§4. Vers une reforme conceptuelle
Il semble de plus en plus que, pour être efficace et
crédible, l'ONU doive se concentrer sur ce qu'elle sait faire le mieux
et sur ce qu'elle peut faire, c'est-à-dire exploiter au maximum la marge
de manoeuvre, l'interstice, que lui laissent ses Etats membres. C'est en effet
"dans les interstices de l'interétatique, dominé, comme toujours,
par les inégalités et les rivalités, [que] des
éléments de conscience, de compétence et de
solidarité universelles, ou du moins universalistes, se font timidement
jour."
C'est dans cette perspective que l'ONU doit aujourd'hui
retrouver une action, un mode de fonctionnement et un leadership qui soient
cohérents et
206 Chiffres donnés par le Département de
l'Information des Nations Unies, mars 1996, DPI/1753/Rev.3.
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coordonnés entre eux et qui aient pour
dénominateur commun l'anticipation et la prévention.
La raison est essentiellement que l'ONU ne peut plus
aujourd'hui espérer se substituer à l'action des Etats. Elle ne
peut plus se contenter d'être un simple palliatif. En l'absence de
véritable concept opérationnel pour mener des actions
armées, l'ONU ne peut être crédible sur un
théâtre d'opérations. Sans moyens, sans commandement unique
et unifié, sans mandat clair et précis, l'ONU ne peut
prétendre faire la guerre à la place des Etats.
Le maintien de la paix doit ainsi retourner à ce qu'il
était à son origine et ne plus se transformer en intervention. De
plus, l'action purement militaire est de moins en moins pertinente pour
régler les problèmes d'un monde où « la
stabilité et la sécurité internationales dépassent
(...) la sphère du militaire» , et dépendent plutôt
« d'un ensemble de mesures d'ordre économique, financier,
politique, éducatif, scientifique et technologique, qui devraient
être élaborées de manière concertée et
appliquées en temps opportun.»
Dans l'optique de l'application pleine et entière des
principes de la Charte, les Nations Unies doivent pouvoir constituer un cadre
permettant de mieux gérer les avantages économiques de la
mondialisation, de pallier ses inconvénients, de "partager les
bénéfices de la croissance économique", de coordonner les
forces d'une "société civile" naissante au niveau international,
d'être le garant de la préservation d'un patrimoine mondial et du
maintien des diversités culturelles, et de promouvoir un
développement humain durable.
C'est dans ce sens que nous proposons ici trois directions de
réforme pour que l'Organisation des Nations Unies ne subisse plus, mais
accompagne les évolutions internationales; pour qu'au lieu de
réagir, elle agisse.
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