PREFACE
Le choix de ce thème vient d'abord d'un
intérêt personnel qui est l'interaction entre les êtres
humains.
Quand je suis entrée dans le monde de l'entreprise, je
n'avais pas encore 18 ans, J'avais déjà remarqué que les
personnes qui avaient du « pouvoir », selon leur personnalité,
pouvaient nous faire réussir ou nous faire échouer. Je
n'utilisais pas ces mots là à l'époque, j'étais
plus dans l'intuition et le ressenti.
Jusqu'à mon arrivée en maison de retraite, mes
expériences professionnelles ne faisaient que confirmer cette sensation
mais je ne pensais pas qu'on pouvait y faire quelque chose, je croyais que
c'était une question de personnalité du manager.
Quand je suis arrivée en tant que directrice en maison
de retraite, tout ce que j'avais « analysé » sur ce sujet
depuis toutes ces années est naturellement ressorti et j'ai alors mis en
place, avec le personnel, le comportement que je trouvais adapté pour
vraiment l'aider et l'accompagner dans mon management, mais encore une fois, de
façon intuitive par rapport à toutes mes expériences sur
ce sujet.
La nouveauté, de taille, était d'intégrer
un contexte vulnérable avec des personnes âgées en
souffrance, en fin de vie, se sentant inutile et un personnel également
renvoyé à sa propre vulnérabilité.
J'ai moi aussi, et très vite, été
fragilisée par ce contexte.
J'ai eu la chance de rencontrer un consultant qui me propose
un accompagnement de type « coaching », je ne savais pas ce que
ça voulait dire mais j'ai accepté car j'étais perdu dans
mes émotions. Cette approche a été pour moi salvatrice car
elle m'a rendue à nouveau professionnelle pour remplir la mission qui
m'était confiée auprès des résidents et j'ai
naturellement pu transmettre aux salariés, dans mon management, ces
outils que je m'étais appropriés pour qu'ils en profitent aussi
dans leur positionnement professionnel.
C'est comme ça que j'ai décidé de devenir
manager coach et de faire une formation. J'étais tellement convaincue de
cette approche que je n'hésitais jamais à faire appel à un
coach pour moi ou mes équipes, jusqu'au jour où je suis
tombée sur une coach « malveillante ». Elle venait faire du
coaching d'équipe et, après chaque jour d'accompagnement
auprès des équipes, venait me voir avec un air triste pour me
dire que l'équipe n'allait pas bien, que c'était pire que la
dernière fois et qu'il fallait qu'elle revienne encore et encore pour
les aider... Grâce à ma formation et le fait qu'ils aient
énormément insisté sur ce genre de
dérives, j'ai compris la manipulation et la gravité de ce qui
était en train de se passer. J'en ai discuté avec l'équipe
qui m'a effectivement parlé de son malaise et j'ai alors annulé
toutes les interventions de cette coach.
A l'occasion de ce mémoire, j'ai tout de suite
pensé à ce sujet: En quoi le coaching en maison de retraite
est--il intéressant, puisqu'il est très rare de trouver cet
accompagnement dans ces institutions ? Et ensuite, quelles sont les limites et
les dérives notamment dans ce contexte de vulnérabilité?
C'était pour moi l'occasion d'enrichir encore mieux mes connaissances
sur ce sujet.
J'ai d'abord commencé le mémoire sur un travail
de définitions et d'histoire du coaching, ce qui permet de bien
comprendre de quoi on parle, à quoi sert le coaching dans
l'accompagnement, et du coup son intérêt également dans les
institutions accueillants les personnes âgées.
Puis j'ai commencé les lectures des livres de
Valérie Brunel et de Norbert Alter. Ces livres m'ont passionnée
car ils mettent des mots et des explications sur ce qui se passe en entreprise:
les changements incessants, la fragilité du personnel, l'interaction
entre les collaborateurs et le « pouvoir » du manager et de
l'entreprise à mettre en place ou non des attitudes ou des actions pour
faire réussir le personnel dans leur mission, pour les
reconnaître.
Ces livres ont mis également en avant toutes les
dérives et les manipulations possibles de certains employeurs quant aux
dons faits aux salariés pour les aider dans leur mission.
Toutes ces lectures ont démontré autant de
descriptions idéalisées du coaching que de critiques.
Après mes différentes lectures, j'ai pu poser
des hypothèses en lien avec l'intérêt du coaching, ses
limites, et les spécificités en maison de retraite.
Dans mon hypothèse, j'ai mis en avant différents
indicateurs qui ressortent fortement lors de la théorie de cette
pratique, tel que l'autonomie et le repositionnement des acteurs au sein des
institutions pour personnes âgées, le sens donné à
l'action et la notion de partage. J'ai alors fait 3 entretiens de
professionnels et J'ai analysé ces entretiens en lien avec ses
indicateurs.
Les indicateurs que j'ai mis en avant quand j'ai posé
mon hypothèse peuvent effectivement être utilisés dans
toutes les entreprises. Le fait de les associer au sein des institutions pour
personnes âgées a donné une autre dimension.
Pour exemple, je reprends les paroles de Christophe (un des 3
professionnels que j'ai interviewé) qui parlent de la logique du jeu
pour les entreprises commerciales et la
logique du sens pour les institutions pour personnes
âgées. L'indicateur du sens donné à l'action, pour
ces institutions, prend en compte le travail auprès de personnes
vulnérables, certaines en fin de vie, qui vivent au présent et ne
sont plus dans la construction de l'avenir mais dans le sens de leur vie
à cet instant. Cet indicateur prend également en compte les
salariés renvoyés à leur propre peur de la vieillesse
et/ou de la mort.
L'idée est bien de comprendre le sens d'avoir encore le
droit d'avoir une vie légitime dans notre société quand on
est vieux ou en fin de vie. Dans une société ou notre culture ne
prône pas l'intérêt de la vieillesse.
Chaque indicateur doit alors être associé avec la
notion suivante : « Quelle est l'utilité de s'occuper des personnes
âgées quand nous est renvoyé son peu d'importance
».
Dans les institutions pour personnes âgées, le
premier travail du coach est de mettre en avant la valeur et
l'intérêt d'être une personne âgée,
dépendante ou non, au niveau sociétal, au niveau culturel et au
niveau personnel. Cela permet de redonner du sens et de pouvoir ensuite
travailler sur les indicateurs professionnels, les renforcer et atteindre un
accompagnement de qualité réellement adapté.
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