
éventuellement son existence sur le vote d`un texte qui exprime la
politique communautaire telle qu`il l`a déterminée au sein de la
communauté, le Parlement restant libre de refuser, non pas ce texte,
mais la politique communautaire qu`il incarne et le gouvernement national qui
la soutient378
378 En paraphrasant VANDENDRIESSCHE (X), « le
parlement entre déclin et modernité », revue pouvoirs,
N°99, pp 59-70, spec. p 62.
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2) La raison relative au contrôle de la
politique communautaire du gouvernement par les parlements
nationaux.
Les parlements nationaux bien qu`ils soient en marge du
processus communautaire au sein de la CEMAC, détiennent un pouvoir
limité concernant le contrôle de l`action communautaire des
gouvernements nationaux. Semblant dans la mesure où cette action n`aura
véritablement pas d`impact sur la politique communautaire telle
qu`élaborée par les Etats membres. Tout de même, elle
permet de faire passer un message aux dirigeants de la communauté, et
éventuellement de faire entendre les aspirations des populations
nationales qui constituent le peuple communautaire. Si les parlements nationaux
renoncent à interférer dans l`action de légiférer
de la communauté, il faudra se résoudre a ce que le rôle
des parlements nationaux modernes au sein des Etats membres, n`est plus de
légiférer en tant que tel, mais de porter une appréciation
éclairée sur les conditions mêmes de mise en oeuvre des
politiques communautaires déterminées par les gouvernements au
sein des organes de gestion de la communauté. Le rôle essentiel du
Parlement en matière communautaire, se situera au contrôle en
cours d`exécution du droit communautaire, entraînant
éventuellement la modification des objectifs et/ou des moyens
déployés pour les atteindre. Mais plutôt, un contrôle
a posteriori, le parlement ayant alors véritablement la
faculté de porter un jugement éclairé sur la
réalisation des politiques communautaires initiées par les
membres des gouvernements réunis au sein des organes communautaires.
Dans cette perspective, il sera important de renforcer les moyens et les
pouvoirs des commissions parlementaires, C`est-à-dire des organes
permanents au sein des chambres du parlement, qui disposent d`un
véritable potentiel pour devenir des outils permanents de contrôle
de l`action politique communautaire du gouvernement ; sans modifier leur action
dans le domaine législatif, il conviendrait alors de renforcer leur
capacité à informer le parlement tout entier des conditions de
mise en oeuvre des politiques communautaires gouvernementales. Cependant, le
constat actuel est relativement décevant : la responsabilité
politique gouvernementale organisée par les constitutions des Etats
membres de la CEMAC est une procédure parfaitement
disproportionnée dans ses effets et très largement insusceptible
d`être mise en oeuvre en raison de la force du fait majoritaire au
parlement. Ainsi, sans remettre en cause le dogme de la responsabilité
solidaire et collégiale du gouvernement, il est peut-être temps de
permettre aux parlements nationaux (et surtout peut-être à leurs
commissions) d`engager la responsabilité individuelle d`un ministre
responsable au niveau communautaire. Il serait ainsi possible de mettre en
place un mécanisme obligeant chaque année les ministres à
rendre compte de leurs
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activités communautaires devant la commission
parlementaire compétente ; il reviendrait ensuite au chef du
gouvernement le soin d`évaluer si cette mise en cause doit affecter
l`ensemble du gouvernement et entraîner sa démission. Cela
entrainerait inéluctablement un souffle de démocratie au sein de
la CEMAC, bien que cela soit au niveau national. Toutefois l`on constate qu`au
niveau communautaire et national, des institutions joueraient a priori
le même rôle. Alors comment est organisée la relation
entre ses institutions symétriques.
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