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John rawls et la question de la justice: une lecture de theorie de la justice

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par Israel Jacob Barouk MEKOUL
Université de Yaoundé I Ecole normale superieure de Yaoundé - DIPES II 2014
  

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ABSTRACT

The issue of justice is at the heart of society. Old and consequentialist conception of justice was challenged by John Rawls to rebuild and provide a new sense of justice based on fairness. Establish justice and equity, it is hoped that the principles adopted jointly by the partners under the "veil of ignorance" can not be violated or challenged by them, once engaged in civilian life. The consequence which is the solidarity which binds the partners. This solidarity leads not on equal opportunities but the fair equality of opportunity, to give all the chances of success and fulfillment. Which presupposes the implementation of the basic structures that make up the basic institutions. Our memory is divided into three parts: The first part presents the Rawlsian principles of justice. Through the principle of equal liberty, John Rawls shows that freedom is a sacred principle that must be granted and guaranteed to individuals without restriction. Through the difference principle, the author of A Theory of Justice, said that the fight against social inequality makes recovery minority layers. In addition, acceptance of inequality could only be justified if it allows disadvantaged towards a better life. The second joint of the study is a trial implementation of this new direction of justice. The difficulty of ensuring that the agreements between individuals will always be respected, once returned to civil society brings to question the relevance of the "veil of ignorance" which guarantee safety should we expect out partners position original? The issue of fair equality of opportunity raises the problem of freedom: the obligation to solidarity with the poor does she not apparent to a form of coercion? Moreover, the claim of freedom without taking into account the environment in which it must be expressed not it runs the risk of being draconian? The third party intends to justify the reception of the Rawlsian thought. It is indeed shift the debate on the question of fair equality of opportunity in relation to the regional balance, understood as essential to protect the most vulnerable social groups.

INTRODUCTION GENERALE

1

« La justice est la première vertu des institutions sociales comme la vérité est celle des systèmes de pensée. »1

Faire de la justice « la première vertu », dans l'entendement de John Rawls suscite un questionnement : Pourquoi est-elle placée à un tel rang à côté d'autres vertus comme la tempérance ou le courage ?

Du latin, jus, juris, droit, la justice s'entend comme un principe normatif et régulateur de la vie sociale. C'est une exigence morale qui invite au gouvernement de soi, au rejet des inclinations, au respecte des droits reconnus à chaque homme. De ces définitions, découle la double connotation, juridique et morale que revêt la justice. Comme institution judiciaire, elle a vocation à faire appliquer la loi. Comme concept renfermant une dimension éthique, elle exige le respect de la personne humaine, de sa dignité et de sa liberté. Elle est dès lors exigible tant dans la vie politique que dans les rapports intersubjectifs. Ces deux exigences, se rejoignant car elles traduisent l'idéal rationnel d'objectivité qu'on appelle la justesse.

La vertu, du latin vis, renvoi à force, pouvoir, puissance. C'est cette valeur morale du sujet lorsqu'elle est constante et confirmée. C'est la réalisation effective de l'idéal moral. C'est aussi une force avec laquelle une âme s'attache à son devoir et le réalise. Elle est donc la morale en acte. C'est pourquoi, pour Rawls, « les vertus morales sont des excellences, c'est-à-dire qu'il est rationnel de les désirer pour soi-même et pour les autres comme des biens appréciés en eux-mêmes ou dans des activités qui fournissent une satisfaction en elles-mêmes.2 »

Placer ainsi la justice au premier rang des vertus découle du fait que la justice est une valeur consubstantielle à l'être humain, c'est-à-dire, une exigence spirituelle et fondamentale de la raison, qui elle, est souveraine et universelle. C'est par la justice qu'on juge un système

1 John Rawls, Théorie de la justice, éd. Le Seuil, février 1987, trad. Catherine Audard, p. 29 2John Rawls , op. cit., p. 571.

2

politique ou une institution. La justice devient alors un droit et un devoir : un droit parce que toutes les personnes méritent des conditions de vie meilleures et une protection égale de la loi ; quiconque se sent lésé a vocation à réclamer les conditions de vie meilleures. Un devoir de respect de la personne humaine, entendue comme sujet digne et libre. Un devoir au niveau des institutions sociales (publiques et privées), car il s'agira de toujours rechercher la loi et la mesure qui soient favorables à tous les sujets.

Dès lors, peut se comprendre le rôle de la justice face aux identités et aux conflits d'intérêts que l'on peut constater dans la société lorsqu'il faut répartir les fruits de la collaboration: pouvoir « choisir entre les différentes organisations sociales qui déterminent cette répartition, des avantages et pour conclure un accord sur une distinction correcte des parts. 3» Ce rôle de la justice s'entend parfaitement par ses principes qui « fournissent un moyen de fixer les droits et les devoirs dans les institutions de base de la société et ils définissent la répartition adéquate des bénéfices et des charges de la coopération sociale.4 »

Les principes de la justice constituent ainsi la finalité même des politiques et le « lien intrinsèque et vital entre l'Homme et ses droits serait le moyen d'expression par excellence de leur survie et de leur importance...Les Etats ne seraient rien d'autres que des ministres de la cause des droits de l'homme recherchant dans l'exécution de ses missions que leurs populations puissent effectivement jouir de leurs droits. »5

Mais, la justice n'exige pas uniquement l'accord des partenaires; elle nécessite de la coordination dans les projets des individus, de la stabilité des institutions, de l'obéissance aux lois qu'on s'est soi-même prescrites et de l'efficacité pour atteindre les buts sociaux fixés sans que cela ne préjudicie aux droits et libertés des individus.

Ce rôle de la justice ouvre la porte à son objet. Rawls lui-même souligne que l'objet premier de la justice, c'est la structure de base de la société, ou plus exactement, la façon dont les institutions sociales les plus importantes répartissent les droits et les devoirs fondamentaux et déterminent la répartition des avantages tirés de la coopération sociale.

Rawls, en définissant l'objet premier de la justice qui réside dans les institutions, montre que, ce sont justement ces institutions, à savoir la constitution politique, les

3 John Rawls, Théorie de la justice, éd. Seuil, février 1987, p. 30

4 John Rawls, ibidem,p.31

5 Crescence Nga Beyeme, « Droit et éthique des droits de l'homme », Revue africaine des sciences juridiques, Université de Yaoundé II, Vol. 8, N° 2, 2011, p.100

3

principales structures socio-économiques qui « définissent les droits et les devoirs des hommes et elles influencent leurs perspectives de vie6 ».

Notre thème de recherche, John Rawls et la question de la justice: une lecture de Théorie de la justice, loin d'aborder exhaustivement les problèmes soulevés, dans une oeuvre connue et étudiée dans les facultés et écoles, est tout simplement la présentation des principes de la justice et de leur réalisation. Cet intérêt à redéfinir la justice cadrait avec le climat intellectuel dans lequel vivait John Rawls.

Le cadre en question, ce sont les Etats-Unis des « années soixante-dix ». Une Amérique dominée par la ségrégation raciale et la Guerre du Viêt-Nam, à laquelle Rawls a pris part. Les revendications de liberté, les inégalités éducatives ou économiques vont pousser John Rawls à engager une réflexion sur les conditions de possibilité d'une société américaine expurgée de toutes formes d'injustices. Pour cela, il va commencer par critiquer la doctrine morale dominante, en l'espèce l'utilitarisme, pour montrer ses limites et proposer une nouvelle morale, prenant en considération les défavorisés et rendant à l'individu toute sa dignité.

Placer ainsi la justice au coeur des institutions publiques ou privées, nous amène à poser le problème de son effectivité et de son applicabilité dans la société. Autrement dit, comment les principes de la justice définis dans la position originelle peuvent-ils être respectés et appliqués dans la vie civile ?

Si la réalisation de la justice exige un accord passé par les partenaires sous le « voile d'ignorance », quelle est la garantie du respect de ce contrat une fois ces partenaires rentrés dans la vie civile avec ses antagonismes et ses conflits de classes ?

De plus, l'agrégat des volontés individuelles, garant de l'effectivité des principes de la justice obtenu sous le « voile d'ignorance » peut-il être transposé dans la vie civile, marquée du sceau des luttes de classes, des contingences et des regroupements tribaux ou intéressés ?

La question de la juste égalité des chances soulève le problème de la liberté : l'obligation à la solidarité envers les défavorisés ne s'apparente-t-elle pas à une forme de contrainte ?

Bien plus, la revendication de la liberté sans prise en compte de l'environnement dans lequel elle doit s'exprimer ne court-elle pas le risque d'être liberticide?

6 John Rawls, op. cit., p. 33

4

La réponse à ces questions commande tout d'abord l'examen des principes rawlsiens de la justice (Ière partie). Il s'agira ensuite et dans une toute autre mesure de soulever les problèmes que posent les principes de la justice chez John Rawls (IIème partie). Enfin, nous montrerons l'actualité de la pensée rawlsienne (IIIème partie).

5

PREMIERE PARTIE :

LA CONCEPTION RAWLSIENNE DE LA JUSTICE

La justice, faut-il le rappeler est un principe normatif et régulateur de la vie sociale. Que ce soit en philosophie morale, religieuse ou politique, la détermination d'une société juste ne reste pas sans débats. En effet, il ne se passe pas un jour dans notre monde sans qu'on n'assiste à des actes injustes. On voudrait que la justice donne à chacun ce qui lui revient, qu'elle traite de manière égale ce qui devrait l'être. Qu'elle aille même plus loin en sortant des cadres légaux pour s'investir dans ce qui est charitable. Malheureusement, ce voeu est rarement réalisé. Et c'est cette difficulté qui nous amène à nous pencher sur cette question de la justice. Au fait que, nous nous demandons ce que doit être sa nature et quels doivent être les critères devant présider aux décisions collectives des individus ou des pouvoirs publics.

Largement redevable à de nombreux philosophes, la théorie de la justice de John Rawls voudrait dépasser les conceptions de la justice, antérieures à la sienne. Pour cela, il part de la position originelle qui « unit en une seule conception un problème de choix assez clair et des conditions largement reconnues comme s'imposant normalement aux choix des principes moraux.7 » pour déterminer le contenu de la justice.

La réflexion sur la nature rawlsienne de la justice et les critères devant présider aux choix collectifs des individus et des pouvoirs publics commande l'examen des modalités d'élaboration des principes de la justice (Chapitre I), et leur exposition chez John Rawls (chapitre II).

7 John Rawls, op. cit., p. 625.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand