B. Réforme de 1981
Les forces en présence étant d'accord sur le
fait que la réforme de 1971 avait mené à une impasse et
qu'il était essentiel de trouver des solutions, la Décision
d'Etat n°09/CC/81 du 1er juin 1981 a essayé de corriger
le problème de la trop grande centralisation dont les résultats
n'ont pas été satisfaisants, en proposant une certaine
décentralisation et une autonomie de gestion plus grande pour les
différents établissements.
Ainsi, l'UNAZA fut scindée en trois universités
d'Etat, à savoir: l'Université de Kinshasa (UNIKIN),
l'Université de Kisangani (UNIKIS) et l'Université de Lubumbashi
(UNILU). Chacune de ces universités était dotée par la
réforme « d'une personnalité juridique et
gérée de manière autonome » par le Conseil de
l'Université, lui-même dirigé par un recteur. Mais cette
« autonomie de gestion» se fait sous la supervision d'un
Conseil d'administration commun à toutes les trois universités. A
ce niveau, le conseil d'administration était lui-même sous le
contrôle supérieur d'un conseil de tutelle140. La
raideur administrative que l'on avait déplorée sous la
première reforme, et qu'il avait fallu combattre, était toujours
présente car là encore, chacun des établissements n'a
toujours pas la liberté totale de définir sa politique compte
tenu des réalités rencontrées sur le terrain. La
centralisation est toujours d'actualité, ce qui fait dire au professeur
Ngub'usim que « la réforme de 1981 n'était [...]
à plusieurs égards, qu'une restructuration de façade
»141 de l'UNAZA, avec toujours à sa tête Mgr
Tshibangu, ancien recteur, devenu le président du Conseil
d'administration des Universités.
Dans le nouveau système, l'Etat garde toujours son
pouvoir de décision et de pression sur les Universités, car c'est
à elle que revient le pouvoir de nommer les autorités en
présence. L'article 14 de l'ordonnance n°081-142 du 3 octobre 1981
précisait que « le recteur est nommé par le
président de la République, [...] parmi les membres du personnel
académique ayant rang de professeur ordinaire ». Il faut
souligner que dans le nouveau système, le recteur de l'Université
peut être comparé au vice-recteur de l'ancien système. On
pourrait donc se réjouir du fait que désormais, c'est parmi
les
140 TSHIBANGU, T. (Mgr), Op. Cit., p.143-144 : les
instituts supérieurs Pédagogiques, et les instituts
supérieurs techniques, possédaient aussi leurs conseils
d'administration. Ce sont ces trois conseils d'administration qui se retrouvait
sous le contrôle du département de l'enseignement supérieur
et de la recherche scientifique.
141NGUB'USIM, R., Op. Cit., p.197
professeurs que l'on retrouve les dirigeants de
l'université. Mais l'article précise plus bas que « sans
égard aux dispositions de l'alinéa précédent, le
Président de la République [pouvait] nommer Recteur tout
Zaïrois jugé digne et compétent »142.
Il y a donc une régression par rapport à l'ancienne
législation. Car, auparavant, légalement du moins, le
vice-recteur devait au moins avoir un diplôme de licence. Ici la
compétence n'est même plus un critère de sélection
des responsables de l'université.
Dans le même temps les problèmes de financement
de l'Université persistent et s'aggravent même car l'Etat,
principal bailleur de fond de l'enseignement, n'a plus du tout les moyens de sa
politique.
A partir de 1975, l'Etat zaïrois traverse une crise
économique profonde dû à une mauvaise gestion du
pays143. L'Etat, pour survivre et sortir de la crise, se met sous la
tutelle des organes de financement internationaux, qui l'astreignent à
des mesures drastiques. Il se trouve contraint, pour recevoir cette aide, de
faire des coupes importantes dans certains secteurs sociaux. La baisse du
budget alloué au secteur de l'éducation en fait partie. Si au
départ l'insuffisance du budget du système universitaire est
définie comme résultant du désir du pouvoir de mettre les
universités à genoux afin de briser la contestation, à ce
moment de l'histoire, l'Etat n'a réellement plus les moyens d'investir
dans le système éducatif, et donc d'atteindre les objectifs qui
sont assignés aux universités.
En 1984, la table ronde sur l'Etat et l'avenir de l'ESU admet
qu'il existe « une inadéquation entre, d'une part, les
objectifs et les grandes orientations politiques de la Réforme de 1981et
d'autre part, les moyens mis en oeuvre pour atteindre ces objectifs et par
conséquent, pour réussir la Réforme, moyens qui sont
insuffisants, étant donné notamment que leurs prévisions
ne sont pas judicieusement articulées. » 144
Cette réforme n'arrive donc pas à réparer
les lacunes existant dans l'Université et la dérive du
système continue.
142 TSHUND'OLELA, G., « Pour une (re)définition
des libertés académiques en République démocratique
du Congo » dans Universités et libertés
académiques en République démocratique du Congo,
Dakar, CODESRIA, 2005, p.114
143NDAYWEL, I., Histoire générale du
Congo. De l'héritage ancien à la République
Démocratique du Congo, Paris-Bruxelles, Duculot, 1998, pp. : Le
Congo connu une certaine croissance à ses débuts grâce
à une politique assez heureuse, il y eu la renégociation du
contentieux belgo congolais, la réforme monétaire de 1967, et la
promulgation en 1969 d'un nouveau code d'investissement. En 1973 eu lieu la
zaïrianisation qui donna de nombreuses entreprises à des membres du
gouvernement qui ne surent les gérer, cela constitua l'une des
premières raisons de la crise.
144 TSHIBANGU, T. (Mgr), Op. Cit., p. 125
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