II- Nature et intérêt de politique du
personnel
Nous appellerons politique de personnel, l'ensemble
des principes directeurs consciemment articulés autours desquels
s'ordonnent les différentes actions de « gestion des ressources
humaines » dans l'organisation. Si l'on considère l'ensemble des
actions de G.R.H, on parle de politique de personnel d'ensemble. Si l'on ne
considère qu'une partie de la G.R.H (rémunération,
recrutement, appréciation du personnel, compétence), on parle de
politique de personnel par thème : politiques de
rémunération, politiques de recrutement, etc. Nombreuses sont les
entreprises qui n'ont pas de tels principes directeurs à la fois
clairement articulés et réellement utilisés en pratique.
Mais très nombreuses sont les entreprises dans lesquelles existent des
pratiques assez constantes que l'on nommera pratiques du personnel ou pratiques
de G.R.H. Dans ce qui suit, nous présenterons quelques exemples
pratiques de politiques de GRH mises en application.
1)- Les politiques de personnel d'ensemble
Les onze politiques du personnel d'ensemble
décrites ci-dessous, doivent être considérées comme
des « types purs », qui décrivent certaines organisations de
façon fidèle, les autres étant un mélange de
plusieurs de ces types (2). En d'autres termes, il s'agit de
politiques globales (pures) et de politiques spécifiques prenant un seul
axe lié à la gestion du personnel. Elle sont
résumées dans ce qui suit :
(1) TEZENAS DU MONTREL. H, Dictionnaire des sciences de
la gestion, Mame, Paris 1992.
(2) ROMELAER. P, Gestion des ressources humaines, Ed,
ARMAND COLIN, Paris 1993, P. 309-315
Chapitre II : Les politiques de GRH: théories et
pratiques
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A)- politique n°1 : L'administration du personnel
comme fonction dominante
Cette politique met l'accent sur la tenue des dossiers
du personnel, le recueil d'informations sur les absences et retards, la gestion
de la paie, les dates de congés, la gestion administratives des
situations de congé maternité, d'accidents du travail, de
chômage partiel.
b)- politique n° 2 : Le droit du travail comme
élément dominant
Cette politique met l'accent sur la
spécification précise dans le contrat de travail des droits et
obligations des parties, dans la formation et l'information de la
hiérarchie dans le domaine du droit du travail, dans l'utilisation
rigoureuse des mécanismes disciplinaires et des textes
conventionnels.
c)- politique n° 3 : Les relations sociales comme
fonction essentielle
Cette politique met l'accent sur le fonctionnement
des instances représentatives en passant des obligations minimales
d'information et de consultation à une pratique de
quasi-négociation. Elle met également l'accent sur les contacts
directs intenses avec la représentation du personnel hors fonctionnement
des instances, ainsi que sur la négociation d'accords d'entreprises et
d'établissement, de façon à réguler par ce biais
une partie substantielle de la gestion des ressources humaines. C'est dans ce
contexte que le syndicat est considéré comme une instance de
partenariat et non de divergence devant les objectifs fixés dans le
cadre de la politique générale de l'organisation.
d)- politique n° 4 : Discipline et
autorité
La hiérarchie a le pouvoir et doit faire
régner l'ordre. Les salariés sont là pour travailler, et
tous le reste doit être maintenu au minimum. C'est l'exact contraire de
la précédente politique qui ne tient en compte que la structure
formelle de l'organisation sans prise en compte des aspects sociologiques dans
lesquels évolue le personnel.
e)- politique n° 5 : La fidélisation du
personnel
Celle-ci met, souvent, l'accent sur la prime
d'ancienneté, les oeuvres sociales, les avantages en nature, la
possibilité d'acquérir à prix bas des produits de
l'entreprise, ainsi que sur les services et le soutien au personnel (dans les
relations avec les administrations, dans les difficultés personnelles,
etc.). Dans cette politique on privilégie plutôt
l'expérience acquise au détriment de la compétence qui en
principe favorise l'innovation et le savoir-
Chapitre II : Les politiques de GRH: théories et
pratiques
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faire. C'est dans cette perspective que dans le
contexte actuel, l'Algérie à l'instar des autres pays a
instaurée dans la nouvelle grille de salaire qu'on verra
ultérieurement un système basé sur la compétence
comme facteur de motivation.
f)- Politique n° 6 : Les relations
humaines
Ici l'accent est mis sur la qualité
psychologique et communicationnelle des entretiens de recrutement et
d'évaluation, sur les études de motivation, la formation de
l'encadrement à des styles de leadership
participatifs, l'utilisation d'enquêtes internes,
l'enrichissement et l'élargissement du travail, les groupes semis
autonomes, et des cercles de qualité centrée sur les
communication et l'échange.
g)- Politique n° 7 : La gestion des ressources
humaines par les systèmes
Elle met l'accent sur les systèmes (de
recrutement, de qualification, de rémunération, de promotion,
d'évaluation, etc.) elle est axée sur le caractère
logique, cohérent et complet des actions de G.R.H, s'accompagne
d'objectifs, de procédures, et d'une professionnalisation du travail de
G.R.H. Elle s'accompagne aussi souvent d'un rôle plus important du
département ressources humaines. Ici la vision systémique est
dominante et considère que le sous-système personnel constitue la
colonne vertébrale dans l'articulation des autres
sous-systèmes.
h)- politique n° 8 : La gestion du personnel par
motivation et concurrence interne
Centrée sur la définition d'objectifs
motivants, l'utilisation d'une part d'une rémunération variable
en fonction des résultats, d'une comparaison systémique entre
salariés, sur les concours et «challenges » (1),
sur des primes au « meilleurs vendeurs du mois », sur la mise en
concurrence de plusieurs personnes sur chaque possibilités de promotion,
sur la mobilité verticale forte pour les salariés ayant des
performances exceptionnelles.
(1) Le Dictionnaire (Petit
Larousse 1991) de la langue française, donne plusieurs significations au
mot challenges. « C'est une épreuve ; Une récompense ; une
entreprise difficile dans laquelle on s'engage comme pour relever un
défi ». Désormais, les responsables des entreprises
emploient ce type d'épreuves afin de créer une concurrence
à l'interne de l'organisation et ce, en vue de faire de mieux, motiver,
sa ressource humaine.
i)- Chapitre II : Les politiques de GRH: théories
et pratiques
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politique n° 9 : La gestion du personnel par la
communication
Elle met l'accent sur la communication à tous
les niveaux, de l'explication du bulletin de salaire à des
présentations sur la stratégie et des résultats de
l'entreprise, en passant par des actions de communication entre
départements commerciaux et de production, journal et projet
d'entreprise, et échange d'information sur les expériences
locales.
j)- Politique n° 10 : La gestion du personnel par
le développement des individus
Cette politique de personnel est basée sur la
formation et la gestion des compétences, avec trois soucis majeurs
:
- utiliser de façon optimale les ressources
humaines existantes ;
- permettre à chaque personne de croître
en compétence, en autonomie et en responsabilité ;
- disposer d'une flexibilité et d'un «
stock » de compétences permettant à l'entreprise d'aborder
les développements futurs prévisibles des incertitudes, crises et
opportunités.
En sommes, il convient de s'adapter à
l'environnement externe de l'organisation en optimisant les
potentialités existantes, humain surtout.
Cette politique utilise de façon intense
l'évaluation des salariés et la gestion prévisionnelle des
compétences. Les dispositifs de formation et description de postes y
sont en général importants : ils servent à détecter
le potentiel d'évaluation, et vérifier que le salarié a su
maître en oeuvre de façon satisfaisante ses nouvelles
compétences dans la pratique.
k)- Politique n° 11 : La gestion économique
et stratégique des ressources humaines
Cette dernière tient compte de la
rentabilité des ressources humaines. Les concepts d' «
investissement-formation », les tableaux de bord, l'intégration
entre la gestion des ressources humaines, la stratégie de l'entreprise
et les projets des responsables hiérarchiques, et sur le contrôle
à posteriori de l'efficacité des actions engagées trouvent
leurs places dans cette orientation politique.
Chapitre II : Les politiques de GRH: théories et
pratiques
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L'exposé des pratiques et politiques de
personnel que nous venons de faire correspond sensiblement à
l'évolution au cours des cinquante dernières années des
idées dominantes que les praticiens et les entreprises se sont fait de
la fonction ressources humaines. La première époque a
considéré la fonction comme essentiellement composée d'un
volet administratif et d'un volet d'autorité (politique n° 1 et 4
ci-dessus). Dans cette première époque, que l'on peut situer
avant 1936, le chef du personnel a, comme son titre l'indique, vocation
à faire régner l'ordre. Puis le droit du travail est
progressivement devenu notablement plus complexe, et s'est enrichi d'un droit
de la présentation du personnel, en particulier en 1936 et 1945. Sous
cette impulsion, on a vu la fonction prendre naturellement une orientation plus
juridique et sociale, et se développer des politiques de personnel
assises sur la régulation sociale par les contrats de travail et par les
relations avec la représentation du personnel (politique n° 2 et 3
ci-dessus). La politique de gestion des relations humaines (politique n° 6
ci-dessus) a toujours été assimilée à un discours
qu'à des pratiques. Elle a son origine dans les travaux universitaires
américaines des années 1930 à 1945 sur la motivation et la
participation, véhiculés par les spécialistes de
psychologie sociales et de psychologie du travail.
La principale pratique qui a marqué la fonction
est ce que nous avons appelé la gestion par les systèmes
(politique n° 7 ci-dessus). Cette politique a son origine dans le monde
d'organisation progressivement adoptée par les grands groupes
industriels américains dans les années 1960, et on peut relier ce
caractère systémique de la gestion à l'essor du
contrôle de gestion et au développement de la planification
d'entreprises : c'est à la même époque que se
développent le processus budgétaire, la planification
stratégique, l'articulation entre plans à long terme et budgets
opérationnels. La gestion des ressources humaines par les
systèmes s'inscrit dans le même état d'esprit.
Les politiques de personnel axées sur la
motivation et la concurrence interne, sur le communication, sur le
développement des individus, et sur une vision économique et
stratégiques de la fonction (politique n° 9, 8, 10 et 11 ci-dessus)
apparaissent comme des développements plus récents, encore
incomplets et non totalement fixés. On y trouve à la fois la mode
du projet d'entreprise, le développement des budgets de communication,
et les tentatives en cours de développer une gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences dans une
perspective d'intégration des ressources humaines à la
stratégie de l'entreprise.
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