3.1. Les objectifs intermédiaires et rôle
accordé à l'agrégat monétaire M2
Comme nous l'avons déjà évoqué,
les autorités monétaires se donne comme objectif
intermédiaire de contrôler les agrégats monétaires.
De ce fait, si l'objectif intermédiaire est la quantité de
monnaie, de quel agrégats s'occupera-t-elles ?
La banque d'Algérie, afin d'atteindre l'objectif ultime
de sa politique monétaire, à savoir l'objectif explicite
d'inflation à moyen terme, un objectif
intermédiaire doit être poursuivi à savoir l'agrégat
monétaire M2 qui devrait contribuer à la concrétisation de
l'objectif d'inflation, à mesure qu'il existe une relation
étroite entre l'inflation et l'agrégat monétaire M2.
Cibler l'inflation ne revient pas à écarter (forcément)
l'ensemble des autres objectifs qui peuvent être d'intérêt
pour la Banque d'Algérie. La politique monétaire
algérienne poursuit des objectifs intermédiaires
monétaires en raison de la volatilité persistante des
agrégats monétaire engendrée par les mutations du
système financier50.
La mise en oeuvre d'une politique monétaire visant la
stabilité des prix par le biais du contrôle d'un agrégat
monétaire repose crucialement sur l'hypothèse de stabilité
de la demande de monnaie.
Le terme stabilité en général, et celle
de la demande de monnaie en particulier, renvoie à une situation
où les comportements des agents non financiers et leurs anticipations en
matière de détention d'actifs monétaires, restent
suffisamment constants dans le temps, ou au moins prévisible à
long terme. La politique monétaire est efficace si la demande de monnaie
est peu élastique au taux d'intérêt. Dans le cas contraire,
une baisse du taux d'intérêt se traduira par une hausse de la
détention monétaire qui n'aura pas d'impact sur l'activité
économique.
La politique monétaire, lorsque son objectif est
d'influencer l'activité économique, suppose de bien
connaître la forme de la fonction de demande de monnaie, pour savoir, par
exemple, quels effets une augmentation de la masse monétaire aura sur
les variables stratégiques pour lesquelles la détention de la
nouvelle quantité de monnaie sera désirée. De plus, il
sera
également indispensable pour mesurer avec
précision l'impact des instruments de politique monétaire de
savoir si la fonction de demande de monnaie est stable, en ce sens qu'il y a
une régularité dans les comportements des détenteurs de
monnaie. Si la demande de monnaie est instable, l'effet de toute intervention
sur le marché monétaire peut se voir amoindri ou même
entraîner des conséquences inattendues.
Ci-après, Figure n0 2 nous montre clairement
l'évolution du taux d'inflation mesuré par l'évolution de
l'IPC par rapport à l'évolution du taux de croissance de
l'agrégat M2.
40
50
30
20
10
0
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Figure n0 2: Evolution du taux d'inflation et
du taux de croissance de l'agrégat M2
tx inf % M2 %
Source : fait par nous-même à
partir des données de la banque d'Algérie
D'après Figure n0 2, nous constatons que
l'inflation semble à priori maitrisée en terme d'objectif, entre
2000 et 2005. En effet ce qui caractérise cette période, est
bien, une austérité budgétaire, mais aussi une politique
monétaire restrictive. Entre 2002 et 2014, le taux d'inflation est de
3,8 % en moyenne annuelle, tout en enregistrant un pic de 8,89 % au titre de
l'année 2012 suivi par une décélération. Ce
résultat dépasse l'objectif de contenir l'inflation, et remet en
cause les instruments de la politique monétaire et le système
bancaire.
Dans un premier temps, donc, la politique monétaire se
présente comme un élément de la politique de stabilisation
et du PAS (1990-1994). Ainsi, la politique d'ajustement structurel menée
en étroite collaboration avec le FMI s'est traduite par l'encadrement de
la masse monétaire et une baisse significative de la liquidité
dans l'économie au cours de la période 1992-1994, comme
l'illustre la figure n0 3 ci-après.
Figure n0 3: Les variations annuelles des
agrégats monétaires M1 et M2 en pourcentage (montants en
Millions de dinars)
50
% M1 % M2
40
30
20
10
0
-10
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : la banque d'Algérie.
L'agrégat pertinent, à savoir la masse
monétaire M2 s'est accrue 1990 à 1991 de 343 005 millions de
Dinars à 415 270 millions de Dinars soit une augmentation de 21,1 %,
pour passer ensuite en 1992 à 515 902 millions de Dinars donc une
croissance de 24,23 % et à 627 427 Millions de Dinars en 1993 soit un
pourcentage de 21,61 % ceci est due à la stabilisation du taux de
change51.
Quant à l'agrégat monétaire M1,
après une augmentation de 20,33 % en 1991, il passe de 270 082 millions
de Dinars à 324 993 millions de Dinars en 1991, soit une augmentation de
13,76%, et 20,87 % pour l'année suivante.
A la fin des années 1993, la situation
économique été marquée par une
détérioration de la balance des paiements et l'accumulation de la
dette extérieure d'où l'adoption du programme d'ajustement
structurel du FMI en 1994 en signant l'accord de Stand-by. De 1993
à 1995, nous remarquons un recul sensible quant à
l'évolution de la masse monétaire M2. Au cours de la
période 1994-1997, la croissance de la masse monétaire est
passée de 15,31% à 18,19% et 47,24% en 1998, en effet, à
partir de 1997, l'accroissement de la masse monétaire est dû aux
avoirs extérieurs du fond monétaire international.
Avec l'avènement d'une conjoncture favorable sur les
marchés pétroliers, suite au net raffermissement des cours du
brut à partir de 1999, l'Algérie passe d'une situation de
pénurie de liquidité à une situation d'excès
d'offre de liquidité sur la marché monétaire, sous l'effet
de l'accumulation soutenue des réserves officielles de change. Les
agrégats monétaires de l'économie algérienne
connaissent une certaine évolution régulière notamment la
croissance de
51 Bedjaoui Z., loc. cit., p. 236.
la masse monétaire M2 qui évolue de 12,36% en
1999 à 17,3% en 2002. Une situation de stabilité monétaire
s'installe entre 2003 et 2005, dont on remarque une diminution du taux de
croissance monétaire de 15,6% à 11,22% avec une reprise
d'accroissement en 2006.
L'analyse de la situation monétaire consolidée,
constituée des agrégats monétaires et de crédit,
montre que l'évolution de la situation monétaire est tirée
de celle de l'agrégat des avoirs extérieurs nets, comme facteur
instrumental. D'autant plus que depuis 2005, les avoirs extérieurs nets
dépassent largement les liquidités monétaires de
l'économie nationale à savoir la masse monétaire M2
(figure n0 4), et ils constituent l'unique source de création
monétaire pour la banque d'Algérie.
Figure n0 4: Evolution des contreparties de
la masse monétaire (en Milliards de dinars)
-5,000
avoirs extérieurs nets crédits intérieurs
crédits à l'économie
crédits à l'Etat M2
20,000
15,000 10,000 5,000 0
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : la banque d'Algérie
Le parachèvement de la conduite soutenue de la
stratégie de désendettement extérieur (20042006) a
débouché sur une accumulation plus importante des réserves
officielles de change au cours des années 2007-2008, source principale
de l'expansion monétaire.
Après un trend baissier en la matière,
l'année 2009, sous l'effet du choc externe inhérent à la
grave crise économique mondiale, s'est caractérisée par
des rythmes de croissance modérés des agrégats de monnaie,
voire même une contraction de la masse monétaire M2. Elle passe de
6 955,9 millions de dinars à 7 173,05 millions de dinars, soit une
augmentation de 3,12 %. La situation de croissance monétaire s'accentue
en 2010 et 2012 pour atteindre respectivement 15,44% et 11%, résultant
de l'augmentation d'épargne financière et les avoirs
extérieurs des exportations hydrocarbures. La
décélération du rythme de l'expansion monétaire
observée en 2012 s'est poursuivie en 2013. Ainsi, pour 2013, le taux de
croissance de la masse monétaire
M2 a été de 8.41 % contre 11% en 2012. Cette
variation à la baisse résulte des effets conjugués d'une
baisse de la part relative des dépôts bancaires à vue,
d'une augmentation de celle des dépôts aux comptes courants
postaux (CCP) et au Trésor, ainsi que celle de la quasi monnaie, le tout
dans un contexte de stabilisation de la part relative de la circulation
fiduciaire52.
Au cours de l'année 2014, on note une augmentation de
12,42% pour l'agrégat M2 contre une augmentation de 3,37% pour le P11B.
La figure n0 5 ci-après nous montre l'évolution de la
masse monétaire M2 par rapport au P11B en pourcentage.
-10
-20
40
60
50
20
30
10
0
Figure n0 5: Evolution de la masse
monétaire (M2) par rapport au PIB (en %)
PIB % M2 %
Source : la banque d'Algérie
Durant la décennie 90, le système bancaire, qui
assurait le financement de l'économie, se caractérisait par une
illiquidité structurelle qui le faisait dépendre totalement du
refinancement de la Banque d'Algérie. Entre 1994 et 1996 le taux
d'accroissement de la masse monétaire M2 est nettement moindre que celui
du produit intérieur brut. Par contre, dans un contexte de stabilisation
du taux de change, la période de 1997à 1998, la tendance est
inversée. Le taux d'accroissement de la masse monétaire M2 a
augmenté plus vite que celui du produit intérieur brut. Le taux
de liquidité dans l'économie a atteint 56% en 1998.
A partir de l'année 2000, l'économie
algérienne se caractérise par de bonnes performances macro
financières notamment l'amélioration de la liquidité
bancaire, qui ont débouché en 2002 sur un rythme de croissance
appréciable. Le surplus commence à apparaître à
partir de 2000 (on note une légère tendance à la baisse
entre 2002 et 2005), cette augmentation résulte des opérations
d'assainissement, la recapitalisation des banques opérées par le
trésor, suite à un
52 Benbahmed T., Lohoues H. (2014), «
Algérie 2014 », Perspectives économiques en
Afrique, pp. 2-15.
afflux des ressources extérieurs nets (très
accentué en 2002), d'une politique budgétaire plus expansionniste
et des retombées du plan de relance de l'activité
économique.
La fragilité de l'économie algérienne
à la volatilité des prix pétroliers est très
élevée. La conjonction de cette volatilité des prix avec
d'autres difficultés de gestion économique s'est traduite par un
impact négatif sur la productivité et la croissance. A l'origine,
le pays a connu une période de performances raisonnables durant la
période 1961-1985, la croissance du PIB était en moyenne
respectivement de 5.3 %. Entre 1986 et 1994, l'Algérie affiche un taux
de croissance annuel un peu supérieur à zéro 0,2 %. Ces
taux de croissance étaient dus à des sources d'influences
externes défavorables.
-1
-2
-3
4
8
7
6
5
3
0
2
1
1990
1991
1992
1993
1994
Figure n0 6: Taux de croissance du PIB en
%
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
Source : données de l'ONS
L'aggravation de la situation économique et
financière en 1994 a conduit les autorités à mettre en
place un programme de réformes qui ont jeté les bases d'une
reprise de la croissance, stabilisation de l'économie et
réduction du chômage en forte augmentation. Les résultats
de l'application du (PAS) sont apparus évidents à partir de 1997.
Le taux de croissance est passé de (-2,1) % en 1993 à 1% en 1997
pour atteindre 3,1 % en 1998 (figure n0 5). Les autres années
suivantes la croissance économique était tirée surtout par
les recettes des hydrocarbures suite à l'augmentation du prix du
pétrole en 1999. On enregistre une croissance annuelle moyenne de 3.3%
entre 1996-2000.
La période 2001 à 2005, une période
d'accélération de la croissance, était
caractérisée par des taux de croissance élevés
liés surtout à l'explosion des cours du pétrole. Les taux
de croissance se situaient en moyenne à 5 %. La croissance du Produit
Intérieur Brut est passée de 4,61% en 2001 à 5,6% en
2002.
La croissance du P11B réel s'est nettement
rétablie après le ralentissement observé en 2000. D'une
croissance économique de 2,2%, le taux est passé à 4,61%
en 2001. Le P11B hors secteur des hydrocarbures a connu une croissance
réelle de 5,3%. En 2004, le produit intérieur brut s'est
établi, en valeur courante, à 6 149,12 milliards de DA, la
croissance économique s'est située à 4,3%, suite au
ralentissement de la croissance de la production d'hydrocarbures et de la
baisse de la production agricole par rapport à 2003 (qui avait
été une année marquée par des récoltes
exceptionnelles). Le PIB réel hors hydrocarbures a été de
4,7%. en 2005, la croissance économique a enregistré un taux
global de 5,1%. L'année 2006 a enregistré une croissance
économique de 1,7%, suite à une baisse de la production
d'hydrocarbures occasionnée par des travaux d'entretien. Hors
hydrocarbures, la croissance du P11B se situe à 5,6%, Au cours de la
période 2000-2006, l'expansion du PIB en volume et en moyenne annuelle
est estimée à 4,8 %. En fin 2007, est annoncé 9352
milliards de DA.
Le taux de croissance économique a été de
3,4% en 2007 et de 2% en 2008 et 1,6% en 2009. La croissance du PIB hors
hydrocarbures a atteint 9,3 % en 2009, soutenue par une bonne performance des
secteurs des services et du bâtiment tirés par le Programme
d'Investissement Public (PIP)53. Cependant, une baisse sensible de
la production d'hydrocarbures (- 6 %) a réduit la croissance globale
à environ (21/2) %, un taux légèrement inférieur
à celui de 2008. En 2010, la croissance du P11B s'est
accélérée atteignant 3,6 % en volume contre 1.6 % au cours
de l'année précédente. Le PIB hors hydrocarbures a
progressé plus rapidement à hauteur de 6 % contre 9,3 %
l'année précédente. En valeur, la hausse du P11B atteint
20,1 %. C'est avec un rythme de croissance plus proche que le P11B progresse
l'année qui suit, il passe de 2,8 % en 2011 à 3,3 % en 2012.
Néanmoins, l'activité économique s'est ralentie en 2013,
en raison du tassement de la croissance de la demande globale et de la baisse
de la production d'hydrocarbures, la croissance en volume du produit
intérieur brut se limite à 2,8 %, en recul de 0,5 point et celle
du PIB hors hydrocarbures demeure stable à 7,1 %54. Avec 4,1
% de hausse du produit intérieur brut en volume en 2014,
l'activité économique renoue avec la croissance. Cependant, hors
hydrocarbures, elle fléchit de 1,5 point de pourcentage à 5,6 %
et le PIB par habitant progresse de 1,65 % contre 1,14 % en 2013.
|