1.3.2 La décentralisation, mode de coopération
contractuelle
Pour les acteurs du tourisme, les dina sont devenues des
interlocuteurs incontournables pour au moins une raison : l'application de
la loi de GEstion LOcale SEcurisée, dite loi GELOSE. Promulguée
en 1996, elle a pour but le transfert de la gestion des ressources naturelles
renouvelables de l'Etat aux communautés locales, censées
être plus compétente en ce domaine, du fait de leur
proximité de leur environnement. Les populations locales deviennent donc
les principaux responsables de la protection de la biodiversité et de
l'exploitation des ressources naturelles. Le lien avec le tourisme
s'établit aisément, lorsque l'on sait que cette même
biodiversité, trésor de la Grande Île, est la clef de
voûte du développement touristique et la première raison du
choix de cette destination par les touristes. Cette loi représente une
avancée pour tenter de combler les lacunes juridiques du pays non
seulement en déléguant une partie du pouvoir central aux
collectivités locales, mais aussi en proposant une forme de
régulation mêlant droit institutionnel et droit coutumier, ce qui
s'avère être un mode de fonctionnement plutôt unique en son
genre. Il s'agit en fait d'une sorte de contrat passé entre les
communautés et l'Etat, un cadre législatif souple laissant une
place à l'exercice des pratiques coutumières.
L'intérêt de la loi GELOSE, tout comme la Gestion
Contractualisée des Forêts (GCF), est non plus d'exclure ou de
contraindre les pratiques locales, mais de les accompagner pour aboutir
à un objectif commun : la préservation de la
biodiversité [Sarrasin, 2009]. Evidemment, cette
« démarche contractuelle » [Horning, 1995]
présente un risque majeur : étant soumise à une
attitude volontaire de la part des communautés, le risque est de voir un
refus ou au moins un non-respect des accords passés. Pourtant, les
résultats semblent plutôt encourageants dans l'ensemble : en
janvier 2005, 70% des contrats visant à la réduction des feux de
forêts étaient mis en oeuvre, et 25% de ceux visant à une
meilleure gestion des ressources [Karpe, 2006].
C'est dans ce contexte d'arrangement juridique que le secteur
privé est encouragé à prendre des initiatives contribuant
à un développement responsable des activités touchant aux
ressources naturelles. Les organisations non gouvernementales (ONG) jouent ici
un rôle prédominant, notamment en matière de gestion des
aires protégées. L'un des acteurs principaux est l'ONG
nommée Madagascar National Parks, remplaçante de
l'Association Nationale pour la Gestion des Aires Protégées
(ANGAP). Crée en 1990 et déclarée d'utilité
publique par décret n° 91-592 du 4 décembre 1991, cette
association de droit privée a été chargée de la
gestion durable et pertinente du réseau des aires
protégées de l'île, par le respect et la mise en oeuvre de
programmes de protection et de conservation. « Cette mission de
conservation suggère l'éducation environnementale, la
valorisation de l'écotourisme et la science et le partage
équitable des bénéfices générés par
les aires protégées avec la population riveraine »
[Madagascar National Parks, 2010]. Ces revenus
générés ne proviennent évidemment pas d'une simple
conservation, mais d'une véritable promotion et d'exploitation des parcs
nationaux à travers une politique de mise en concession des aires. Cette
initiative, entérinée par la signature en 2008 de la Lettre de
Politique sur les mises en concession dans les aires protégées, a
pour objectif de stimuler l'investissement privé autour et dans ces
zones. Le caractère écotouristique des projets est un
élément indispensable pour qu'un investisseur puisse se voir
accorder un droit d'exploitation par des représentants de MEEFT, de
l'EDBM ou de l'Office National du Tourisme. Plusieurs aires ont ainsi
déjà été soumises à appel d'offres de
valorisation, comme le parc national d'Ankarafantsika, aujourd'hui
exploité par le groupe bancaire allemand KfW. A terme, l'ensemble des
aires gérées par le Madagascar National Parks seront mis à
la disponibilité des investisseurs privés, en vue d'assurer une
génération suffisante de revenus pour autogérer ces
parcs.
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