2- UNE STRATEGIE QUI DOIT PRENDRE EN COMPTE LES REALITES
LOCALES
La Commission européenne a fait preuve d'une nette
évolution dans son rapport à la société civile avec
sa démarche auprès des réseaux culturels. Il y a
maintenant un modérateur entre les réseaux et les institutions
européennes. La plateforme montre peu à peu son
efficacité. Son utilité majeure n'est pas de transmettre des
informations aux institutions européennes, car les réseaux le
faisaient déjà avant, mais ici il y a une volonté que la
parole soit transversale pour une politique culturelle européenne avec
un intérét général et non plus sectoriel. De plus
la compétence des plateformes au sein de l'Agenda a un certain impact
car elle est partagée avec les Etats. Mais la commu nication entre la
MOC et les plateformes est limitée. Ç La relation que nous
avons entretenue avec la plateforme de l'accès à la culture s'est
limitée à l'inviter systématiquement à nos
réunions. Deux réunions rassemblant les présidents des
groupes MOC et des plateformes ont été organisées par la
Commission européenne È34. Ë ce sujet, il a
été dit lors de la dernière réunion
plénière de 2009, que les relations entre les plateformes et la
commission mais aussi avec le conseil étaient une priorité. En
outre, Xavier Troussard, chef de l'unité Politique culturelle et
Dialogue interculturel de la Délégation Générale
pour l'Education et la Culture, a aussi conseillé aux plateformes, de
concentrer leurs efforts sur l'approche directe des gouvernements nationaux,
car les Etats membres sont les principaux décideurs pour un grand nombre
de recommandations soulevées dans les plateformes.
34 D'après Jean-Marc Lauret, qui a
présidé le groupe MOC `synergies with education' jusqu'au 31
décembre 2010.
En effet, on ne peut pas rester dans le transnational, car les
échanges culturels se vivent sur le terrain. Et chaque territoire a des
besoins précis concernant le développement culturel. On peut
avoir un besoin de développer des projets culturels d'aspect artistique,
ou anthropologique, mais qui ne répondent pas qu'à un aspect
économique de la culture.Ç De plus la culture ne devrait pas
être percu comme un processus essentiellement motivé par la
recherche du profit- l'impulsion créatrice doit rester son moteur
»35 Les collectivités territoriales, dans ce
domaine, Ç jouent un double rTMle culturel d'une importance majeure.
Ce sont elles qui sont le mieux à même de transmettre les valeurs
portées par la culture. »36 On peut
également se demander si cette réflexion sur la culture
artistique intéresse tous les pays membres de l'Union européenne.
En effet, le programme Culture 2000 a été créé
durant l'Europe à quinze mais cet aspect culturel n'est certainement pas
la priorité de la Grèce aujourd'hui, par exemple. Au vu de cet
état des lieux, on peut se demander si des financements européens
directs, par exemple, ne seraient pas plus adaptés aux
réalités du secteur culturel. Pour établir une
adéquation entre les territoires et leurs besoins, on peut imaginer que
les financements culturels deviennent des financements européens
indirects. Ils seraient déconcentrés et gérés par
les régions, comme c'est le cas pour le Fonds Feder (Fonds
européen de développement régional), par exemple, qui a
une réactivité très efficace auprès des structures
qui font appel à des financements.
En effet, pour que le développement de l'accès
à la culture soit réussi, il faudrait que chaque
compétence soit mise en place à son niveau: des
compétences exclusives
35 La place de la culture dans l'Europe de Demain,
Document de synthèse, Euromedinculture citoyenneté 2009.
36 Livre vert des politiques culturelles des
collectivités territoriales en Europe, les Rencontres association
des villes et régions de la Grande Europe pour la Culture, 2004,
p.10.
pour l'Union européenne avec une base juridique
commune, des obligations nationales et une mise en valeur des politiques
locales en partant de la culture des territoires. Chaque Etat doit prendre part
au processus en incluant les régions et les autorités locales,
les agences nationales, le Parlement européen et la
société civile: Ç Nous attendons de l'Agenda qu'il
rende plus cohérente et ambitieuse l'action communautaire dans le
domaine culturel et qu'il pousse les Etats membres à développer
la dimension européenne de leurs politiques culturelles nationales
et
37
qu'ils coopèrent plus étroitement sur ces
questions.È . Ceci afin de stimuler la compréhension
mutuelle et la cohésion sociale dans nos sociétés de plus
en plus multiculturelles. Il faut que les collectivités locales qui se
sont déjà engagées auprès de leurs citoyens pour
les sensibiliser aux propositions européennes, renforcent encore leur
investissement notamment en ce qui concerne la diversité culturelle et
l'intégration européenne. Il faut également que les
régions analysent mieux les besoins sur leur territoire et qu'ils
proposent de vraies aides pour une coopération culturelle
européenne. Il ne faut pas oublier que la culture se vit avant tout sur
le terrain, et qu'à trop penser de manière transnationale, on
risque de `dématérialiser' la culture.
Ç Depuis l'émergence de l'idée
européenne, la culture tient une place qui, bien que réduite, est
historiquement exceptionnelle dans un projet de société. On a
néanmoins l'impression qu'elle a, jusqu'ici, plutTMt été
vue comme un moyen d'atteindre des buts qui la dépassent Ð
politiques ou économiques. Aujourd'hui que ces buts sont partiellement
atteints, il est indispensable de ne pas laisser de cTMté cet aspect
puissamment original du projet européen, faute de quoi celui-ci se
réduira à une
37 Daphné Tepper, analyste politique à Culture
Action Europe
éniéme version du tout-économique qui
a tendance à devenir la norme mondiale. Il importe de penser comment
l'on développe cette idée de culture européenne. Si les
opérations transcendant les frontières ont eu et ont encore une
fonction intéressante de mise en relation des différentes
cultures qui constituent la mosa ·que européenne, elles peuvent
aussi mener, à la longue, à une standardisation et à un
nivellement délétéres. Les «capitales
européennes de la culture« et certaines opérations à
caractére régional ont montré - et à bien des
égards aidé à renforcer - l'intérêt et le
désir de l'affirmation culturelle locale, mais leur caractére
ponctuel laisse trop souvent les collectivités territoriales
désemparées, une fois les opérations achevées. Une
prise en compte du rTMle permanent de ces collectivités devrait
maintenant avoir lieu, tant du point de vue financier
qu'organisationnel.»38
38 Livre vert des politiques culturelles des
collectivités territoriales en Europe, les Rencontres association
des villes et regions de la Grande Europe pour la Culture, 2004, p.10.
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