3.10 : Entre recomposition et mutations
foncières : quel avenir pour l'élevage et le pastoralisme aux
dallols et sur la vallée du fleuve Niger ?
La tendance au développement de l'irrigation sur la
vallée du fleuve Niger et de ses affluents à savoir les dallols
Maouri et Fogha risquerait de compromettre à jamais le pastoralisme dans
cette région. Ainsi, des communes septentrionales dans le
Département de Dogondoutchi jusqu'à la zone de confluence entre
le dallol Fogha et le fleuve Niger à Dolé dans la commune de
Tounouga au Sud, le secteur de l'élevage est soumis à des
contraintes. Il s'agit des difficultés que rencontrent les
éleveurs et les animaux pour y accéder aux ressources pastorales
de ces milieux. Cela semble être la même situation qu'ont ressortie
Alexis Gonin et al en 2012 dans une étude conduite au sein du bassin
cotonnier à l'Ouest du Burkina Faso. En claire, c'est la recomposition
et le changement de fonction des espaces pastoraux à travers la mise en
culture des pistes à bétail, la réduction des
pâturages et les difficultés liées aux déplacements
des troupeaux dans ce bassin qui est aussi une zone de transition
sahélo-soudanienne.
52
Aujourd'hui, dans la zone des dallols et de la vallée
du fleuve Niger la mise en valeur de ces espaces en culture irriguée
tend à se généraliser. La conséquence sociale est
l'aggravation des conflits entre les acteurs. Rien qu'en 2012, dans la commune
de Doumega les conflits entre les éleveurs et les agriculteurs ont fait
l'objet d'énormes dégâts d'environ 40 cases et 25 greniers
des éleveurs brûlés. A cet effet, le village de Dolé
dans la commune de Tounouga est le sanctuaire de conflits de ces genres depuis
l'introduction de l'irrigation il ya à peine 4 ans. Avec le
développement des cultures de contre saison, l'exploitation des
ressources pastorales dans les dallols et le système transhumant des
pasteurs seront aléatoires au regard des difficultés
d'accès à ces ressources.
Face à ce problème crucial, il nous semble
important voire urgent de préciser dans le cadre du Schéma
d'Aménagement Foncier (SAF) que certains espaces dans les communes de
Yélou, Bana et Bengou peuvent être classés comme zones
pastorales. La présence du sel dans ces régions handicapent le
développement des cultures irriguées. De Malgorou en allant vers
le Nord de la vallée du dallol Fogha où certains chefs des
villages affirment avoir laissé le maraîchage depuis plus de sept
(7) ans (Leysson Baydou, L Matché). Ensuite, entre Bana et Bengou, la
présence de sel à faible dose n'empêche pas
l'irrigation.
A l'Ouest de cette commune sur une longueur de trois
kilomètres, les animaux exploitent les ressources pastorales du dallol
en saison sèche. C'est seulement en hivernage que les maraîchers
utilisent ce potentiel avec comme principales spéculations la patate
douce et la canne à sucre.
Ainsi, sur la route de Tounouga se présente des sols
dunaires certes favorables aux spéculations de la patate douce mais,
dans l'ensemble la zone présente plus des caractéristiques
à vocations pastorales qu'agricoles. C'est aussi, la même
situation dans la partie Sud de Yélou où les parcs à
rôniers imposent l'activité pastorale au détriment de
l'irrigation.
A cet effet, il est donc nécessaire de dégager
le statut clair de ces zones humides. Cette réglementation permettra,
soit d'intégrer les deux systèmes de productions ou de laisser
à une seule activité. Si non, dans ces conditions, certains
producteurs ruraux peuvent accaparer à jamais ces espaces au
détriment des autres exploitants.
A ce sujet, l'application du décret n° 87-077 /
PCM/MI du 18 juin 1987 réglementant la circulation et le droit de
pâturage du bétail dans les zones des cultures n'est pas
effective. A cela s'ajoute aussi, le non respect de l'ordonnance n°2010
relative au pastoralisme en son
53
dernier alinéa8. De ce fait, on assiste
à la recomposition de l'espace et aux mutations des statuts fonciers.
Avec le développement de l'irrigation et l'extension des superficies
surtout ces dernières années, les espaces pastoraux sont entrain
d'être transformés en devenant des espaces purement et simplement
agricoles. L'une des conséquences est la déstructuration du
système de la mobilité pastorale. Dans le contexte des dallols,
ce mode de conduite des animaux est d'une importance capitale compte tenu de la
situation écologique du milieu. Il s'agit là du système
plateaux-vallées, vallées- plateaux. Donc, limiter
développement de l'élevage sur les plateaux c'est réduire
la production animale dans cette zone. Selon des nombreuses recherches
passées et en cours, les espaces pastoraux du sahel sont modelés
par un déséquilibre instable entre cheptel et la
végétation9. L'impacte de troupeaux dans le
système écologique sahélien est bénéfique
à bien des égards. La pâture dans le système mobile,
constitue un acte mécanique qui améliore la qualité du
pâturage durant la courte période des croissances des plantes et
enrichi la diversité de la flore. Il est donc nécessaire
d'accorder plus de valeur à cet équilibre, à la favorable
action du bétail pour la préservation de l'environnement du sahel
en générale et de la zone des dallols et de la vallée du
fleuve Niger en particulier.
|