WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Mouvements de résistance et culture politique au Sud-Kivu. Mise en évidence des fondements idéologiques et des actions revendicatrices.

( Télécharger le fichier original )
par Philippe KAGANDA MULUME-ODERHWA
Université officielle de Bukavu - Diplôme d'études supérieures en sociologie politique 2009
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3.1.2. Axe politico-historique

L'axe politico-historique permet de retenir des variables suivantes : l'effondrement de l'Etat, l'éclosion des survivances révolutionnaires, le pouvoir politico-militaire.

10 L'effondrement de l'Etat congolais

L'affaiblissement de l'Etat congolais à la suite d'une mauvaise gouvernance s'est matérialisé dans l'incapacité de celui-ci à apporter des réponses aux problèmes de la société et à assurer le fonctionnement normal des institutions. En plus d'une crise idéologique

remarquable, il a été noté les conséquences suivantes : la dégradation sensible de conditions de vie des populations, la corruption, la concussion, le détournement au sein des institutions politiques et de l'administration publique, la détérioration des infrastructures socio-économiques de base, le chômage élevé, etc.

Les débâcles successifs des forces armées nationales devant les forces militaires rebelles et leurs alliés entre les années 1996-2000 ont permis aux mouvements de résistance à se manifester comme forces de << sécurisation » des populations et de << défense » de l'intégrité territoriale.

Dans l'ouvrage Effondrement de l'Etat (72), le concept de l'effondrement de l'Etat est d'une richesse heuristique certaine. L'accent est mis sur l'incapacité de l'Etat à accomplir ses fonctions. L'Etat repose sur trois fonctions à savoir : l'Etat est autorité souveraine, il est une institution ; il est le garant de la sécurité d'un territoire et de sa population. Les indicateurs de l'effondrement de l'Etat sont ainsi exprimés dans les considérations ci-dessous :

«Si l'Etat s'effondre, c'est qu'il ne s'acquitte plus de ses fonctions de base qu'il doit remplir telles qu'elles sont analysées dans les diverses théories. Les centre de décision du gouvernement est paralysé et impuissant ; on ne légifère plus, l'ordre n'est plus maintenu et la cohésion sociale se rel~che (...). L'Etat symbole d'identité n'est plus capable de conférer un nom à ses populations, non plus qu'un sens à l'action de la société (...). Son territoire ne jouit plus de la sécurité et des approvisionnements nécessaires qu'une organisation centrale souveraine doit normalement lui assurer (...). Institution politique dotée

72 y. ZARTMAN, Effondrement de l'Etat,

d'autorité, il a perdu sa légitimité qui est en quelque sorte mise à l'écran ; il a donc perdu le droit d'ordonner et de conduire les affaires publiques (...). Système d'organisation socioéconomique, son équilibre d'échange et de production est anéanti ; les populations ne le soutiennent plus, il n'a plus de pouvoir sur elles et n'est plus capables de leur apporter quoi que ce soit. Incapable de fonctionner, ne possédant plus aucune source de légitimité, qu'elle soit traditionnelle, charismatique, ou institutionnelle, il n'a plus le droit de gouverner » (73).

Il précise aussi que

« D'une part, l'effondrement de l'Etat est une rupture du bon gouvernement, de la loi et de l'ordre. Entité responsable de la prise de décisions, de leur application et de leur exécution, l'Etat n'est plus en mesure de décider, ni de faire respecter ses commandements. L'effondrement de la société, d'autre part constitue une rupture totale de l'harmonie sociale ; génératrice des institutions de cohésion et de maintenir, elle ne sait plus créer, rassembler ni exprimer les soutiens et les demandes qui forment les fondements de l'Etat (...). Ce sont là deux aspects de la décomposition ; à eux deux, ils se brisent les liens et les imbrications entre l'Etat et la société. L'échange normale de demandes et de réponses s'atrophie ; les processus politiques de légitimation populaire sont écartés ou détournés ; la vie politique et l'économique se rétrécit, se localise ; enfin, le centre s'éloigne des rouages de la société » (74).

Les faiblesses de l'Etat congolais s'étaient avérées particulièrement criantes et ce, dans tous les domaines. En 2007, nous avons analysé les forces et faiblesses de seize Gouvernements de transition en R.D.C entre 1990-1997. On peut lire dans la conclusion ce qui suit :

<< (...) l'on est loin de retrouver une action gouvernementale tendant à instaurer une culture politique démocratique et à consolider l'économie nationale, et partant, améliorer les conditions de vie des citoyens. Il s'était plutôt observé une instabilité politique et institutionnelle permanente délibérément entretenue par les acteurs politiques laissant libre cour à l'effondrement de l'Etat. >>(75).

Devant cet effritement de la mission régalienne de l'Etat, les

mouvements de résistance ont assuré à des communautés locales ou

tribales la sécurité des personnes et de leurs biens, substituant ainsi à

l'Etat dans un contexte crisique que G. Muheme présente comme suit : << A nouveau, le mois d'ao~t 1998, la révolte dite

des Rwandais-Banyamulenge a fait de Bukavu le lieu par excellence des revendications tutsi sur l'appartenance aux ethnies du Congo(...). Il va falloir attendre dix mois d'occupation avant que le Rwanda ne reconnaisse sa présence militaire au Kivu a déclaré, un mois après l'Ouganda, un cessezle-feu le vendredi 28 mai 1999, à minuit. L'intention ne se concrétisera pas. (...) >>(76).

75 P. KAGANDA MULUME-ODERHWA, « Evaluation critique du rôle des Gouvernements de la transition dans le développement politique et économique de la R.D.C.( 1990-1997) in Analyses Sociales, vol.X, numéro unique, Octobre 2007, p. 67.

76 G. MUHEME, Op. Cit., p. 8.

Outre le rôle militaire, les mouvements de résistance ont réussi une orientation idéologique des populations se trouvant sous administration des rebelles-qualifiés de "traitres"- et leurs alliés-qualifiés d'envahisseurs- Ils ont, avec l'appui de la société civile, réussi à véhiculer le patriotisme, le nationalisme dont ils étaient le porte-étendard pendant la période de guerre.

Les fonctions militaire et idéologique ont été accomplies avec beaucoup des limites et déviations. Elles ont changé la cible après les années 2000 en s'opposant aux institutions politiques en place. Par ce fait, les mouvements de résistance venaient de modifier leur but et s'ouvrir aux ambitions politiques dans le système politique national.

Eclosion des survivances historiques révolutionnaires et
conflictuelles

Les représentations de mouvements de résistance au SudKivu sont aussi fondées sur les survivances révolutionnaires de premières rebellions décrites dans le chapitre précédent. Pour le cas du Sud-Kivu, il s'agit de la rébellion muleliste qui a laissé des traces idéologiques dans le territoire de Fizi et d'Uvira, dont se servira Laurent Désiré Kabila pour mobiliser les gens à adhérer dans son mouvement rebelle en 1996. Cet acquis historique a poussé tous les autres mouvements de résistance formés à Bunyakiri, Kabare, Walungu, Mwenga, Uvira à garder le commandement général à Fizi pour coordonner les activités militaires contre la rebellions du RCD en appui au Gouvernement de Laurent-Désiré Kabila et de son successeur, Joseph Kabila. A l'exception de Fizi et dans une moindre mesure Uvira, toutes les autres contrées de la Province du Sud-Kivu ont connu le phénomène de résistance vers les années 1997.

terres entre certains peuples du Sud-Kivu (alors organisations politiques traditionnelles) et les banyarwanda (peuple rwandais de l'époque). C'est ce qu'on peut lire dans certains ouvrages ou la tradition orale (expressions, épopées, chansons, etc.). Par exemple, la tradition orale shi (à travers les épopées, légendes) enseigne aux jeunes générations les guerres traditionnelles qui ont opposé les Bashi aux Banyarwanda, et les invitent à pus de vigilance car ces dernies représentent toujours un danger. Cette pensée peut être trouvée dans le 956ème provrbe retenu

par Kagaragu en ces termes : « Eyonera Omuhanya, e Rwanda

ehubuka ». elle se traduit en français « la vache qui ravage le champ du malheureux vient du Rwanda », et s'interprète que la malchance atteint toujours le malheureux, même quand elle vient de loin77.

Dans le même ordre d'idées, on peut lire dans les lignes proposées par Paul Masson ce qui suit :

« Malgré les nombreuses dissensions intérieures qui minaient la vie politique des descendants de KabareKaganda établis au Bushi, les Rwanda (sic.), pourtant brillants soldats, ne purent se (sic.) les soumettre. Les invasions et inflitrations(sic) furent innombrables, surtout s'il faut compter toutes les razzias et expéditions de brigandage que les Watutsi opéraient sur la rive ouest. Jamais cependant, le pays ne fut entièrement conquis. Les Bashi retrouvaient toujours, au milieu de leurs disputes de famille ou des misérables famines, la solidarité nécessaire pour repousser les voisins belliqueux qui convoitaient leurs champs et pâturages. On peut même presque dire que, au cours des derniers règnes, cette solidarité devint un véritable sens national.

Quelques fois occupé, souvent défait par le Rwanda, le Bushi ne fut jamais soumis»(78).

77 KAGARAGU NTABAZA, Emigani Bali Bantu Proverbes et maximes des Bashi, 4èmé éd., Bukavu, Libreza, 1984, p. 123.

78 P. MASSON, Trois siècles chez les Bashi, 2ème édition, Bukavu, La Presse congolaise, 1966, p.102.

Le pouvoir politico-militaire

Le pouvoir politique et le pouvoir militaire constituent aussi le fondement des idées dans les mouvements de résistance. La direction politique ou le commandement militaire au sein des M.R a amené certains acteurs à pouvoir gouverner certaines entités rurales sur les plans administratif, économique, militaire. Les processus de réunification entamés à l'issue de l'Accord global et inclusif a permis à certains dirigeants politiques et militaires d'améliorer leurs statuts sociaux dans la structuration sociale nationale, notamment au sein des institutions politiques nationales et de l'armée nationale régulière.

A titre exemplatif, nous relevons quelques postes occupés par certains leaders des mouvements de résistance au Sud-Kivu au sein des institutions politiques de la transition.

Tableau n° 8 : Représentation des mouvements de résistance au sein des institutions politiques et d'appui à la Démocratie

Institutions

Postes

Nombre

Gouvernement

- Ministre de développement rural

- Ministre de l'agriculture

1

 

- Vice Ministre aux transports et

 
 

communication

1

 

- Vice ministre au travail et

 
 

prévoyance sociale

1

 

- Ministre de l'Economie

1

Commission vérité

et réconciliation

2e rapporteur

1

Commission

1er rapporteur

1

Electorale indépendance

 
 

A ces rangs et fonctions politiques s'ajoutent des grades militaires comme le grade de général attribué à certains chefs miliciens principalement à Bunyakiri et à Fizi. Nous citons les généraux Padiri Bulenda, Lwecha, Dunia, etc.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite