CHAPITRE II : LES ENTRAVES A
L'APPLICATION EFFICACE DES
INSTRUMENTS INTERNATIONAUX DE
LUTTE CONTRE LE TRAFIC ET LE
BRACONNAGE DES ELEPHANTS ET DES
GORILLES EN AFRIQUE CENTRALE
Depuis des décennies, plusieurs espèces
s'éteignent inexorablement au point où plus de 95% qui ont
vécu à un moment ou un autre de l'histoire de la vie n'existent
plus193. La Déclaration sur la Lutte Anti-Braconnage en
Afrique centrale reconnait que les : « initiatives nationales de lutte
contre le braconnage et le trafic illicite de la faune sauvage, en dépit
d'importants moyens déployés, n'ont pas abouti aux
résultats escomptés »194. Cette affirmation
n'est pas gratuite, car en effet plusieurs interventions juridiques,
techniques, matérielles et humaines ont été mises en
oeuvre pour bloquer la voie aux prédateurs des espèces
menacées d'extinction. Il convient de déceler les raisons de
l'échec de ces interventions dans le contexte sous-régional
(Section I) avant d'apporter quelques suggestions modestes à titre de
solutions transitoires (Section II).
SECTION 1 : PARTICULARITES DES PROBLEMES DU TRAFIC ET
DU BRACONNAGE DES ELEPHANTS ET DES GORILLES DANS LA SOUS
REGION
Aujourd'hui, toutes les initiatives pour combattre le
braconnage et le commerce illégal des espèces sont insuffisantes.
C'est sans doute la raison pour laquelle, le Professeur Alexandre KISS
considère que : « les efforts faits au niveau mondial dans la
protection des ressources forestiers n'ont abouti qu'aux résultats
modestes »195. En fait, les pays de la sous-région
se heurtent à des bandes organisées armées au-delà
des frontières des Etats, ces groupes ayant des ramifications dans
plusieurs continents livrent ainsi le commerce des produits issus du braconnage
à la loi de l'offre et de la demande196.
Beaucoup de pays souffrent du manque d'organisation et d'une
extrême lenteur dans l'application de la CDB. Les politiques nationales
de coordination n'ont pas des techniques
193 VALLAURI Daniel, Jean André, GENOT Jean-Claude, DE
PALMA Jean-Pierre, EYNARD-MACHET Richard, Biodiversité,
naturalité, humanité. Pour inspirer la gestion des
forêts, p. 22.
194 Réunion d'Urgence des Ministres de la CEEAC en
charge des Relations Extérieures, des questions de Défense et de
Sécurité, de l'Intégration Régionale et de la
Protection de la Faune sur la mise en oeuvre d'un Plan d'Extrême Urgence
sur la Lutte Anti Braconnage dans zone septentrionale de l'Afrique centrale,
Yaoundé (Cameroun), palais des congrès, 21-23 mars 2013, p. 2.
195 CORNU Marie et FROMAGEAU Jérôme, Le droit
de la forêt au XXIe siècle. Aspects internationaux, collection
Droit du patrimoine culturel et naturel, l'Harmattan, novembre 2007, p.
272.
196 Article Wikipédia, braconnage en Afrique centrale.
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adéquates pour développer des stratégies
efficaces, sensibiliser l'opinion et faciliter le processus de
consultation197.
Au vu de ce qui précède, il convient de soulever
dans cette étude quelques raisons qui pourraient justifier la
montée grandissante du trafic et du braconnage dans la
sous-région. Pour ce faire, une première démarche
consistera à présenter l'absence lacunaire des moyens financiers
(Paragraphe 1). Par la suite, nous verrons que l'ignorance
généralisée des populations sur les effets du trafic et du
braconnage (Paragraphe 2) et la répression très réduite de
ces actes (paragraphe 3) ont limité les stratégies et plans
d'actions mis en oeuvre.
Paragraphe 1-Absence lacunaire des moyens financiers pour
lutter efficacement contre le trafic et le braconnage des espèces
sauvages
Pour lutter efficacement contre le commerce illégal et
le braconnage des espèces menacés d'extinction, le PAPECALF
prévoit que : « Les pays sont chargés de mettre en
oeuvre le (...) plan d'Action. Dans cette optique, chaque pays est tenu de
mobiliser les ressources financières et humaines adéquates.
Ainsi, chaque pays devra prévoir un budget national pour la mise en
oeuvre de ce Plan d'Action. Les Ministères en charge de la Faune sont
chargés de vulgariser le Plan d'action à travers un large
processus de concertation qui doit aboutir à la planification de la mise
en oeuvre à l'échelle nationale »198. Cette
exigence est toutefois enclavée par l'extrême pauvreté des
pays de l'Afrique subsaharienne. C'est sans aucun doute l'une des raisons de
l'intensification du braconnage des espèces menacées. Les pays de
la sous-région bien qu'ayant instaurés des plans d'actions pour
la conservation de la faune, sont pour la plupart dépourvus d'un budget
pouvant permettre de mettre en place un système de contrôle
continue des aires protégées. Sans compter le fait que ces pays
sont profondément endettés199. La création des
aires protégées transfrontaliers par les Etats n'est pas
accompagnée du même engagement au plan financier, matériel
et humain pour garantir la réalisation des objectifs. Le fonctionnement
des organes s'en trouve handicapé. D'où, « la
précaution à prendre pour ne pas multiplier inutilement les
organes et structures de gestion »200.
Les allocations provenant des Etats développés
et des organisations internationales et non gouvernementales, ne suffisent pas
à encadrer la lutte contre le braconnage. Il convient par ailleurs de
soulever l'épineux problème de l'ignorance des populations
locales face aux conséquences des actes anti fauniques.
197 WWF, Des mesures pour maitriser l'accès aux
ressources, et assurer le partage des bénéfices qui en
découlent». La situation dans dix pays, la biodiversité au
service de tous. Un document de réflexion du WWF International.
198 Secrétariat exécutif COMIFAC, Plan
d'action sous-régional des pays de l'espace COMIFAC pour le renforcement
de l'application des législations nationales sur la faune sauvage
(PAPECALF) 2012-2017.
199 CROUIGNEAU Françoise, L'endettement malsain du
tiers monde, Le Monde du 20 janvier 1988.
200 NGOUFO Roger, Etude sur la capitalisation des
expériences d'Aires Protégées transfrontalières en
Afrique centrale, mars 2003, p. 34.
59
Paragraphe 2- L'ignorance
généralisée des populations sur les effets du trafic et
du braconnage des espèces
L'une des raisons de l'intensification du braconnage dans la
sous région est certainement liée au problème d'ignorance
des populations face aux effets parfois irréversibles de ces actes bien
que de nombreuses campagnes de sensibilisations ont été faites.
Cela expliquerait alors comme précise l'ancien Chef d'Etat ivoirien, le
peu de considération des populations pour les mesures visant à
rationaliser l'activité de la chasse. Selon lui : « l'attitude
de la grande masse de la population nationale face à la faune tient au
fait qu'elle n'a pas encore une conscience exacte de la nécessité
de conserver ce patrimoine qu'est la faune que la providence nous a offert, et
que nous devons conserver pour les générations futures
»201. Certes, en cherchant bien on peut trouver dans les
revues ou dans les publications spécialisées quelques
recommandations, au demeurant trop techniques, qui visent à informer le
public sur la nécessité d'un usage rationnel des biens et des
services environnementaux.
Néanmoins, force est de constater que si ces revues et
publications tentent de combler les lacunes des stratégies globales en
matière d'information, leur incidence reste toute minime202.
Et ceci pour plusieurs raisons : Le caractère trop technique de ces
revues et publications réduisant leur accessibilité aux seuls
professionnels ou aux spécialistes. Or, une information qui vise un
grand public doit être claire et simple. Un autre bémol à
la communication des populations est le choix de la langue de publication qui
est soit l'Anglais, le Français, ou l'espagnol, représentant les
langues étrangères héritées de la période
coloniale. Ce choix de langue restreint le nombre de citoyens alors même
que la plupart des populations riveraines des zones fauniques et
forestières ne savent ni lire, ni écrire ces langues. Ces
derniers étant des autochtones, ne parlent que les langues
vernaculaires.
Eu égard ces arguments, la communication des
populations a été mené sous la roulette de plusieurs
acteurs parmi lesquels, l'Etat à travers ses collectivités
locales, les ONG, les défenseurs de la nature, et les organisations
internationales. Cette sensibilisation est explicitement recommandée
dans la plupart des conventions internationales, notamment la Convention sur la
Diversité Biologique de Rio 1992 en son article 13 : « Les
Parties contractantes : a) Favorisent et encouragent une prise de conscience de
l'importance de la conservation de la diversité biologique et des
mesures nécessaires à cet effet et en assurent la promotion par
les médias, ainsi que la prise en compte de ces questions dans les
programmes d'enseignement; b) Coopèrent, selon qu'il conviendra, avec
d'autres Etats et des organisations internationales, pour mettre au point des
programmes d'éducation et de sensibilisation du public concernant la
conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique
». Cependant, ces mesures entreprises n'ont pas apporté les
résultats escomptés. Tout au long de nos recherches, nous sommes
allées auprès des villageois de la tranche d'âge allant de
20 à 57 ans vivant à proximité du parc de la Mefou-Akamba
(Sud du Cameroun) pour les interroger sur le trafic et le braconnage des
espèces menacées. Sur vingt cinq personnes
interrogées203, seulement quatre d'entre elles connaissaient
que la capture illégale des espèces protégées
pouvaient donner lieu à une peine d'amende et/ou
201 KOUBO Douzo, La stratégie environnementale en
question, Côte d'ivoire, l' Harmattan, juin 2003, p. 18.
202 Ibid., pp. 19-20.
203 La collecte de données au Parc National de la
Mefou-Akamba (Cameroun), s'est faite pendant une durée de trois jours,
pendant laquelle nous avons interrogé le conservateur, le chef du
quartier où se trouve ce parc ainsi que les populations autochtones de
la localité. A ce sujet l'un des éco gardes rencontré sur
place nous informe que les principaux braconniers arrêtés dans le
Parc justifiaient leurs actes par la pauvreté dont ils sont victimes, et
qui affectent leur famille.
60
privative de liberté204. La
difficulté de la communication réside dans le fait que les
populations locales considèrent que les aires protégées
font partie de leur patrimoine personnel et comptent vivre de l'exploitation
des produits issus de ces zones forestières205.
L'échantillon des personnes interrogées
considère également que la lutte contre le braconnage est un luxe
pour les pays riches. Car en réalité, les pays en
développement des zones arides et tropicales humides sont en permanence
confrontés aux problèmes écologiques et
financiers206. De plus, les pachydermes causent de gros
dégâts sur les cultures des populations riveraines, qui par
conséquent sont plus motivées à les abattre. Cela remet
à nouveau en cause le problème du conflit
homme-éléphant dont les conséquences ont été
désastreuses depuis plusieurs décennies.
Si de manière globale on assiste à une
évolution dans le processus de partage de revenus de la rente
forestière, notamment avec le début de l'application des
dispositions législatives et règlementaires, l'impact de ces
mesures sur les conditions de vie des populations est
limité207. Tout de même, les ressources
forestières représentent un enjeu économique, à la
fois pour les populations, l'Etat et les opérateurs économiques.
Tout le monde y gagne, à des degrés divers et de diverses
manières208. Il est donc important d'informer les populations
de leurs droits sur ces ressources fauniques. Cette information selon
Greenpeace, passe par les médias si possible en direct et par les
journaux écrits ou parlés209. De sorte qu'elle sera
transmise à une grande échelle et les citoyens pourront apporter
leur soutien aux gouvernements. Quid de la répression très
réduite des actes de trafic et de braconnage ?
Paragraphe 3- Le quasi inexistence de la
répression des trafiquants illégaux et des
braconniers
Selon Bas HUIJBREGTS au vue de l'état du trafic
illégal et du braconnage des espèces faunique : « Dans
toute l'Afrique centrale, nos efforts sont anéantis parce que la loi
n'est pas appliquée. Les braconniers ne sont jamais condamnés,
alors ils reviennent. Au Cameroun, le problème est pourtant devenu un
enjeu de sécurité nationale »210. Le
braconnage tout comme le trafic a été très encadré
d'un point de vue international et national. Au regard de la panoplie des
instruments internationaux sur la problématique de la lutte contre le
trafic et le braconnage des éléphants et des gorilles, il est
tout à fait aberrant que la répression de ces actes soit quasi
inexistantes211 en Afrique centrale. Cela alors même que le
trafic mondial et illégal de la faune sauvage est au
4ième rang mondial des trafics illicites avec une valeur
annuelle mondiale estimée entre 8 et 10 milliards de dollars
américains. Malheureusement, le trafic illégal des
espèces
204 Voir la Loi Camerounaise N°94 / 01 du 20 janvier 1994
portant régime des forêts, de la faune et de la pêche.
205 BIGOMBE LOGO Patrice, Le retournement de l'Etat
Forestier. L'endroit et l'envers des processus de gestion
forestière au Cameroun, préface du
Professeur Maurice KAMTO, presse de l'UCAC, 2004, p. 17.
206 PRIEUR Michel, Droit de l'Environnement, Dalloz, p.
42.
207 MILOL Adonis et Pierre Jean-Michel, Impact de la
fiscalité forestière décentralisée sur le
développement local et les pratiques d'utilisation des ressources
forestières au Cameroun, Rapport de Consultation pour la Banque
Mondiale, janvier 2000, 48 p.
208 Ibid.
209 LEQUENNE Philippe, Dans les coulisses de Greenpeace,
l'Harmattan, janvier 2005, p.111.
210 Déclaration de Bas HUIJBREGTS, chargé de la
gestion des projets régionaux de conservation au WWF, interviewé
au Journal français Le monde.
211 Cela est prouvé à cause du nombre
limité de peines attribuées ou alors de la mise en condamnation
effective des trafiquants et des braconniers.
61
sauvages est encore considéré dans la plupart
des législations fauniques de la sous-région comme un
délit, au lieu d'être reconnu comme un crime, au même titre
que les trafics d'hommes, le trafic des drogues et des armes.
Le braconnage tout comme le trafic des espèces sauvages
a des effets pervers sur les revenus d'une communauté. Ces actes
fragilisent la paix et la sécurité sociale. Les braconniers sont
prêts à tout pour parvenir à leurs fins, même si pour
cela ils sont obligés de sacrifier des vies humaines qui tenteraient de
leur dissuader. Face à la gravité du problème que
soulève la répression des actes délictuels dans la faune
sauvage, on est en clin de s'interroger sur l'espérance de vie des
éléphants et des gorilles. Il se pourrait que si les trafiquants
et les braconniers continuent de perpétrer leurs actes, les
générations futures n'auront connaissance de ces espèces
emblématiques, qu'à travers les livres et musées
historiques. L'environnement doit être protégé dans toutes
ses composantes, tel est le souhait des instruments internationaux. Reste
qu'une telle ambition est enclavée par des individus inconscients de ce
que le patrimoine commun de l'humanité doit être conservé
au même titre que la dignité humaine.
Si l'on veut se prémunir contre le risque d'une
altération irréversible des effectifs des éléphants
et des gorilles dont les conséquences environnementales et
économiques pourraient être inestimables, il est nécessaire
de repenser l'ensemble des stratégies
élaborées212. Fort de ce constat, il convient de
présenter dans les développements qui vont suivre quelques
esquisses de propositions de solution.
SECTION 2 : ESQUISSES DE SOLUTIONS COMPENSATOIRES
DES CONTRAINTES EXISTANTES
Le braconnage et le trafic des espèces prennent de plus
en plus de l'ampleur. C'est pourquoi SADIGH Elie établit que, «
les ressources naturelles doivent être préservées afin,
d'une part, de pouvoir les transmettre de la meilleure façon et dans le
meilleur état aux générations à venir, d'autre
part, de réaliser le développement durable, enfin de
préserver l'avenir du vivant. L'épuisement et la
dégradation des ressources naturelles sont essentiellement les
conséquences de l'action de l'homme, il faut donc agir sur cette action
»213. En d'autres termes, les actes criminels dans la
faune n'est pas sans conséquence sur l'économie et le
développement durable de la sous-région. L'efficacité de
l'action contre ces actes suppose « l'inscription de l'environnement
à l'agenda politique, ce qui ne passe pas uniquement par la
sensibilisation, mais une refonte des institutions économiques,
politiques, judiciaires, financières dans le sens des
intérêts protégés de l'environnement
»214. Dans le cadre de cette étude on peut tout de
même relever que l'augmentation des budgets nationaux (Paragraphe 1), la
sensibilisation du public (Paragraphe 2), la révision des
pénalités en matière d'infraction faunique (Paragraphe 3)
et un dialogue entre les états d'Afrique centrale et les pays
consommateurs (Paragraphe 4) sont des mesures compensatoires pouvant dissuader
les gangsters fauniques en Afrique centrale.
Paragraphe 1- Augmentation des budgets nationaux dans la
lutte contre les actes criminels dans la faune
Pour lutter au mieux contre le trafic et le braconnage des
espèces menacées, il faudrait
212 Douzo KOUBO, La stratégie environnementale en
question, Côte d'ivoire, l' Harmattan, juin 2003, p.13.
213 SADIGH Elie, Le Développement durable et
équitable, décembre 2008, l'Harmattan.
214 Bernard KALAORA, Au-delà de la nature
l'environnement. L'observation sociale de l'environnement, collection
« environnement », l'Harmattan, mars 1998, p. 81.
62
que le budget annuel alloué aux ministères
chargés de la faune dans la sous-région soit revue à la
hausse. L'insuffisance des ressources financières est
décriée comme une contrainte majeure de gestion des aires
protégées transfrontalières. Paradoxalement, c'est l'un
des aspects pour lesquels les acteurs et personnes ressources ont du mal
à fournir des chiffres. Ceci révèle déjà une
grande faiblesse du système de gouvernance. Un accent particulier doit
être mis au niveau des Comités de Suivi sur la compilation des
tableaux de synthèse des financements215. Les Etats de
l'Afrique centrale devraient comme recommande la Déclaration de
Yaoundé « (...) inscrire (...) le programme de lutte anti
braconnage en Afrique centrale, dans leurs budgets respectifs, et invitent leur
Ministre en charge des finances à prendre les mesures nécessaires
à cet effet »216.
Pour parvenir aux objectifs fixés, ils devraient
considérer comme priorité majeure la lutte contre le trafic et le
braconnage des espèces sauvages menacés d'extinction
conformément aux annexes de la CITES. Il s'agit ici de faire face
à trois problèmes majeurs : Décourager les braconniers et
les trafiquants illégaux, assurer la survie des mammifères en
voie d'extinction et garantir la paix et la sécurité sociale. Or,
cela nécessite une grande mobilisation financière que les Etats
de la sous-région ne disposent pas aisément.
Les politiques intérieures des Etats d'Afrique centrale
devraient être redynamisées et recentrées sur ce qui
aujourd'hui constitue incontestablement une nouvelle forme d'économie
car un pays qui dispose des espèces sauvages en abondance est largement
convoité par les touristes de tous les horizons. En
réalité, le tourisme contribue à l'économie
nationale et même sous-régionale. Il est un enjeu
considérable de développement217. A titre illustratif,
au Zimbabwe beaucoup de touristes parcourent les aires protégées
de cette nation, captivés par la variété des
espèces qui sont conservés in situ et ex situ. Le Zimbabwe
possède une des plus grandes densités d'éléphants
du continent estimés à 0,46% par Km2 derrière
le Botswana218. L'industrie de l'éléphant «
génère un revenu annuel moyen d'environ 11,75 millions de $
Z. Car au Zimbabwe, l'éléphant est un animal qui motive de
nombreux chasseurs non résidents qui sont prêts à payer
pour les 21 jours de safari réglementaire requis pour la chasse à
l'éléphant »219. Ce qui par ricochet
contribue à l'économie de cet état, dépassant ainsi
le seuil de la pauvreté ambiante de l'Afrique subsaharienne.
Il est donc constant que les stratégies et les plans
d'actions de conservation des éléphants en Afrique centrale ont
été entravés par le flou financier qui subsiste. A titre
d'exemple, du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, seul le Cameroun a
cotisé pour la mobilisation des ressources financières annuelles
de la COMIFAC. Et le recouvrement des arriérés du Congo
était de100 000 000 FCFA tandis qu'au Gabon il était de 30 700
000 FCFA220, ce qui est très limité compte tenu de
dépenses annuelles de cette organisation. Au regard de ce qui
précède, conserver la faune en Afrique centrale est
bénéfique non seulement pour les populations des
éléphants et gorilles, mais aussi pour l'économie
nationale. C'est donc un investissement viable et promoteur de
développement durable des peuples. La lutte contre les actes de trafic
et de braconnage des éléphants et des gorilles nécessite
également la sensibilisation du public.
215 NGOUFO Roger, Etude sur la capitalisation des
expériences d'Aires Protégées transfrontalières en
Afrique centrale, mars 2003, p. 34.
216 Réunion d'Urgence des Ministres de la CEEAC en
charge des Relations Extérieures, des questions de Défense et de
Sécurité, de l'Intégration Régionale et de la
Protection de la Faune sur la mise en oeuvre d'un Plan d'Extrême Urgence
sur la Lutte Anti Braconnage dans zone septentrionale de l'Afrique centrale,
Yaoundé (Cameroun), Palais des congrès, 21-23 mars 2013, p.4.
217CHERUBINI Bernard, décembre 2004, Le
territoire Littoral ? Tourisme, pêche et environnement dans
l'océan Indien, l'Harmattan, p. 138.
218 COMMISSION EUROPEENNE, Faune sauvage africaine. La
ressource oubliée (Tome II), p. 251.
219 Ibid.
220 COMIFAC, Rapport annuel 2012, p. 28.
63
Paragraphe 2- La sensibilisation du public passe par
les
médias
Il est primordial de mettre en place une information
stratégique pour aviser « l'opinion publique nationale et
internationale » 221 sur les effets du braconnage à long
terme. Les populations sont « préoccupées par
l'état et le devenir des ressources forestières
»222 dans leur pays. C'est pourquoi la gestion faunique
doit être participative et fait appel à l'aide des communes et des
populations étant donné que chasser légalement profite
à tout le monde.
En effet, les chasseurs ayant les permis de chasse payent les
taxes qui sont versées en partie au ministère chargé de la
faune, une autre partie est versée aux populations du lieu de chasse.
L'année dernière la redevance faunique a apporté
près de 400 000 millions de FCFA à l'Etat du Cameroun. Les
populations doivent être informées des bénéfices des
redevances forestières car elles ont tout à gagner.
En réalité, plusieurs campagnes de
sensibilisations ont été menées dans le cadre de la lutte
contre le trafic et le braconnage des éléphants et des gorilles
en Afrique centrale. Même si ces campagnes ont permis de faire
évoluer la lutte contre ces actes criminels, il reste que nombreux sont
les citoyens de la sous-région qui n'ont pas encore eu connaissance des
effets du braconnage notamment sur la biodiversité. Il convient donc que
l'information soit faite par l'intermédiaire des médias nationaux
et internationaux notamment la télévision, l'internet, la radio,
la presse etc. Et cela avec la même intensité que sont
menées les campagnes sur les sensibilisations des maladies, des produits
technologiques ou cosmétiques. La sensibilisation du public consiste
donc à informer le grand public sur les dangers qui guettent les animaux
sauvages. Elle consiste aussi à informer le public sur les missions des
éco gardes et leur statut en Afrique Centrale. En outre elle doit
être informée des actions que mène le PAPECALF dans la
gestion de la faune sauvage. Que penser de la révision des
pénalités en matière d'infraction faunique ?
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