L'UEMOA face au défi de l'intégration sous-régionale( Télécharger le fichier original )par Arnaud SEKONGO Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest (Abidjan, Côte d'Ivoire)) - Maîtrise Droit Public option Droit Communautaire et Intégration Economique 2013 |
B- LES RAISONS D'ORDRE POLITIQUE ET ECONOMIQUEL'ex-président Modibo KEITA affirmait dans un discours sur l'indépendance monétaire du Mali en 1962 que le pouvoir politique s'accompagne toujours et nécessairement du droit régalien de battre monnaie et que le pouvoir monétaire est inséparable de la souveraineté nationale. Cette allégation est d'ordre à nous élucider sur le fait que l'indépendance politique et l'indépendance monétaire forment un tout indissociable. En effet, l'exemple de la France sur les pays de la zone franc le démontre bien. Cet Etat a réussi à travers la colonisation, à manipuler souverainement en sa faveur le taux d'échange entre le franc français et le franc CFA ; vue que l'organisation de la monnaie et du crédit ainsi que tous les pouvoirs de décision dans ce domaine sont concentrés à la métropole c'est-à-dire à Paris.206(*) Dès lors, comment promouvoir le développement d'une nation donnée si l'on ne dispose pas des moyens nécessaires voire du puissant levier de commande que constitue la monnaie ? Battre monnaie par nos propres Etats reste le gage d'une liberté acquise en ce sens que cela permet non pas de faire ce que l'on veut mais plutôt d'agir dans le sens de l'intérêt national, de contraindre les féodalités économiques et les groupes de pressions qui ont pour objectif d'ignorer l'intérêt national. Un Etat dit indépendant, autonome et souverain ne peut confier la gestion de sa monnaie à un autre Etat et attendre de celui-ci qu'il nous sorte de l'auberge ; cela est impossible car tout autant que nous sommes, chacun agit dans son propre intérêt. De plus, la planification de projet de développement ne saurait être réalisée par un gouvernement dénudé de pouvoirs monétaire. Avoir une autonomie monétaire, disposer de pouvoirs monétaires, c'est, sur le plan interne, pouvoir régler et contrôler comme on l'entend l'émission de la monnaie métallique et fiduciaire, la direction du crédit aussi bien aux entreprises privées ou publiques qu'à l'Etat. Mais c'est aussi et surtout sur le plan externe, avoir la possibilité de contrôler la validité des paiements extérieurs conformément au plan du commerce extérieur, d'assurer le rapatriement de la contre value des exportations, d'empêcher les transferts spéculatifs. Il est clair que la détention de tels pouvoirs est absolument nécessaire à un Etat qui veut promouvoir le développement harmonieux et planifié de son économie.207(*) Cela dit, pour réussir une intégration parfaite de ses Etats membres, à travers la création d'une monnaie, l'UEMOA doit veiller au grain à prendre et de façon complète et totalitaire les reines du contrôle des pouvoirs monétaires. Car en effet, l'outil monétaire est l'élément essentiel de la maîtrise du destin d'un pays. Dans une interview accordée au quotidien français le Monde d'Avril 1990, le président français Jacques CHIRAC a soutenue que confier la gestion quotidienne de la monnaie nationale à une autorité étrangère «conduirait à des transferts de souveraineté tout à fait excessifs au moment où la France... doit conserver entre ses mains l'essentiel des instruments lui permettant de maîtriser son destin«208(*). L'Union devrait donc s'appuyer sur cette allégation pour comprendre que battre monnaie par elle-même est un outil essentiel pour contrôler notre destin. De plus, comme le souligne le professeur Nicolas AGBOHOU, « sans cette arme monétaire typiquement africaine, le franc CFA et l'Euro continueront de bloquer structurellement le déblocage socio-économique du continent noir. Il affirme à cet effet que « les dirigeants africains seront toujours humiliés et ridicules dans les instances internationales en excellent dans la politique de mendicité illimitée »209(*). * 206 Idem, p.164 * 207 Idem, p. 169 * 208 Idem, p.164 * 209 Idem |
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