La protection des biens culturels en droit international humanitaire( Télécharger le fichier original )par Francois Munguiko Kyuma UNIGOM - Licence 2013 |
§5. La répression des infractions au DIHComme toute règle de droit international public, le droit humanitaire se décompose en une obligation majeure qui est de la respecter, et une obligation mineure consistant à corriger les effets de son non respect59(*). Dans la conception classique du droit international, les Etats n'étaient astreints qu'à la séparation des dommages causés. Aujourd'hui, avec la prise de conscience des interets communs et la reconnaissance des valeurs prioritaires il se pose le probleme de l'institution d'un véritable régime de droit pénal international ou à tout le moins d'un système plus éfficace que la séparation. Il n'est plus exclu de sanctionner les sujets de droit international, des délits du manquement qualifié de crime, de délits en vue de mettre fin aux effets déstabilisateurs des violations de la norme internationale. Cette préoccupation n'est pas étrangère au droit international humanitaire qui est l'un des domaines spécifiques du droit international où les violations du droit donnent lieu à des sanctions pénales individuelles60(*). En effet, à la responsabilité de droit commun, les conventions de Genève superposent un mécanisme de responsabilité pénale des individus auteurs d'infractions graves précisé par le protocole additionnel n°1. Les Etats parties à ces conventions doivent également poursuivre et juger les auteurs des graves violations du DIH à moins que ceux-ci ne soient remis à un Etat tiers qui ouvrira une enquête (principe aut dedere aut judicare). Enfin, ils ont l'obligation de se communiquer tout renseignement utile à la poursuite de l'infraction grave et de s'accorder l'entraide judiciaire. En tout état de cause, les parties contractantes ont l'obligation de charger, les commandants militaires de réprimer et de dénoncer aux autorités les infractions qu'ils n'auraient pu empêcher de la part de leur subordonnés. Le commandant qui néglige les consignes ou ne prend pas les mesures de contrôle nécessaires verra ainsi sa responsabilité engagée sur le plan pénal si des infractions graves ont été commises sous ses ordres61(*). L'ordre supérieur de commettre une infraction ne permet pas cependant au subordonné qui l'exécute de dégager sa responsabilité. Ainsi, on peut déduire de la lecture des conventions et de leur protocole additionnel que ces instruments se fondent sur la présomption que « tout ordre de caractère criminel est inadmissible ». Ainsi, le fait d'exécuter un tel ordre est il considéré comme un crime. Un ordre criminel et arbitraire est illégal et la responsabilité de cet ordre ne peut être réfutée par la personne qui l'a donné ou par celle qui l'a exécuté. Il ya par conséquent un système de responsabilité pour les infractions aux lois et coutumes de la guerre qui contribue à prévenir les crimes et à renforcer la protection des droits de l'homme. Dès lors, dans le cadre du Droit International Humanitaire, le subordonné apparait comme un sujet immédiat d'un droit international sanctionnateur. Ce droit lui confère des devoirs dont le mépris entraine sa responsabilité pénale. Pour cela, les Etats parties aux conventions de 1949 ont l'obligation de rechercher les personnes accusées d'avoir commis ou d'avoir ordonné de commettre une infraction grave. Cette obligation pèse sur tous les Etats parties ; quel que soit le lieu où l'infraction a été commise. A. Responsabilité pénale individuelle en cas d'attaque non autoriséeL'article 28 de la convention de 1954 dispose que les Etats doivent « prendre, dans le cadre de leur système de droit pénal, toutes mesures nécessaires pour que soient recherchées et frappées des sanctions pénales ou disciplinaires les personnes, quel que soit l'ordre de commettre l'infraction à la convention »62(*). Cette disposition est restée en grande partie lettre morte, principalement parce qu'elle n'énumère pas les infractions passibles d'une sanction pénale or, l'expérience des services consultatifs en Droit International Humanitaire du CICR montre qu'il est essentiel de dresser une liste des violations si l'on veut instaurer un système cohérent et complet de répression des crimes de guerre dans le monde entier63(*). C'est là un de principaux domaines où le deuxième protocole précise et développe le droit international humanitaire applicable aux biens culturels. En s'appuyant sur le protocole additionnel I et le statut de Rome de la Cour Pénale Internationale, l'article 15 du deuxième protocole définit cinq actes qui constituent une infraction grave et qui doivent être punis d'une sanction pénale lorsqu'ils sont commis intentionnellement et en violation de la convention de 1954 et du deuxième protocole : 1. faire d'un bien culturel sous protection l'objet d'une attaque ; 2. utiliser un bien culturel sous protection renforcée ou ses abords immédiats à l'appui d'une action militaire ; 3. détruire ou s'approprier sur une grande échelle des biens culturels protégés par la convention (deuxième protocole) ; 4. faire d'un bien culturel couvert par la convention et le (deuxième) Protocole l'objet d'une attaque ; 5. le vol, le pillage ou le détournement des biens culturels protégés par la convention, et les actes de vandalismes dirigés contre les biens culturels protégés par la convention. Toute fois, le fait de définir les violations graves n'est pas en soi suffisant pour garantir que les auteurs de tels actes soient punis. * 59 Articles 11 §4 et 85 §3 et 4 du Protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 Août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (protocole I) * 60 Articles 49, 50, 129 et 146 du 1ère, IIème, IIIème et IVème convention de Genève. * 61 Article 87, 81 et 3 du protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 Août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole 2). * 62 Article 28 de la convention de 1954. * 63 Th. RADITSKY, La responsabilité pénale individuelle pour la violation du Droit International Humanitaire applicable en situation de conflit armé non-international, Genève, CICR, 1998, p78. |
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