1.2. Démarche de la recherche
A la suite de F. Dépelteau, nous avons
préféré utiliser le terme « démarche »
pour exprimer toute la procédure suivie dans la réalisation de
cette étude. Il s'agit de fixer avec précision les principes et
règles épistémologiques qui ont guidé nos
recherches. Pour ce faire, il importe de dire un mot sur le sujet et le type de
raisonnement qu'il inspire, le cadre théorico-conceptuel ainsi que les
aspects méthodologiques de l'étude.
10 B. NERMERY « Ethnogenèse au Rwanda et
au Burundi » in La Revue Nouvelle, n°10, octobre 1990, p.
1.2.1. Sujet d'étude et mode de raisonnement
La formulation de notre sujet de recherche présente
deux aspects : l'un, empirique, les mouvements de résistance ; l'autre,
théorique, la culture politique. Deux types d'erreur
épistémologique peuvent en découler : vouloir
insérer la pratique sociale dans la théorie ou chercher à
adapter la théorie à la pratique sociale.
En réalité, cette étude considère
les mouvements de résistance et la culture politique comme des
éléments du vécu, ou des faits empiriques analysables
à travers des pratiques susceptibles d'être
catégorisées en termes de variables, concepts en vue d'une prise
en charge théorique.
En d'autres termes, les deux éléments sont
d'abord des objets réels qui, par un effort de construction scientifique
(conceptualisation), sont transformés en objet de connaissance
exprimé dans un langage scientifique. C'est la rupture
gnoséologique et la rupture praxéologique(11).
La conjonction qui relie les deux termes du sujet exprime un
rapport. Il est question de démontrer dans quelle mesure les mouvements
de résistance comme acteur historique participent à travers leur
idéologie et action, à l'émergence d'un type de culture
11 KAMBAJI WA KAMBAJI retient trois types de ruptures :
La rupture
épistémologique : elle pose le problème de
l'acceptabilité des connaissances sociologiques. Elle est une
opération qui consiste à se dépouiller des «
prénotions » (Bourdieu), des « assertions gratuites »
(Gouldner), d onc des préjugés de toutes sortes dans le but de
formaliser la pensée sociologique, de la rendre cohérente et
logique.
La rupture gnoséologique :
elle est relative à l'irréductibilité entre l'ordre des
phénomènes empiriques, concrets, globaux et complexes, de l'ordre
des phénomènes logiques, théoriques, abstraits, partiels
et simples. Elle pose le problème d'intelligibilité ou de la
théorisabilité ayant trait au degré d'adéquation
théorique des paradigmes sociologiques au système concret.
La rupture praxéologique :
c'est une dérivé de la rupture gnoséologique, car il est
question de l'irréductibilité de la praxis à la
théorie sociale. Elle soulève le problème de
l'applicabilité des schèmes sociologiques qui est relatif
à leur validation par rapport au champ empirique.
Lire KAMBAJI WA KAMBAJI « Quelques réflexions sur
les fondements épistémologiques de la connaissance sociologique
Problèmes théoriques et perspectives d'avenir» in
QUEST, Vol.II, n°2 Lukasa : UNAZA, 1988, pp.53-72 cité par
MASCOTCH NDAY WA MANDE, Critique des fondements de l'hexagone philosophique
de LONGANDJO. Essai d'élargissement épistémologique
à la lumière de la Grille de lecture Kambajienne,
Mémoire de DES, UNILU, 2002, pp. 25-26. Inédit.
politique. Les deux catégories sont analysées
à travers principalement les idéologiques
véhiculées ainsi que les actions revendicatrices.
Par ailleurs, il ne serait pas indiqué d'adopter une
démarche empiriste du fait de partir des phénomènes
concrets sous peine d'historiographie ou de monographie. Par contre, le fait
que les phénomènes sous analyse sont circonscrits dans un cadre
théorique déterminé, nous avons opté pour un
raisonnement hypothético-déductif. C'est pourquoi, nous avons
formulé des hypothèses empiriques et théoriques. Le
schéma de la démarche hypothético-déductive
classique se présente comme suit selon F. Dépelteau.
Fig. n° 3 : Schéma de la démarche
hypothético-déductive selon Dépelteau Question de
recherche
Processus de déduction et/ou d'induction
Adoption ou construction d'une théorie et d'une ou
plusieurs hypothèses
Processus de vérification empirique et d'analyse des
données (ou tests empiriques)
Conclusion :
La théorie et la ou les hypothèses concordent ou ne
concordent pas avec les faits
Deux possibilités
a) Si la théorie et la ou les hypothèses passent
le
test empirique, aucune autre action n'est nécessaire car
la réponse à la question de la recherche est trouvée
(« vérifiée ») ;
b) Si la théorie et la ou les hypothèses ne
passent pas le test empirique, la théorie est rejetée ou
amendée
La théorie est rejetée La théorie est
amendée
en faveur d'une nouvelle selon les nouveaux faits
théorie
Source : F. DEPELTEAU, La
démarche d'une recherche en sciences humaines. De la question de
départ à la communication des résultats, Bruxelles,
De Boeck, 2000, p.63.
Dans ce schéma, F. Dépalteau retient quatre
temps de la démarche hypothético-déductive. Le premier
temps consiste à se poser une question de recherche. Dans le
deuxième temps, le chercheur procède à des
déductions et/ou des inductions selon les prémisses et les
connaissances
empiriques du sujet qu'il possède. Dans le
troisième temps, il adopte ou construit une théorie et une ou des
hypothèses de recherche. Dans un quatrième temps, le chercheur
procède à des tests empiriques dont le but est de vérifier
ou d'infirmer la ou les hypothèses de la recherche.12
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