Le régime successoral en matière des droits d'auteur au Burundi.( Télécharger le fichier original )par Yves KAMIKIWE Université du lac Tanganyika - Licence 2015 |
A. Quotité disponibleSelon DESBOIS, «la dévolution successorale des droits patrimoniaux d'auteur obéit aux mêmes règles que l'ensemble du patrimoine169.» L'auteur sera toujours limité dans ses volontés exprimées dans le testament. L'ampleur des legs ou des donations ne pourra pas porter sur l'intégralité du patrimoine de l'auteur car il est obligé de respecter la réserve héréditaire des héritiers réservataires. En outre, une part minimale de l'héritage reviendra 166 C.COLOMBET, Propriété Littéraire, artistique et les droits voisins, 8eme édition, DALLOZ, Paris Cedex14, 1997, p.214 167 Voir supra p.8 168 Voir supra p.7 169 H.DESBOIS, Op. cit, p.391 53 nécessairement aux héritiers réservataires. C'est le reste du patrimoine après avoir satisfait les héritiers réservataires, qui est appelé la quotité disponible. Ainsi, les legs et les donations ne porteront que sur cette quotité disponible170. B. Dépendance de la quotité disponible de la situation de famille du de cujus Pour montrer cette dépendance de la quotité disponible de la situation familiale, nous pouvons nous donner les hypothèses suivantes: soit l'auteur de cujus avait des enfants (1), soit il n'en avait pas (2). 1. En cas de présence d'enfants Si l'auteur a des enfants, la quotité disponible changera selon que l'auteur était célibataire (a) ou selon qu'il était marié au moment de son décès (b). a. Si l'auteur de cujus était célibataire La part réservée aux enfants va dépendre de leur nombre. La pratique des successions est que si on est en présence d'un enfant, la réserve est au minimum 1/2 du patrimoine. Si on est en présence de deux enfants, la réserve est au minimum 2/3, un tiers chacun. Si on est en présence de trois enfants, la réserve est au minimum 3/4, un quart chacun. Ainsi, la quotité disponible dont l'auteur peut librement disposer par voie testamentaire ou donation au bénéfice de qui il voudra est au maximum la moitié de ses droits d'exploitation de ses oeuvres en présence d'un enfant. En présence de deux enfants, la quotité disponible sera au maximum un tiers. En présence de trois enfants, elle sera au maximum un quart171. Cette solution trouve naissance dans la législation française:« Les libéralités soit entre vifs, soit par testament ne pourront pas excéder la moitié des biens du disposant, s'il ne laisse à son décès qu'un enfant, le tiers, s'il laisse deux enfants, le quart s'il en laisse trois ou un plus grand nombre172.» Nous pouvons signaler, que les règles de représentation seront respectées en cas de prédécès d'un enfant. Ce sera ses propres enfants qui se partageront la part173. 170 Voir supra p.9 171 Voir en ce sens G.GATUNANGE, op cit, p.12 172 A.LUCAS, Op. cit, p.522 173 Voir supra, p. 6 54 b. Si l'auteur de cujus était marié Dans cette hypothèse, il faut d'abord respecter l'usufruit du conjoint survivant (i). La part réservataire des enfants sera toujours respectée (ii). i. L'usufruit du conjoint survivant Concernant le conjoint survivant, notre législation pourrait s'inspirer de la législation française en ce qui concerne son usufruit sur le droit d'auteur. La législation française dans l'article 123?6 du C.P.I crée un usufruit au profit du conjoint survivant, un usufruit spécial portant sur le droit d'exploitation. Selon COLOMBET le législateur a supposé que le conjoint, par sa présence, contribue à la création littéraire ou artistique et qu'il était équitable de le récompenser. «Le conjoint survivant contre lequel n'existe pas un jugement passé en force de chose jugée de séparation de corps ,bénéficie quel que soit le régime matrimonial et indépendamment des droits d'usufruit qu'il tient de l'article 767 du code civil sur les autres biens de la succession ,de l'usufruit du droit d'exploitation dont l'auteur n'aura pas disposé. Toutefois si l'auteur laisse des héritiers à réserve, cet usufruit est réduit au profit des héritiers, suivant les proportions et distinctions établies par les articles 913 et 915 du code civil. Ce droit s'éteint au cas où le conjoint survivant contracte un nouveau mariage174.» Cet usufruit est important puisqu'il permet au conjoint survivant de percevoir des redevances générées par les exploitations de l'oeuvre et, dans une certaine mesure, utiliser seul ces exploitations. Néanmoins, il faut savoir que l'usufruitier ne pourra accomplir que des actes d'administration175. 174 Article 123-6 du C.P.I 175 Voir sur ce site: www.sacd.fr/uploads/tx_sacdresources/succession_long.pdf Consulté le 20 mars 2016 LES SUCCESSIONS EN DROIT D'AUTEUR, p.5 L'usufruitier ne pouvant accomplir que des actes d'administration et non de disposition, le conjoint survivant ne peut conclure seul les contrats d'exploitation des oeuvres que dans la mesure où ceux-ci prévoient des cessions de courtes durées et ne comportent pas d'exclusivité (par exemple l'autorisations de représentation pour les oeuvres dramatiques) En revanche, les contrats prévoyant des durées de cession plus longues et des exclusivités (par exemple les contrats de cessions de droits portant sur des oeuvres audiovisuelles) constituent des actes de disposition et doivent par conséquent être signés également par les autres héritiers, ce qui rend les choses un peu complexes en pratique. C' est pourquoi la nomination d'un mandataire est, en pareil cas, conseillée 55 En plus nous pouvons dire que cet usufruit a des conditions indispensables. Cet usufruit, récompense de la présence discrète favorable à la création, n'a plus de raison d'être si la présomption d'entente s'avère mal fondée du fait du divorce ou de la séparation de corps aux torts du conjoint de l'auteur. Aussi pouvons-nous penser que la fidélité à la mémoire de l'auteur s'est estompée, le conjoint s'étant remarié après le décès de l'auteur176. ii. La réserve héréditaire Dans l'hypothèse où le de cujus était mariée au moment de son décès, les enfants conserveront leur part réservataire en respectant l'usufruit du conjoint survivant. Néanmoins, l'usufruit spécial connait une limitation importante, il ne peut être exercé si l'auteur a pris des dispositions testamentaires contraires en ce qui concerne ses droits d'exploitation (legs de ses biens patrimoniaux à une autre personne par exemple ou si l'auteur a donné ou bien cédé forfaitairement ses droits d'exploitation de son vivant). D'après la législation française, «cet usufruit est réduit au profit des héritiers, suivant les proportions et distinctions établies par les articles 913 et 915 du code civil177.» 2. En cas d'absence d'enfants Lorsque l'auteur ne laisse aucun enfant à sa succession, la quotité disponible dont il peut disposer par voie de legs ou de donation dépend de sa situation matrimoniale au moment de son décès. Ainsi cela dépendra du fait qu'il est célibataire(a) ou selon qu'il était marié (b). a. Si l'auteur de cujus était célibataire. Si l'auteur célibataire n'avait pas d'enfants, ses ascendants deviennent ses héritiers réservataires178. Ceux-ci reçoivent donc à son décès au minimum la moitié du patrimoine de l'auteur, un quart pour la ligne paternelle et un autre quart pour la ligne 176 C.COLOMBET, Propriété Littéraire et artistique et droits voisins, DALLOZ, 8eme édition, Paris Cedex14, 1997, p.206 177 Article 123-6 du C.P.I 178 Voir supra p.9 Les bénéficiaires de la réserve. 56 maternelle. Nous pouvons signaler que s'il ne reste des ascendants que dans une ligne paternelle, la réserve se limitera à un quart179. Cela trouve aussi inspiration dans le Code civil français:« les libéralités entre vif ou par testament ne pourront pas excéder la moitié des biens, si à défaut d'enfant, le défunt laisse un ou plusieurs ascendants dans chacune des lignes, paternelle et maternelle, et les trois quart s'il n'en laisse d'ascendant que dans une ligne180.» Ainsi l'auteur pourra librement disposer et léguer dans son testament, les trois quart qui restent. b. Si l'auteur de cujus était marié Si le de cujus qui était marié n'avait pas d'enfants, ses ascendants sont réservataires. Chaque ligne aura droit à un quart de sa succession. Encore, il ne faudra pas oublier que l'usufruit spécial du conjoint survivant sera respecté comme nous l'avons vu ci-dessus181. Tout de même, l'auteur a la latitude de privilégier le conjoint survivant: Le de cujus peut avoir prévu dans le testament que l'intégralité du patrimoine devra revenir au conjoint survivant. Autrement dit l'auteur peut prévoir dans son testament, s'il n'a pas d'enfants que toute sa succession revienne au conjoint survivant. II. La dévolution légaleEn l'absence de testament, la transmission des droits patrimoniaux suivra le régime du droit commun mais le droit de suite a un régime particulier. Dans le cas de dévolution légale, le lien de parenté avec l'auteur déterminera l'ordre des successeurs(A). Aussi la dévolution légale dépendra-t-elle de la situation familiale du de cujus(B). |
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