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La gestion des biodéchets à  Bruxelles. Etat des lieux, analyse et perspective

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par Laurent Dennemont
CUNIC IAP - Conseiller en Environnement 2012
  

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I.3. Le cadre réglementaire au niveau fédéral

Les institutions fédérales ne disposent pas de compétences propres en matière de gestion des déchets. En revanche c'est bien le Service Public Fédéral (SPF) Santé Publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement qui gère les questions d'engrais et d'amendements de sols. La législation concernée est reprise dans l'arrêté royal du 7 janvier 1998 relatif au commerce des engrais, des amendements du sol et des substrats de culture.

Dans le cas de la mise en place d'une filière des biodéchets à Bruxelles, il est essentiel d'assurer la distribution et la commercialisation du compost et de ses dérivés sur le marché bruxellois, belge et européen. Or la législation actuelle a été pensée et rédigée pour des produits phytosanitaires issus de la pétrochimie. Elle n'est pas adaptée à la mise en place d'un marché européen du compost, issu de la valorisation ou du recyclage des biodéchets ménagers, et pour preuve, chaque demande de commercialisation d'un amendement de sol issu du compostage doit faire l'objet d'une demande de dérogation auprès du ministre compétent. Si Bruxelles-Compost a pu obtenir une dérogation (n° E M036.BR), alors que l'origine de son compost est facilement traçable puisqu'il est issu à 100% de déchets verts, il parait compliqué pour un compost de quartier, dont les biodéchets sont très variés, de pouvoir vendre son compost. Même si la vente de compost n'est pas l'objectif prioritaire d'un compost de quartier, cette démarche pourrait donner une certaine autonomie financière à chaque compost collectif.

Passons en revue les points principaux de l'Arrêté Royal du 7 janvier 1998 :

L'article 2 stipule que l'arrêté est applicable « à tout produit auquel est attribué une action spécifique de nature à favoriser la production végétale ». Par contre, l'article 3 alinéa 5 précise qu'il « n'est pas applicable aux matières fertilisantes ou amendements du sol provenant des ressources naturelles de la ferme, vendues dans leur état naturel ». Doit-on comprendre que les exploitations agricoles ont le droit de vendre leur fumier ou lisier sans contrainte ? Est-ce qu'une ferme est une entité juridique définie ? Est-ce qu'une activité de compostage (urbain) peut être apparentée à une ferme ?

De plus, l'article 8 de l'AR du 07/01/1998 précise que « les produits visés par le
présent arrêté doivent être de composition homogène et stable et ce, jusqu'au stade

de l'utilisateur final (...) et doivent être dans une telle mesure exempts de substances toxiques ou nocives, d'insectes nuisibles, de nématodes (...) ou d'autres germes phytopathogènes qu'ils ne puissent avoir une influence défavorable ni sur les cultures, ni sur la santé des hommes et des animaux, lorsque ces produits sont utilisés à des doses normales et de façon judicieuse ». Si la préoccupation du législateur quand à la préservation de la santé humaine et de l'environnement est louable, il me semble impensable d'appliquer une telle législation dans le cadre du développement d'une filière du compost à Bruxelles. En effet, le processus biochimique même du compostage implique l'action successive et/ou simultanée de millions de bactéries, champignons et autre micro ou macrofaune. Ces actions biochimiques ont pour conséquence l'enrichissement du compost en humus26. Ici, l'exigence d'homogénéité et de stabilité est impossible à garantir à partir du moment où cet engrais ou amendement de sol est issu de la collecte de biodéchets ménagers, qui par définition sont inconstants et fluctuants en fonction des périodes (influence des saisons sur nos habitudes alimentaires), des quartiers (aspects culturels des habitudes alimentaires) etc.

L'article 5 précise que le « Ministre peut admettre la commercialisation, aux conditions qu'il détermine (C'est-à-dire ?), des produits qui ne figurent pas au tableur ». Il semble que ce soit là la seule issue pour commercialiser un compost. Or cette procédure est lourde et inadaptée à de petites unités de compostage :

« Pour obtenir une derogation, il faut introduire une demande écrite, accompagnée d'un dossier contenant autant d'informations que possible sur le produit. Le contenu précis du dossier depend de la nature du produit mais le dossier doit, dans les grandes lignes, contenir les elements suivants:

· Composition, nature et origine du produit

· Description du processus de production

· Valeur agronomique / garanties

· Un rapport d'analyse d'un laboratoire agree, avec le(s) parametre(s) pertinent(s)

· La (les) destination(s), le(s) dosage(s) et mode(s) d'emploi

· Un modele de l'etiquette ou du document d'accompagnement »

Après une discussion avec l'administration du SPF Santé Publique, Sécurité de la
chaîne alimentaire et Environnement, j'en déduis que l'appellation « engrais27 » est

26 Cf Définitions - Humus

27 Cf Définition - Engrais

définitivement réservée aux produits phytosanitaires et que le compost entre dans la définition des « amendements de sol organique28 ».

En définitive, sans un changement de législation, il est impossible pour une unité de compostage décentralisée d'obtenir toutes les garanties et analyses demandée pour pouvoir commercialiser son compost. Pourtant, cela ne remet aucunement en cause la qualité du compost produit ! Il me semble que le compost et tous les enjeux inhérents à la production de celui-ci méritent bien mieux qu'une législation par défaut laissée à l'appréciation d'un ministre.

28 Cf Définition en Annexes - Amendement de sol

Partie II - Les enjeux d'une gestion durable des biodéchets à Bruxelles

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry