DEUXIEME PARTIE
QUELLE PLACE POUR LES AUTOMOBILES DE
L'ETAT DANS LE FONCTIONNEMENT DE L'ADMINISTRATION AU TOGO INDEPENDANT
? (1959-1992)
La machine de la décolonisation en branle depuis la
Conférence de Brazzaville de 1944, fut accélérée
sur fond de revendication dans les années 1950 avec des étapes
décisives au Togo comme la République Autonome (RAT) en 1956 et
surtout la victoire des nationalistes aux élections législatives
du 27 avril 1958. Grâce à la synergie des voix anticolonialistes
qui s'élevaient, les Indigènes togolais étaient de plus en
plus associés à la gestion de leur territoire aux cotés
des Français au cours de ce processus. C'est cette victoire qui consacra
la volonté de la majorité des Togolais de gérer d'ores et
déjà, eux-mêmes, les affaires de leur pays.
L'administration du territoire imposait des moyens humains et
matériels.
Parmi ceux-ci, figurent solidement les moyens de transport
modernes routiers, sans lesquels aucun développement n'est possible.
Pendant la période coloniale française, le parc automobile
s'était imposé comme meilleur et plus efficace patrimoine roulant
des pouvoirs publics. Après l'indépendance, les véhicules
devaient, par la flexibilité qu'offre leur trafic, aider
l'Administration, avide de développent socioéconomique, à
gérer avec dynamisme l'ensemble du territoire, dont elle a la charge,
par le transport de son personnel et de ses matériels de service et
à y bien s'enraciner. Comment ont-ils alors contribué à la
gestion du territoire togolais par l'Administration de la veille de la
souveraineté internationale du Togo à 1992.
Répondre à cette question, revient à
montrer au prime abord, dans cette partie, comment les véhicules de
l'Etat, soumis à un système de gestion, ont-ils permis à
ce dernier de se déployer sur le territoire togolais de 1959 aux milieux
des années 1970. Secundo, il sera analysé l'apport du parc
automobile au fonctionnement des institutions et structures administratives au
Togo pendant la période qui s'écoule entre le début du
troisième plan quinquennal et 1992, une année marquée par
des crises multiformes.
TROISIEME CHAPITRE
VEHICULES ETATIQUES, UN HERITAGE COLONIAL
DE TRANSPORT POUR UNE BONNE GESTION DU TERRITOIRE TOGOLAIS SOUVEVERAIN
(1959-1976)
Le système colonial, par sa nature et ses objectifs,
maintenait à l'écart les `'indigènes» des postes de
décisions concernant la gestion de leur territoire. Cependant, au Togo
(comme sur plusieurs autres cieux), quelques années avant
l'indépendance, les autochtones à travers leurs élites
contrôlaient à bien des égards des secteurs de
développement de leur territoire confiés aux départements
ministériels, et ce, dans le contexte de l'imminence de sa
souveraineté. Par son poids dans le développement
socio-économique et administratif, le secteur des transports retenait
l'attention de ces nouveaux dirigeants, surtout sa section automobile
administrative héritée de la colonisation.
Ainsi, la gestion des véhicules de l'Etat a fait
l'objet d'une réflexion lors de la Conférence tenue le 8
septembre 1959 et réunissant les Commandants de cercles et Chefs de
circonscriptions sous la présidence du Premier ministre d'alors,
Sylvanus Epiphanio Olympio. Les automobiles, grâce à leur bonne
gestion, devaient permettre à l'Administration indépendante de
bien circuler sur le territoire et d'établir son contrôle sur tous
ses points, en vue de sa bonne gestion et de son développement
harmonieux. Mais, la réussite d'une telle mission exige d'abord un
réseau routier fiable et un parc automobile assez garni. Comment se
portaient alors les équipements liés au trafic automobile au Togo
de la veille de l'indépendance au début du troisième plan
quinquennal, où en principe les résultats des efforts entrepris
dans le cadre des programmes de développement socio-économiques
devaient déjà être perceptibles? Comment le transport
administratif à bord de véhicule a-t il été
gère pendant cette période? Ce système de gestion a-t-il
permis aux véhicules administratifs de remplir pleinement leur mission
de transport des personnes et des biens des institutions et structures de
l'Etat togolais?
Ce chapitre 3, qui va de 1959 à 1976, fait le point sur
les réalisations en matière d'infrastructures routières et
l'état du patrimoine automobile au Togo. Il aborde aussi le
système d'encadrement du transport automobile administratif. Enfin, elle
analyse la contribution des automobiles de l'Etat au déploiement
administratif.
I- Les équipements de transport automobile au
Togo : de la léthargie à la relance (1959 - 1976)
L'accession à la souveraineté internationale du
Togo a eu lieu dans un contexte très critique tant sur le plan interne
qu'international. Les impacts sur le transport routier sont énormes. Ce
secteur fut, à bien des égards, handicapé et n'a connu un
renouveau qu'avec les deux premiers plans quinquennaux.
1- Une ère difficile pour le trafic routier dans un
contexte socio-économique national et international critique
(1959-1966)
Les difficultés économiques internationales,
l'indépendance du Togo et la situation politique interne n'ont
été guère favorables au développement du transport
routier.
Sur le plan national, le Togo était secoué par une
crise politique et socio- économique.
Ainsi, Sylvanus Olympio essuyait de vives critiques de la part
de ses opposants au moment où une préoccupante crise
économique frappait le pays. Il finit par laisser sa peau le 13 janvier
1963 à la suite d'un coup d'Etat militaire. Son successeur N. Grunitzsky
a consacré un bon temps pour aplanir les crises politiques, et ce, au
détriment des secteurs de développement.
Sur le plan international, la situation vacillait entre
brouille diplomatique et crise économique.
En effet, la victoire des nationalistes aux élections
législatives du 27 avril 1958 avec 60 % des voix, signifie que la
majorité des Togolais a opté pour l'indépendance
immédiate. Ce nouveau statut suppose que le territoire togolais devait
supporter à ses propres frais, sa gestion tant sur le plan
institutionnel que structurel donc, aussi en matière
d'équipements de transport routier. La France, métropole et
principale partenaire économique du Togo, ne se sentait plus mêler
dans ses affaires. A la même période, en 1958, la croissance
économique céda la place aux difficultés
économiques en Europe voire dans monde. Cette situation internationale
influença les financements de la France au Togo qui ne pouvait que
souffrir du manque d'équipements routiers, même si quelques
actions étaient menées dans ce sens.
Le troisième plan du FIDES (1958-1962) n'était
pas concrétisé. Il fut remplacé par le Fonds d'aide et de
coopération (FAC) par la Constitution française de 1958
(Tsigbé 2009 : 291). La dotation du Togo sur les ressources de ce fond
au titre de l'exercice 1959-1960 était de 317,3 milliards de FCFA dont
39,6 millions pour le secteur de la santé et 48,5 millions pour
l'aménagement des routes (Tsigbé 2009 : 293). Elle est maigre par
rapport à celle du
FIDES. Ces fonds servaient, non seulement à la
construction des routes et infrastructures socio-collectives, mais
également à l'achat des matériels roulants de transports
nécessaires pour l'exécution des travaux et pour le transport des
biens et personnels des services sociaux (ambulance, etc.)
A cette période d'autres travaux d'édification
des infrastructures routières ont débuté avec l'aide des
Etats-Unis qui ont fait des dons de véhicules au Togo.
Ainsi, dans son discours de fin d'année 1961, le
président de la République, Sylvanus Olympio, faisait observer
qu' « afin de nous aider à faire face aux importantes
dépenses d'entretien, le gouvernement des Etats unis d'Amérique a
gracieusement mis à notre disposition 36 engins neufs dont 10 camions et
une quantité importante de pièces de rechange
118».
Ces matériels acquis sur don et sur payement pour
effectuer les travaux, renforçaient le parc automobile de l'Etat. Ce
dernier était aussi alimenté par les Nana-benz qui mettaient
gracieusement à la disposition de l'Administration des véhicules
pour les besoins de service, autour de 1960, où l'Etat en
difficulté économique n'arrivait pas à en payer, du moins
suffisamment.
Les difficultés étaient si cruciales que, S. E.
Olympio lors de la Conférence des Chefs de circonscriptions et des
commandants de cercles et des Ministres qui a lieu le 8 septembre 1959,
demandait une bonne gestion et utilisation des véhicules des pouvoirs
publics pour contribuer à réduire les dépenses
publiques119.
Tout compte fait, les difficultés économiques,
politiques et diplomatiques ont beaucoup limité les réalisations
en matière d'équipements de transport routier (véhicules
et routes) au Togo entre 1959 et 1966. En conséquence, le trafic
automobile administratif en a assez souffert. Il faut donc attendre les plans
quinquennaux pour voir un véritable changement.
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