WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les relations internationales âpres la guerre froide: analyses et perspectives

( Télécharger le fichier original )
par Merveil Ilonga leka bilimba
Université pédagogique nationale - Licence 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CHAPITRE II : A LA RECHERCHE D'UN NOUVEL ORDRE MONDIAL

La Guerre froide permettait à la politique étrangère américaine de se fonder sur trois paradigmes simples : "endiguer" (contain) l'Union Soviétique, empêcher la diffusion du communisme, promouvoir une croissance économique globale, sous-direction américaine. Pour la première fois depuis plus de quarante ans, les Etats-Unis doivent réévaluer leur place dans le monde, penser à nouveau leur politique extérieure, "repartir à zéro".

En fait, depuis l'attaque japonaise sur Pearl Harbor le 7 décembre 1941, la politique étrangère américaine n'a été formulée qu'en réponse à une menace posée par des ennemis. Depuis cette date fatale, l'engagement actif à l'extérieur n'a jamais cessé. Quand les armes se taisaient, la confrontation se poursuivait sous d'autres formes. Depuis 1990, les Etats-Unis ont retrouvé une véritable liberté de choix.

SECTION 1. CONCEPTS AMERICAINS POUR L'APRES-GUERRE FROIDE

Le regard se porte, dans un réflexe compréhensible devant l'inconnu, sur ces années cruciales où avaient été définies les grandes options vis-à-vis de l'extérieur. On va rechercher certaines études des années 1945-1949. On interroge à nouveau George Kennan, Robert Strausz-Hupé, Dean Acheson. La référence à l'histoire oblige même à remonter à la seconde décennie du XIXe siècle, lorsqu'un "nouvel ordre mondial", arrêté au Congrès de Vienne, avait mis un terme aux guerres napoléoniennes. Même si la compétition entre les puissances continue, la crainte d'une domination globale par la force semble avoir disparu, et avec elle, au fond, la première caractéristique de la politique internationale au XXe siècle.

Les Américains ont toujours aimé utiliser des expressions-clés, des concepts significatifs d'une vision du monde et du rôle de leur pays. Le "nouvel ordre mondial" préconisé par George Bush au moment de la guerre du Golfe est le plus connu de ces concepts d'après-guerre froide.

Il n'est pas le seul. D'autres sont apparus, dans la même mouvance d'un "internationalisme triomphant" ou dans celle, bien connue, de l'isolationnisme : thèse et antithèse. L'administration Clinton semble avoir recherché une sorte de synthèse en pratiquant un "nouvel internationalisme" aux contours assez flous mais dont émergent malgré tout certains concepts tels que l'"engagement global sélectif" ou la "sécurité économique".

22

§1. L'internationalisme triomphant

Les Etats-Unis sont naturellement triomphants pour les analystes qui s'étaient spécialisés dans l'étude de la menace soviétique et plus généralement pour ceux qui considèrent la dimension militaire comme le fondement ultime de la puissance. Il en a été de même pour l'administration Bush, qui avait un intérêt politique évident à engranger les bénéfices de la "victoire", mais dont les conceptions fondamentales insistaient aussi sur le rôle de commandant en chef du Président14.

Pour ceux qui sont davantage sensibles aux aspects économiques de la puissance et qui font des comparaisons avec le Japon et l'Allemagne, le triomphe des Etats-Unis paraît plus modeste. D'une manière générale, l'option internationaliste triomphante est celle de la continuité dans la politique étrangère, mais avec cette caractéristique, pour certaines variantes du moins, que l'instant est à saisir, que l'Amérique doit profiter au maximum de sa position actuelle d'unique superpuissance.

§2. Le nouvel ordre mondial

Le 11 septembre 1990, George Bush présentait l'instauration d'un "nouvel ordre mondial" comme le cinquième des objectifs à atteindre dans l'affrontement avec l'Irak de Saddam Hussein. Mais c'est après la fin des hostilités, en avril 1991, qu'il donna une signification précise au concept : celui-ci voulait décrire la nouvelle responsabilité que leurs propres succès imposaient aux Etats-Unis.

C'était une nouvelle façon de travailler avec les autres nations pour dissuader toute agression, assurer la stabilité, la prospérité et la paix. Dans le cas de l'invasion du Koweït par l'Irak, les Nations Unies avaient pu fonctionner comme cela avait été prévu par leurs fondateurs et des nations du monde entier s'étaient coalisées contre l'agresseur15. Le Président ajouta cependant que la recherche d'un nouvel ordre mondial restait en grande partie un défi : il fallait y oeuvrer pour écarter les dangers de désordre. Le monde restait dangereux et avait besoin du leadership américain. Les Etats-Unis ne pouvaient rester en retrait16.

14«Aucune fonction, aucun des chapeaux du Président, selon moi, n'est plus important que son rôle de commandant en chef» a dit George Bush à l'académie de West Point, le 5 janvier 1993 («Bush Says U.S. Military Power Must Help Promote Peace»,United States Information Service (USIS), Presidential Text,Bruxelles, Ambassade des Etats-Unis, 7 janvier 1993, p. 1). Les références à ces documents reproduits par l'Ambassade des Etats-Unis àBruxelles apparaîtront désormais sous la forme abrégée USIS.

15The White House, National Security Strategy of the United States, Washington, D.C., Government Printing Office, août 1991, p. V.

16Ibid., pp. V, 1-Q.

23

En fait, il n'y a rien eu de très nouveau dans le nouvel ordre mondial de George Bush. Le Secrétaire d'Etat James Baker n'a pas donné de contenu véritable au concept en dehors d'un souci constant de la "stabilité"17. Il y a, dans la responsabilisation des Etats-Unis, une continuité certaine avec la pratique de la Guerre froide, mais la clé du nouvel ordre mondial semble bien n'être que le maintien du statu quo. C'est la vision d'un monde qui n'aurait pas réellement changé.

Les dangers évoqués sont l'instabilité et l'incertitude18. L'Amérique deviendrait alors le principal gardien de la stabilité et de l'ordre, contre tout Etat menaçant la tranquillité du système international19. Il y aurait un leadership global, qui agirait dans le cadre d'une réponse collective. Les Etats-Unis seraient en quelque sorte le catalyseur, la conscience des démocraties.

Le concept de nouvel ordre mondial a donné lieu à de nombreuses analyses critiques, d'autant plus qu'il avait eu l'occasion d'être "mis en oeuvre" avec le conflit du Golfe. En dehors de la volonté de punir l'agression, un autre objectif est apparu dans ce conflit : la nécessité de détruire la machine militaire irakienne. L'argument, lié au concept de nouvel ordre mondial, n'était pas éloigné de la justification d'une guerre préventive20.

Les bombardements dont l'Irak fut encore l'objet en janvier 1993, dans les derniers jours du mandat de George Bush, sont venus renforcer cet aspect du concept de nouvel ordre mondial. Pour d'aucuns, la guerre dans le Golfe n'a pas créé les conditions d'une paix meilleure. Les Etats-Unis joueraient un rôle impérial en se déchargeant des devoirs classiques qui incombent à un empire, à savoir ramener la paix et l'ordre civil après la guerre.

Cette disjonction entre puissance et responsabilité mettrait en doute la capacité de la nation américaine à veiller militairement à l'instauration d'un nouvel ordre mondial21. Les limites de cette étude - dont l'objet n'est pas la politique étrangère de George Bush - ne permettent pas d'épiloguer pour savoir si le concept de nouvel ordre mondial est mort à Sarajevo, comme l'a dit Pierre Hassner22.

Il faut toutefois mentionner que l'opération Restore Hopemenée en Somalie à partir de décembre 1992 a apporté une dimension supplémentaire.

17Garry Wills, «The End of Reaganism», Time, 16 novembre 1992, p. 73 ; Richard Lacayo, «Boldness Without

Vision», Time, 9 mars 1992, pp. 20-21.

18The White House, op. cit., p. 25.

19James Chace, The Consequences of the Peace. The New Internationalism and American Foreign Policy, New York-

Oxford, Oxford University Press, 1992, pp. 10-12.

20David C. Hendrickson, «The End of American History : American Security, the National Purpose, and the New World

Order»,Rethinking America's Security. Beyond Cold War to New World Order, sous la dir. de Graham Allison et Gregory

F. Treverton, New York, Norton, 1992, pp. 397-398.

21Ibid., pp. 399-401 ; Alain Joxe, L'Amérique mercenaire, Paris, Stock, 1992, pp. 401-402.

22ime, 8 juin 1992, p. 25.

24

Cette fois, il s'est agi d'une intervention purement "humanitaire", où les Etats-Unis n'avaient apparemment aucun intérêt stratégique ou économique en jeu.

Il y avait cependant un point commun avec l'engagement dans le Golfe : le déploiement militaire était impressionnant, mais l'objectif politique à long terme n'était pas clairement défini. Le nouvel ordre mondial semble décidément très lié à une capacité militaire opérationnelle. En effet, s'il a été décidé d'intervenir en Somalie et non en Bosnie, par exemple, c'est parce que les militaires ont estimé que c'était "faisable" dans le premier cas23.

§3. Maintien du leadership de l'empire du bien» et unilatéralisme global

Le sénateur Malcolm Wallop (Républicain, Wyoming) a plaidé pour une interprétation plus activiste du concept de nouvel ordre mondial. Ronald Reagan avait qualifié l'URSS d'"empire du mal". Wallop n'hésite pas à qualifier les Etats-Unis d'"empire du bien"24.

C'est, selon lui, l'unique pays dévoué aux notions universelles de liberté et de justice et cela lui donne des responsabilités mondiales. La géographie contraint l'Amérique à rester engagée et active au dehors. Cela doit se faire par la puissance maritime et, surtout, par la maîtrise de l'espace. Ce deuxième champ stratégique est du même type que le premier : les espaces intersidéraux sont les mers du futur. La maîtrise de l'espace est le nouveau challenge pour les Américains, la "nouvelle frontière"25.

En mars 1992, une version du Defense Planning Guidance du Pentagone, qui n'était pas destinée à être rendue publique, est dévoilée par le New York Times et provoque une certaine sensation par son interprétation du concept de nouvel ordre mondial. Le texte a été rédigé par des fonctionnaires du département d'Etat et du Pentagone, sous la direction du sous-secrétaire à la Défense chargé des Affaires politiques, Paul D. Wolfowitz, et en liaison avec le Conseil national de sécurité.

Le rapport Wolfowitz affirme la volonté des Etats-Unis de garder leur statut de superpuissance unique. Il souligne le rôle privilégié, à cette fin, de la puissance militaire. Celle-ci devra éventuellement être utilisée de façon unilatérale par les Etats-Unis car l'ordre international est, en définitive, garanti par eux. L'Europe et le Japon devront être empêchés de porter ombrage à la

23Time, 14 décembre 1992, p. 25. Il y aurait eu aussi «l'effet CNN» : les scènes d'horreur en Somalie ternissaient, aux yeux du public américain, les derniers jours d'une présidence qui avait appelé à un nouvel ordre mondial (Le Monde, 5 décembre 1992, p. 3).

24Malcolm Wallop, «The Ultimate High Ground», America's Purpose. New Visions of U.S. Foreign Policy, sous la dir. d'Owen Harries, San Francisco, ICS Press, 1991, p. 98.

25Ibid., pp. 100-105.

25

domination américaine. L'OTAN, véhicule des intérêts américains en Europe, doit rester le premier garant de la sécurité sur le vieux continent26.

La presse reprocha au Pentagone de chercher à définir un agenda politique pour l'après-guerre froide et d'attribuer brutalement aux Etats-Unis ce rôle de "gendarme du monde" qu'on les soupçonne souvent de vouloir jouer. Mais si ce rapport fut rédigé, c'est à cause de l'absence de directive en provenance de la Maison blanche ou du Congrès27.

Le nouvel ordre mondial n'étant pas suffisamment défini par les autorités politiques, certaines autorités militaires crurent bon de préciser leur propre vision des intérêts américains. Celle-ci correspondait à un "unilatéralisme global", position soutenue par certains conservateurs qui croient que les Etats-Unis doivent agir seuls pour imposer la paix au monde.

§4. L'unipolarité

Pour le journaliste Charles Krauthammer, le monde de l'après-guerre froide est unipolaire et les Etats-Unis sont la superpuissance incontestée. Dans une génération, d'autres grandes puissances auront émergé et pourront rivaliser avec eux mais, en attendant, c'est l'"instant unipolaire"28. Si les Etats-Unis sont prééminents, c'est parce qu'ils sont le seul pays dont les atouts soient à la fois militaires, diplomatiques, politiques et économiques.

Cela leur permet d'être le joueur décisif dans n'importe quel conflit partout dans le monde. La guerre du Golfe, comme celle de Corée, a été l'occasion d'un pseudo-multilatéralisme. En réalité, les Etats-Unis ont réagi seuls mais, pour sacrifier à l'autel de la sécurité collective, ils ont recruté des alliés et ont cherché à obtenir l'aval du Conseil de sécurité. L'Amérique, comme la Grande-Bretagne auparavant, est une nation commerçante, maritime, échangiste, qui a besoin d'un environnement mondial ouvert et stable. Si elle abdique et que le monde se peuple de Saddam Hussein, son économie sera gravement atteinte. Les engagements extérieurs sont une charge mais aussi une nécessité. La stabilité internationale n'est jamais donnée. Si l'Amérique la veut, elle devra la créer car personne ne le fera à sa place.

Le concept d'unipolarité offre une alternative à la politique étrangère américaine. Il implique la reconnaissance, au centre du système mondial, d'une confédération occidentale où, comme dans la construction européenne, des abandons progressifs de souveraineté seraient prévus. Le G-7, sorte de comité occidental des finances, en est une préfiguration.

26Paul-Marie de la Gorce, «Washington et la maîtrise du monde»,Le Monde diplomatique, avril 1992, pp. 1 et 14-15. 27Christopher Ogden, «Globocop Glop», Time, 23 mars 1992, p. 14.

28Charles Krauthammer, «The Unipolar Moment», Foreign Affairs,vol. 70, 1990/1991-1, pp. 23-33.

26

Autour de cette confédération occidentale tourneraient des cercles concentriques : celui des Etats est-européens, qui deviendraient progressivement des membres associés, celui des Etats en développement, dont certains (Corée du Sud, Brésil, Israël) pourraient s'attacher davantage au centre29. L'objectif est d'arriver à un marché commun mondial, ce que décrivait Francis Fukuyama dans son célèbre essai sur la "fin de l'histoire"30.

L'universalisme des Nations Unies postulait que les structures allaient produire la communauté, mais cela s'est avéré une erreur. Il faut au contraire partir de la communauté démocratique occidentale. La périphérie s'adaptera d'elle-même. Le premier objectif est l'unification de l'Ouest industrialisé. Voilà à quoi doivent travailler les Etats-Unis.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon