B- Le respect des princi pes generaux ratione
materia
Contrairement aux principes généraux
ratione personae, les principes généraux ratione matéria
tiennent compte de l'acte illicite -et non de la personne. Ils correspondent au
principe de légalité (1) et a celui de
l'imprescriptibilité (2).
305 Voir KAMTO Maurice, L'agression en droit
international, op.cit., P.350.
1- Le respect du princi pe de legalite
Le principe de legalite est defini par l'article 11,
paragraphe 2, de la DUDH306. Il signifie que le legislateur doit
precisement definir et incriminer un acte social qui devient par la-meme
reprehensible et preciser les peines qui l'accompagnent. Comme l'ecrit Damien
SCALIA, le principe de legalite « suppose que 1) l'individu est l'auteur
d'un fait qui est defini objectivement (une omission peut aussi etre
incriminee) et que 2) ce fait est incrimine par la loi
*307.
Le principe de legalite se traduit dans les
instruments juridiques par la double maxime "Nullum crimen sine lege'' et
"Nulla poena sine lege''308. L'application de ce principe «
permet d'eviter l'arbitraire et laisse aux citoyens le soin de regler leur
comportement social *30 9. Ce principe est, selon les termes du
Professeur Jean PRADEL, la « regle cardinale, cle de voute du droit
criminel *310.
Le statut de la CPI prevoit le principe de legalite
des delits et des peines. D'une part, l'article 22 enonce le principe Nullum
crimen sine lege311. Il dispose alors :
L 1. Une personne n'est responsable en vertu du
present Statut que si son comportement constitue, au moment ou il se produit,
un crime relevant d'une competence de la Cour.
2. la definition d'un crime est d'interpretation
stricte et ne peut etre etendue par analogie. En cas d'ambiguïte, elle est
interpretee en faveur de la personne qui fait l'objet d'une enquête, de
poursuites ou d'une condamnation.
306 Voir annexe 3,
p.163.
307 Voir SCALIA Damien, g Quelques reflexions ...*,
op.cit., P.2.
308 Voir KAMTO Maurice,
L'agression en droit international, op.cit., PP.346-347.
30 9 Voir SCALIA Damien, g
Quelques reflexions ... *, op.cit., P.2.
310 Voir PRADEL Jean, Droit
pénal, op.cit., P.161.
311 Litteralement g pas de
crime sans loi *.
3. Le present article n'empêche pas qu'un
comportement soit qualifie de crime au regard du droit international,
independamment du present Statut D.
D'autre part, le principe Nulla poena sine
lege312 est prevu a l'article 23 du statut de la CPI en ces termes
:
«Une personne qui a ete condamnee par la Cour ne
peut etre punie que conformement aux dispositions du present Statut
D.
Ainsi, le principe de legalite des delits et des
peines permet d'un cote qu'il soit expressement prevu et de l'autre que le juge
lui soit subordonne313. Mais, surtout, ce principe permet que le
contenu des crimes soit clairement identifie ainsi que celui des peines qui
l'accompagnent. C'est a cette condition que peuvent Itre separes les crimes
prescriptibles des crimes imprescriptibles.
2- Le respect du princi pe de l'im prescri
ptibilité des crimes
Si les crimes de droit commun sont prescriptibles, il
est des violations des droits de l'homme qui ne peuvent s'eteindre par le seul
fait de l'ecoulement du temps314. L'article 2 9 du statut de Rome
dispose :
g Les crimes relevant de la competence de la Cour ne
se prescrivent pas D. Il s'agit precisement des crimes contre l'humanite, du
crime de genocide et des crimes de guerre.
Dans sa resolution du 26 novembre 1 968, l'AGNU
adoptait la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et
des crimes contre l'humanité315. L'article premier de la
Convention dispose :
312 Litteralement * pas de
peine sans loi *.
313 Voir PRADEL Jean, Droit
pénal, op.cit., PP.164-174.
314 Voir KAMTO Maurice,
L'agression en droit international, op.cit., PP.353-354.
315 Voir Convention sur
l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes
contre l'humanité, adoptee et ouverte a la signature, a la
ratification et a l'adhesion par l'AGNU
L Les crimes suivants sont imprescriptibles, quelle que
soit la date a laquelle ils ont ete commis :
a) Les crimes de guerre, tels qu'ils sont definis
dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 aout 1 945
et confirmes par la resolution 3 (I) et 95 (I) de l'Assemblee generale de
l'Organisation des Nations Unies, en date des 13 fevrier 1 946 et 11 decembre 1
946, notamment les "infractions graves'' enumerees dans les Conventions de
Geneve du 12 aout 1 94 9 pour la protection des victimes de guerre
;
b) Les crimes de l'humanite, qu'ils soient commis en
temps de guerre ou en temps de paix, tels qu'ils sont definis dans le Statut du
Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 aout 1 946 et confirmes par
les resolutions 3 (I) et 95 (I) de l'Assemblee generale de l'Organisation des
Nations Unies, en date des 13 fevrier 1 946 et 11 decembre 1 946, l'eviction
par une attaque armee ou l'occupation et les actes inhumains decoulant de la
politique d'apartheid, ainsi que le crime de genocide, tel qu'il est defini
dans la Convention de 1 948 pour la prevention et la repression du crime de
genocide, meme si ces actes ne constituent pas une violation du droit interne
du pays ou ils ont ete commis N.
Ainsi, les conditions de forme a l'application de la
sanction penale internationale relévent autant du respect des principes
generaux du droit penal international que du statut des individus responsables
des violations des droits de l'homme. Ceci dit, la qualite officielle ou non
officielle d'un individu ne le disculpe pas de sa responsabilite penale. Par
ailleurs, la sanction est mise en oeuvre en respect d'un procés
equitable ou toutes les garanties lui sont accordees devant la juridiction
competente. Cette derniére doit d'abord pouvoir determiner le ou les
actes incrimines. C'est dire que
tout comme celles liees a la forme, les conditions de
fond sont necessaires a la mise en oeuvre de la sanction penale
internationale.
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