II.1.4- le point de vue des auteurs
- Jean Bodin32 (1568) rejette
l'idée selon laquelle la hausse des prix serait seulement due à
la dépréciation de l'unité de compte. Pour obtenir la
même quantité de biens qu'au début du siècle, il
faut livrer une quantité supérieure de métal. Non
seulement cet auteur explique la hausse des prix par l'afflux d'un métal
que reçoit d'abord l'Espagne, mais il montre comment cette hausse se
répercute en France.
- David Hume (1752) effectue une
présentation mécanique des effets d'une variation du stock de
monnaie sur les prix qui nous rapproche des formulations modernes de la
théorie quantitative. Selon cet auteur, si en une nuit les quatre
cinquièmes de la monnaie circulant en Grande-Bretagne disparaissent, les
prix devraient baisser dans les mêmes proportions. Au contraire, si par
miracle cette quantité de monnaie quintuplait dans la nuit, l'effet
inverse se produirait.
- Selon les économistes d'obédience
keynésienne, la politique monétaire rejette l'hypothèse
selon laquelle la monnaie est neutre à court terme. Car pour Keynes et
ses disciples la politique monétaire est un instrument de politique
conjoncturelle dont le rôle est généralement
présenté dans le cadre du modèle IS/LM
(Investment-Saving/Liquidity-Money). La politique monétaire
32 Bodin, avocat à la cour, publie en 1568 "Une
réponse aux paradoxes de M. de Malestroit touchant
l'enchérissement de toutes choses"
29
dans la conception keynésienne se fixe comme objectif
final l'arbitrage entre inflation et chômage, et retient comme objectif
intermédiaire les taux d'intérêt : ceteris paribus, lorsque
l'économie est en surchauffe, une politique monétaire
restrictive, en augmentant le taux d'intérêt, permet de combattre
les tensions inflationnistes. À l'inverse, en période de hausse
du chômage, une politique monétaire expansionniste avec une
diminution des taux d'intérêt doit permettre de relancer
l'investissement et l'activité.
- Selon P. Guillot, la politique
monétaire est pour les keynésiens un outil d'accompagnement de la
politique budgétaire dont les effets sont plus importants sur la demande
globale, donc sur l'ensemble de l'activité économique. Pour
les keynésiens, en matière monétaire, il faut agir sur le
taux d'intérêt car il est le déterminant de la demande de
monnaie et de la demande d'investissement. Par ailleurs, pour les
monétaristes, il faut privilégier la politique monétaire
au détriment de la politique budgétaire qui est peu efficace
à court terme. Toutefois, la politique monétaire doit être
utilisée avec circonspection afin de maîtriser les effets
inflationnistes. Selon la conception monétariste, la politique
monétaire ne doit avoir qu'un seul objectif : lutter contre
l'inflation.
Pour les classiques, la réglementation doit être
le vecteur directeur de la politique monétaire en ce sens qu'elle ne
doit jamais être discrétionnaire. Seules les politiques
monétaires respectant la condition de cohérence inter temporelle
des choix peuvent être crédibles.
- Pour Emile JAMES (1970), l'inflation est un
phénomène global et non pas strictement monétaire. Global
par ses causes, car étant un excès de la demande globale. Global
pour ses conséquences, en ce sens qu'il affecte l'économie dans
son ensemble, modifie les prix, la structure des revenus, le quantum et
l'orientation de la production. Plus loin, il soutient que la monnaie est un
moyen d'action. Elle n'est pas un simple "voile", ni seulement un
"intermédiaire
30
des échanges" et un "étalon de valeurs", mais un
levier permettant de promouvoir la croissance de l'économie, de modifier
la distribution des revenus et une source privilégiée de
puissance. Au-delà de certains niveaux, le développement des
opérations de crédits n'entraîne que la hausse des prix, et
non l'essor de l'activité. Les autorités monétaires
doivent donc se concerter pour rechercher quel est, parmi les taux de
croissance possibles, le plus compatible avec l'équilibre
monétaire.
- John Taylor (1993), dans ce même
ordre d'idées, a énoncé une règle moderne de
politique économique selon laquelle les autorités
monétaires fixent le taux nominal en fonction des déviations de
l'inflation et l'écart de production par rapport aux cibles visés
en la matière. En d'autres termes, le taux d'intérêt
décidé par la Banque Centrale est relié au taux
d'inflation de l'économie et à l'écart entre le niveau du
PIB et son niveau potentiel :
: le taux d'intérêt réel à l'instant t
;
: le taux directeur fixé par la Banque Centrale à
l'instant t ;
: le taux d'inflation, la cible d'inflation de la Banque Centrale
; et : les niveaux respectifs du PIB et du PIB potentiel ;
et sont déterminés par l'entremise de
modèles économétrique formulé par les
économistes de la Banque Centrale pour la zone monétaire ou le
pays concerné.
L'équation de Taylor dite règle de Taylor permet
de calculer la valeur optimale à fixer pour le principal taux directeur
de la Banque Centrale. La règle de Taylor suggère un taux
d'intérêt élevé quand le taux d'inflation
dépasse sa cible et quand l'économie semble être en
surchauffe ; et un taux d'intérêt relativement bas dans des
situations opposées. Ainsi cette règle propose-t-elle une
31
politique monétaire accommodante. Selon M. Zumpe
(2010), l'intuition de Taylor est que les autorités monétaires
tiennent compte de l'inflation et de l'écart de production lorsqu'elles
prennent des décisions de politique monétaire.
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