Section 2 : Mise à l'épreuve des
hypothèses
Les résultats obtenus par l'utilisation des entretiens et
des questionnaires nous ont apporté des éléments de
réponse plus ou moins précis sur les hypothèses
formulées.
Afin de rendre plus claire cette partie empirique, nous
répondrons d'abord aux hypothèses concernant la communication
locale, puis celles relatives à la communication extra territoriale.
1. Hypothèses concernant la communication locale
La Communauté d'Agglomération d'Annecy (A) est
compétente en matière de déchets depuis janvier 2002, date
du transfert de la compétence communale. Les décisions sont
prises au sein de la « Commission Environnement », qui a en
réalité la charge de la gestion des déchets et de l'eau
potable. Elle assure en régie la collecte des déchets et en
prestation, la gestion des déchèteries. Après avoir mis en
oeuvre en 2003 la collecte sélective des ménages, la politique
actuelle est une politique de prévention (engagée dans un
Programme Local de Prévention des déchets avec l'ADEME) tout en
optimisant les performances du service (en termes de tournées mais aussi
de qualité du tri). Il faut également savoir que pendant
longtemps, le sujet des déchets n'existait pas car les communes ne
payaient rien sur la production de leurs déchets. Seuls la collecte et
le tri des papiers et cartons était déjà en place depuis
2005 dans le cadre des Agendas 21.
La politique de gestion des déchets a connu deux
évolutions majeures ces six dernières années. En 2008,
trois initiatives furent mises en oeuvre. D'abord, la création d'un
label pour les éco manifestations et la sensibilisation des
organisateurs événementiels ont forcé ces derniers
à mettre en place des dispositifs de tri. Ensuite, la collecte des
cartons dans les zones industrielles et commerçantes fut un grand
succès car elle permet aujourd'hui de réorienter environ neuf
tonnes par semaines (uniquement pour l'hyper centre d'Annecy) de ce
matériau qui partait avant en incinération. Parallèlement
à cela, la redevance spéciale (RS) sur les BID a
été votée en échange du service d'enlèvement
des cartons et pour responsabiliser les commerçants et les associations
sur le tri de leurs déchets.
Le second tournant politique fut initié en 2011. Suite
à l'application de la RS, services communaux doivent aussi participer au
financement de la gestion des déchets. Cela a amené une
réelle prise de conscience de la nécessité de
réduire leur volume global de déchets et de mieux les trier :
« Quand ça commence à coûter des sous, on se dit qu'il
faut faire quelque chose » (Thierry BILLET, 2014). Dans un premier temps,
les communes ont donc supprimé leur nombre total de bacs de collecte, ce
qui a mécaniquement fait baisser le volume global de déchets.
Elles ont également consenti des efforts sur le tri via la
sensibilisation du personnel. Etant donné que ces actions n'ont pas
suffisamment fait diminuer la facture, la prochaine étape, qui est
actuellement en cours d'application, est de responsabiliser chaque service en
divisant la somme due par la commune. Chaque service (vie scolaire, sports,
voirie...) devra donc mettre en place les moyens nécessaires pour
réduire au maximum sa facture, qui constituera un poids sur leur budget.
De plus, la mairie ne fait pas payer les bacs pour le tri, il y a donc double
effet d'incitation.
En d'autres termes, la démarche de prévention des
déchets est accentuée. La volonté de Thierry BILLET est
d'étendre cette démarche de prévention aux entreprises,
qui sont pour le moment laissées de côté sur ce plan :
« La collecte des cartons a été bien accueillie [...] mais
le bémol est que
44
l'agglo n'est pas rentrée avec les entreprises dans une
logique de prévention des déchets » (Thierry BILLET,
2014).
Les déchets ménagers parviennent aux services de
l'agglomération par deux moyens : la collecte des poubelles (une fois
par semaine pour les papiers, cartons, métaux, plastiques et deux
à trois fois par semaine pour les déchets non triés) et
les dépôts en déchetterie ou dans les collecteurs
spéciaux (pour le verre par exemple). Ils sont ensuite traités
comme indiqué sur le schéma suivant :
Les ménages sont concernés par la taxe
d'enlèvement des ordures ménagères (TOEM). La
difficulté annécienne est que malgré une bonne
exécution des gestes de tri de la population, les services de
l'agglomération ne parviennent pas à faire baisser cette taxe car
les coûts de gestion des déchets, et notamment de
l'incinération, ne cessent d'augmenter, en raison du durcissement des
contraintes environnementales.
Les ménages sont concernés par la taxe
d'enlèvement des ordures ménagères (TOEM). La
difficulté annécienne est que malgré une bonne
exécution des gestes de tri de la population, les services de
l'agglomération ne parviennent pas à faire baisser cette taxe car
les coûts de gestion des déchets, et notamment de
l'incinération, ne cessent d'augmenter, en raison du durcissement des
contraintes environnementales.
Cela n'empêche pas les citoyens d'exprimer une
volonté d'aller plus loin dans la gestion des déchets en ce qui
concerne la prévention et le recyclage. Premièrement, la
totalité du panel interrogé s'accorde à dire que le
recyclage « est un thème auquel ils accordent de l'importance
», alors qu'ils
45
ne sont que 37% à se sentir « totalement
impliqué » ou « très impliqué » dans la
politique de gestion des déchets en place. Autre fait marquant, ils sont
69% à déclarer ne pas se renseigner sur la politique de gestion
des déchets de leur commune. Ensuite, on constate que 81% d'entre eux
estiment que la commune dans laquelle ils vivent doit aller plus loin en
matière de recyclage. Parmi eux, 38% pensent que le recyclage doit
être « une priorité ».
Vous sentez-vous impliqué dans la politique de
gestion des déchets mise en place dans votre commune ?
totalement impliqué très impliqué
assez peu impliqué pas du tout impliqué
19
44
6
31
Dans la politique environnementale de votre commune, vous
pensez que le RECYCLAGE doit
6 être une priorité
avoir une importance moyenne avoir une importance marginale ne
pas avoir d'importance
38
56
Le premier élément proposé pour avancer dans
ce sens est la communication et l'information (35%) ; viennent ensuite la
création de partenariats avec des entreprises et l'augmentation du
nombre de lieux de collecte (22% chacun), les aides financières (13%) et
la mise en place de centres publics dédiés au recyclage (9%). Ce
fait est compréhensible quand on sait que les trois quart des
répondants ne se sentent pas suffisamment informés sur la gestion
des déchets. D'autre part, Thierry BILLET nous explique que cette
volonté d'aller plus loin est aussi due à la confiance qu'ont les
citoyens en la qualité du service public, pour ce qui est du cas
d'Annecy du moins. Ils ont la certitude que les déchets seront
traités de manière adéquate et que personne n'en tirera
profit.
Aujourd'hui, le recyclage est donc au coeur du dispositif de la A
: « preuve en est la mise en place des nouvelles filières de
manière continue sur nos déchèteries ou au niveau des
habitants : compostage, lombricompostage et compostage partagé en pied
d'immeuble, DEEE en 2010, textile en 2011, mobilier en 2013...collecte des
cartons des commerçants du centre-ville en 2012 » (Valérie
LAURENT, 2014). Ces initiatives montrent la volonté de la
collectivité d'aller plus loin en matière de recyclage.
Cependant, cette tâche est difficile car il y a encore un décalage
idéologique entre les décideurs politiques (que ce soit à
la mairie ou au siège de l'agglomération) et la population sur
cette question : « je suis persuadé que le frein à en faire
encore plus n'est pas chez les gens mais chez les élus. » (Thierry
BILLET, 2014).
Concernant le cas d'Annecy, la mise en place d'initiatives
liées au recyclage a donc très peu d'effets sur l'implication des
entreprises. Le modèle existant laisse davantage le champ à la
coopération entre
46
L'agglomération d'Annecy est donc une ville qui a fait des
progrès importants ces dix dernières années en
matière d'initiatives sur le recyclage, mais qui souffre encore d'une
certaine inertie politique. Face à cela, nous remarquons que les
citoyens, annéciens ou non, expriment une volonté de
progrès. Cependant, nous ne pouvons pas réellement parler
d'implication proprement dite. En effet, les citoyens demandent à ce que
des actions soient mises en placent et les accueillent favorablement une fois
établies, de part la confiance qu'ils ont en le service public. Mais
force est de constater qu'ils ne se sentent pas pour autant très
impliqués dans ces actions et qu'ils ne cherchent pas
spécialement à se renseigner. Nous pouvons donc parler
d'une volonté de leur part, mais pas d'implication : la
collectivité doit prendre les devants et être force de
proposition. L'hypothèse H1.1 est donc
réfutée.
Pour ce qui concerne les entreprises, nous avons vu que l'action
de la A est relativement restreinte. La politique générale
était jusqu'il y a peu de leur laisser le soin de la gestion des
déchets, partant du constats qu'elles ont des obligations légales
décidées au niveau national et qu'elles font en
général appel à une entité privée pour
gérer leurs déchets.
La situation a commencé à changer en 2008 avec la
mise en place d'un label « Eco Manifestation » pour sensibiliser les
organisateurs d'évènements au tri. Est venue ensuite la RS et la
collecte des cartons qui, aux dires de Mme Valérie LAURENT, était
une demande initiale des commerçants du centre annécien. L'effet
de ce système a donc permis :
- De sensibiliser les commerçants et les industriels au
tri sélectif ;
- De réduire fortement le volume de papiers et cartons
partant à l'incinération et des le
réorienter vers le recyclage ;
- De résoudre les problèmes de stockages des
commerçants, et en corollaire d'améliorer la propreté
urbaine car lesdits cartons ne sont plus laissés sur le trottoir en
ville.
Cependant, les réflexions autour de l'accompagnement des
entreprises sont encore très récentes et embryonnaires : «
jusqu'il y a encore trois ans, c'était un sujet tabou, idéaliste
; depuis, il y a eu une évolution des mentalités » (Thierry
BILLET, 2014). Bien que la volonté à terme soit de favoriser les
circuits courts de recyclage, les exemples de partenariats sont encore rares et
peu développés. Nous pouvons citer celui de Wood Stock Creation,
qui transforme des palettes récupérées dans les
différentes décharges de l'agglomération, et qui
proviennent initialement d'entreprises qui s'en sont
débarrassées. Mais là encore, la majeure partie des
approvisionnements en bois et en textile (les deux matières principales
qu'elle utilise) sont en majorité réalisés directement
auprès d'entreprises locales. Nous sommes donc la plupart du temps dans
un biptyque « entreprises classiques / entreprises de recyclage ». Mr
Florian PALLUEL confirme ces propos : « Finalement, ce n'est pas tant la A
mais bien des clusters comme l'OSV qui sont importants et qui ont ce rôle
de coordination. » (Florian PALLUEL, 2014).
Enfin, la A et la ville d'Annecy ne cherchent pas à
communiquer auprès des entreprises
« classiques » pour les sensibiliser. Elles jouent un
rôle d'intermédiaire de communication entre les entreprises et les
associations de tri et de recyclage telles que (Tri Vallées, Roul Eco,
Bazar Sans Frontière, WSC...) et les entreprises productrices de
déchets mais là encore ce rôle est limité.
47
entreprises privées sous forme de partenariats (Millet et
WSC par exemple7) ou sous forme de prestation de services. Aussi,
les entreprises sont soumises à des obligations légales sur la
prévention et la gestion des déchets. La collectivité joue
parfois un rôle d'intermédiaire pour l'approvisionnement et / ou
pour la communication entre firmes. Les projets de collaboration entre les
trois entités sont encore embryonnaires mais tendent à se
développer, mais sont à notre connaissance plutôt
axés sur les opportunités commerciale à l'heure
actuelle8. Il est nécessaire d'étudier
d'autres cas que celui dont nous disposons, mais nous pouvons avancer que
l'hypothèse H1.2 est réfutée, au titre que les entreprises
productrices de déchets se basent davantage sur les entreprises de
gestion pour s'impliquer dans le recyclage. De plus, la logique
entrepreneuriale laisse supposer que ce type de démarche est
plutôt le fait de la volonté de la direction. Les
collectivités ont tout de même un moyen d'action : favoriser la
création d'entreprises et d'associations de recyclage et / ou de
tri.
En termes d'animation du territoire, les initiatives
exclusivement axées sur le recyclage existent mais n'occupent pas une
place très importante. Encore une foi, nous sortons tout juste d'une
période où ce thème ne faisait pas partie des
préoccupations politiques. Comme nous l'explique T. BILLET : « Les
élus étaient dans une logique de dire que l'incinération
est une méthode propre [...] l'affaire des mâchefers d'Avernioz,
qui a coûté plusieurs centaines de milliers d'euros à la
collectivité, a fait prendre conscience que l'incinération
n'était pas la solution miracle » (Thierry BILLET, 2014). Là
encore, la question des coûts a un rôle important : alors que
traiter une tonne de mâchefers coûtait environ 13€ il y a
quatre ans, ce montant est aujourd'hui passé à 50€. De plus,
l'efficacité thermique des usines d'incinération
annéciennes est ridicule (10% pour celle de Chavanod) par rapport
à leur bilan carbone. Tous ces éléments ont conduit
à un mécontentement de la population et donc à une
nécessité d'agir.
Pour répondre aux problèmes de
l'incinération et des mâchefers, la A a mis en place trois actions
:
- L'isolement des mâchefers par injection d'argile et la
décantation des eaux d'infiltration sur le
site d'Avernioz ;
- L'amélioration des performances de l'incinérateur
de Chavanod (environ 80 millions € de travaux), la construction d'une
usine de méthanisation des boues (environ 7 millions €) et de
centre de compostage des déchets verts (environ 10 millions €) ;
- L'utilisation d'une partie des mâchefers en remblai
routier et l'investissement avec la région
Rhône-Alpes dans la recherche sur un processus de
vitrification pour les rendre inertes.
L'installation de trente bornes de compostage au sein de
complexes immobiliers est également une action allant dans le sens de
l'animation du territoire, au sens que cela fait réagir (plutôt
positivement) les citoyens et entraine la mise en place d'organisations entre
eux pour la gestion de ces bornes, ce qui crée du lien social. La
commune d'Annecy souhaite aller plus loin dans ce sens et créer des
bornes de don disposées en ville. Il existe également une
volonté de valoriser par la communication les associations qui
récupèrent des produits en fin de vie pour les redistribuer ou
les revendre.
En matière d'animation évènementielle, il
n'y a pas de manifestation exclusivement réservées au recyclage.
Ces évènements regroupent plusieurs thèmes du
développement durable ; nous pouvons citer à titre d'exemple le
« Village du Développement Durable » organisé les
1er et 2 avril 2014. Il faut
7 Millet, producteur de matériel de sports
outdoor et WSC ont établi début 2014 un partenariat basé
sur le recyclage créatif. Concrètement, WSC dispose des produits
en fin de vie récupérés par Millet auprès de ses
clients et les transforme en outils de promotion de type « goodies »,
qu'elle revend ensuite à Millet.
8 Pour des raisons de secret commercial, nous ne
pouvons nous avancer davantage sur le sujet.
48
tout de même noter que le recyclage a une place importante
dans ces évènements, qui permettent à la fois de
sensibiliser la population et de faire se rencontrer les acteurs professionnels
du secteur.
Enfin, le sondage montre que plus de la moitié (53%) des
répondants estiment que les dirigeants locaux ne sont pas à
l'écoute de leurs attentes en termes de politique de gestion des
déchets. On en conclu qu'il y a encore un réel manque d'animation
locale sur le sujet, d'autant que 34% de ces insatisfaits souhaitent qu'il y
ait plus de communication et 20% que les démarches soient
simplifiées.
La priorité de l'agglomération d'Annecy en
matière d'animation du territoire est donc l'amélioration des
outils existants pour répondre au mécontentement populaire. La
construction d'instruments plus poussés comme une recyclerie n'est pour
l'instant pas d'actualité. Les manifestations et initiatives urbaines
organisées spécifiquement autour du recyclage sont rares mais on
remarque une volonté de progression dans ce sens. Ces
éléments nous permettent de confirmer l'hypothèse H1.3,
sous réserve encore une foi que la collectivité soit à
l'origine des démarches.
Les questions de l'implication du citoyen et de l'animation du
territoire nous amène à nous intéresser à celle de
la relation entre la collectivité et l'individu. Grâce à la
communication locale, les communautés territoriales cherchent aussi
à créer un lien avec la population, afin de mieux comprendre son
identité ses attentes et de l'impliquer. Il s'agit en fait d'un cercle
où le lien crée de l'implication, qui renforce le lien
qu'entretien le citoyen vis-à-vis de la collectivité.
Nous avons vu que la A accorde une certaine importance à
la sensibilisation à la fois aux gestes de tri et de recyclage et
à la prévention des déchets. Cela passe notamment par la
communication de terrain, via les « ambassadeurs du tri ».
Encadrés par un technicien en charge de la prévention et du tri,
ces ambassadeurs mènes des actions de communication de terrain
permanentes : sensibilisation en porte à porte, contrôles de
terrain, animation de stand, visite de centre de tri ou
déchèteries... Aussi, des caractérisations de
tournées sont effectuées régulièrement afin de
prendre si besoin des mesures de suivi et sensibilisation ciblées. Il y
a donc une volonté de la part de la collectivité territoriale
d'aller vers la population pour échanger sur le sujet du recyclage,
même si cette volonté reste freinée par l'inertie politique
dont nous avons déjà parlé.
49
De leur côté, les citoyens sont disposés
à développer ce lien avec la collectivité. On remarque que
la totalité des répondants accordent de l'importance au
thème du recyclage et que comme nous le rappellent T. BILLET et V.
LAURENT, les actions mises en place sont toujours bien reçues. Qui plus
est, d'après ces responsables des services de gestion des
déchets, les individus font confiance au service rendu par la A et
savent qu'il est de qualité. Enfin, les répondants nous
apprennent que leur principal moyen de renseignement (pour ceux qui se
renseignent) est la documentation publiée par les services de la
collectivité (42%, auxquels nous pouvons ajouter les 25% se renseignant
via l'affichage urbain).
8
Comment vous renseignez vous sur la politique de gestion
des déchets de votre commune ?
8 presse locale
17
42
télévision
25
site web de la commune
documentation publiée par les services communaux campagnes
électorales
50
En retour, la collectivité communique auprès de la
population de manière positive, en mettant en avant le fait qu'il faut
continuer à être performants. C'est par exemple ce qui c'est
passé au moment de l'arrêt de la collecte des encombrants sur les
trottoirs9 : « quand on a supprimé la collecte des
encombrants, on l'a présenté de la sorte : comme vous triez bien,
on peut encore faire une étape supplémentaire [...] en supprimant
la collecte en pied d'immeuble parce qu'on peut ainsi réduire la part de
l'incinération et augmenter le tri sélectif, donc il faut passer
par les déchetteries. » (Thierry BILLET, 2014).
Cependant, nous devons considérer ces résultats
avec précaution. D'une part, il y a un décalage entre les
répondants qui disent accorder de l'importance au recyclage (soit 100%)
et ceux qui par exemple disent se renseigner sur la gestion des déchets
dans leur commune, qui ne sont que 31%. On peut supposer ici un écart
entre le « bien pensant » et le « bien agissant ». En
d'autres termes, le recyclage est-il réellement une préoccupation
suffisamment forte pour créer du lien avec la collectivité
territoriale ? Nous pouvons en douter en regardant les principaux centres
d'intérêts des citoyens en matière de politique
territoriale.
En matière de politique territoriale EN GENERAL,
à quels thèmes accordez-vous de l'importance ?
10 urbanisme (sauf logement)
4 10 logement
transport
activités culturelles et sportives
développement durable
sécurité
emploi
éducation
6
16
8
24
22
Enfin, 53% des personnes interrogées pensent que leurs
élus ne sont pas assez à l'écoute en matière de
gestion des déchets. Thierry BILLET confirme cela pour le cas d'Annecy
en nous disant qu'il y a un décalage entre la volonté populaire
et l'inertie politique. A Valérie LAURENT de rappeler qu'il reste aussi
des progrès à faire concernant la relation avec le public, en
citant l'exemple de l'accueil dans les déchetteries.
La situation pourrait donc être résumée ainsi
: les citoyens font preuve de bonne volonté et attendent davantage
d'action de la part de leurs représentants, qui eux-mêmes sont
divisés entre ceux qui souhaitent faire progresser les choses et ceux
qui ne considèrent pas le thème du recyclage comme prioritaire.
Il faudrait donc pouvoir étudier le cas d'une collectivité ou la
démarche de collaboration avec la population sur le recyclage est plus
poussée. Toute chose égale par ailleurs, l'analyse des
réponses au questionnaire et les constats précédents
peuvent nous amener à penser que le recyclage n'est pas un thème
suffisamment important aux yeux de la majorité de la population pour en
faire un vecteur de lien entre elle et l'entité «
collectivité ». En l'attente d'éléments plus
probants, l'hypothèse 1.4 est donc réfutée.
9 Parallèlement à la mise en place de la
RS et de la collecte des cartons, la A a cessé de récolter les
encombrants, qui étaient simplement laissés sur les trottoirs. Il
est maintenant demandé à leurs propriétaires de les amener
en décharge. En plus de la propreté urbaine, cela permet surtout
de réduire d'autant le volume de déchets partant en
incinération (puisque les encombrants collectés étaient
incinérés) et d'améliorer le tri, qui se fait en
décharge, et donc d'augmenter la quantité de matériaux
recyclés.
51
Le dernier point de la communication locale que nous souhaitons
aborder est celui de l'identité. Les réponses aux
hypothèses précédentes nous permettent d'ores et
déjà d'avoir des éléments de réponse
à l'hypothèse H1.5 mais nous devons savoir plus
précisément en quoi les initiatives autour du recyclage peuvent
inciter les acteurs (individus et entreprises) à s'approprier le
territoire.
Comme nous l'avons déjà évoqué, le
problème des mâchefers d'Avernioz a suscité une vive
réaction populaire, non seulement à cause de la pollution
engendrée, mais aussi à cause du coût de la
dépollution.
D'autre part, les enquêtes nous montrent que :
- Les répondants ne développent pas
réellement de sentiment d'identité (seul un quart) et que pour
56% d'entre eux leur commune ou leur agglomération est « simplement
leur lieu de résidence » ;
- Les arguments qui reviennent le plus souvent pour
définir la ville de résidence sont :
« paisible / tranquille » (56%), « dynamique /
jeune » (44%) ; « responsable / propre » (44%) ; « belles /
jolie » (38%) ;
- S'ils devaient déménager, 63% des
répondants ne tiendraient ni compte du développement durable, ni
du recyclage.
Pour ce qui est des entreprises, on sait grâce à Mr
BILLET et à Mme LAURENT qu'aucune forme de communication n'est
réalisée sur les entreprises « classiques » qui mettent
en place des démarches de recyclage ; seules sont promues (dans une
certaine mesure) les entreprises et les associations de tri et de recyclage.
Rappelons également que la A et la commune d'Annecy n'interviennent
quasiment pas auprès des entreprises sur ce thème.
En tant que responsable au sein d'une entreprise, Florian PALLUEL
juge importante la mise en place de moyens pour améliorer le processus
de recyclage. Cela incite Picture à rester à Annecy et serait
pris en compte si l'entreprise devait s'installer ailleurs. Mais rappelons que
c'est notre seul répondant ayant ce profil.
Le seul outil pouvant développer le sentiment
d'identité autour du recyclage mis en place par la A est la
labellisation « QualiTri + » par l'ADEME. Mais Mr BILLET
lui-même avoue qu'il « ne sait pas si les annéciens y sont
sensibles ou même s'ils s'en rendent compte ».
Au vue de ces éléments, la mise en place de
démarches de recyclage poussées peut donc aider au
développement de l'identité mais est loin d'être suffisante
en soi. Pour ce que nous avons pu étudier dans la partie
théorique et avec Picture, les entreprises sont plus susceptibles d'y
être sensibles. Les citoyens sont quant à eux divisés entre
ceux pour qui le recyclage (et plus généralement le
développement durable) est un centre d'intérêt et ceux pour
qui cela est secondaire. Compte tenu des résultats d'enquête,
nous réfutons l'hypothèse H1.5. Mais, en rappelant que le
sentiment d'identité est un concept subjectif, nous émettons deux
réserves :
- Les initiatives de recyclage peuvent être plus
intéressantes pour le développement de l'identité des
entreprises ;
- Ces initiatives peuvent développer le sentiment
d'identité des citoyens ayant déjà une disposition forte
par rapport au recyclage.
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