§2. La métamorphose du droit moral
Que devient le droit moral après la disparition de son
auteur? La doctrine étrangère a partagé cette idée
que le droit moral change après la mort de l'auteur.
Claude COLOMBET donne une excellente expression quand il
affirme que «le droit moral n'est donc pas tel, après la mort,
qu'auparavant, puisque les successeurs n'ont pas qualité pour prendre
des décisions qui procèdent de leurs opinions ou de leurs
goûts. Les prérogatives que l'auteur maniait à son
gré, deviennent les instruments d'un devoir de
fidélité98.»
98 C.COLOMBET, Propriété
Littéraire et artistique, 2eme édition, DALLOZ, Paris, Cedex05,
1980, p.188
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Nous pouvons affirmer que le droit moral change après
la mort de l'auteur créateur. Les successeurs du de cujus ne pourront
pas l'exercer comme le ferait ce dernier de son vivant.
Ainsi les successeurs de l'auteur exerceront les
prérogatives du de cujus tout en se conformant au devoir de
fidélité. Ils ne sont pas aussi libres que l'auteur dans
l'exercice du droit moral99.
Le constat est que le droit moral n'aura pas le même
aspect qu'avant quand il est exercé par l'auteur. La consistance du
droit moral va subir certaines restrictions.
André FRANCON soutient Claude COLOMBET en affirma que
«la consistance du droit moral subit certaines restrictions
après la mort de l'auteur100.»
Par ailleurs, pour bien appuyer cette théorie de
métamorphose du droit moral après la mort, nous aimerions
rappeler que la prérogative de repentir et de retrait s'éteint
avec la mort de l'auteur101.
A notre avis les héritiers ne peuvent pas exprimer leur
regret à la place de l'auteur vis à vis de l'oeuvre et
décider à la place du de cujus que l'oeuvre soit retirée
du circuit économique. En tout état de cause, c'est seulement
l'auteur qui a le droit d'apprécier que l'oeuvre est contraire à
ses actuelles convictions philosophiques, religieuses scientifiques... Il a
seul le droit de décider de la retirer de la circulation
économique. Le droit de repentir et de retrait s'éteint avec la
mort de l'auteur.
La doctrine étrangère a classé les
prérogatives du droit moral en deux groupes. Au premier groupe des
prérogatives appartiennent le droit de retrait et de repentir ainsi que
le droit de divulgation. Ce sont les prérogatives positives. Au second
groupe appartiennent le droit de paternité et le droit au respect de
l'oeuvre. Ce sont des prérogatives négatives.
André FRANCON affirme que s'agissant des
prérogatives dites positives, peu d'entre elles survivent à
l'auteur102. Le droit de retrait ou de repentir ne s'éteint
pas avec la mort de l'auteur. Il survit.
99 Voir infra p. 34 et s.
Il y a des contraintes dans l'exercice du droit moral post
mortem
100 A.FRANCON, Op. cit, p.54
101 Voir supra pp.(15-16)
La perpétuité ne s'applique pas au droit de
repentir ou de retrait Voir aussi en ce même sens Délia LIPSZYC,
Op. cit, p.162
102 A. FRANCON, Op. cit, p45 voir aussi Délia
LIPSZYC, Op. cit, p.145
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Ainsi, avec la disparition du droit de repentir et de retrait
au décès de l'auteur, nous pouvons affirmer que le droit moral
subit une métamorphose après la mort du créateur.
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