§2. Les risques d'échecs de l'Administration de
mission
L'Administration de mission ne présente pas toujours que
des avantages. Des risques d'échecs subsistent.
A. La gestion aristocratique
La nomination des membres de l'Administration de mission et le
recrutement de son personnel est quasiment discrétionnaire au Burundi,
comme ailleurs. Or, il s'agit des organismes où les tâches sont
à la fois les plus exaltantes et les mieux
rémunérées; et par conséquent, ce sont les emplois
les plus recherchés du secteur public qui sont ceux pour lesquels la
sélection se fait dans les conditions les plus proches de
l'arbitraire66. De même, les règles de gestion des
crédits qui leur sont alloués ne sont pas fixées de
manière précise et détaillée par les textes
créateurs. Le plus souvent, ceux-ci habilitent les administrations de
mission de le faire elles-memes, l'autorité étatique se
contentant d'un contrôle a posteriori67.
65 H. DEROCHE, op .cit., p.197
66 C. DEBBASCH, op. cit., p.443
67 Voir infra, pp. 65-68
Dès lors, il se crée, au sein de
l'Administration Publique, une «aristocratie» qui fait que les agents
les plus dynamiques et les plus entreprenants et surtout ceux qui ont les
meilleures relations se dirigent vers elle. Cette « aristocratisation
» de l'Administration, loin de susciter l'émulation, peut augmenter
la sclérose de l'Administration de gestion ainsi que l'amertume des
agents qui la composent. D'où la mésintelligence et les conflits
qui surgissent quelques fois entre les deux types d'Administration.
B. Le dépassement du cadre initial
L'Administration de mission dont la création devrait
rester exceptionnelle, est en passe de se généraliser de
façon incontrôlée. Ceci pose le problème du suivi
des institutions de coordination et on peut se demander si l'esprit de mission
ne perd pas sa raison d'être dès lors que chacun est devenu
«missionnaire»68. On doit également remarquer que
l'Administration de mission participe du mouvement vers les
démembrements69 de l'Administration dénoncée
par la Cour des comptes française. De même,
l'ambiguïté de la formule d'Administration de mission notamment
quant à la généralité et à la permanence de
l'objet et au caractère indéfini de la durée pour
certaines structures créées, entraîne le dépassement
du cadre initial ou du schéma de l'administration de mission-type.
C. La fuite des responsabilités
Parfois, le pouvoir politique peut créer une
administration de mission pour qu'elle lui serve de «
bouc-émissaire » et lui fasse échapper à sa
responsabilité politique et administrative. Dans ce cas, c'est à
elle que seront attribuées les décisions contestées par
les administrés et elle sera désignée comme le responsable
de toutes les erreurs ou injustices, qu'il faut supprimer, lors même que
le pouvoir créateur aurait eu une quelconque
responsabilité70.
68 C. DEBBASCH, op. cit., p.441
69 Dans son rapport 1960/61 p.42, la Cour des comptes
française définit les démembrements de l'administration
comme « organismes intermédiaires entre les établissements
publics et les groupements privés, ayant les statuts les plus divers,
bénéficiant de la personnalité juridique et de l'autonomie
financière, créés par l'administration en marge de ses
structures propres en vue de l'accomplissement des tâches relevant
normalement du service public aussi bien par leur nature que l'origine des
moyens financiers mis en oeuvre », Voir R. DRAGO, op. cit., p.74
70 H. DEROCHE, op .cit., p. 202
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