2) Les services les plus utilisés par les
étudiants : la salle d'enregistrement, la salle de consultation
L'accroissement de la scolarisation et de la formation
continue conduit de plus en plus d'étudiants à étudier
à la BNUT. Comment les accueille-t-elle ? Quels services propose-t-elle
à ces nouveaux publics ?
La vie des étudiants à l'intérieur de la
BNUT est caractérisée par trois lieux emblématiques :
l'enregistrement des publics à l'accueil - qui est aussi la salle des
périodiques -, à côté de l'entrée principale
; les services de la salle de consultation au deuxième étage,
lieu de prédilection des étudiants, où ils peuvent
étudier sur des grandes tables ; la salle de distribution et de
prêt, où les collections du magasin sont empruntables et où
on peut, depuis un mois à peine, consulter le dépôt
légal dans les étagères ouvertes.
a) L'enregistrement des usagers : l'accueil
Le décret DPR 1995/14744 stipule que dans
les bibliothèques d'État et les BN les casiers sont obligatoires
: avant d'entrer, les usagers doivent déposer leurs sacs et autres
objets. Par contre, si du côté de la bibliothèque plusieurs
raisons expliquent ce phénomène (un budget restreint, qui ne
permet pas de magnétiser tous les livres), la nécessité de
déposer ses affaires dans des casiers lors de sa venue à la
bibliothèque a suscité de nombreux remous dans l'enquête,
et notamment de la part des étudiants. Une critique récurrente
vise en effet le manque endémique de casiers (160 environ pour 420
postes assis), ainsi que la perte de temps qu'ils engendrent. Il faut par
contre souligner que la BNUT a modifié un point de l'ordonnance
ministérielle, puisqu'avant 2006 il était interdit d'entrer dans
la salle de consultation avec son propre matériel, tandis que maintenant
il est désormais possible d'entrer avec ses
42 v. Annexe 2, L'enquête quantitative,
Tableaux de bord, p. 41
43 cf. supra, p. 6
44 DPR.1995, n°147, Titre IV, service au public :
lecture, points 31. Conditions d'admission et 32.
Accès et comportement.
propres livres, crayons et matériel informatique. Cette
modification atteste l'acceptation de la part de la Direction que la plupart
des usagers ne viennent plus pour consulter les livres ou les manuscrits, mais
pour travailler sur ses propres documents.
Après avoir laissé ses affaires dans les
casiers, l'enregistrement est le premier service rencontré à la
BNUT. Les service d'accueil délivre aux nouveaux usagers une carte
d'accès aux différents services de la bibliothèque. C'est
avec cette carte que l'usager doit se rendre dans la salle d'enregistrement
pour déclarer son entrée et sa sortie. L'enregistrement est
effectué à l'aide d'Erogazione servizi, un logiciel
informatique inventé par un des informaticiens de la BNUT. Un logiciel
simple d'accès, qui permet d'enregistrer en moins de 15 minutes
l'usager. Pour les étudiants, l'information la plus difficile à
comprendre et à appliquer est la norme qui les oblige à passer
à l'accueil pour déclarer qu'ils rentrent ou sortent de la
bibliothèque, mesures qu'ils considèrent comme un acte de
contrôle qu'ils aiment déjouer. Un local, situé entre
l'enregistrement et les escaliers principaux qui mènent à la
salle de consultation, sert en effet à la surveillance des usagers. Ces
mesures sont par ailleurs justifiées par la sécurité de
l'établissement, mais aussi afin de connaître le nombre d'usagers
et leur identité en cas d'incident, ainsi que pour protéger le
patrimoine de la bibliothèque, qui possède une salle des
manuscrits rares.
Pourtant, malgré la volonté de simplifier les
conditions d'accès à la bibliothèque, le nombre d'usagers
insatisfaits par le service d'accueil est assez élevé. Les
enquêtes quantitative et qualitative démontrent le
mécontentement des étudiants. Dans la première, à
la question « Dans quels espaces t'estu rendu aujourd'hui ? », les
étudiants ont répondu à 13% seulement qu'ils se sont
rendus à l'accueil-salle des périodiques, les autres n'ayant
certainement pas compilé cette partie, par agacement, par
méconnaissance du nom de service dans lequel ils étaient - ou par
déstabilisation par le nom accueilsalle des périodiques, puisque
souvent ils utilisent l'un ou l'autre service sans penser qu'ils sont dans un
même et unique espace. Des commentaires négatifs apparaissent dans
les réponses ouvertes : « Devoir signaler par une carte son
entrée et sa sortie fait perdre beaucoup de temps et je ne pense pas que
ce soit utile. » Certains étudiants vont jusqu'à ajouter que
l'enregistrement à l'accueil «dérange les activités
d'étude et de recherche ». Dans l'enquête qualitative, le
témoignage de l'étudiante n° 6 confirme un tel constat, et
elle critique par ailleurs l'ensemble du système des services de la
BNUT, défini « trop bureaucratique », un jugement
récurrent des entretiens.
Hormis l'enregistrement, l'autre service proposé par la
salle d'enregistrement est l'accueil des étudiants, par l'information et
l'orientation, c'est-à-dire indiquer la présence d'autres
services dans la bibliothèque, leur localisation, leurs horaires etc.
Par ailleurs, des hausses journalières de la
fréquentation (11h, 14h, 18h), ne permettent pas de gérer les
différents publics efficacement. Par la quantité d'usagers
quotidiens, ce service n'est pas toujours un service d'accueil, puisqu'il faut
enregistrer et aider les usagers le plus rapidement possible, afin de ne pas
entraîner le mécontentement des autres usagers qui patientent. Les
étudiants, souvent nouveaux dans ce service, peuvent donc être
désorientés et perdus, car les bibliothécaire n'ont pas le
temps de délivrer toutes les informations nécessaires. Des
brochures n'existent pas à l'heure actuelle, bien qu'une une Touch box
soit présente, mais elle est peu utilisée, sinon par les
professeurs qui organisent des visites de la BNUT pour leurs
étudiants.
Les bibliothécaire de la salle
d'enregistrement-périodiques sont donc confrontés tous les jours
au problème de l'accueil des publics étudiants, nouvelle forme
d'accueil qui entraîne des problèmes dans la qualité des
informations premières à délivrer pour orienter l'usager.
Afin d'améliorer la politique d'accueil des l'établissement,
envers les étudiants mais aussi les lycéens, à se
repérer dans les locaux de la bibliothèque, d'ici quelques
semaines, un guide sur les différents services d'accueil de la BNUT
devrait être disponible, en italien, anglais et français et ce
grâce à l'association Les amis de la BNUT.
Association qui soutient la bibliothèque et l'aide
financièrement. Une carte de la qualité des services a
été mise en ligne en 2008 et est en cours de restructuration
actuellement, afin d'améliorer le rapport entre l'usager et les services
de la bibliothèque.45 De plus, une signalétique
introduit la zone d'accueil, sous la forme de flèches.
b) La salle de consultation
La salle de consultation est le service le plus utilisé
par les étudiants universitaires et les lycéens de la BNUT (77%),
contre 70% pour les autres publics. Ce « succès » s'explique
parce que la salle est spacieuse et munie de tables d'études grandes,
qui peuvent accueillir jusqu'à 420 personnes. Elle est la
deuxième plus grande salle de consultation italienne, après celle
de la BN de Florence. 88,5% des étudiants universitaires viennent
à la BNUT pour étudier et 25% pour ses concentrer,
c'est-à-dire qu'ils se rendent surtout dans la salle de consultation et
ne sont pas spécialement intéressés par les autres
services.
Dans la salle de consultation des matériels
bibliographiques sont mis à disposition des usagers pour les aider
à effectuer leurs recherches. Contrairement à ce que dit
l'enquête de 2010, les usagers semblent consulter habituellement les
livres de ce service (40% les étudiants, 55% les autres),
utilisés d'ailleurs le jour même par un nombre correct
d'étudiants universitaires (29%). Un autre point intéressant de
l'enquête est le jugement des usagers sur la signalétique de la
salle de consultation, ainsi que son système de classification. 70 000
volumes sont en effet mis en libre-service sur les étagères :
encyclopédie générales, dictionnaires, répertoires
biographiques, bibliographies générales, langue et
littérature moderne etc., ce qui donne une soixantaine de cotes,
classées de haut en bas (des balcons de la salle, vers l'espace
inférieur) alphabétiquement (de CONS.A à CONS. X). De
plus, les ouvrages sont classés par sections. Un système qui
semble être compliqué au premier abord, puisque le nombre de
sections et de cotes est élevé, mais aussi à cause du
manque de visibilité des ouvrages sur les étagères, dont
la classification est mentionnée sur de petites étiquettes,
visibles seulement de près. On peut comprendre qu'à la vue de
toutes ces étagères pleines de volumes savants, dont les contenus
sont aujourd'hui « dépassés » à cause de leur
date de publication ancienne, l'étudiant - habitué
désormais plus aux couleurs et aux multimédias d'Internet
qu'à l'ambiance sacrée d'une bibliothèque nationale -
puisse être désorienté. En outre, la signalétique
dans ce secteur n'est constituée que par un unique panneau, ancien,
daté des année 1980, ce que confirme que seul 29% des publics
interrogés dit ne pas avoir de problèmes dans la recherche d'un
livre. Les ennuis que rencontrent les étudiants de la BNUT avec les
collections de la salle sont d'ailleurs confirmés par quelques
commentaires ouverts de l'enquête quantitative,46 par des
adjectifs qui qualifient les collections de « désuète
», « vieille ». Mais aussi, à « améliorer
avec un système classificatoire plus visible, pastilles de couleur
», etc. Il est à noter que les étudiants n'ont
majoritairement pas répondu à cette question, car elle
était textuelle et les obligeait à s'exprimer sur un sujet que,
peut-être, ils ne connaissent pas véritablement.
Différemment des étudiants, les autres publics se montrent plus
à l'aise avec les systèmes bibliothécaires traditionnels,
car ils se servent davantage de la salle de consultation, comme nous avons vu,
où ils manifestent un bon sens de l'orientation, puisqu'ils trouvent les
livres très facilement (60%), lorsque les étudiants rencontrent
certaines difficultés (38%) et ont aussi l'habitude de demander de
l'aide à un bibliothécaire (33%), ce qui arrive aux plus «
expérimentés » uniquement dans 14% des cas.
Autre problème rencontré dans le classement des
livres sur les étagères, les livres manquants. En
45 Biblioteca Nazionale Universitaria, Ministero per i beni e le
attivita'culturali, Carta della qualità dei servizi, 2008 non
disponible actuellement, mais en ligne à l'adresse suivante:
<http://www.bnto.librari.beniculturali.it/ >. Consulté le
29 mai 2011
46 v. Annexe 2, L'enquête quantitative,
Réponses ouvertes, p. 60
effet, normalement l'usager qui emprunte un livre doit mettre
à sa place un « marque-livre », avec le numéro de la
table qu'il occupe. Mais ces consignes ne sont pas toujours respectées,
notamment par les étudiants, et il arrive que les livres soient
volés, car non magnétisés, ou ne soient pas rangées
au bon endroit, ce qu'on retrouve dans les commentaires de l'enquête
quantitative47 : « Parfois, certains livres ne sont pas
rangés à leur bonne collocation ou alors ils résultent
présents sur internet, mais une fois sur place, ils sont manquants
».
Il faut souligner que, pour résoudre ces
problèmes, les ressources traditionnelles de la salle de consultation
ont été progressivement intégrées par les
ressources électroniques, selon le projet d'une salle de consultation
virtuelle, en partie déjà réalisée.48
Six postes informatiques sont mis à disposition des usagers, qui peuvent
les utiliser pour accéder aux catalogues en ligne (Librilinea pour le
Piémont, Banca dati pour les journaux numérisés etc),
ainsi que pour repérer les livres dans la salle de consultation. Il est
en outre possible de se connecter à internet depuis son ordinateur
personnel, même si les deux enquêtes ont souligné les
difficultés des étudiants vis-à-vis d'une utilisation
optimale de la salle de consultation et de ses ressources, à cause du
wi-fi qui ne marche pas toujours bien, et pour lequel seuls 200 usagers peuvent
se connecter en accès limité. En effet, seules vingt prises pour
recharger les batteries des ordinateurs existent : « il y a peu de prises
pour les PC, pour la batterie [...], parfois je ne viens pas parce que je sais
que les prises sont déjà prises. ».
L'autre problème majeur est celui du bruit que font les
étudiants, même si cinq bibliothécaires sont au centre de
la salle de consultation, une disposition qui rend difficile la surveillance
sur toutes les extrémités et les balcons, où les
étudiants peuvent donc parler librement. Aucune solution n'a encore
été mise en pratique pour assurer la tranquillité des
usagers, mais aussi afin de permettre de travailler en groupe à ceux qui
en ont besoin. Les commentaires à ce sujet sont récurrents tant
dans l'enquête quantitative que dans l'enquête qualitative : «
Une fois (il y a deux ans) le silence régnait dans tout l'édifice
[...] et cela me déplaît à chaque fois que j'ouvre la porte
de ce magnifique édifice historique » ; « Je trouve toujours
plus difficile de faire des recherches à la BNUT, comme si elle faisait
partie du passé. L'ambiance est devenue bruyante, ce qui n'aide pas
à la concentration. » ; « Je pense que créer des
espaces dédiés aux chercheurs, qui ont besoin de silence et de
prendre de la distance avec les étudiants universitaires serait une
très bonne idée. ». Le bruit dans la bibliothèque se
propage surtout au niveau des balcons et à cause de la grande hauteur
des plafonds. Ce problème permet de mieux saisir dans sa
complexité le phénomène de l'accueil des publics et de
leur cohabitation dans un espace décloisonné, où la
bibliothèque doit assumer un double rôle: être un lieu
d'étude, permettant le travail intellectuel, et être un lieu de
sociabilité favorisant les échanges et les rencontres. La BNUT
doit donc réfléchir sur les façons de faire cohabiter des
publics aux usages plus diversifiés qu'autrefois et à la question
des espaces et de leur division afin qu'un public n'en chasse pas d'autres.
Ainsi 49« L'accueil des publics en
bibliothèque est une pratique politique d'ouverture sans perdre ni
exclure. » Un autre problème est aussi la présence de
certains publics "agressifs". En effet, en moins d'un an la bibliothèque
a eu nombre de cas de violences physiques entre les usagers, constatées
dans les toilettes, mais aussi en salle de consultation, à l'exemple
d'un usager qui a provoqué un second étudiant en lui jetant son
ordinateur sur le visage, lui cassant le nez. Ou encore, il y a moins d'une
semaine deux usagers (étudiants et non étudiant) se sont
disputés, un des deux allant jusqu'à mordre le petit doigt du
second...
47 ibidem
48 DE PASQUALE ANDREA, L'integrazione tra risorse
tradizionali e risorse elettroniche: come cambia la sala di consultazione di
una Biblioteca Nazionale. Roma : « Bibliocom », 2002
49 CHEKIB Vincent, L'accueil des publics en
bibliothèque: une pratique politique d'ouverture sans se predre ni
exclure. Villeurbanne, ENSSIB, 2008
Ce ne sont pas les étudiants et leurs comportements qui
sont à fustiger, mais le manque de personnel de la bibliothèque
pour surveiller les usagers. La BNUT, composée aujourd'hui d'à
peine 80 personnes et elle assume depuis quatre ans une trentaine de
départ à la retraite. Luciano Scale,50 ministre des
Biens Culturels, en 2006 souligne le manque et l'âge du personnel : les
bibliothèques publiques d'État ont environ 3500 personnes avec
une moyenne d'âge comprise entre 50 et 60 ans. Et pour avoir des
bibliothèques publique d'État fonctionnelles il faudrait 750
personnes en plus...
A côté de ce jugement, pourtant, les
étudiants universitaires expliquent dans les deux enquêtes qu'ils
aiment venir à la bibliothèque pour le silence qui règne,
le fait qu'elle soit une bibliothèque assez calme par rapport aux autres
réseaux de lecture publique, comme le témoignage dans
l'enquête qualitative de l'étudiant n°10, qui nous explique
que la première pensée lui ayant traversé l'esprit
lorsqu'il a pénétré le hall d'entrée de la BNUT,
est le film allemand Les ailes de la liberté, de Wim Wenders,
à cause de la luminosité de l'édifice, de ses espace et du
silence qui règne.
En conclusion, le débat sur la salle de consultation et
sur son utilisation par des publics distincts démontre que la politique
d'accueil mise en place dans ce secteur est aujourd'hui en partie
désuète : le nombre de bibliothécaires dans ce secteur est
insuffisant, ou en tout cas mal réparti dans les différents
espaces de la bibliothèque afin d'assurer un service de surveillance
optimal; les heures de pointe, qui voient le public attendre longtemps à
la salle d'enregistrement et remplir la salle de consultation, rendent l'aide
aux recherches bibliographiques de plus en plus difficile pour une partie du
public, et notamment des chercheurs et actifs occupés si on se
réfère aux enquêtes, tandis que les étudiants
apprécient fortement cette partie de la bibliothèque pour son
calme et sa tranquillité.
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