L'hypothèse de la relance de la gestion d'une agglomération: le cas de l'aire métropolitaine de Port-au-Prince( Télécharger le fichier original )par Carline JOSEPH CTPEA - Maitre en Développement Urbain et Régional ( option gestion urbaine) 2011 |
2.1 Transition démographique, transition urbaine : Regards sur les villes de l'AMPHaïti est un pays qui se trouve à une étape de transition démographique modérée. En effet, elle présente une natalité élevée soit 30%0habitants en 2000-2005 et une mortalité modérée, 10,5%0habitants pour la même période. C'est pourquoi, cette particularité laisse observer une croissance modérée de la population avec une structure par âge où les jeunes prédominent. Il faut toutefois souligner que le processus migratoire en Haïti tend à accélérer cette transition.7(*) Se référant aux inquiétudes que suscite le cas des villes haïtiennes principalement l'Aire Métropolitaine de Port-au-Prince (AMP), il est nécessaire de considérer la transition urbaine. En réalité, le schéma de la transition urbaine prolonge celui de la transition démographique au niveau d'un système de peuplement où l'urbain est distingué du rural. Selon l'INED, la transition démographique est un changement radical survenu dans un régime démographique traditionnel où les taux de natalité et de fécondité sont élevés. Les changements techniques et les idées nouvelles ont conduit àun régime moderne qui se traduit par une baisse des taux de fécondité et de natalité. C'est ce qu'on appelle transition de la fécondité ou transition épidémiologique ou encore transition sanitaire. Or, le schéma de la transition démographique affirme qu'au cours du processus de modernisation le taux d'accroissement naturel de la population suit une évolution en forme de cloche ou de matière équivalente que la population croit suivant une évolution ayant plus ou moins la forme d'un S. Par ailleurs, on admet que la transition urbaine est bien plus qu'un passage statistique : c'est aussi un passage dans le fonctionnement et l'organisation des territoires ; dans leur gestion et dans celle des citadins qui les habitent ; c'est enfin un passage politique. Par ailleurs, les villes formant l'agglomération dénommée l'AMP, regroupent des populations très inégales. Selon le recensement de 2003, Port-au-Prince et Delmas représentent respectivement 38,3% et 31,5% de la population de cette aire, alors que Pétion-Ville et Carrefour ont les plus faibles pourcentages soient, 19,1% et 11.1%. Bien que, parmi ces villes, la ville de Port-au-Prince soit demeurée longtemps l'une des plus peuplée, sa part dans la population de l'AMP est passée progressivement de 84,9% en 1950, à 88,1% en 1971, puis 90,6% en 1982 pour connaitre une baisse en 2003 soit 61,2%. Durant ces mêmes périodes, l'importance démographique relative des autres villes n'a pas été connue pour les trois premiers recensements, alors que pour Pétion-Ville elle a baissé passant de 15,1% en 1950 à 8,2% en 2003 (Tableau 1.2 Ci -après). Tableau 1.2 Répartition de la population totale des villes de l'AMP au cours des recensements de 1950,1971, 1982 et 2003 (en %).
Source : IHSI, recensement 1950, 1971,1982 et 2003 Entre les deux derniers recensements (1982 et 2003) ces villes ont connu un accroissement annuel intercensitaire atteignant 4,7% pour Port -au-Prince, 5,9 % pour Pétion -ville, les données pour Carrefour et Delmas n'étant pas disponibles. En supposant que ces taux demeureront constants, ces deux villes doubleront leurs effectifs, l'une tous les 15 ans et l'autre tous les 12 ans environ. Figure 6.2 : Répartition de la population de l'Aire Métropolitaine de Port-au-Prince en 2003 (en %) Source : IHSI, recensement général de la population et de l'habitat 2003 Ce dernier modèle convient surtout à Haïti ; puisque cette transition a des effets sur le développement, des impacts négatifs sur l'écologie, un rajeunissement de la population et un vieillissement continu. Alors que la transition urbaine, qui emprunte ses fondements de la théorie de la mobilité proposée par Zélinski en 1971, montre que la mobilité des individus présente des régularités variant plus ou moins avec le type de mouvements.8(*) Ainsi, dans la plupart des cas, la propension à migrer des individus, quasi nulle dans les sociétés traditionnelles, augmente à mesure que se déroule le processus de modernisation puis, passé un certain stade, commence à diminuer singulièrement pour redevenir quasi nulle dans les sociétés modernes. Appliquée au cas des migrations du rural vers l'urbain, qui caractérise l'Aire métropolitaine de Port au-Prince, cette théorie donne lieu au schéma de la transition urbaine. De même que le schéma de la transition démographique, ce schéma comprend trois phases. · Celle des sociétés traditionnelles, il y a peu de mouvement du rural vers l'urbain; · Celle coïncidant avec le processus de modernisation, les migrations du rural vers l'urbain s'amplifient non seulement en volume mais également au niveau individuel; · Celle où les mouvements s'essoufflent et la propension à migrer vers l'urbain finit par diminuer. Ainsi à mesure que se produit le processus de modernisation, le taux d'émigration nette du secteur rural suit une évolution en forme de cloche que suit également le taux d'immigration nette du secteur urbain. En fait, l'évolution du taux d'accroissement de la population de l'AMP entre 1950 et 2003 laisse apparaitre une augmentation significative mais l'évolution du degré d'urbanisation paraît plus frappante que le taux d'accroissement (voir tableaux 2.2 et et 2.3). Tableau 2.2 Évolution des taux d'accroissements annuels des villes composant l'AMP de 1950 à 2003 en %
Source : IHSI Ainsi, nous nous accrochons à l'idée de ceux qui avancent qu'il y a une relation entre degré d'urbanisation et niveau de l'emploi, il y a aujourd'hui une hyperurbanisation dans l'AMP, toutefois les conditions sont différentes suivant la ville considérée. Il convient ici de souligner que la population urbaine de Port-au-Prince a fluctué durant les quatre recensements, passant de 93,4% en 1950 à 92,8% en 1971 puis à 95,1% en 1982 à un pourcentage inférieur de 36,2% en 2003.9(*) Alors que Pétion -ville a connu des hauts et des bas passant de 6,6% en 1950 à 7,2% en 1971,puis 4,9% en 1982 à un sommet de 10,9% en 2003. Tableau 2.3 Répartition de la population de l'AMP au cours des recensements de 1950,1971, 1982 et 2003 (en %).
Source : IHSI Mais, l'accroissement rapide de l'AMP ne tient pas qu'à son évolution démographique. En effet, au cours de ces trente dernières années, il résulte d'une très forte attraction des populations migrantes des autres villes et sections rurales du pays vers la Capitale. L'AMP demeure l'un des grands pôles d'attraction des migrants du pays et un espace où se concentrent les principales activités lorsqu'on la compare à d'autres chefs-lieuxde départements. 1 916 133 personnes résident dans l'AMP, 637 038 sont des migrants soit 78,84% du total des migrants internes du pays. De plus, les mouvements migratoires ruraux à destination de l'AMP comptent 350 000 personnes soit plus de la moitié (54,9 %) du total des migrants de l'AMP. 2.3 Contexte de la construction des quartiers précaires dans l'AMPL'AMP particulièrement Port-au-Prince, depuis 1950 et pendant de nombreuses années, a attiré les populations des autres départements. Les conditions socio-économiques régnant dans les campagnes, la concentration des structures administratives et éducatives ont contribué à l'afflux de la population vers cette agglomération. Ils y viennent afin de chercher du travail et d'apporter une main d'oeuvre à bon marché. La migration des années soixante est influencée majoritairement par les industries de sous-traitance installées à Port-au-Prince et le fait des fêtes organisées par le pouvoir des Duvaliers qui rassemblaient bon nombre de personnes transportées en camions et autres sur les places publiques. Des cités seront construites à cité soleil ci devant Cité Simone, à Delmas 2 etc... Après 1987, les coups d'État militaire vont permettre à certains soldats des forces Armés d'Haïti (FADH) et autres citoyens influents de s'approprier des terrains laissésvacants en flanc de montagne et sur le littoral. Ainsi naissent les zones telles que Fort mercredi, de Cité l'Eternel, cité Plus, Village de Dieu etc Vers les années quatre vingt dix, le pouvoir Lavalasse permet le regroupement d'un nombre imposant de la population venue de la province dans ces quartiers dits précaires. Les résidents font venir, quand ils le peuvent, leurs familles et leurs amis. Les crises politiques des années 2000 et jusqu' à 2010au lieu de mettre un terme brutal à cet afflux de migrants n'ont fait qu'atténuer cette situation. Les effets de la centralisation des structures administratives et éducatives, et le développement du secteur informel justifient le mirage de la ville capitale. Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010 les tentes s'éparpillent un peu partout sur les places publiques, terrains vacants et autres. Cette situation semble freiner très temporairement la tendance qui tend à se consolider comme une tendance à long terme par la construction de maisons de fortune dans les gros camps comme Corail. En 1950, les port-au-princiens vivaient dans les cités ; aujourd'hui les bidonvilles de l'AMP accueillent près de 67% de cette population. Toutefois, aujourd'hui, on essaie de faire comprendre et d'exiger la destruction de certains bidonvilles jugés dangereux. Un plan de reconstruction de la ville de Port-au-Prince est toujours en attente et la résorption de l'habitat provisoire aboutit à la consolidation des camps qui devraient être un espace de transit mais qui vont perdurer des années, en attendant que toutes ces familles soient relogées dans un logement social. * 7 Ministère de l'économie et des Finances et IHSI. Bureau du recensement et Centre latino-américain de démographie CELADE/CEPAL. 2008. Estimations et projections de la population totale, urbaine, rurale et économiquement active. Port-au-Prince. pp 17-18 * 8 www.ucs.inrs.ca/cours/ledent/eur8224 * 9N.BEn 1950, 1971 et 1982, l'AMP était composée de deux villes : Port-au-Prince et de Pétion - Ville; en 1982 elle était composée de quatre villes mais les résultats publiés ne concernaient que deux villes (Port-au-Prince et Pétion -ville); en 2003, deux autre villes ont été créées par décret cependant les résultats publiés ne concernaient que quatre villes (Port-au-Prince, Pétion -ville, Delmas, Carrefour) donc les données concernant Cité -Soleil et Tabarre n'étaient pas encore disponibles. |
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