A.2. Le foncier, la différenciation urbaine et la
croissance urbaine
Malthus (1815) et Smith (1776) considèrent que la rente
foncière est un don gratuit de la nature récupérée
par les propriétaires fonciers en vertu de leur pouvoir monopole de
détention de la terre. La terre constitue un capital, voire une valeur
refuge sur laquelle investissent les urbains au profit de leurs enfants ou pour
accroître leur propre richesse (pratiques spéculatives). Ces
dynamiques - anciennes - s'accélèrent aujourd'hui en raison de
l'augmentation très importante de la valeur des parcelles, notamment en
milieu péri-urbain où les champs se transforment en terrains
à bâtir. Cette évolution s'accompagne de pratiques
clientélistes : les élites économiques ou politiques
nationales et locales utilisent le foncier comme moyen de rétribution et
de consolidation de leur base sociale et de leur clientèle politique
(Mansion et Broutin, 2012).
La théorie des places centrales de Christaller (1955) a
connu plusieurs extensions dont celles proposées par Losch (2002). Losch
a montré « qu'il y a avantage à ordonner les ensembles de
réseaux urbains en un paysage économique où des secteurs
riches en villes, ..., alternent avec des secteurs plus pauvres en
agglomérations ».
Le caractère centrifuge des mouvements
d'activités a fait l'objet de diverses enquêtes qui l'ont rendu
évident. Ces enquêtes ont été à la base de
plusieurs constructions théoriques qui empruntent une idée
très ancienne selon laquelle : derrière l'acquisition d'un bien
foncier, il y a aussi la disponibilité d'un type d'accès au
centre.
Différents travaux ont été menés
à partir du modèle d'Alonso (1964) aux Etats-Unis et en France.
Selon ces travaux, pour minimiser les dépenses de transport et
accroître ainsi la surface de son logement, un individu recherchera une
localisation proche du centre. Le prix de l'unité de sol central
s'élèvera, ce qui dissuadera certains de s'y rapprocher.
Finalement, le prix du sol décroîtra du centre vers la
périphérie parallèlement à la croissance des
dépenses de transport. Un double arbitrage intervient donc : entre
dépenses de transport et de logement ; entre prix de l'unité
d'espace et quantité d'espace.
Dans le même ordre d'idée, l'importance du
modèle élaboré par Mayer (2001) est qu'au lieu de partir
du centre pour expliquer la décroissance des prix du sol plus on
s'approche de la périphérie; « c'est l'évolution du
prix du sol périurbain qui se transmet en ville : la hausse des prix
fonciers urbains dépend de la hausse du prix du sol aux limites de
l'urbanisation ».
Aménagement du territoire et croissance urbaine au
Cameroun
En ce qui concerne la différenciation du territoire,
les stratégies de différenciation horizontale ou verticale des
territoires sont des réponses pertinentes pour mobiliser et valoriser
les atouts particuliers de chaque région dans un pays. Les
autorités publiques de différents territoires ont
intégré, du moins partiellement, avec la mondialisation, les
enjeux de la concurrence internationale. Elles ont aussi intégré
le fait que la compétitivité territoriale peut se gagner avec des
spécialisations adaptées.
Les stratégies de différenciation verticale
accordent une priorité au renforcement du système éducatif
à tous les niveaux et à l'amélioration des
compétences dans tous les secteurs de l'activité
économique. Les universités apparaissent comme les moteurs et les
catalyseurs du développement des régions les plus
avancées, les collèges technologiques et les centres techniques
sont les instruments privilégiés d'accès à la
connaissance dans des régions qui se situent encore loin de la
frontière technologique. Ces stratégies verticales jouent sur le
développement des capacités d'innovation de l'ensemble des
entreprises par l'élévation du niveau d'ensemble du capital
humain de la région, le renforcement des interactions des PME avec les
grandes entreprises, les collèges techniques, les centres de recherche
et les universités. Elles passent également par
l'amélioration des infrastructures de la région et de son
accessibilité. Toutes ces actions supposent l'élaboration et la
bonne mise en oeuvre de stratégies d'innovation adaptées à
la situation de chaque territoire (Madiès et Prager, 2008).
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