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Les étudiants et l'usage des services d'accueil de la Bibliothèque nationale universitaire de Turin

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par Jessica ROUSSEL
Institut universitaire de technologie de Dijon  - Métiers du livre et des bibliothèques 2010
  

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3) Promotion de la lecture et de la culture à la BNUT

a) Le service de prêt-distribution

Le service phare de la BNUT, jusqu'à la crise des année 1990-2000, a été le service de prêtdistribution et de consultation des collections du magasin, doté de fonds éclectiques à la fois anciens (avant 1930) et modernes. Les usagers pouvaient emprunter les livres du dépôt légal et des collections ajournées, ce qui correspondaient à une véritable politique d'acquisition, correspondant aux missions de la bibliothèque et aux besoins des usagers. Aujourd'hui, on constate un déclin de l'emprunt à la BNUT crise qui ressemble à celle des bibliothèques de lecture publique anglo-saxonne ou française. Par exemple, en 2009, sur les 54 026 personnes admises au service de prêt, un peu moins de la moitié (20 125) ont utilisé ce service. Les chiffres du carnet de bord Tous publics appuient le constat des professionnels, puisque les livres les plus lus à la BNUT sont ceux de la salle de consultation (33%), lorsque l'emprunt des monographies n'est effectué que par 21% des publics.

Pour l'emprunt des documents, les analyses croisées51 démontrent que généralement les étudiants sont ceux qui ont le moins répondu à la question des collections et les autres publics aussi. Quant aux chercheurs, on se rend compte qu'ils empruntent par contre régulièrement à la BNUT : 50% affirment avoir utilisé le service de prêt le mois dernier et 20% aujourd'hui.

L'emprunt des documents est aussi caractérisé par une différence entre le public étudiant et les autres publics: 27% du nombre total des publics dit avoir emprunté un document le mois dernier, soit 23% des étudiants, contre 31% pour les autres publics. Par contre la tendance s'inverse pour l'utilisation de documents sur place, le jour même avec 14,8% des étudiants contre 7% des autres publics. Les autres

50 SCALE Luciano, Biblioteche statali : a che punto siamo ?, « Biblioteche oggi », novembre 2006, p. 14- 15

51 v. Annexe 2, L'enquête quantitative, Tableaux croisés, p. 55-57

publics sont aussi ceux qui empruntent le plus sur le long terme, puisque 31% disent avoir emprunté le mois dernier. Les étudiants généralement ont donc une consultation assez éphémère des documents, c'est-à-dire sur place, tandis que les autres publics ont une utilisation plus équilibrée des différentes collections de la BNUT.

Hormis l'emprunt des documents, un autre clivage existe entre les publics actifs, les chercheurs et les étudiants. Il s'agit du genres de livres empruntés au service de prêt-distribution, puisque les autres publics utilisent surtout les livres d'histoire, de politique, de littérature moderne et classique, des genres particulièrement présents dans le magasin de la BNUT, et les chercheurs empruntent principalement la critique littéraire, l'histoire et la politique, lorsque les étudiants utilisent les manuels scolaires et les livres de sciences humaines, ce qui caractérise une fois encore leur utilisation de la BNUT comme un espace privilégié pour l'étude.

Ces chiffres et ces usages diversifiés des collections soulignent que les publics ont des besoins très diversifiés, pour lesquels la constitution de politiques d'accueil adaptées s'avère nécessaire.

En effet, tant dans l'enquête quantitative, que dans l'enquête qualitative, la bureaucratie du système d'emprunt et la politique d'accueil a été vivement critiqué par les étudiants, principalement, mais aussi par les autres publics. Les premiers ont affirmé ne pas vouloir emprunter de documents car le système de prêt est plus compliqué que dans les autres bibliothèques turinoises, reprochant ainsi à la BNUT son côté bureaucratique et « à l'ancienne ». Le "décorticage" de la procédure mise en place pour emprunter les livres à la BNUT permet toutefois de comprendre pourquoi les étudiants se passent du service de prêt et de consultation. A la BNUT les livres ne sont pas en accès direct, un phénomène récurrent dans l'ensemble des bibliothèques du territoire italien. Les bibliothèques municipales, telles que la Civica (bibliothèque de lecture publique centrale), ont un magasin et peu de livres en libre-service, et toutes les bibliothèques universitaires fonctionnent aussi par le biais du magasin. Seules les bibliothèques de proximité ont l'avantage de disposer d'étagères en libre-service. Ce phénomène trouve son explication dans l'architecture des bibliothèques italiennes : la plupart d'elles sont dans des bâtiments historiques, où des travaux nécessitent de suivre un cadre législatif stricte et difficilement applicable. Un étudiant fait une telle remarque dans l'enquête quantitative : « Mettez tous les livres après 1900 dans les étagères ! ». Ainsi, pour pouvoir consulter un livre et l'emprunter, l'usager de la BNUT doit passer par quatre services distincts :

1. il doit compiler un document, qui requiert nombreuses informations sur le livre et le lecteur, à écrire deux fois (un volet pour l'administration, l'autre est mis à la place du livre dans le magasin), et qui est à consigner au service de distribution ;

2. la demande est envoyée au magasin, une immense tour de six étages, et elle revient avec le livre au service de distribution, où un bibliothécaire appelle le lecteur par les 3 derniers chiffres de sa carte et lui consigne le livre pour la consultation;

3. si le lecteur souhaite emprunter le livre, il doit aller au service de prêt et

4. repasser pas le service de distribution pour tamponner une attestation d'emprunt.

Si on somme le temps pour remplir les documents (2 à 3 minutes chacun), l'attente, les passages d'un service à l'autre, l'obtention d'un livre requiert une quinzaine de minutes minimum. En sachant qu'il arrive que l'usager se trompe dans la collocation (ou autre indication bibliographique) du document recherché (confusion avec les collocations des autres bibliothèques) et qu'aucun service d'aide n'est alors assuré par les bibliothécaires de ce secteur, les temps d'attente peuvent s'allonger davantage. En effet, la salle était jusqu'à présent dotée d'ordinateurs pour les recherches bibliographiques, mais ce secteur a été délocalisé au niveau des balcons de la salle de consultation, à l'autre côte de l'étage, sans aucune visibilité ou signalétique claire pour les lecteurs. En témoignent les étudiants n°6, 10 et 11 de l'enquête

qualitative,52 qui racontent en détail le cheminement parsemé d'embûches qu'ils doivent suivre pour accéder à un document, ou la fatigue et l'énervement généré par le grand nombre d'opérations diverses de la salle de distribution et de prêt.

Mais le phénomène le plus frappant, dont les étudiants aussi font parti, est que 43,8% des usager a affirmé qu'au moins une fois ils ont demandé un livre qui était déclaré « présent » dans l'OPAC, mais les bibliothécaires leur ont dit que le livre était « manquant ». Un phénomène vraiment inquiétant pour les chercheurs, puisque 80% de ce public a été victime du phénomène livre manquant, et d'ailleurs répandu en Italie, comme témoigne la doctorante n°8 de l'enquête qualitative, qui nous conte ses mésaventures à Rome, où elle s'était déplacée spécialement dans le but de consulter des livres, qui n'étaient pas présent à la bibliothèque alors qu'ils apparaissaient sur l'OPAC de la bibliothèque comme disponibles. Deux facteurs expliquent que les livres soient manquants à la BNUT, soit le livre est mal rangé dans le magasin, soit il n'est pas ramené par l'usager. Il faut noter que les bibliothèques italiennes sont entièrement gratuites et qu'aucunes pénalités financière n'existent dans le réseau des bibliothèques turinoises. A la BNUT, aucune suspension ou sanction n'a lieu si les livres sont manquants, et aucune lettre de rappel n'est envoyée à l'usager retardataire. Ce qui peut effectivement pousser certaines personnes peu scrupuleuses à faire leur shopping à la bibliothèque...

La bibliothèque a tenté de faciliter le service de prêt-distribution par le « prêt en ligne », mis en place depuis moins d'un an, orientée d'ailleurs vers un public qui n'est pas toujours étudiant. L'usager téléphone ou envoie par courriel les informations bibliographiques du document qu'il recherche. Le livre est ensuite recherché dans le magasin et mis de côté. Si le livre n'est pas disponible ou manquant par contre, les usagers n'est pas toujours prévenu, et l'usager se déplace alors à la bibliothèque sans motif. Le problème étant que certains usagers non turinois se déplacent à la bibliothèque pour un document précis, dont la collocation apparaît sur le catalogue, mais absent des rayons. Mais le prêt en ligne est récent et peu connu des usagers à l'heure actuelle. L'accueil des publics en ligne permet de faciliter l'accès pour faire gagner du temps, rendre visible les collections, les services et le personnel.

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