b) Les entreprises semi-privées ou semi-publiques :
Les entreprises semi-privées ou semi-publiques sont un
cas assez atypique qui fut inventé par le PCC pour résoudre les
problèmes d'image et de réputation des entreprises d'Etat tout en
gardant un contrôle total de ces dernières. Ces entreprises ont
commencé à se multiplier à partir de la fin des
années 1990 en parallèle d'une réforme de l'Etat. A partir
de 1998 et le début des années 2000, Pékin abandonna petit
à petit un contrôle dirigiste et rigoureux des entreprises d'Etat
et surtout de leurs politiques d'investissement à l'étranger afin
de préparer son entrée à l'OMC en 2001. L'Etat chinois
commença à émettre des politiques plus incitatives que
réellement dirigistes (à l'exception de secteurs clés
comme l'extraction des ressources premières et les hautes technologies)
et cela tout en poussant les entreprises d'Etat à se réformer de
différentes manières. Ces dernières n'assurent plus les
fonctions sociales caractéristiques des entreprises d'Etat et n'ont pour
seul objectif que de faire des profits au même titre que des entreprises
privées. Pour ces entreprises, l'Etat céda une partie du capital
social (tout en restant majoritaire), ouverture aux financements privés
chinois et parfois étrangers. Ces entreprises font de plus appel
à l'expertise étrangère en faisant entrer des
étrangers dans leurs « maisons mères » comme China
Mobile, et sont (pour certaines) cotées à la bourse de
Shenzhen. Cependant tout en se libéralisant sur le plan de la prise de
décision et d'élaboration des stratégies, ces entreprises
continuent à recevoir un soutien fort des administrations publiques
(même si ce soutien s'exerce de façon plus discrète). Elles
bénéficient en effet d'une aide à l'accès au
crédit et de procédures administratives simplifiées. En
cas de visites officielles du président chinois à un Etat
étranger, ces dernières le suivent pour bénéficier
d'un appui politique au moment de la signature des contrats, appui qui se
poursuit alors après la visite par les services de l'ambassade de la
république populaire de Chine dans ce pays. Cette nouvelle forme
d'organisation des entreprises d'Etat permit une réelle
modernisation des politiques d'expansion de ces
dernières et une meilleure allocation des ressources financières
ainsi que du capital humain. Elle permit de plus de débarrasser ces
entreprises de tâches coûteuses et non rentables pour ces
dernières avec la suppression de l'obligation d'assurer des fonctions
sociales. Ces entreprises cumulent donc de nombreux avantages : une plus grande
autonomie de gestion avec un soutien toujours extrêmement fort des
autorités chinoises. Or l'accumulation de ces avantages n'exclue pas
l'existence de problèmes contraignant leurs développements.
En effet, malgré une aide plus fine du gouvernement
chinois à ses entreprises d'Etat, les critiques que les entreprises
étrangères émettent restent les mêmes. L'influence
et le soutien du PCC ne reste qu'une forme de « dumping
»21 officieux, qui permet à ces entreprises d'être
plus compétitives que d'autres (surtout les entreprises privées
chinoises). Or la Chine en 2001 accéda à l'OMC et accepta de
libéraliser son économie, mais cette libéralisation
rencontre encore des soucis au niveau de son application à
l'échelle de grandes entreprises qui se révèlent utiles
pour le gouvernement chinois. Cette politique étouffe de plus le
développement d'un secteur privé autonome en Chine qui à
long terme pourrait se révéler bien plus efficace que le secteur
public en terme de croissance et d'expansion vu que ce dernier peut se targuer
de ne pas bénéficier de soutiens directs du gouvernement. Cette
nouvelle forme d'organisation amena aussi de façon indirecte à un
problème de gestion des externalités de l'entreprise, en effet le
fait d'avoir pu abandonner les fonctions sociales qui s'exercent aux
entreprises d'Etat classiques rend ces entreprises semi-privées
réticentes à toute forme de Responsabilité Sociale des
Entreprises (RSE) 22 . Ce problème se retrouve en dehors de
la Chine particulièrement présent en Afrique, où les
entreprises chinoises se retrouvent à devoir faire venir des
travailleurs chinois pour travailler sur place étant donné que
les travailleurs locaux sont plus prompts à protester face à des
excès de la hiérarchie. Le cas est particulièrement vrai
pour l'extraction des matières premières et le travail dans les
mines, qui sont les secteurs souffrant le plus du manque de RSE de la part des
firmes
21 Le « dumping », où la vente
à prix prédateurs en français est une forme d'aide que les
Etats mettent en place pour soutenir une part fragile de leur économie
face à la concurrence. Ces derniers poussent les entreprises à
vendre leurs produits au prix le plus bas possible (voir à perte) et
s'engagent à compléter la différence avec les prix
réels du marché.
22 La Responsabilité Sociale des Entreprises
(RSE) est un concept en économie qui veut que l'entreprise cherche
à gérer ses externalités autant écologiques que
sociales. Ce concept s'il est utilisé doit de alors rentrer en compte
lors la formation de la stratégie. Pierre Batellier et Emmanuel
Raufflet, Responsabilité sociale de l'entreprise, Paris, 2008,
Presses internationales Polytechniques.
chinoises : la mine de Chambishi en Zambie exploitée
par l'entreprise Non-Ferrous Company-Africa (NFCA) en est une
parfaire représentation23. Cependant paradoxalement, un
leader dans la mise en place d'une réelle politique en faveur de la RSE
est une entreprise semi-privée : China Mobile. Son fondateur et
actuel Président Directeur Général (PDG) , du nom de Wang
Jianzhou (\u29579%oOE'à : Wáng Jiànzhòu),
mit en place une RSE très complète en cinq points : «
Ruralité » (politique visant à permettre de relier de
nombreux villages isolés à des réseaux de
télécommunication : ils sont 60 000 à l'heure actuelle),
« Vie » (ce programme a pour but de gérer des crises
naturelles et autres : en 2008 la compagnie dépensa 1,15 milliards de
Yuan après le tremblement de terre du Sichuan) , « Culture »
(le but de ce programme est d'avoir une action positive pour la défense
des cultures et des patrimoines : restauration d'une partie de l'ancien palais
d'été de Pékin ([1 t : Yuánmíng
Yuán), « Environnement » (est le point phare de la RSE
développée par China Mobile : recyclage de batteries de
téléphones portables et de cartes SIM, utilisation
d'éoliennes et de panneaux solaires pour alimenter des relais
téléphoniques...), et « Bénévolat »
(politique d'aménagement pour des handicapés, soutien à la
scolarité dans des pays d'Afrique...). L'ensemble de ces programmes
permit à China mobile de devenir la première et seule entreprise
chinoise à être cotée au Dow Jones Sustainability
Index24.
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