TITRE 2:
EVALUATION DE LA REGLEMENTATION FRANCAISE
DES SOCIETES DE FINANCEMENT
Comme il a été précisé plus haut,
la société de financement a déçu les espoirs qui
lui étaient attachés, en ce sens qu'elle est
délibérément circonscrite aux anciennes
sociétés financières sans que d'autres entités
nouvelles puissent en solliciter l'agrément, en raison de la
circonspection des autorités de régulation au regard de cette
nouvelle forme d'établissement. Néanmoins, pour les besoins de la
réflexion, il nous faut examiner l'attractivité du régime
de la société de financement dans l'hypothèse heureuse
où « l'embargo juridique » pesant sur la société
de financement viendrait à être levé. De la sorte, nous
mesurerons l'adéquation du régime de la société de
financement aux objectifs d'attractivité et de protection avant de
formuler des propositions pour en améliorer le dispositif.
Il est évident que l'assimilation du régime
prudentiel de la société de financement à celui des
établissements de crédit par application du package CRD / CRR est
de nature à sauvegarder la stabilité financière en
soumettant ces sociétés à des exigences strictes à
la fois en termes de fonds propres, afin de renforcer la solvabilité,
mais également en termes de couverture des risques, de diminution du
levier, et de constitution de coussins de fonds contracycliques pour
éviter les effets de procyclicalité en temps de crise et
afin que les sociétés puissent continuer à prêter.
Ainsi, l'application de ces exigences issues des accords de Bâle III est
associée au degré de protection le plus élevé
contre les risques liés à l'activité de prêt. En
effet, les risques tels que le risque de contrepartie, d'illiquidité, ou
de runs, sont ainsi minimisés. Dès lors, il peut
être affirmé que la société de financement
présente peu de risques au niveau de la stabilité
financière.
Pour autant, ce principe d'assimilation au régime
prudentiel des banques n'est pas sans poser des problèmes. Dans
l'hypothèse, en effet, où l'obtention de l'agrément serait
possible pour des entités du shadow banking, sans que l'ACPR ne
s'y oppose, ce régime pose problème au niveau de
l'attractivité du statut. D'abord, si l'on considère que c'est
justement le
notamment celles qui figurent dans les sixième et
septième parties du ce règlement.
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durcissement prudentiel pesant sur les banques qui a
été à l'origine de la raréfaction du crédit,
il y a là une contradiction à soumettre une nouvelle
entité non bancaire à des exigences aussi strictes, car la
nouvelle entité, supposée - à tout le moins au sens du
droit de l'Union européenne - pallier l'insuffisance des banques, ne
pourrait mener cette tâche à bien. Mais ce sont surtout les
conséquences du régime prudentiel sur l'attractivité du
statut qui sont dirimantes. En effet, il y a fort à parier que les
établissements qui auraient pu prétendre au statut de
société de financement soient dissuadés par la
complexité du statut prudentiel et les exigences en termes de fonds
propres, d'autant plus parce que ces entités - désirant
réaliser des opérations de crédit - avaient
délibérément choisi de ne pas opter pour ce statut avant
que la société de financement soit créée.
Ainsi, il semble que l'arbitrage ait été
clairement réalisé en faveur de la sécurité
financière et moins en faveur de l'attractivité. Ainsi, la
société de financement apparaît condamnée à
la fois par son régime prudentiel, et par les réticences de
l'Autorité de contrôle prudentiel.
Cependant, si l'on part du principe que le statut de
société de financement reste une avancée positive du droit
qui présente des attraits et des potentialités au niveau
conceptuel, l'on est en droit de se demander si une troisième voie n'est
pas envisageable. Cette dernière consisterait à prendre plus
largement en compte les spécificités de la société
de financement et surtout les objectifs qu'elle pourrait servir en terme de
source de financement alternative pour les agents économiques. De la
sorte, il est nécessaire d'élaborer un régime prudentiel
qui, sans sacrifier les impératifs de stabilité
économique, soit moins contraignant. Il est possible d'assouplir le
régime applicable aux sociétés de financement sans
sacrifier la stabilité financière : notamment en réduisant
les exigences en termes de capital et d'actionnariat, et en réduisant
les obligations relatives aux ratios de solvabilité.
Bien entendu, l'ensemble de ces préconisations ne
présente un intérêt qu'à partir du moment où
l'idée que cette forme juridique puisse bénéficier aux
entités du shadow banking soit admise, ce qui, en
l'état, n'est pas d'actualité.
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