3.1.4. Les bases communautaires des mouvements de
résistance au Sud-Kivu
Les recherches empiriques auprès des autorités
coutumières et assimilés (notables ruraux) et des chefs des
organisations Mai Mai prouvent que tous les mouvements de résistance ont
un lien direct ou indirect avec les communautés rurales.
Statistiquement, les 14 chefs de groupes et 31 autorités
coutumières et assimilés contactés ont reconnu qu'il
existe des relations de collaboration entre le pouvoir coutumier et les
mouvements de résistance d'une part, que ces derniers sont
acceptés et soutenus par les populations locales, d'autre part. A cet
effet, deux phénomènes dans le rapport mouvement de
résistance-communauté peuvent être analysés : le
mouvement de résistance comme émanation des communautés et
le mouvement de résistance comme appropriation des
communautés.
1° Le mouvement de résistance comme
émanation des
communautés
Certains mouvements de résitance du Sud-Kivu ont
été créés par les communautés pour assurer
sa sécurité ou s'affirmer. A l'origine de ces mouvements de
résistance l'on trouve la prise de conscience de
l'insécurité et ses effets (tueries, vols, viols domination,
81 F.D. AMURI MISAKO, Op.cit., pp.
145-146.
etc.) orchestrés par les troupes militaires
étrangères (Interhamwe, FDLR, armée rwandaise,
armée burundaise) nationales (armée régulière) ou
locales (autres mouvements de résitance.). Des réunions
communautaires ont abouti à la mobilisation des moyens et
stratégies nécessaires pour mettre sur pied une organisation
d'auto-défense. Dans ce registre, nous citons les mouvements de
résistance suivants : Raiya mutomboki à Shabunda, Mai- mai
Shikito à Mwenga, Mai-mai Zabuloni à Fizi, Mai-mai Nakabaka
à Uvira.
2° Le mouvement de résistance comme
appropriation des communautés
Sous cette catégorie, on aligne les mouvements de
résistance que les communautés acceptent soit par
nécessité (besoin de sécurité) soit par contrainte
(la force) sans ressortir de la volonté des populations. Le rôle
jugé positif de ces mouvements de résistance les a
intégrés dans les communautés auxquelles ils s'identifient
actuellement. Les groupes non intégrés sont ceux présents
dans certains milieux par souci d'expansion dans les zones jugées non
contrôlées en vue d'accroître l'influence. Dans cette
catégorie, nous citons les mouvements de résistance
ci-après : Mai-mai Shabunda, Simba Mai-mai, Mudundu 40, Mai-mai de
Bunyakiri, Mai-mai Yakutumba, Mai-mai Zabuloni, Mai-Mai Kirikicho, Pareco,
Mai-mai Ny'ikiriba, Mai-mai Kapopo, Mai-mai Mahoro.
Quelle que soit la catégorie, les mouvements de
résistance ont bénéficié de trois formes d'appui de
la part des communautés rurales : matériel, humain et
symbolique.
Modèle explicatif des fondements
idéologiques des mouvements de résistance
Axe anthroposociologique
Axe philosophicopsychologique
Axe historico- politique
Base socio-politique et économique
L'axe philosophico-psychologique est au centre de
l'explication de l'idéologie mai-mai avec des variables comme la
protection du territoire et des valeurs traditionnelles, la recherche de la
liberté et du bonheur, la lutte contre l'injustice. Les axes
anthropo-sociologique et historico-politique sont liés à celui
anthropo-sociologique, et alignent les variables suivantes : l'isolement des
masses rurales, la superstition et la conception localiste de l'Etat pour le
premier ; l'effondrement de l'Etat, les survivances historiques
révolutionnaires et conflictuelles, le pouvoir politique et militaire
pour le second. Entre les trois axes et la base sociopolitique et
économique, il y a un rapport de détermination réciproque.
Par contre, entre les 3 axes, il y a une imbrication suffisante qui appelle
à une vigilance épistémologique soutenue pour distinguer
et catégoriser les variables. Par le principe de la circularité,
il y a lieu d'envisager que selon les contextes, chaque axe peut occuper le
centre de l'explication.
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