III. PERSPECTIVES ET EVOLUTION DE L'INVESTISSEMENT DES
RESEAUX AU SEIN DES PLATEFORMES.
1-UN ROLE STRATEGIQUE DIFFICILE QUI DEMANDE UNE CERTAINE
ADAPTATION DE LA PART DES RESEAUX
Les recommandations des réseaux culturels au sein de
l'Agenda se font par le biais d'une stratégie délicate pour
renforcer les initiatives culturelles de l'Union européenne en les
insérant minutieusement dans les politiques européennes. Le
vocabulaire que les réseaux doivent utiliser dans les recommandations
n'est pas pleinement celui des acteurs culturels sur le terrain s'ils veulent
qu'elles soient acceptées par les politiques de l'UE. L'idée de
faire appel aux réseaux culturels est donc une bonne initiative et ce
système de plateforme a certes un grand potentiel et mérite
d'exister. Mais, en réalité, il n'est pas évident pour
tous les réseaux culturels de s'engager dans l'Agenda. En
définissant les réseaux culturels, il y a toutes sortes de
réseaux à différentes échelles. Certains
réseaux qui travaillent sur le terrain ont été
consultés, c'est le cas du réseau `In Situ'25 par
exemple. Les réseaux participent à des réunions, sans
être des chercheurs, alors qu'ils seraient intéressés pour
entrer dans ces réflexions à temps complet. La plateforme serait
une bonne initiative, mais elle n'est pas a daptée aux
réalités du terrain. Ils n'ont pas le temps de s'occuper de ces
questions car ils travaillent beaucoup dans l'urgence sur des contenus
opérationnels.
25 Lieux publics, Centre National de création des arts
et de la rue a pour mission l'accompagnement des artistes de toutes disciplines
qui font de la Ville, le lieu, l'objet et le sujet de leurs créations.
Lieux publics pilote IN SITU, plate-forme de soutien à la
création d'Ïuvres à l'échelle européenne, avec
Valladolid (Espagne), Graz (Autriche), Anvers (Belgique), Glasgow (Ecosse) et
Sotteville-lès-Rouen (France). Chaque année, trois projets
singuliers sont créés autour d'une spécificité
européenne.
Ils sont compétents sur des questions de dispositifs de
soutien à la création, mais ne se sentent pas assez
expérimentés pour parler de sujets concernant l'influence de la
culture sur la société européenne. Ce n'est pas un niveau
de réflexion auquel tous les réseaux sont habitués. Or,
pour la plateforme, il s'agit de réaliser une feuille de route contenant
de grands principes comme le `Dialogue Interculturel', `l'accès à
la culture', `les industries créatives'. Il faut une capacité
à les traduire dans un Agenda politique, à les intégrer
aux textes de lois qui existent, à adresser tel ou tel sujet, telle ou
telle demande aux institutions. Ce travail nécessite d'être
réalisé par des personnes compétentes qui ont une certaine
expertise pour faire la médiation entre l'artiste et l'Europe. Ce sont
souvent des coordinateurs, délégués ou des
secrétaires généraux de réseaux culturels qui
participent à l'Agenda. De plus, 90% de la plateforme de la
société civile est constituée lobbyists basés
à Bruxelles 26
de qui sont
comme des fonctionnaires de la commission,
spécialisés dans ces questions de politique culturelle et donc
loin des réalités du terrain. Certains réseaux culturels
peuvent se sentir perdus face à des spécialistes performants au
niveau des institutions européennes. En 2009, ÇIn Situ È
étaient les seuls opérateurs de terrain. Or, ils ne se sentent
pas en capacité de contribuer à l'agenda et sont loin des
réalités économiques de l'Europe.
D'autres réseaux, comme Culture Action Europe,
IETM,É sont eux, davantage spécialisés dans les politiques
culturelles et arrivent à contribuer pleinement à ces
plateformes. Néanmoins, certains doutes persistent sur les
stratégies de l'Union européenne: ÇJ'ai publiquement
exprimé mon hésitation car, je n'étais pas sure que les
trois domaines politiques choisis (dialogue interculturel, accés
à la culture et
26 D'après une interview de Jean-Sebastien
Steil du 12 mars 2010, coordonateur In situ, et participant aux reunions de
l'Agenda européen pour la culture.
industries culturelles et créatives) étaient
les plus appropriés pour l'Art. Cependant, j'ai cru et crois toujours
que c'était une stratégie politique extremement intelligente de
Quintin 27
part
la dÕOdile . (Parce que la culture sera toujours un
secteur trés
faible da ns la politique de l'Union européenne et
des programmes, comme il a une base légale trés limitée
dans le Traité et certainement pas un budget important et il y a
toujours le risque que si des compressions budgétaires
sévères doivent etre faites, la culture serait parmi les premiers
secteurs à dispara»tre ...) de toute façon, la vue
officielle de l'IETM devait le soutenir et encourager les autres à le
soutenir également. »28
C'est dans ce sens que les réseaux culturels sont
forts, ils ont cerné les enjeux et sont prêts à s'investir
dans des questions très larges qui englobent d'avantage de questions que
celles de leurs propres activités, des centres d'intérêt de
leur nation. Ils font l'effort de s'adapter aux règles
européennes pour espérer un réel investissement de la part
de l'Union européenne qui perdurerait à long terme malgré
les crises que les sociétés traversent.
Mais pour avoir une stratégie mieux définie, on
pourrait imaginer discerner les différents niveaux de réseaux.
Créer un nouveau mot dans le vocabulaire des réseaux pour mieux
déterminer leur champ d'activité réel car comme on le
disait dans la définition des réseaux, il y a toutes sortes de
réseaux culturels. C'est
27 Odile QUINTIN a rejoint en 1971 la Commission
européenne, of elle occupe depuis des fonctions à haute
responsabilité. Depuis le 1er janvier 2006 elle est Directeur
Général de la DG Education et Culture à la Commission
européenne. Elle est à ce titre particulièrement investie
dans la promotion à la fois de la diversité culturelle et
linguistique, et de la mobilité et la participation active des citoyens
européens.
28 Mary Ann DeVlieg, secrétaire
générale de l'IETM
pourquoi Jean-Sebastien Steil pense que « Face
à l'émergence de « professionnels » des dossiers
européens qui ont parfois un manque de connaissance des besoins
réels sur le terrain, on pourrait imaginer transformer certains
réseaux en polycentres européens composés de plusieurs
structures européennes qui travailleraient à long terme sur les
contenus européens, les projets de coopérations culturelles. Ils
auraient une mission claire et un poids important dans la réalisation de
projets transnationaux à fort impact sur le territoire local.
»29. Et pour remédier au probléme des
acteurs culturels qui ne se sentent pas assez compétents pour
émettre des recommandations directes à la Commission, «
La commission pourrait envisager de faire travailler des sociologues des
politiques culturelles qui iraient au contact des acteurs culturels avec un
questionnaire et celui-ci remonterait aux institutions
».30
Un questionnaire a déjà été
réalisé par ADCEI31 en 2009 en vue dÕengager un
débat public sur la portée de lÕAgenda. CÕest un
projet qui a reçu le soutien de la Commission européenne et qui a
réuni neuf forum régionaux qui ont rassemblé des citoyens,
des professionnels de la Culture et des décideurs de différents
pays. Un
29 D'apres l'interview de Jean-Sebastien Steil, coordonateur In
situ, Lieux public, et participant aux reunions de l'Agenda européen
pour la culture.
30 D'apres l'interview de Jean-Sebastien Steil, coordonateur In
situ, Lieux public, et participant aux reunions de l'Agenda européen
pour la culture.
31
Association pour le Développement Culturel
Européen et International. Cette association a pour but de promouvoir et
de développer tout projet ou toute activité culturels soutenant
ou participant à la construction européenne, d'une part, et les
échanges et activités culturels entre l'Europe et le reste du
monde, d'autre part. Elle a également comme fonction de permettre la
mise en place de relations privilégiées entre les milieux de la
Culture et d'autres domaines tels celui de l'Education populaire, de la
JeunesseÉ Pour ce faire, elle mene toute étude, organise toute
manifestation, informe, forme et assiste tout opérateur, et ce tant au
niveau local, territorial, national, européen qu'extra- communautaire
.
grand forum s'est tenu à Montpellier en Juin 2009 afin
de discuter sur les conclusions des débats ayant émergés
de ces rencontres. Les conclusions ont été rédigées
dans un document de synthèse qui a été transmis à
la Commission européenne32. ADCEI a pris une très
bonne initiative qui a permis de donner la parole a de nombreux acteurs
culturels. Néanmoins ce questionnaire n'a pas été connu de
tous et sur 23 975 questionnaires diffusés, seuls 742 ont répondu
entièrement au questionnaire et 972 de manière incomplète.
De méme sur 12 880
33
invitations envoyées pour les forums, 1554 citoyens se
sont réellement impliqués . Nous pouvons alors nous demander si
les acteurs culturels se sentent vraiment impliqués dans ces questions?
Néanmoins cette structure n'a pas les outils des sciences sociales. Et
puis elle est subventionnée par l'Union européenne et cette
étude n'a pas été réalisée directement par
la Commission européenne. Le laboratoire de Grenoble, par exemple,
mène de nombreuses études sociologiques sur les politiques
culturelles européennes. Ce sont des professionnels comme ceux qui
travaillent dans cette structure qui pourraient impulser un nouveau mode
d'étude auprès du secteur culturel. On pourrait aussi penser
à une commission d'expert ou à une commission d'universitaires,
ou d'acteurs sociaux qui élaboreraient un rapport sur la question pour
faire émerger les propositions des acteurs du terrain.
32 La place de la culture dans l'Europe
de Demain, Document de synthèse, Euromedinculture
citoyenneté 2009.
33 D'après les chiffres issuant de la place de la
culture dans l'europe de demain, document de synthèse,
euromedinculture citoyenneté 2009
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