1 CONCEPT ET ÉTAT DE L'ART
Avant d'entamer notre étude, ce premier chapitre
intitulé concept et état de l'art va présenter les
théories relatives au secteur informel ainsi qu'au développement
économique. Ainsi pour mieux appréhender ce
phénomène vont être présenté successivement
l'origine et la définition du secteur informel, les
caractéristiques du secteur informel à Madagascar, les
caractéristiques du secteur informel dans les autres pays de l'Afrique
subsaharienne et des théories sur le développement
économique.
1.1 Origine de la notion du secteur informel
Le concept de secteur informel a fait son apparition dans la
théorie économique du développement avec les premiers
travaux du Programme Mondial de l'Emploi entrepris par le Bureau International
du Travail (BIT) au début des années 1970. À la
conférence sur le chômage urbain en Afrique (1971), Keith Hart fut
le premier à employer ce terme, mais c'est véritablement le
rapport du BIT sur le Kenya (ilo, 1972) qui lança et vulgarisa le
concept.
C'est en effet le Programme Mondial de l'Emploi qui fit passer
au premier plan les préoccupations du chômage et du sous-emploi
liées à l'urbanisation accélérée. Le secteur
informel a acquis de cette observation une évidence : le chômage
ouvert voit son expansion limitée par le fait qu'il n'est pas
indemnisé dans la plupart des économies en développement
et touche essentiellement les jeunes primo-demandeurs d'emploi à leur
entrée sur le marché du travail. Il apparut alors clairement que
le secteur moderne (et plus particulièrement l'industrie) n'était
pas en mesure d'absorber un surplus toujours croissant de main-d'oeuvre,
contrairement à ce que laissait entendre le modèle de
Lewis1 (1954). Des opportunités de revenus hors du
système moderne devaient donc nécessairement être
trouvé pour vivre ou pour survivre et le secteur informel constitue
ainsi un terme générique et pratique recouvrant toutes les
stratégies de survie.
Chômage déguisé pour les
économistes, le secteur informel ne pouvait s'agir que d'une poche de
sous-emploi aux activités faiblement productives et très peu
rémunératrices permettant
1L'idée principale de Lewis est qu'il existe
un important surplus de main d'oeuvre dans le secteur traditionnel qui peut
être déplacé vers le secteur moderne disposant d'une offre
illimitée de main-d'oeuvre, sans perte de production dans le secteur
traditionnel.
Berthelier Pierre, Lipchitz Anna. Quel rôle joue
l'agriculture dans la croissance et le développement ? In: Tiers-Monde.
2005, tome 46 n°183. Paysans : modes de survie. pp. 603-624.
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Consulté le 27 mars 2015
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seulement la reproduction simple de la force de travail. En
d'autres termes le secteur informel ne serait que la simple transposition
urbaine du sous-emploi rural.
Les modèles de Lewis et de ses successeurs
cédèrent la place à des modèles tri sectoriels
fondés sur les théories de l'exode rural dont Todaro (1969) fut
l'un des initiateurs : les migrants ruraux qui étaient
sous-employés dans l'agriculture de subsistance sont attirés vers
les villes par l'espérance d'obtenir un emploi dans le secteur moderne
de l'économie. Se retrouvent en désespoir ils sont par
nécessité, rejetés dans le secteur informel qui leur offre
des opportunités de revenus au niveau de la simple subsistance.
Le rapport du BIT sur le Kenya portait déjà en
germe cette double conception du secteur informel, associant activités
marginales (de rues ou dans des établissements de fortune), artisanat,
production de service et petit commerce.
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