Charge financière dans la
fabrication d'un journal: cas de Talassa
Désignation
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Prix unitaire en FCFA
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Quantité moyenne par édition
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Total
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Nombre de parutions
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Coût global
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Rame de papier
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18.000
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10
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180.000
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12
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4.160.000
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Plaque
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6000
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6
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36000
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12
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432.000
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Impression
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150.000
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2000
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150.000
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12
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1.800.000
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Coût minimal pour 12 éditions
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4.392.000 FCFA
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De facto, il est aisé de comprendre pourquoi les
domiciles de certains directeurs de publications font office de
« siège social » à certains titres
dépourvus de moyens. Dans ces conditions, la véranda, voire la
cour du promoteur/directeur de publication peut servir de "salle de
conférences" dans l'hypothèse où il existerait une
équipe rédactionnelle d'au moins une dizaine de personnes.
Malheureusement, ce n'est pas souvent le cas sachant que des
promoteurs/propriétaires des périodiques préfèrent
individuellement assumer plusieurs tâches à la fois et limiter le
nombre d'employer dans l'intention de minimiser au mieux les charges qui,
valent bien plus que ce que nous avons indiqué ici, si nous
considérons les dépenses relatives à l'eau et
l'électricité, à la communication (téléphone
et Internet), au transport, à la distribution, aux fournitures de
bureau... Les coûts sont énormes.
La descente aux enfers : la pluralité
à la précarité
Dépourvus d'ambition et de modèle
économique, ces titres ont pour la plupart simplement disparu du paysage
médiatique comme du beurre au soleil. La Nation,
Madukutsékélé, La Rumeur, Le Tam-Tam, la liste n'est
pas exhaustive. Aujourd'hui encore, faute de base économique, nombreux
sont les titres sans avenir : La Rue-Meurt, L'Observateur, Boponami,
Nouvelle Vision et bien d'autres encore n'augurent pas des lendemains
meilleurs. Face à l'étroitesse du marché de la
publicité sur lequel les principaux annonceurs ou partenaires
publicitaires (institutions gouvernementales pour l'essentiel et les ONG et
entreprises privées dans une moindre mesure) détiennent les
clés de l'indépendance, le recours à des méthodes
peu orthodoxes et déontologiques pour survivre est inévitable
pour ces entreprises de presse dont le principal modèle de financement
reste la publicité. Dépendant des annonces et peu
structurée, la presse se trouve alors domestiquer et instrumentaliser
par les pouvoirs économiques : institutions gouvernementales, ONG
et entreprises privées. Dans cette jungle médiatique, l'organe
qui aura vivoté cinq (5) ans durant pourra s'estimer chanceux.
Toutes proportions gardées, au regard de l'absence de
données chiffrées (fiables) avec des encarts publicitaires au
prix dérisoire (200 à 100.000 F CFA la page), le marché
reste embryonnaire. Et à chaque fois qu'un nouvel organe d'information
voit le jour, l'émiettement des parts de la publicité aux
médias devient considérable et réduit toute chance de
rentabilité ou de rentabilisation... À cette
réalité, on peut ajouter le décalage entre le tirage de
chaque organe de presse et la population générale (environ quatre
millions d'habitants) ou le taux d'alphabétisation (92,1 %) en
République du Congo. Ce qui signifie que par rapport au nombre de la
population et à celui des personnes sachant parler et lire le
français au Congo (78 % en 2010), les capacités
réelles des organes de presse écrite à informer ses
potentiels lecteurs sont quasi-nulles. Dans ces conditions, les annonceurs
ont-ils tort de jouer des organes de presse incapables de fixer le prix d'un
encart publicitaire en fonction, non seulement de la place de la
publicité dans le journal, mais également en tenant compte de la
taille du lectorat ? Dans ce modèle économique introuvable,
le financement direct ne saurait garantir un retour sur investissement,
viabiliser ou rentabiliser l'activité journalistique, le projet
éditorial. La pénurie du papier, intrant incontournable,
représente aussi une externalité négative qui
anéantit tout éventuel avantage lié aux coûts fixes
sur lesquels les médias s'appuient souvent économiquement. La
probabilité d'un fort taux de prise en main du journal par les lecteurs
est faible si l'on considère le rapport aux éventuels invendus et
la population générale. Ce qui signifie que la presse n'a pas les
moyens de ses ambitions.
Par ailleurs, les écarts de tirage peuvent être
expliqués par, cela est à relativiser, des écarts
budgétaires entre ces différents organes de presse. Mais, cela
signifie-t-il que le titre qui mobilise des capitaux élevés se
soucie plus de la rentabilité de son activité ?
Plus de 30 ans durant, des années
post-indépendances à la conférence nationale souveraine en
1990, la presse écrite congolaise a fait les frais de la monopolisation
de la parole sévèrement contrôlée par l'État,
freinant ainsi toute initiative privée ou individuelle. À cause
de cette situation de monopole d'antan, malgré l'ouverture
démocratique des années 90, nous distinguons deux
catégories d'entreprises de presse écrite dans le paysage
médiatique congolais : les organes de presse débrouillards
et ceux relativement bien organisés.
Les organes de presse débrouillards
De façon générale, ils sont
sous-équipés et ne disposent guère d'un budget de
fonctionnement ni d'un fonds de roulement, ce qui explique
l'irrégularité de parution de certains périodiques qui
participent de cette catégorie. Ces organes de presse, en dépit
de la rédaction présentée dans l'ours, ne dispose pas d'un
organigramme. Ce qui traduit combien le fonctionnement de ces organes reste
simplement une aventure. Car, non seulement les effectifs du personnel aussi
bien administratif que rédactionnel permanents dépassent rarement
une dizaine d'employés, mais également le promoteur et/ou
propriétaire cumule les fonctions de directeur de publication, d'agent
commercial ou de chargé de marketing et de directeur
général. Il s'agit en gros soit des organes d'information
à propriété déguisée ou des titres
créés presque de façon spontanée contrairement
à d'autres issus d'un projet éditorial et économique. Dans
cette catégorie, on peut classer les organes suivants : les
périodiques Vision Nouvelle et Boponami qui sont
respectivement animés par une et trois personnes. Dans les deux cas,
aucun de ces périodiques ne dispose d'un siège social : les
adresses indiquées sur les bandeaux des imprimés étant les
domiciles de chacun des directeurs de publication. Si Vision Nouvelle
est une initiative « individuelle », Boponami
quant à lui est le fruit d'une « mutualisation des
fonds »;
Talassa : à la différence des deux
périodiques cités supra, ce bihebdomadaire né d'une
ambition personnelle dispose au moins d'un siège social et compte 19
agents dont neufs journalistes sur trois permanents. Ce bi hebdo ne dispose ni
d'un organigramme ni d'un budget, deux facteurs clés pour une meilleure
gestion et organisation. Par ailleurs, l'Observateur est
animé par deux journalistes qui sont les hommes à tout faire.
Quant à La Nouvelle République, organe de presse de
service public comptant un personnel de plus 50 agents (journalistes et autres
confondus), ni son nouveau siège inauguré le 10 août 2012
ni son budget annuel, « versé à compte
goûte » et passé de dix-huit millions en 2008 à
dix millions en 2012, ne lui permettent de paraître de façon
régulière pour rivaliser avec les médias privés.
Cet organe est pourtant bien organisé de par son organigramme, mais sa
forte dépendance à l'égard du ministère de la
communication semble le rendre contre-productif.
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