4 L'écotourisme est un moyen de s'intégrer dans
une filière globalisée
Après s'être penché sur les raisons et les
moyens à déployer pour que Madagascar puisse voir en
l'écotourisme un mode touristique plus soutenable et instigateur de
développement, un aspect constitutif du succès des politiques
touristiques n'a pourtant que peu été évoqué :
les visiteurs. En effet, les bénéfices de l'activité
dépendent certes des modes de gestion, mais surtout de capacité
à créer un flux touristique, à capter un public
consommateur des prestations. La démarche d'analyse des liens existants
entre prestataires locaux et clients finaux demande d'élargir le champ
d'étude, car le tourisme est un phénomène migratoire
mondial. A considérer que Madagascar persévère dans sa
politique de valorisation de sa biodiversité et de promotion de
l'écotourisme, les probabilités pour que l'Île Rouge ne
devienne une destination écotouristique de premier rang seraient
assurément hautes, disposant déjà d'un avantage absolu (la
biodiversité) et travaillant au développement d'un
écotourisme de qualité.
La « mondialisation touristique » se
définit autant par la présence mondial de l'activité et
que par sa dynamique de promotion internationale, oeuvrant à faire
connaître les destinations à tout un chacun [Violier, 2003]. Le
tourisme est une opportunité pour un pays de s'exposer sur la
scène internationale et d'intégrer la marche de la
mondialisation, grâce aux flux monétaires et de personnes que
génère ce secteur. Cette ouverture des pays par le tourisme est
une nouvelle voie explorée par les territoires les plus petits, surtout
depuis les années 1960. Cette stratégie est une alternative
à un rattachement à des territoires souverain plus puissants
(DOM-TOM, Hawaii, etc.), dans le but de soutenir le développement de
l'île [Duvat, 2006]. L'analyse de ce processus d'ouverture passe par
l'étude des flux touristiques : à qui s'adresse cette mise
en tourisme ? Qui sont les pays émetteurs ? Comment se faire
connaître auprès des voyageurs internationaux ? Les
spécificités de l'écotourisme répondent-elles aux
exigences de la filière touristique mondiale ? La création
d'un flux touristique mondial vers la destination malgache est un
élément indispensable à la réussite des politiques
écotouristiques menées jusque là.
4.1 L'Europe,
principale zone émettrice à destination de Madagascar
Le tourisme malgache est encore peu développé et
assez confidentiel, comme c'est le cas dans l'ensemble de la zone
sub-saharienne, à l'exception de l'Afrique de Sud. Les pays de cette
région géographique ont souvent choisi un tourisme
spécialisé, jouant de leurs avantages pour se faire une place sur
un marché international : safaris du Kenya, tourisme
balnéaire à Maurice ou tourisme de luxe aux Seychelles.
4.1.1 Une forte fréquentation
française
La fréquentation touristique de Madagascar tient
aujourd'hui plus au passé historique qu'à la promotion d'une
véritable identité touristique, encore en construction. En effet,
les visiteurs français sont les principaux arrivants étrangers
à fréquenter la Grande Île pour raison touristique. En
2007, 58% des touristes provenaient de France, une proportion relativement
stable depuis plus de 10 ans. L'Île Maurice est le second pays
émetteur, avec prêt de 10% des visiteurs sur la dernière
décennie (voir Annexe 7). La proximité de cette République
et le passé commune avec Madagascar, toutes deux anciennes possessions
coloniales françaises, expliquent le développement des relations
et des échanges entre les deux nations. Maurice fait cependant office
d'exception quant à l'origine des visiteurs. En effet, la grande
majorité des arrivants (autour de 75%) provient plutôt des pays du
Nord, et plus précisément d'Europe de l'Ouest et
d'Amérique [MEEFT, 2009].
Ce constat reflète une tendance plus globale. A
l'échelle mondiale, l'Europe et l'Amérique sont des zones
émettrices majeures, représentant respectivement 55,2% et 16,5%
des voyageurs internationaux. La zone Asie-Pacifique n'est cependant pas en
reste, générant 19,7% des touristes mondiaux [UNWTO, 2009].
L'Allemagne, les Etats-Unis et le Japon forment le trio de tête des pays
émetteurs. Il n'est pas étonnant de constater que ces
nations figurent parmi les premières puissances économiques
mondiales. Ainsi, la corrélation entre pouvoir économique et
inclinaison au tourisme paraît assez à établir.
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