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L'administration de mission en droit burundais: cas de la Commission Nationale des Terres et autres Biens (C. N. T. B. )

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par Emmanuel NIYOMWUNGERE
Université du Burundi - Licence 2010
  

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B. L'adaptation des structures institutionnelles aux missions nouvelles et contingentes de l'Etat

L'Administration de mission est la mieux indiquée pour faire face à la complexification des tâches de l'Etat et à la rapidité des changements du monde contemporain. La raison d'être de l'Administration de mission burundaise s'inscrit dans la logique de maîtrise des contingences actuelles, en particulier de sortie de guerre et de pénurie des ressources budgétaires.

réintégration des ex-combattants de la C.N.D.R.R.; le Programme national de lutte contre le SIDA du C.N.L.S.

49 C. DEBBASCH, op. cit., p.444

50 Voir infra, p. 25

1. L'Administration de mission et le contexte post-conflit

Pour atteindre les objectifs de l'après- guerre qui consistent notamment dans la reconstruction, la réhabilitation des institutions et des personnes sinistrées, la réconciliation et la consolidation de la paix, le pouvoir politique a compris qu'il doit recourir à la stratégie d'Administration de mission. Il a pris l'option de laisser l'Administration classique s'occuper des missions de service public traditionnelles, tandis que les missions nouvelles liées aux contingences de la période post-conflit sont confiées à l'Administration «missionnaire».

Au demeurant, l'Accord d'Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi signé le 28 août 2000 est l'assise politique et juridique de la technique d'Administration de mission. En effet, c'est de cet acte de compromis politique que prend source le phénomène actuel de « polysynodie administrative », c'està-dire de prolifération presque pathologique d'oTanes collégiaux, consultatifs ou délibérants, associés à l'action administrative 1 et dont la plupart sont des administrations de mission. Seules celles-ci peuvent concilier l'impératif de la représentation et la participation des principaux intéressés et celui de la rapidité et de l'efficacité d'une certaine action administrative.

Ainsi, cet Accord prévoit expressément la création des administrations de mission telles que la C.V.R.52, la C.N.R.S.53, la C.E.N.I.54et une sous-commission de la C.N.R.S. ayant pour mandat spécifique de traiter les questions relatives aux terres et autres biens 55aujourd'hui devenue la C.N.T.B.

On peut ajouter à cette énumération, une autre non plus exhaustive, portant sur des administrations de mission dont les mandats présentent un lien étroit avec l'Accord d'Arusha. C'est entre autre la C.N.D.R.R., la C.T.D.C., le Comite de pilotage tripartite en charge des consultations nationales sur la justice de Transition au Burundi.

Signalons enfin qu'en jetant un regard en arrière, on trouve également que la C.N.R. du 30 juin 1977 et celle du 7 novembre 1996 ainsi que la C.N.R.A.R. du 22 janvier 1991 ont été créées consécutivement aux crises de 1972, de 1988 et 1993.

51 R. DRAGO, op.cit., p.52

52 Art. 8, protocole 1

53 Art. 3, protocole 4

54 Art. 20, protocole 1

55 Art. 3, protocole 4

On peut remarquer que l'Administration de mission burundaise est en forte corrélation avec la résolution des difficultés inédites du contexte de sortie de guerre.

2. L'Administration de mission et le contexte de pénurie de ressources budgétaires

Le Burundi est confronté actuellement à la raréfaction des ressources budgétaires eu égard au vaste chantier de reconstruction socio-économique et de lutte contre la pauvreté d'une part, et de bonne gouvernance d'autre part.

a. La reconstruction socioéconomique et la lutte contre la pauvreté

Concernant le volet relatif à la reconstruction socio-économique et de lutte contre la pauvreté, l'Etat s'est décidé pour l'interventionnisme afin de relancer son économie et recoudre le tissu social. Cependant, cette politique interventionniste dont l'objectif est de permettre au pays de retrouver et consolider la paix; de créer un Etat de droit et de mettre en place les bases d'un développement humain durable, est compromise par l'insuffisance de moyens financiers. Pour régler ce problème, l'Etat procède de deux façons distinctes selon que ses projets relèvent du domaine économique ou du domaine social.

Ainsi, les projets relevant du domaine économique sont financés en recourant aux crédits des organismes financiers internationaux et leur exécution est confiée le plus souvent à des associations sans but lucratif opérant dans ce domaine en tant qu'organismes d'utilité publique56.

Quant aux projets relevant du secteur social, ils sont, à quelques exceptions près, financés par des dons et sont coordonnés en ce qui concerne la mise en oeuvre, surtout par des administrations de mission57. Par ailleurs, il est prévu dans l'Accord d'Arusha que suite au surendettement, le pays doit recourir plus aux dons qu'aux dettes58.

Dans la mobilisation des ressources budgétaires, l'Administration de mission est doublement adéquate en ce sens qu'elle permet la coordination

56 Exemple: Twitezimbere, Projet des Travaux Publics et de Création d'Emploi (PTPCE), Agence Burudaise des Travaux d'Intérêt Public (ABUTIP), etc.

57 Voir supra, p. 10

58 Articles 5, 2, 1, Chapitre 3, protocole 4

externe de l'appui financier des bailleurs de fonds et la coordination interne de l'appui technique des différentes structures de l'Administration classique.

Dès lors, on est en présence de deux types d'administrations de mission effectuant un travail en relais en matière financière. Le premier type d'administrations de mission qui se situent en amont, collectent les « affluents financiers » de l'étranger et les canalisent ensuite vers le second type d'administrations de mission opérationnelles en aval.

Deux exemples illustrent ce schéma :

- Il s'agit d'abord du Comité National de Coordination des Aides (C.N.C.A.)59 qui collecte les aides étrangères redistribuées ensuite à plusieurs structures administratives, y compris celles qui sont «missionnaires».

- C'est également le cas du Comité de Pilotage Conjoint du Fonds de Consolidation de la paix au Burundi chargé de décider des projets nationaux à financer pour autant qu'ils cadrent avec l'objet du Fonds.

Or, la mise en oeuvre de ces projets est souvent l'apanage du second type d'administrations de mission. C'est dans ce cadre que le projet « Appui au règlement pacifique des litiges fonciers » pris en charge par la C.N.T.B., a obtenu le financement du Fonds.60

b. La bonne gouvernance

Concernant le second volet relatif à la bonne gouvernance, le pays est en quête des voies et moyens de renforcer la transparence dans la gestion de la chose publique. Il s'agit en fait de lutter contre la corruption et les malversations économiques qui ont récemment pris une allure inquiétante au sein de l'Administration publique burundaise. Il résulte de cette tendance l'atteinte au crédit et à la légitimité de l'Etat et surtout de l'Administration classique.

Pour restaurer la confiance et le concours des administrés et de la communauté internationale, l'Administration de mission se trouve être l'alternative privilégiée par le Gouvernement du Burundi dans la mise en oeuvre de sa politique. Elle est, en effet, neuve et est composée d'un personnel choisi en

59 Voir D.P. n°100/128 du 12 décembre 2005 portant création, missions, composition et
fonctionnement du Comité National de Coordination des Aides (C.N.C.A.), (non inséré au B.O.B.)

60 Ce projet est financé à concurrence de 700 000$ par le Fonds; 800 000$ du Gouvernement du Burundi et 100 000$ du Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD); soit un montant total de 1 600 000$.

principe selon les critères de probité et d'intégrité morale61, et mieux rémunéré. Elle est soumise, dans l'évaluation de ses activités, aux audits internes et externes et rend compte régulièrement à l'autorité étatique. L'Administration de mission serait l'une des structures administratives où le service public ne se monnaie pas.

Enfin, l'aménagement de ses structures, le caractère collégial de sa composition et de sa décision permet d'associer un représentant des bailleurs de fonds dans la mise en oeuvre des projets qu'ils financent62. Ceci est inconcevable au sein de l'Administration classique hiérarchisée et beaucoup plus jalouse de l'indépendance et de la souveraineté nationales. Donc, l'Administration de mission est la voie de prédilection à travers laquelle l'Etat peut reconquérir l'appui direct des bailleurs de fonds qui commençaient à geler leur coopération bilatérale ou à faire transiter leurs aides par les organisations non gouvernementales.

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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"