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Analyse des facteurs de blocage de l'introduction des langues nationales dans le système éducatif formel au Sénégal: analyse de la perception des acteurs socioéducatifs de la commune de Fatick

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par Pape Samba Gueye
Université Gaston Berger de Saint-Louis Sénégal - Master 2 2010
  

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I-6.Objectifs de recherche

Notre travail cherche à :

-Déterminer et analyser les facteurs qui empêchent le Sénégal d'introduire les LN dans le SEF.

-Faire part aux chercheurs et politiques des dits facteurs afin qu'ils s'investissent dans une logique d'action et de résolution pragmatique et durable.

- Déterminer des stratégies d'introduction et de maintien des LN dans le système éducatif sénégalais.

1-7.Hypothèses de la recherche

L'usage du français comme langue d'enseignement dans les écoles du Sénégal de la colonisation jusqu'à nos jours, est demeurée un instrument administratif d'un poids décisif. L'ensemble de l'appareil étatique reste régi par des textes en français : « le français demeure la langue privilégiée de la diplomatie et de la politique sénégalaise : c'est la langue de l'autorité, celle de l'Etat » précise P.DUMONT

Ainsi, pour être bien considéré ou se valoriser dans certains milieux administratifs socioprofessionnels, il faudrait faire « preuve d'une bonne élocution en français ».Certains sénégalais continuent à croire que la bonne maitrise de la langue française est synonyme `'d'éveil'', de `'progression'' ou de `'civilisation''25.

C'est à cet état de fait et de croyance que mon objet de recherche s'oriente en partant des hypothèses ci-dessous :

25 Souleymane GOMIS, 2003, op.cit, p18.

Hypothèse principale

-La velléité politique linguistique de l'Etat du Sénégal (des décideurs politiques), conséquence des représentations sociales des LN par la société sénégalaise et de la reproduction de la violence symbolique linguistique hélas, véhiculée par l'administration coloniale, constitue un facteur de blocage pour l'introduction des LN dans l'éducation formelle.

Hypothèse secondaire

-Les parents d'élève en tant qu'acteurs socioéducatifs ne sont pas contre l'enseignement des LN à l'école mais sont mal informés sur les programmes et politiques éducatifs mis en oeuvre par l'Etat.

En effet, dans la perspective de vérifier nos hypothèses nous nous proposons par le biais de l'empirie de recueillir la conception des acteurs professionnels et socioéducatifs tels que les inspecteurs de l'enseignement, les actuels et anciens enseignants, les parents d'élèves, les chefs d'établissement, les maitres expérimentateurs, les membres de syndicat de l'enseignement, les élus locaux (maire, conseillers régionaux etc.).

I-8.Analyse conceptuelle

Cette partie sera le point de procéder à une définition des concepts de nos hypothèses qui font l'objet de notre étude. Qu'est ce que conceptualiser ? WEBER l'a définit par sa finalité : le but du concept, c'est de dominer la réalité par la pensée, un enjeu soumis à conditions, mais aussi exposé à l'échec. Il s'agit de comprendre ; non seulement d'expliquer par la (ou les)causes(s)prochaine(s), mais de rassembler à un tout indicatif tous les signes qui contribuent à « faire sens », en signifiant pour commencer la fin par rapport à laquelle s'ordonnent tous ces signes26. En effet, notre étude cherchera à éclairer les concepts suivants : Education formelle, politique linguistique, reproduction, violence symbolique linguistique et représentation sociale.

*Education formelle

Le mot éducation vient du latin « e-décerne » qui signifie conduire à partir de ; c'est-à-dire tirer d'un état pour conduire à un autre.

Pris dans son sens le plus large, le terme `'Education» recouvre toute activité visant à transmettre à des individus l'héritage collectif de la société où ils s'insèrent .Son champ de compréhension inclut tout autant la socialisation du jeune enfant par la famille, la formation reçue dans des institutions ayant une visée éducative explicite (écoles, mouvement de jeunes) ou dans le cadre de groupements divers (associations sportives, culturelles, des mass-médias etc.

L'activité éducative est une réalité immanente à la nature humaine. C'est par elle que l'homme cherche à léguer à sa progéniture la somme de ses expériences indispensable à sa survie, ses techniques professionnelles, ses convictions morales et religieuses, les convenances sociales, ses aspirations, ses espérances.27

Selon DURKHEIM, elle est : « l'action exercée par les générations adultes sur celles qui ne
sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez

26 D.DELEULE et alii, 1990, Le commentaire de textes de philosophie. Psychologie. Sociologie, NATHAN, p156- 157.

27 Assane SYLLA, 1994, La philosophie morale du wolof, publié avec le concours de la coopération belge-2e édition IFAN, p 1167.

l'enfant un certain nombre d'états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et de sa société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné » (Durkheim, Education et Sociologie (1922).

Par ailleurs, lorsqu' elle est suivie du qualificatif `'formel», elle devient alors un champ plus spécifique et restreint. Ainsi, l'éducation formelle concerne plusieurs niveaux et types d'enseignement. Elle est composée de l'éducation préscolaire, de l'enseignement élémentaire, de l'enseignement moyen et secondaire général, de l'enseignement technique et de la formation professionnelle et de l'enseignement supérieur.

A chacun de ces niveaux, on retrouve à côté de l'enseignement public, un enseignement privé. De même, l'éducation spéciale occupe une place de plus en plus importante dans le système.

Pour sa part, la Classification Internationale Type de l'Education (CITE) définit ainsil'éducation formelle : « enseignement dispensé dans le système des écoles, des collèges, des
universités et d'autres établissements éducatifs formels. Ils constituent normalement une
`'échelle» continue d'enseignement à plein temps destinés aux enfants et aux jeunes,
commençant en général entre cinq et sept ans et se poursuivant jusqu'à vingt ou vingt cinq
ans...
»28.

Appelée également `'scolaire», l'éducation formelle a pour cadre une organisation nationale relevant du domaine de l'Etat. Elle est dispensée dans les institutions dûment mandatées (écoles) par des professionnels (formés et rémunérés par l'Etat), selon un processus pédagogique déterminé (objectifs, contenus, méthodes et outils)

Les principales caractéristiques de l'éducation formelle sont :

*l'unité et la normativité : l'éducation formelle est prédéfinie dans un cadre législatif applicable pour tous sur l'ensemble du territoire national ;

*la hiérarchisation des enseignants(en programme et cycles) et des entités éducatives suivant une organisation verticale ;

*la cohérence et la permanence des enseignants à travers des programmes et des cycles allant du préscolaire à l'enseignement supérieur ;

28 CITE, 1997, UNESCO, p41.

*le paradigme d'une éducation gratuite, égalitaire, globale et universelle : l'éducation formelle s'adresse à tous les citoyens « scolarisables », elle est censée leur offrir des chances égales de réussite et d'intégration sociale à travers un enseignement prenant en compte les besoins essentiels d'éducation et de formation.29

Cependant, il semble plausible pour nous, d'évoquer succinctement pour plus de distinction les caractéristiques de l'éducation non formelle qui permettent de mieux se rendre compte des deux concepts. Pour sa part, l'éducation non formelle se passe dans le cadre extrascolaire, intègre tous les âges et ne suit pas nécessairement une `'échelle».

Le secteur de l'éducation non formelle comprend l'alphabétisation, les écoles communautaires de base etc.

*Politique linguistique

Par politique linguistique, il faut comprendre selon HALAOUI comme étant « la conception théorique qui préside à la réalisation des actions entreprises ou à entreprendre sur la langue » (HALAOUI, 2003 :7).Elle désigne alors une orientation qui sous-tend l'ensemble des activités qui caractérisent ou favorisent l'utilisation de la langue. Elle apparaît ainsi comme une dimension de l'aménagement linguistique considérée comme plus large puisqu'il intègre la totalité des actions de l'homme sur une langue.

La politique linguistique du Sénégal, à l'instar de celle de beaucoup de pays africains, n'est pas clairement définie. Mais, la nature des débats et des activités menées dans le cadre de promotion des langues nationales, permettent de la classer dans le groupe des politique de « facilitation de communication ». (HALAOUI, 1991, 2002,2003 :9).30

Ainsi, dans l'esprit de notre étude la définition qu'en donne André BATTANA nous parait
plus plausible. Selon lui la politique linguistique consiste à « toute action des décideurs

29 DIOUF (A) et Alli, Dakar, Mars 2001, L'Education non formelle au Sénégal. Description, évaluation et perspectives, UNESCO

30 Yéro Dia Abdoulaye BOUSSO et alii, 2008, « l'introduction des langues nationales dans le système éducatif formel .Entre medium de communication et outils d'apprentissages scolaires »p8.

politiques et administratifs en vue de la réglementation de l'utilisation des langues en présence sur le territoire national »31

Sous ce rapport, la politique linguistique apparaît à notre égard comme la capacité d'une synergie de la volonté et des moyens mobilisée en vue de développer une langue sur le plan socioéducatif. Par elle, la langue peut se hisser au rang des langues traductrices de sciences et par là de se maintenir face à `'la guerre des langues».

*Violence symbolique linguistique

Le concept de symbolique a en anthropologie une acception restreinte et un sens large. Dans son acception restreinte ou spécialisée, il sert à qualifier des oeuvres de cultures qui ont pour caractéristiques d'être pourvues d'une valeur perçue comme immédiatement expressive : mythes, rites, croyances, etc.

Dans son acception large le symbolique renvoie donc à ce processus constitutif de l'état de culture qu'est l'attribution de sens au monde. Chaque société sélectionne des significations ; chacune classe, réunit, oppose et hiérarchise les objets de la réalité selon la manière propre qui est à la fois le cadre d'intelligibilité qu'elle se donne de la communication entre ses membres.

Au sens sociologique, il importe de mentionner la conception bourdieusienne de la `'violence symbolique» .P. BOURDIEU, le théoricien du « structuralisme constructiviste » entend souligner que la capacité des agents en position de domination à imposer leurs productions culturelles et symboliques joue un rôle essentiel dans la production des rapports de domination.

Ainsi, il définit la violence symbolique comme « la capacité à faire méconnaitre l'arbitraire de ces productions symboliques, et donc de les faire admettre comme légitimes ».Dit autrement, il peut représenter un « mécanisme premier d'imposition des rapports de domination .Elle renvoie à l'intériorisation par des agents de la domination sociale inhérente à la position qu'ils occupent dans un champ donné et plus généralement à leur position

31 André BATTANA, 1995, « problématique d'une politique linguistique : le cas du Burkina Faso »in Les politiques linguistiques, mythes et réalités, UREF, 351pp.

sociale. Cette violence est infra-consciente et ne s'appuie pas sur une domination intersubjective (d'un individu sur un autre) mais sur une domination structurelle (d'une position en fonction d'une autre) »Cette structure qui est fonction des capitaux possédés par des agents fait violence car elle est non perçue par les agents .Elle est source d'un sentiment d'infériorité ou d'insignifiance qui est uniquement subi puisque non objectivé.

La violence symbolique euphémise les rapports de force qui se donnent à voir comme irréductibles dans la société .La légitimation est un masque qui cache la dimension arbitraire du pouvoir. Il ya domination symbolique toutes les fois qu'un dominé accepte de croire qu'il est juste, bon et nécessaire que les détenteurs de certaines caractéristiques factuelles dominent les autres. Pour qu'une domination soit durable, il faut qu'elle se transforme en contrat, en échange réciproque, en consensus qui maintient la violence physique à l'horizon des rapports sociaux. Autrement dit, la reconnaissance est toujours aussi une méconnaissance ...de l'arbitraire. Le consentement des dominés implique une forme de cécité qui fait voir l'arbitraire comme légitime. On fait adopter des représentations pour en censurer d'autres.32

Dans l'esprit de notre problématique de recherche, en référence au concept de « violence symbolique » décrit par BOURDIEU nous y conjuguons l'adjectif « linguistique »dans la perspective de décrire la manière dont nos langues sont confrontées à une violence symbolique consciente ou/ et inconsciente. En effet, cette domination symbolique apparait comme légitime du fait qu'elle est acceptée et n'étant généralement pas sur la sellette. Elle continue de déterminer notre système éducatif dans sa globalité.

Ainsi, nous entendons par violence symbolique linguistique l'attitude des acteurs et agents sociaux sénégalais qui consiste à légitimer la domination des valeurs linguistiques occidentales au détriment des nôtres en considérant que ces dernières ne peuvent aucunement être génératrices de connaissances via l'enseignement formel. Cette vision arbitraire des acteurs sociaux sénégalais ne s'inscrit dans aucune logique palpable mais se forge à partir d'imagination ou de représentation. On peut dire qu'elle se base sur des idées toutes faites voire sur des clichés sociaux. Cet imaginaire collectif : « les langues occidentales valent plus que les nôtres » est tellement ancré dans la conscience individuelle et collective des sénégalais. De ce fait, nous concevons juste, bon et nécessaire de faire primer ou de

32 Pascal BALANCIER et alii, 2008, Epistémologie de la sociologie. Paradigmes pour le XXI e siècle, de boeck, sous la direction de Marc JACQUEMEAIN et Bruno FRERE, p196.

privilégier, sans en avoir pleinement conscience, la langue occidentale au détriment des nôtres.

En effet, ces jugements de valeur existant depuis la période coloniale ne cessent de se perpétuer tant sur le plan national comme international. Rappelons l'affirmation de L.V.THOMAS lorsqu'il dixit : « les négres sont des primitifs (...)L'africain n'a pas de langue mais tout au plus des idiomes ou des dialectes ,pas d'histoire mais à la rigueur des chronologies ,pas d'art mais seulement un folklore...Il n'est pas capable de science ou de philosophie, son seul savoir était magique ou empirique ;ni de morale puisqu'il obéit, singulièrement à celle du sexe »33

Cette sournoise et insultante pensée de L.V.THOMAS continue de dominer certaines mentalités africaines qui, sans fondement pensent que nos langues sont loin d'être des vecteurs de développement et de progrès socioéducatifs.

*Reproduction

Selon BOUDON et BOURRICAUD dans Dictionnaire critique de la sociologie, le concept de reproduction dans son acception sociologique est dû à MARX. Les processus économiques qualifiés par MARX de processus de reproduction simple sont caractérisés par la constance de la reproduction et de la stabilité des relations de production : les individus sont remplacé dans le temps mais le système se reproduit à l'identique. Un processus est dit par MARX de reproduction élargie lorsque la production est croissante mais que l'organisation économique ou les rapports de production demeurent stables : la production augmente, mais les relations entre les classes comme les relations des individus à l'intérieur des clases (par exemple la concurrence entre les capitalistes) demeurent constante34.Cependant, MARX a orienté le concept de reproduction sous l'angle économique. Ce qui lui confère une dimension réductionniste qui nous oblige à revisiter d'autres conceptions.

33 L.v.THOMAS, 1974, « acculturation et nouveaux milieux socioculturels en Afrique Noire », Bulletin de l'IFAN, série B, T.XXXI, p172.

34 Boudon et Bourricaud, 1982, Dictionnaire critique de la sociologie, PUF, pp500-504.

Par ailleurs, la conception bourdieusienne semble plus adéquate pour notre problématique dans la mesure où il a opéré une analyse socioéducative de la reproduction prenant en compte le facteur enseignement.

Selon lui, la reproduction sociale est « le principe qui dévoile l'illusion de l'indépendance et de la neutralité des structures sociales ». Elle légitime un arbitraire culturel, reproduit la structure de la distribution du capital culturel et met à nu les contradictions qui affectent le système d'enseignement présentant les agents à la fois comme produits et reproducteurs des structures. La reproduction de la domination s'effectue par le biais de la violence symbolique, c'est à dire la capacité à faire méconnaître l'arbitraire de ces productions symboliques, et donc à les faire reconnaître comme légitimes.

En effet, la reproduction consiste dans l'esprit de notre étude à la répétition permanente et incalculée du système d'enseignement légué par nos maitres d'hier(les colonisateurs).Ce système demeure oppressif et anesthésiant en ce qui concerne nos identités intellectuelles et culturelles dans la mesure où nos valeurs culturelles ne peuvent être traduites et interprétées que par nos valeurs linguistiques.

*Représentation

L'expression « système de représentation » désigne d'une manière générale l'ensemble des idées et des valeurs propres à une société. Ces données traitées par la sociologie comme des réalités autonomes existant indépendamment de ce les psychologues appellent des « représentations » ou des « images » mentales .Toute société élaborait ainsi plusieurs systèmes de représentations spécialisées : du cosmos, de la totalité sociale, de la magie et de la sorcellerie, etc. Dans l'esprit des individus, de tels systèmes ne sont présents que de façon généralement incomplète et particulièrement conscient : on parlera de représentations collectives, qui témoignent d'attitudes intellectuelles du groupe et non de dispositions mentales individuelles. Cette conception antipsychologique a principalement été défendue par DURKHEIM et par ses continuateurs.35Le théoricien de l'holisme méthodologique pour qui les représentations collectives sont extérieures aux consciences individuelles, les conçoit

35 Bonté -Izard, 2000, Dictionnaire de l'ethnologie et de l'anthropologie, QUADRIGE /PUF, pp 626-627.

comme un « effet passif et souvent déformé de ce monde par le biais des pratiques dont elles seraient une reproduction simulée »36

Il s'agit donc d'un concept plus large que celui d'attitude car l'attitude ne permet qu'un positionnement par rapport à un seul objet. La représentation sociale, par ailleurs, fonctionne comme un `'système d'interprétation régissant notre relation au monde et aux autres, orientant et organisant les conduites et les communications sociales».Elle fonctionne comme un système cognitif (avec ses interprétations affectives, sociales et normatives) d'interprétation et d'action sur le monde. Les représentations sociales d'un groupe prennent appui sur la mentalité du groupe, c'est-à-dire reliées à son système de valeurs et à sa vision du monde. `'Une représentation s'inscrit toujours dans un cadre de pensée préexistant»

Une représentation sociale est le résultat de la transformation d'une série d'expérience concrètes vécues en une sorte de `'théorie spontanées» à propos des expériences. Cette `'théorie spontanée' est le résultat d'une sélection des informations, dune `'neutralisation» de certaines d'entre elles (c'est-à-dire, de transformation en choses concrètes).

Les représentations sociales interviennent ensuite dans la perception de la réalité en proposant des schémas touts- faits. Elles sont alors à l'origine de préjugés. Elles exercent sur tous les membres du groupe une influence qui les poussent à adopter la représentation sociale dominante et, plus s'y conformer, lorsque cette représentation sociale concerne leur identité.37

Dans un autre angle, JODELET en dira : « c'est une forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d'une réalité commune à un ensemble social. Egalement désignée comme `'savoirs de sens commun'' ou encore `'savoir naïf'', `'naturel'', cette forme de connaissance est distinguée, entre autre, de la connaissance scientifique »38

Par ailleurs, les représentations sociales apparaissent comme un ensemble symbolique exerçant une influence effective sur les groupes et leurs conduites .Dans une perspective quasi similaire que celle de JODELET, J.M.SECA, la notion de représentation sociale est analysée comme un « système de savoirs pratiques (opinions, images, attitudes, préjugés, stéréotypes, croyances) générés en partie dans des contextes d'interactions interindividuelles

36 Denise JODELET, 1994, Les représentations sociales, Paris PUF.

37 Alex MUCCHIELLI, 2001, La psychologie sociale, Hachette, p92-93.

38 Denise JODELET, op.cit.1994, pp36-37.

ou/et intergroupaux »39.En d'autres termes, la représentation sociale est comprise comme une organisation sociale des pratiques immatérielles d'une société donnée. Elle peut être également un point d'arrivée après un long travail de perception réalisé par l'interrelation des membres du groupe social par rapport aux données environnementales ou contextuelles.

En effet, à supposer que ces deux définitions soient pertinentes parmi tant d'autres, elles s'inscrivent en substance dans la logique de notre problématique de recherche. A ce titre, nous concevons que le terme `'représentation» désigne tout simplement un ensemble de comportements psychiques ou mentaux collectifs et/ou individuels à priori qui orientent la façon de voir ou de considérer les choses (de se les représenter) par un agent social. Elle peut être selon le comportement du groupe, une bonne ou mauvaise représentation qui peut être sous-tendue par le contexte sociohistorique de ce groupe. C'est pour dire, par exemple comment le sénégalais individuellement ou /et les sénégalais collectivement perçoivent les langues nationales par rapport au système éducatif formel et leurs comportements moraux qu'ils entretiennent à l'égard d'elles après un contexte marqué par la colonisation.

Ainsi, comme nous le savons bien, cette période de la vie des sénégalais plus que jamais marquée par une politique d'acculturation entreprise par l'envahisseur ou l'usurpateur (les colonisateurs) constitue un contexte fort par rapport aux représentations sociales de nos objets matériels et immatériels longtemps affaiblis par le pouvoir de la domination mentale ou symbolique des colonisateurs.

39 J.M.SECA, 2002, Les représentations sociales, ARMAND COLLIN.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus