Vision africaine du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes( Télécharger le fichier original )par Wendeyida Jessie Josias OUEDRAOGO Université Privée de Ouagadougou - Licences es Sciences Juridiques; Option: Droit public 2012 |
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
Introduction générale« Lorsque dans le cours des événements humains, il devient nécessaire pour un peuple de dissoudre les liens politiques qui l'ont attaché à un autre et de prendre, parmi les puissances de la Terre, la place séparée et égale à laquelle les lois de la nature et du Dieu de la nature lui donnent droit, le respect dû à l'opinion de l'humanité oblige à déclarer les causes qui le déterminent à la séparation »1(*). Par ces propos, les rédacteurs de la Déclaration d'indépendance des États-Unis ont affirmé un principe qui connaitra une évolution inouïe en raison de la particularité et de son champ d'action et de ses effets : le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. En réalité, on assiste à un développement des droits des peuples depuis le XVIIème siècle, passant par la Déclaration d'indépendance des États-Unis du 4 juillet 1776. Vient ensuite, entre autres, le projet de Déclaration de droit des gens (4 floréal an III) de l'abbé Grégoire pendant la révolution française, et la révolution de 1848 en Europe. Plus tard, le 8 janvier 1918, dans les quatorze points qu'il présenta au Congrès américain comme moyen de mettre un terme à la Première Guerre mondiale et reconstruire l'Europe, le Président américain Woodrow Wilson cita en cinquième lieu le règlement impartial des questions coloniales2(*). Si le programme alors proposé par Woodrow Wilson n'a pas connu vive approbation des sénateurs, son point sur les questions coloniales inspirera les rédacteurs de la Charte des Nations Unies. À l'issue de la Deuxième Guerre mondiale, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes obtiendra une consécration juridique remarquable dans la Charte des Nations Unies. De nombreuses résolutions seront aussi adoptées dans ce cadre dont la Résolution 637 (VII) du 16 décembre 1952 réaffirmant l'importance du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Des instruments conventionnels tels que les deux Pactes de 1966 s'intéressèrent également à ce droit. En Afrique, ce droit connaitra une consécration juridique en 1981 dans la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Avant de prendre sa forme actuelle, le droit à l'autodétermination était connu en tant que principe des nationalités. La portée de ce principe demeurera toutefois réduite et certains auteurs sont arrivés à en nier la valeur juridique. Dans sa forme de l'après guerres mondiales, il prendra une force tout à fait particulière et se présentera comme fondement juridique de la décolonisation. Dans un souci de stabilité au sein de la communauté internationale, les États donneront à celui-ci un contenu beaucoup plus large afin de le faire subsister à l'indépendance. Les africains, plus grand bénéficiaire de la décolonisation, joueront un rôle très important dans la redirection de ce droit. En effet, ils appréhendèrent très tôt que le même principe qui les a affranchi du joug colonial, de la domination étrangère, de l'apartheid pouvait également servir de base à des mouvements déstabilisateurs. Dès lors, on se pose la question suivante : comment l'Afrique appréhende t'elle le droit des peuples à l'autodétermination ? Prétendre répondre de façon exhaustive à cette question est une gageure. Il sera donc question dans les lignes suivantes d'aborder la vision africaine du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes tel qu'il est consacré dans la Charte ADHP de 1981. En vérité, depuis la consécration juridique de ce principe, l'Afrique en développera progressivement une conception particulière tendant à concilier deux impératifs à savoir la préservation de l'intégrité territoriale des États et la volonté de chaque peuple de s'autodéterminer. Cela dit, il convient de préciser au préalable que la présente étude n'a pas pour objectif de procéder à une comparaison de la vision africaine de ce principe à d'autres conceptions dudit principe. Il ne sera pas non plus question de dégager une vision africaine s'excluant de ce qui prévaut au niveau universel. Plutôt, cette étude tentera de présenter ce que l'Afrique entend être « le droit des peuples à l'autodétermination » et comment il doit s'exercer. À cet effet, il sera fait en permanence un va et vient entre les positions universelles et celles typiquement africaines. C'est alors qu'il sera procédé en premier lieu à une conception théorique du droit à l'autodétermination des peuples (Chapitre 1) et en second lieu à une lecture de la mise en oeuvre de ce droit (Chapitre 2). * 1 Déclaration d'Indépendance des États-Unis du 4 juillet 1776. * 2 http://www.andreversailleediteur.com/intra/Autres/Wilson01_1918site.pdf consulté le 11/10/2013 à 18h09. « Ajustement libre, sans préjugés et absolument impartial de toutes les revendications coloniales, basé sur une observation stricte du principe selon lequel, en déterminant toutes ces questions de souveraineté, les intérêts des populations concernées doivent peser autant que les revendications justes du gouvernement dont les compétences sont à déterminer ». |
|