2- Le choix du déroutage
Le BIMCO a développé un outil sur feuille Excel,
prenant en compte tous les facteurs existant, pour déterminer s'il est
préférable pour l'armateur, en fonction des
caractéristiques du navire et de la marchandise pris en compte, de
choisir le passage par Suez ou par le Cap de Bonne Espérance. Toutefois,
l'organisation, dans un article publié en novembre 2009 sur son site
Internet, et intitulé « Avoiding piracy by sailing round the cape
of Good Hope is a costly business », ne paraissait pas très
optimiste...
Si l'une des premières mesures pour éviter les
risques de la piraterie a été d'envisager le contournement en
déroutant les navires par le Cap pour éviter le passage par le
Golfe d'Aden pour rejoindre le Canal de Suez, l'expérience testée
notamment par le groupe danois Moller Maersk, plus gros propriétaire de
navires en Europe, n'a pas été concluante et n'a par
conséquent pas remis en question la pérennité de la grande
route Est-Ouest.
En effet, le passage par le cap de Bonne
Espérance impose un temps de navigation
supplémentaire de plus ou moins 10 jours sur un voyage entre le
Golfe Persique et l'Europe, en comparaison avec un passage par le Canal
de Suez, et coûte en carburant 800 000 dollars de plus
pour un VLCC (Very Large Crude Carrier) et 2,7
millions de dollars de plus pour un portecontainers. Au total, la
société V-Navy évalue à plus d'un million
de dollars le surcoût du passage par le cap de Bonne Espérance
pour un VLCC, en comptant l'économie de 500 000 dollars de la
redevance de passage par le canal de Suez.
Par ailleurs, l'étalement océanique de la
piraterie laisse présager que les mesures de détournement
ne sont pas toujours suffisantes et ne sont des solutions ni
économiquement ni stratégiquement durables. Les mesures
cumulatives de défense (flottes militaires internationales et
auto-protection) s'avèrent généralement
suffisantes à la sécurisation du trafic. Comme nous le verrons
plus loin, les armateurs font de plus en plus appel à des
Sociétés Militaires Privées (SMP) pour intimider les
pirates.
Toutefois, en fonction de la variation des prix du carburant
et du fret, les jours supplémentaires en mer pourraient être moins
pénalisants, et le choix du contournement pourrait finir par
s'imposer, ne serait-ce que pour répondre à la pression
des équipages. Cela n'en prend cependant pas le chemin
: même si les prix de fret sont en diminution constante depuis
quelques mois, le prix du baril de pétrole prend la voie
inverse et le Brent a atteint plus de 100 $ depuis février
2011.
Au-delà des traumatismes vécus par les marins et
de la médiatisation des prises d'otages qui marquent l'opinion publique,
l'arbitrage financier fait encore pencher la balance en faveur d'un maintien du
transit par les voies habituelles.
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